Nouveau regard sur la nature dans les campagnes d’aujourd’hui
Certains scientifiques qualifient notre ère d’anthropocène pour qualifier l’impact de l’homme sur la planète. Cela part de la théorie que les activités humaines sont en train de laisser une empreinte profonde dans les couches géologiques. Après la perception des pollutions locales par l’industrie, les transports, ou encore l’agriculture intensive, liés aux modes de production dominants, est venue la crainte de voir s’épuiser les énergies et les matières fossiles, tandis qu’en ce début de siècle monte en puissance la conscience que l’activité humaine modifie le climat général de la planète, diminue le potentiel productif des sols, érode la biodiversité. Au sein de la société civile, s’amorce un processus de réflexion sur la nécessité de reconsidérer la relation des hommes à la nature et aux ressources naturelles . Cette transition écologique se dessine à la fois dans les comportements que dans les perceptions et les représentations que les individus se font de tel ou tel espace. Je m’intéresse ici à l’espace spécifique que constitue « la campagne » ou plutôt « les campagnes », qui deviennent à partir des années 1970 et surtout 1990 des « espaces ruraux », et aujourd’hui des « milieux ruraux ». Nature et campagne, désir de nature et de paysage et ruralité, agriculture et espaces naturels sont aujourd’hui presque systématiquement associés, parce que ce serait dans l’espace rural que l’on trouverait les ressources naturelles (énergie lumineuse, sols, eau, biodiversité…). Il est donc nécessaire de poser la question des usages qu’en font les habitants, qu’ils soient agriculteurs ou non, du point de vue de leurs rapports écologiques aux « natures » du milieu rural, d’autant plus que les sociétés contemporaines ne sont plus urbaines et paysannes mais composites. La création de l’Association des ruralistes français en 1974 témoigne d’une conception pluridisciplinaire des recherches rurales. Mais depuis les années 1990, la substitution du terme d’espace rural à celui de campagne, la multiplication des échanges entre sociologues, économistes et géographes, ont conduit les chercheurs ruralistes à privilégier une analyse démographique et sociologique des campagnes, délaissant la question des rapports à la nature (des sols, de l’eau …) ainsi qu’aux « natures rurales » qui, avec leurs diverses temporalités et spécificités locales, constituent aussi l’environnement physique des autres habitants. L’assimilation de la nature au paysage, de la campagne au « vert », du désir de campagne à la nature rêvée, de l’activité agricole à un simple « cadre de vie », a éloigné la recherche de la question des rapports à la nature et aux ressources en milieu rural. Concernant la question des ressources des milieux ruraux, c’est la gestion d’une ressource qui semble en faire la valeur . La gestion pousse à trouver des terrains d’entente et des mode s de gouvernance (notion qui sera définie plus tard dans la partie sur le tourisme rural et les labels). D’autre part, la relation des individus entre eux qui se noue autour des usages faits de la nature est elle-même constitutive de ressources. La possession de la terre détermine l’accès à des ressources dans la mesure où celui qui la possède décide de ses usages. Par la transmission générationnelle du patrimoine foncier, la terre passe progressivement dans celle des urbains, en fragmentant ainsi la propriété foncière. La question foncière crée ainsi des conflits d’usage, du fait par exemple de la spéculation sur la possibilité de bâtir des maisons fait monter le prix des terres, laisse les agriculteurs dans l’expectative et limite l’installation de jeunes agriculteurs.
Toutefois au niveau local, sous l’impulsion de citoyens porteurs de projets collectifs, les communes et communautés de communes peuvent développer des stratégies foncières dans des projets de territoire en définissant l’usage souhaité des terres : maintien de l’agriculture, lotissement de bâti ou de jardins maraîchers. Mais les espaces agricoles n’en restent pas moins vulnérables. La propriété foncière permet à ceux qui la détiennent de profiter d’un bien commun fourni par la nature, comme le vent dans le cas de Cravant par exemple ; un projet conçu par une entreprise d’éoliennes et des propriétaires agriculteurs a été discuté et accepté localement en raison des retombées financières sur la commune. Les arbitrages locaux, confirmés par l’enquête publique, étaient donc en faveur de la constitution d’un parc éolien, malgré l’opposition d’un petit nombre. Il existe donc des enjeux forts quant à la possession et à la gestion des ressources naturelles.
Il n’y a en effet pas de ressource en soi sans gestion. A titre d’exemple, après avoir été aménagés pour la navigation, les cours d’eau du bassin Adour-Garonne l’ont été pour irriguer les coteaux de Gascogne, puis pour l’énergie hydroélectrique. Ces différents usages correspondent à différentes conceptions de leur intérêt . Le changement de paradigme découpe le temps en périodes : aujourd’hui, l’Etat adopte une nouvelle position pour répondre aux préoccupations des agriculteurs et d’associations protectrices de la biodiversité : les politiques nationales et internationales ont mis l’accent sur la préservation des milieux. Une vision éco centrée apparaît ainsi. Concernant les individus qui pratiques les milieux ruraux, la gestion des ressources naturelles passe par la recherche d’une garantie de qualité des produits à travers une meilleure connaissance des producteurs. Emerge l’idée qu’une proximité géographique réduirait l’empreinte carbone. Par exemple en Île-de-France, dix projets « agri-urbains » sont soutenus par la région et l’Europe à travers le s programmes Leader. Les circuits courts sont également aidés par les collectivités territoriales et chambres consulaires. Les communes, les conseils généraux poussent les restaurations collectives qui sont de leur compétence à s’approvisionner en partie de produits locaux et bio dans la mesure du possible. Mais si l’on considère maintenant la notion de paysage, ce n’est pas la matérialité des choses de la nature qui fait ressource, mais l’usage qui en est fait par certains, comme les agriculteurs et qui est apprécié par d’autres comme le reste des habitants ou encore les touristes.
Ainsi, la ressource ne se trouve pas simplement dans les usages qui en sont faits, mais dans les relations qui se nouent autour de ces usages et donc dans les représentations qui se nouent à un territoire et ses ressources. Par l’aménagement des structures paysagères et par leurs pratiques de culture ou d’élevage, les agriculteurs créent d’ailleurs une offre récréative , non marchande, qui traduit un besoin de sociabilité et de reconnaissance. Par ailleurs, les agriculteurs d’un même territoire s’allient parfois pour créer par exemple une coopérative qui mette en relation leurs ressources exploitées. L’intensité des relations entre gens d’un même lieu apparaît également comme un moteur puissant d’élaboration de projets : ils créent des nouveaux modes d’habiter car par la suite, la population adhère et au projet. Cela fait que l’ensemble d’une population locale adhère aux mêmes valeurs, valeurs rattachées à leur identité rurale et à leurs ressources naturelles spécifique s. En Touraine, les habitants se définissent par leur lien à la vigne ; l’œnotourisme est un moyen de valorisation privilégié de la « région de Rabelais », connue pour ses domaines viticoles.
La perception des rapports à la nature par les institutions et les individus, sa mise en actes à travers leur interaction sont encore peu étudiées aujourd’hui. Pourtant, la mise en tourisme des espaces ruraux témoigne de représentations spécifiques que les locaux se font de leur territoire.
…au tourisme culturel
Le territoire : un construit socioculturel
Mais ce milieu naturel ne peut être compris que dans le cadre des sociétés humaines et de leurs pratiques traditionnelles. Ainsi, l’offre touristique tend également à valoriser les productions issues des savoir-faire spécifiques élaborés localement. En effet, il s’agit d’aborder la destination sous le prisme du territoire en proposant de valoriser l ’existence d’une communauté socio-culturelle particulière et de ses savoir-faire. La campagne bénéficie aujourd’hui d’une image positive ; elle incarne un art de vivre et des valeurs identitaires qui nourrissent l’imaginaire des visiteurs autant que la diversité de ses paysages, patrimoines, savoir-faire et traditions . Le territoire apparaît donc, tel que l’écrit Guy Di Méo, comme un construit socioculturel , c’est-à-dire un système de valeurs qui assure la régulation et l’intégration des comportements individuels et qui se maintient tout en se renouvellant au fil de l’histoire. En ce sens, l’ancrage des produits et des ressources que mobilisent les habitants d’une destination donnée dans le temps et l’espace constitue donc un enjeu stratégique du développement économique . Il y a un lien entre patrimoine et ressource : patrimoine et territoire donnent tous deux du sens et de la valeur à des objets. Ils participent à l’émergence d’un espace commun, dans lequel un groupe se reconnaît, dont il se revendique, et autour duquel il se construit. Les éléments patrimoniaux qu’ils soient matériels ou non, contribuent très largement à marquer l’espace social, à lui donner du sens, à générer ou conforter des pratiques collectives et donc à fabriquer des territoires qui, à leur tour, façonnent ceux qui y vivent et renforcent les pouvoirs existants sur des bases culturelles à la fois sélectives et symboliques.
Cette dynamique se déploie par ailleurs sur le long terme. Territoire, ressource et patrimoine sont le résultat d’une construction sociale : « l’espace devient territoire et l’objet patrimoine, lorsqu’ils sont pris dans un rapport social de communication » . Ainsi, une ressource territoriale se construit sur une ressource spécifique ; elle peut ainsi être de nature différente selon qu’elle fasse l’objet ou non d’un processus de valorisation . Le passage de de la notion de ressource à celle de patrimoine est lié à un processus de révélation que les acteurs opèrent collectivement et qui est donc intentionnel. Les acteurs locaux ont donc un rôle clef lorsqu’il s’agit de selectionner les ressources à valoriser à des fins touristiques. Une ressource n’est pas un patrimoine en lui-même, il le devient par l’action des acteurs locaux sur cette dernière. Ce processus de patrimonialisation des ressources est propre à chaque territoire et c’est ce qui m’intéresse notamment dans mon sujet. Enfin, le processus de patrimonialisation s’appuie sur plusieurs étapes interdépendantes. Ces différentes étapes peuvent être scindées en deux temps : le premier, est celui du discours et comprend une phase de sélection et justification de la ressource : elle fixe l’objet. Le second temps est celui de l’action et s’incarne dans la conservation et l’exposition ou encore la valorisation. Ce second temps est plus directement lié à l’usage qui en est fait par les touristes à posteriori. La patrimonialisation fait ainsi partie intégrante du tourisme culturel puisqu’il porte sur des objets chargés de signification pour les acteurs locaux, sur des objets à forte dimension identitaires qui participent par la suite activement à la construction socioculturelle qu’est le territoire.
Le positionnement générique de la marque « Val de Loire » : le libre partage d’un monde d’exception
Le positionnement générique d’une marque est essentiel puisqu’il définit la façon dont la destination va être perçue par les clients. Le positionnement générique est construit à partir des valeurs identifiées de la marque et s’appuie sur ces dernières ainsi que sur les éléments constitutifs de cette dernière. Le positionnement est un choix, puisqu’il consiste à mettre en avant des avantages compétitifs forts tout en cherchant à répondre aux attentes et demandes des visiteurs et clients. Une fois le positionnement défini, la marque peut construire la promesse qui leur sera faite. Ce positionnement générique, c’est ce qui permet à la marque « Val de Loire », de devenir pertinente et reconnue sur la scène internationale. Le positionnement de la marque est le suivant : « le libre partage d’un monde d’exception ». Ce positionnement se nourrit des valeurs détaillées plus haut et qui sont celles des encadrés verts du schéma ci-contre.
La Stratégie régionale du tourisme du Centre-Val de Loire : des ambitions calquées sur celles de la marque « Val de Loire »
Le lancement de la marque « Val de Loire », s’est inscrit dans la stratégie régionale du tourisme durable de la région-Centre-Val de Loire pour 2011-2015, puis dans celle de 2016-2020. Cela est révélateur de l’intérêt de la région pour la marque touristique « Val de Loire ».
Les objectifs de cette dernière sont réellement alignés sur ceux du Centre-Val de Loire. En effet, dans la stratégie régionale du tourisme de 2011-2015, les axes stratégiques retenus étaient d’unepart « Soutenir une destination visible à l’international, le Val de Loire, et structurer le territoire en s’appuyant sur des destinations touristiques pertinentes » , d’autre part, « Structurer une offre stratégique et compétitive pour les quatre filières prioritaires : patrimoine culturel, tourisme de nature, itinérances douces, art de vivre et améliorer l’offre d’hébergements marchands », mais aussi « Soutenir l’innovation et la formation pour renforcer la professionnalisation et améliorer la compétitivité des acteurs publics et privés du tourisme » et « Développer une nouvelle stratégie marketing en lien avec les filières et les marques prioritaires ».
Pour répondre au premier axe, le CRT entendait s’appuyer sur la marque « Val de Loire » et sur l’affirmation de la démarche d’excellence des grands sites patrimoniaux du Val de Loire avec les deux marques « Châteaux de la Loire » et « Qualité Tourisme ». Le but était également que le Val de Loire puisse peu un peu, s’imposer et irriguer les autres destinations régionales. Les objectifs du deuxième axe, eux, consistaient à faire du lien entre la filière « art de vivre » qui regroupe œnotourisme, gastronomie, produits du terroir) et les autres filières touristiques : châteaux, itinérance douce, parcs et jardins. Le réseau et label Vignobles & Découvertes répond par exemple à cette ambition puisqu’il regroupe les différents prestataires touristiques d’une destination par l’intermédiaire du produit vin. Le CRT développe également les activités de tourisme de nature sur les destinations Brenne, Val de Loire, Perche, Forêt d’Orléans et Sologne et en faisant travailler ensembles les acteurs de ces différents territoires et de cette même filière. L’objectif de cet axe 2 est en effet aussi de développer l’itinérance douce et de valoriser « LaLoire à Vélo » en construisant de nouvelles vélo routes et en travaillant à la diffusion du label « Accueil Vélo ».
Le troisième axe de soutien à l’innovation et à la formation passe lui par la mise en place d’un fond d’aide régional pour soutenir les projets innovants et par la formation des acteurs touristiques en vue de leur professionnalisation. La directrice du CRT Centre-Val de Loire a évoqué ces formations à lors de notre entretien : « au sein du CRT Centre-Val de Loire, on a un dispositif de formation qui s’appelle « formation tourisme Centre », qui propose des modules de formation dans un premier temps qui vont être proposés en présentiel autour de sessions de formation pour les ambassadeurs et futurs ambassadeurs du Val de Loire ». Madame Beaudoin a cependant souligné la difficulté de mobiliser les acteurs sur le sujet. Le CRT a donc changé de fusil d’épaule en proposant des tutoriels sur comment est-ce que l’on gère une marque touristique lorsque l’on est ambassadeur, qu’est -ce que l’on doit apporter, qu’est ce que ca nous apporte et comment optimiser le fait d’être ambassadeur Val de Loire ou d’une autre marque territoriale.
Finalement, en réponse au quatrième axe, le CRT souhaitait investir sur les cinq marques touristiques majeures du Val de Loire et « utiliser la capilarité au bénéfice de l’ensemble des acteurs touristiques de la destination
» : « Le Val de Loire », « Les Châteaux de la Loire »,
« La Loire à Vélo », « Berry Province » et « la Touraine ».
Ces axes rejoignent ceux du Schéma régional de développement durable du territoire à horizon 2020, adoptés en 2011 sur les filières prioritaires qui sont :
– le patrimoine culturel/châteaux de la Loire
– les parcs et jardins,
– le tourisme de nature,
– les itinérances douces,
– l’œnotourisme,
– et le tourisme d’affaire.
Concernant la stratégie régionale du tourisme 2016 – 2020, la encore ses orientations se calquent sur celles de la marque « Val de Loire ». Le modèle de développement touristique partagé repose sur un double objectif quantitatif et qualitatif. L’un vise à capter une part croissante du tourisme de masse mondial et de renouveler les clientèles. L’autre consiste à maintenir une part importante du tourisme de proximité qui peuvent, en revenant dans la destination, devenir des véritables ambassadeurs de cette dernière. En effet, les résultats de mes questionnaires portant sur le tourisme en Val de Loire ont révélé que 47,3% des répondants s’étaient rendu dans le Val de Loire 7 fois ou plus. 93,6% de ceux pour qui c’était une première expérience dans le Val de Loire disent vouloir y revenir. C’est donc une destination, dont fait partie la région Centre-Val de Loire, qui fidélise. Cette stratégie suppose aussi de travailler à garantir une offre et une expérience vécue de qualité. La stratégie globale est ainsi celle de la fidélisation de la clientèle, fidélisation qui nécessite une bonne gestion marketing concertée.
La région s’engage d’ailleurs à accompagner les prestataires touristiques privés et publics, dans l’amélioration de l’expérience client. La fidélisation nécessite aussi, une offre et un accueil de qualité. C’est le deuxième objectif de la stratégie régionale : miser sur la qualité pour fidéliser la clientèle étrangère et française. Le but est de « prendre en compte l’ensemble des acteurs intervenants dans la chaîne de l’accueil et ayant à un moment donné un contact direct avec le tourisme ». Cette stratégie se concentre notamment, sur la valorisation des offres de qualité et des expériences vécues dans les outils de promotion touristique comme les labels. Cela explique aussi pourquoi la région Centre-Val de Loire semble très investie dans la marque « Val de Loire » : elle constitue pour elle , un véritable outil de promotion et d’attractivité régionales. L’autre ambition de la région à l’horizon 2020, était de développer un tourisme axé sur la douceur et l’art de vivre pour devenir une référence nationale du tourisme de l’art de vivre. Par art de vivre, la région entend douceur de vivre, vivre ensemble, ressourcement et temps retrouvé. Cette ambition semble avoir été atteinte au vu des résultats du questionnaire sur le tourisme en Val de Loire. Concernant le choix du Val de Loire plutôt qu’une autre destination , de nombreuses personnes ont répondu « Pour le cadre agréable », « pour la détente, le calme », « pour la douceur de vie ». Cet art de vivre joue sur l’équilibre Nature-Culture, équilibre aussi revendiqué par la marque « Val de Loire » dans son code de marque.
La Loire à Vélo : un projet exemplaire de coopération interrégionale
Depuis sa création jusqu’à sa mise en place et son assise sur le territoire qu’elle traverse, la « Loire à Vélo » est l’exemple parfait d’une gouvernance cohérente et efficace dans la gestion d’une marque.
En amont du projet, une sensibilisation de tous les acteurs du territoire concerné a été mise en place, associant partenaires publics et partenaires privés. Son histoire débute par la mise en place d’un pilotage cohérent par les deux régions concernées, du Centre-Val de Loire et des Pays de la Loire. La volonté de la part de ces dernières, était de s’inscrire dans la durée tout en pilotant le projet sans discontinuités. Des techniciens ont fait un travail de terrain très détaillé en concertation avec les édiles locaux pour argumenter leurs choix d’itinéraires. Pour ce faire, ils se sont appuyés sur des bureaux d’études spé cialisés dans les circulations douces pour conforter les choix faits entre les divers itinéraires proposés et valider les solutions techniques les plus pertinentes. Chaque cas particulier s’est vu accordé du temps pour lui trouver une solution adaptée à son environnement naturel protégé. Cette veille au cas par cas répondait à l’ambition de qualité et d’excellence portée par la destination pour se positionner sur le marché concurrentiel international.
La « Loire à Vélo » est aussi par définition un réseau de prestataires autour du vélo.
Cette logique de réseau implique donc la coopération entre la marque « Loire à Vélo » et ces prestataires et encore les prestataires entre eux. Réseau d’acteurs, mais aussi réseau des itinéraires cyclo-touristiques français à cette époque encore peu structurés et développés n’étant pas au centre des préoccupations touristiques. L’itinéraire de la « Loire à Vélo » a été conçu pour accueillir d’autres itinéraires qui voudraient venir s’y greffer ; la logique est donc au-delà d’une coopération interrégionale. La « Loire à Vélo » a donc rapidement, été considérée comme un axe majeur, vecteur de valeurs et de développement. Ce positionnement lui a donc permis de l’inscrire dans une logique de développement local, mais aussi national et européen. En effet, l’itinéraire cyclo-touristique s’est intégré à l’ Euro-véloroute des fleuves : « l’EuroVélo6 », permettant le montage d’un projet Interreg qui a favorisé les échanges de bonnes pratiques et a permis de financer des actions structurantes mutualisées portant par exemple sur la fourniture de services ou les outils de promotion.
La marque « Val de Loire » : une gouvernance interrégionale partagée
Mon entretien avec la directrice du Comité Régional du Tourisme Centre-Val de Loire m’a beaucoup appris sur la gouvernance de la marque « Val de Loire ». Les actions menées sur la marque sont pilotées par le Centre -Val de Loire, qui est le pilote politique. Le comité Régional du Tourisme est lui le pilote stratégique et opérationnel. C’est lui qui est garant du Contrat de destination et qui pilote la marque à l’échelle interrégionale de concert avec l’agence de développement économique des Pays de la Loire et très souvent Atout France (agence de développement touristique de la France), sur la mise en œuvre des actions à l’international. Le CRT travaille aussi souvent avec Atout France au titre de la marque « Châteaux de la Loire » dont le rayonnement est international. Atout France adhère aussi à plusieurs clusters et commandite des actions de promotion au Comité Régional du Tourisme. Comme Madame Beaudoin me l’a expliqué, le CRT mène de manière fréquente avec Atout France, quelque chose qui est à la fois un partenariat et une relation de « prestataire de service ». Le travail du CRT sur le développement de la marque « Val de Loire », mais aussi des marques constitutives de cette dernière : « Loire à Vélo » et « Châteaux de la Loire », fait l’objet d’une gouvernance partagée interrégionale avec la région Centre-Val de Loire et la région Pays de la Loire qui en sont copropriétaires. Les deux marques filières de « La Loire à Vélo » et des « Châteaux de la Loire » font aussi l’objet d’un travail interrégional. La marque « Châteaux de la Loire », créée en 2008, a d’ailleurs précédé le « Val de Loire » interrégional. On peut donc considérer qu’elle en est un pilier central voir qu’elle est au fondement même de la marque « Val de Loire ». Ceci expliquerait pourquoi la majorité des répondants de mon questionnaires perçoivent le Val de Loire à travers le prisme des Châteaux de la Loire. Le Val de Loire compte 22 grands sites, essentiellement les châteaux de la Loire qui sont 15 côté Centre -Val de Loire et 7 côté Pays de la Loire. D’après Marie-Estelle Beaudoin, les plus célèbres, les plus fréquentés et ceux qui ont le plus de notoriété sont côté Centre-Val de Loire : Chenonceau, Amboise et Chambord. Les deux régions ont peu à peu essayé faire en sorte qu’il n’y ait pas trois stratégies différentes sur ces trois appellations là : « Loire à Vélo », « Val de Loire » et « Châteaux de la Loire », mais que les stratégies soient complémentaires et viennent s’enrichir les unes les autres. Toujours dans le cadre de la coopération avec Atout France, les deux régions ligériennes ont travaillé sur les marchés étrangers pour positionner la bonne marque porte d’entrée pour promouvoir l’ensemble de la destination Val de Loire. Les deux copropriétaires de la marque se sont posé les questions suivantes : « Est-ce qu’on rentre par la marque Val de Loire ? Est-ce qu’on rentre par la marque « Châteaux de la Loire », parce qu’à l’international ça veut tout dire, et est-ce qu’on rentre pour certaines clientèles, pour d’autres marchés par « La Loire à Vélo » ? ». Il s’agissait d’étudier, avec le soutien d’Atout France, quelles étaient les bonnes marques porte d’entrée et comment les autres contribuaient ou non ou pourraient contribuer ou non à la promotion de ce grand espace Val de Loire. Comme le souligne la directrice du CRT Centre Val de Loire, c’est un travail qui s’est fait en commun et qui a permis, sur la plupart des marchés lointains, à l’exception non négligeable près des pays anglo -saxons, que la marque porte d’entrée soit plutôt celle des « Châteaux de la Loire ». Sur les pays anglo-saxons, notamment les Etats-Unis par exemple, voire le Canada anglophone ou encore l’Australie, la bonne marque porte d’entrée a plutôt été la « Loire Valley », symbole de « l’art de vivre à la française ». Ce travail de positionnement sur les marchés étrangers permet de « mettre en avant les bons ingrédients », censés par la suite tirer le reste de l’offre touristique en faisant la lumière sur cette dernière. Cet exemple fait partie des décisions prises en concertation entre les Pays de la Loire et le Centre-Val de Loire. Tous les ans, elle se traduit par la mise en place en coordination, d’un plan d’action opérationnel. J’ai aussi appris que « La Loire à Vélo » était rarement la bonne marque porte d’entrée, mais qu’elle permettait sur des marchés, notamment le marché néerlandais, de pouvoir travailler et toucher des clientèles qui ne sont pas forcément touchées par le Val de Loire mais qui sont sensible aux séjours et voyages à vélo, au tourisme de nature et aux questions de mobilités douces. Enfin, pour la directrice du CRT Centre-Val de Loire, la marque joue surtout sur l’absence progressive de frontières entre certaines destinations du Val de Loire comme c’est le cas entre la Touraine et l’Anjou. Selon elle, « l’Anjou c’est vraiment le cœur du Val de Loire, et là de même qu’avant il y avait déjà des actions communes entre Touraine et Val de Loire ». Celles-ci ont pu s’accentuer, les collaborations également, même au niveau du travail CRT-ADT, notamment sur une filière interne au Val de Loire : la filière œnotourisme. Les deux régions travaillent sur cette logique interrégionale du Val de Loire oenotouristique en essayant de construire des formations et des plans d’action avec les deux interprofessions viticoles qui sont présentes sur le Val de Loire : d’un côté BIVC à l’est avec notamment l’appellation Sancerre et de l’autre l’interprofession InterLoire, à cheval sur Pays de la Loire et sur Centre Val de Loire, et qui touche en Centre Val de Loire la Touraine et le Loir-et-Cher. Les plans d’actions sont ainsi construits avec les deux interprofessions et les deux structures touristiques régionales s’observe nettement entre l’Anjou et la Touraine et entre la Touraine-Loire et le Loir-et-Cher. En revanche, la Loire-Atlantique est un cas un peu à part : Nantes est un « chef-lieu », une ville et une marque à part entière, la Loire Atlantique est une côte dont la fréquentation est très, c’est donc plus compliqué pour eux de se concentrer sur les objectifs « Val de Loire ».
Il y a donc des structures de gouvernance officielles, qui divergent parfois, avec la réalité de la construction des plans d’action annuels. L’action du CRT est complémentaire de celle du conseil régional Centre-Val de Loire.
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Table des matières
Etat de l’art
I. Histoire des représentations de la campagne
A. “Le rural”: de quoi parle-t-on?
B. La notion de rural et les rapports ville-campagne en France: les années 1990
C. Nouveau regard sur la nature dans les campagnes d’aujourd’hui
II. Qu’est- ce que le tourisme rural ?
A. Le tourisme rural en France : un état des lieux
B. Du tourisme de nature
C. …au tourisme culturel
III. Les démarches d’excellence en France
A. Label et tourisme
B. Labels, marques territoriales et branding touristiques
C. Le tourisme pour instituer un label et un label pour attirer les touristes
Méthodes d’enquête
Problématique et hypothèses
Partie 1 : La marque territoriale « Val de Loire » : un outil de construction de la destination
Chapitre 1 : Unir deux régions autour d’un Contrat de destination
1. Deux Régions, un fleuve
2. D’une marque touristique créatrice de valeur
3. …à un Contrat de destination basé sur une stratégie touristique tournée vers l’international
Chapitre 2 : « Val de Loire » : une marque amirale pour la visibilité et l’attractivité du territoire
1. Le socle de la marque : de l’identité d’un territoire à l’identité de la marque
2. Le positionnement générique de la marque « Val de Loire » : le libre partage d’un monde d’exception
3. L’univers sémantique et iconographique de la marque : une ruralité magnifiée à travers la mise en avant de richesses reconnues
Partie 2 : La labellisation comme outil de gouvernance
Chapitre 3 : Un management de destination pour dépasser l’enchevêtrement des compétences
1. Une gestion marketing concertée au service du développement touristique régional : le cas du Centre-Val de Loire
2. Lutter contre l’autoconcurrence territoriale en impliquant tous les acteurs du tourisme autour d’objectifs communs et d’une ingénierie concertée
3. Le pilotage de la marque « Val de Loire » : quelle réalité ?
Chapitre 4 : Être acteur de la destination en devenant ambassadeur « Val de Loire »
1. Devenir Ambassadeur du « Val de Loire » : être un relais amplificateur de la démarche d’appartenance au Val de Loire
1. Bénéficier de la visibilité d’une marque et des retombées de campagnes de promotion et de communication
2. S’associer à une marque mondiale portée par les deux régions et Atout France : l’opportunité
d’être accompagné dans le « marketage » des offres
Partie 3 : Un Val de Loire ou des Vals de Loire ?
Chapitre 5 : Une stratégie de marketing territorial centrée sur des espaces déjà touristiques et à fort potentiel naturel et culturel
1. Positionner le Val de Loire comme une destination d’excellence en s’appuyant sur des filières stratégiques déjà existantes
2. Développement touristique et disparités territoriales
Chapitre 6 : De la marque Val de Loire aux labels touristiques intrarégionaux : une ou des destinations ?
1. Les labels : un contrepoids ou un appui à la marque « Val de Loire » ?
2. Une multiplicité de labels pour une même filière : un manque de lisibilité ? L’exemple des labels oenotouristiques
3. La labellisation : un phénomène territorial ponctuel
Conclusion
Bibliographie
Annexes