LA TRAITE NÉGRIÈRE
Qu’est ce que la « traite négrière » ?
Tout d’abord, il est nécessaire d’apporter des précisions sur le concept de « traite négrière » encore appelé « esclavage », « commerce triangulaire », « traite des noirs ». Toutes ces appellations ont un lien de proximité. En effet, elles se renforcent entre elles par le fait que l’absence de pratiques esclavagistes ne peut permettre une quelconque traite d’esclaves, impliquant ainsi un autre lien indissociable entre ces deux dernières dénomination: « Le terme traite était à l’époque moderne un équivalent de celui, actuel, de commerce. Il sous-entendait l’existence d’opérations d’achat et de vente (…) Par traitant, on désignait non seulement le marchand, mais aussi le bénéficiaire de marchés publics ou de monopoles, bref l’homme brassant des affaires » . Olivier Pétré Grenouilleau n’en reste pas là quant à la définition que l’on pourrait apporter à cette expression courante. Il précise que le commerce des esclavesr envoie à des périodes historiques plus anciennes.
L’état de soumission imposé à des captifs est aussi ancien que la guerre et l’esclavage est un élément constitutif des sociétés humaines. Il est d’ailleurs difficile de déterminer l’apparition de l’esclavage dont l’origine est probablement liée à celle de la guerre. Au Néolithique , l’augmentation de la population des différents groupes humains, la constitution d’une classe « dominante » (physique plus que sociale) et la découverte de nouveaux territoires sont des éléments qui ont pu être à l’origine des premiers conflits armés. En effet, les vainqueurs décidaient du sort de leurs adversaires. S’ils leur laissaient la vie sauve, c’était le plus souvent pour les emmener avec eux et les asservir dans leur domaine. C’est alors la naissance d’une société de caste où « les supérieurs » jugeaient les autres comme « inférieurs », donc indignes du statut d’homme libre, voire comparable à celui d’un animal. Plusieurs civilisations ont pratiqué l’esclavage notamment les égyptiens, grecs, romains, musulmans, chrétiens, aztèques, barbares…
C’est pourquoi, Olivier Pétré-Grenouilleau rappelle qu’il n’est pas possible de réduire le « commerce des esclaves » aux seules opérations où bons nombres d’africains en furent les victimes. De ce fait, en précisant ce propos la dénomination s’affinerait autour du concept de « traite des noirs » ou de « traite négrière », faisant apparaître.
Les conditions menant aux révoltes, le chemin vers l’abolition ?
La traite négrière a donc rendu des millions d’africains captifs avant d’être envoyés par bateaux vers les Caraïbes, les États Unis, le Brésil et d’autres territoires des Amériques. Ce processus d’asservissement dans les conditions qui ont été décrites précédemment ont logiquement fait apparaître, rapidement, des mouvements contestataires chez les captifs qui, la plupart du temps, étaient violemment réprimés par des violences physiques, psychologiques. Mais du 16ème au 19ème siècle, les esclaves ne se résignèrent jamais à leur sort, pendant quatre siècles, les fréquentes révoltes individuelles ou collectives révélèrent que ces luttes n’étaient pas anecdotiques dans le système esclavagiste mais ont participé à le miner. Ces mouvements insurrectionnels constituèrent l’une des composantes majeures du processus qui finit par imposer l’abolition de l’esclavage.
D’autant plus que le passé proche, en Espagne, a donné des formes d’espoir.
La controverse de Valladolid en août 1550 en est un exemple des plus marquants quant à l’espérance d’une éventuelle abolition de la traite négrière. Suite à la découverte des Amériques par les européens, les occidentaux ne savaient comment considérer les peuples autochtones, notamment leur statut d’Homme. Il faut préciser qu’avant la traite des noirs, les indiens étaient exterminés, asservis et considérés comme des sous-hommes. Bartolomé de Las Casas (1470 1566), après avoir obtenu du Pape Paul III la proclamation que les indiens sont de véritables hommes donc aptes à recevoir la foi, défend l’humanité des indiens, à Valladolid. Il s’oppose à Juan Guinès de Sépulvéda qui lui, conforme aux principes d’Aristote, considérait que certains hommes sont esclaves par nature. Le point de vue défendu par Las Casas l’emporte de justesse. Survivre aux rythmes de travail, aux sévices en tout genre pouvait être considéré par certains comme une forme de résistance intérieur mais les révoltes en étaient des manifestations extérieures.
Cela pouvait commencer dès l’embarquement pour se poursuivre à l’arrivée sur la terre ferme : refuser de s’alimenter, se mutiler, se suicider, provoquer un avortement, ralentir ou saboter le travail, voler de la nourriture, frapper ou insulter le commandeur, tenter d’empoisonner le bétail ou le maître, incendier les champs de cannes, s’enfuir… Ils avaient parfaitement compris qu’un esclave mort représente un manque à gagner pour les traitants. Parallèlement à cela, ils avaient également mis en place des relations sociales et solidaires entre eux, ils se sont créés une sous-culture (ensemble de valeurs, de normes et de comportements propres à un groupe social donné et manifestant un écart par rapport à la culture dominante ) leur permettant de se soutenir collectivement, toujours dans le but de survivre et d’espérer l’abolition de l’esclavage. Le développement de cette sous-culture des esclaves a été freinée par les propriétaires mais s’est cependant constituée et a bel et bien fonctionné. Durant les quelques temps libres accordés, ils ont pu créer des modes de vie et des comportements propres à leurs conditions mais également à leurs origines. Ils adaptent donc leurs vies autour de ces deux civilisations, eux ayant subi cette acculturation (modification des modèles culturels de base de deux ou plusieurs groupes d’individus, de deux ou plusieurs ethnies distinctes, résultant du contact direct et continu de leurs cultures différentes) violente et forcée. Ils donnent naissance, d’un côté, à une culture « légale » autour de rituels, de festivités, de prévention avec l’approbation du maître et, de l’autre côté, à une culture illégale et clandestine le défiant. La contrepartie résidait dans le fait que les esclaves acculturés perdaient leurs repères sociaux au fil du temps, ce qui arrangeait les propriétaires d’esclaves. Doucement, cette sous-culture naissante puis installée permettait aux captifs de s’organiser, de se renforcer, de communiquer/s’informer… Ils lançaient les prémices d’insurrections à venir jusqu’à la libération finale.
L’abolition en deux temps :« Un long chemin vers la liberté »
1er temps
En occident, c’est à partir de la fin du 17ème siècle que l’on commence à entendre des voix dissonante vis à vis de la traite négrière et du statut d’esclave. C’est effectivement le cas des « Quakers » , mouvement religieux créé en Angleterre en 1650 par George Fox considérant que chaque homme a en lui « une semence ou une lumière divine qu’il doit retrouver dans la méditation silencieuse» ; elle se faisait appelé « société des amis ». En 1688, ce sont les premiers à manifester publiquement, dans le monde occidental, contre le commerce des Hommes. En Pennsylvanie aux États Unis, ils y fondèrent la « société de Pennsylvanie pour l’abolition de l’esclavage ». En 1788, une enquête du Conseil privé de la Couronne d’Angleterre légitima leurs actions et permis ensuite d’amorcer un débat sur le sujet des esclaves au Parlement, ayant pour conséquence l’interdiction de la traite négrière. Les abolitionnistes britanniques (dont le député Wilbeforce comme chef de file ou encore Olaudah Equiano, esclave affranchi qui a touché la société anglaise après la publication de son autobiographie) amplifièrent leurs actions autours de conférences, de signatures de pétitions, de campagnes de boycott de marchandises en provenances de pays esclavagistes, de diffusion de livrets et feuillets imprimés et illustrés exposant les conditions de vie des captifs. Après deux siècles d’usage massif et efficient du trafic d’Hommes, l’Angleterre devenait la rampe de lancement des courants abolitionnistes du monde. En France, au milieu du 18ème siècle, l’Encyclopédie de Diderot précisait que : « l’esclavage est l’établissement d’un droit fondé sur la force, lequel droit rend un homme tellement propre à un autre homme qu’il est le maître de sa vie, de ses biens et de sa liberté ». Par ailleurs, il rappelle que les hommes naissent libres et que la nature les avait fait tous égaux ; la visée d’un tel message étant l’arrêt de l’usage de captifs dans les colonies européennes.
Dès 1748, dans De l’Esprit des Lois, Montesquieu s’interroge sur l’incohérence entre les valeurs relatives à la croyance chrétienne et la pratique de l’esclavage. Les positions quant à l’esclavage évoluent durant la seconde moitié du 18 ème siècle. Entre 1750 et 1770, il passe de l’indifférence à la gêne ; à partir de 1770, un regroupement d’idées seront transcrites législativement par les Assemblées Révolutionnaires. En 1756, Voltaire, dans son Essai sur les mœurs, se révolte contre le fait que les esclaves de Saint Domingue « abrègent leur vie pour flatter nos appétits nouveaux ». En 1781, Condorcet fait éditer son ouvrage Réflexion sur l’esclavage des nègres, où l’on retrouve un parti pris en faveur des esclaves « Réduire un homme à l’esclavage, l’acheter, le vendre, le retenir dans la servitude, ce sont des véritables crimes, et des crimes pire que le vol ». Dès le 8 mars 1790, une question se pose à l’Assemblée Nationale Constituante : faut-il accorder l’égalité civile aux hommes de couleurs libres ? Problématique qui est fustigée par les planteurs et négociants (exemple, le club Massiac ). Mais la révolte de Saint Domingue, de 1791, accélère le processus. C’est donc le 4 février 1794 que les membres de la Convention votent à l’unanimité l’abolition de l’esclavage dans les colonies françaises. Sauf qu’en 1802, en tant que Premier Consul, Bonaparte ayant pris le pouvoir en 1799 après le coup d’État du 18 brumaire, rétablit la traite et l’esclavage qui ont pour effet, quasi immédiat, des rébellions d’esclaves. Il avait envoyé, en 1801, deux expéditions vers les caraïbes dans le but de mater l’insurrection et d’imposer son autorité sur le territoire. Bien que l’ordre ait été rétabli en Guadeloupe par le régime Bonapartiste, Saint Domingue résista malgré l’arrestation en 1802 de leur chef Toussaint Louverture. En effet, les troupes des deux expéditions envoyées en 1801 ont dû capituler en 1803 suite à de nombreuses défaites et de maladies contractées dans ces contrées exotiques. Le 1 er janvier 1804, l’île se nommera désormais Haïti, comme l’ont souhaités les insurgés et l’esclavage y était aboli. C’est le seul lieu appartenant à la France où l’esclavage a pu prendre fin.
2ème temps
Il faut attendre le 27 avril 1848 pour que le décret d’abolition de l’esclavage soit signé, après différentes dénonciations de la Société Française pour l’abolition de l’esclavage, de réclamations dont celles de Cyrille Bissette, martiniquais descendant d’esclave et de publications de Victor Schoelcher suites à une série de voyage entre 1830 et 1848, ( Des colonies françaises, abolition immédiate de l’esclavage) ; c’est lui-même qui aura l’honneur de signer ce décret, en tant que nouveau sous-secrétaire d’État aux Colonies. L’alsacien Scoelcher, a laissé jusqu’à aujourd’hui un regard précieux à travers les descriptions faites des colonies esclavagistes, notamment sur le plan du système en lui même, sur les pouvoirs des colons et leurs abus, sur les dysfonctionnements du mode de gouvernement et de la justice dans les colonies. Il y décrit (dans De l’esclavage des Noirs et de la législation coloniale,1833 ; Des colonies françaises, abolition immédiate de l’esclavage, 1842 ; Colonies étrangères et Haïti, résultat de l’émancipation anglaise, 1843) la morts sociale des esclaves, les stratégies de survie, les divers processus de résistance, lui donnant une légitimité pour dénoncer les sévices illégaux dont étaient victimes les esclaves mais également l’impunité des propriétaires. Une longue page noire de l’histoire de France se clôt. Aux États Unis, c’est en 1865 que l’abolition de l’esclavage a été amendée à la Constitution Américaine par Abraham Lincoln après une guerre civile, la « guerre de sécession », entre les États du Sud (esclavagistes), et les États du Nord (abolitionnistes) qui a débuté en avril 1861 et avril 1865. Leur profond désaccord se situait sur le refus des États du Sud à accepter l’abolition de l’esclavage qui, eux, avaient besoin de main d’œuvre pour continuer à prospérer dans le commerce du sucre, du tabac, etc. alors qu’au Nord, c’est l’industrie qui créait le développement économique.
Les abolitionnistes ont gagné, malgré l’assassinat de Lincoln en avril 1865, tandis que les états du sud se sont retrouvés dans une situation de faillite économique suite à la défaite militaire mais surtout suite à la libération de tous les esclaves dans ces états laissant ainsi les parcelles agricoles sans force de travail de pour les entretenir et les exploiter. Sur le plan international, le 7 mai 1955, est mis en place une convention spécifique, adoptée par l’organisation des Nations Unies, confirmant l’abolition de l’esclavage, de la traite et de toutes les institutions ou pratiques du même genre. Elle complète celle du 25 juillet 1951 qui interdit et punie la traite d’êtres humains et la prostitution d’autrui. En 1970, une autre convention stipule le caractère imprescriptible des crimes contre l’humanité. C’est d’ailleurs, en 2001 que Christiane Taubira, députée de Guyane, présente à l’Assemblée Nationale un projet de loi où la France est clairement montrée du doigt pour avoir pratiqué la traite négrière et l’esclavage pendant plusieurs siècles, et de fait, d’avoir commis un crime contre l’humanité.
Le lien entre la traite négrière et la société actuelle : la discrimination raciale, l’esclavage moderne
Face à une pratique veille de quatre cent ans et malgré l’abolition de l’esclavage de 1848, des nouvelles formes détournées ont fait leurs apparitions.
Le temps du travail forcé, sous couvert du statut de « travailleurs libres sous contrat » explose dans les colonies françaises (Nouvelle-Calédonie, île de la Réunion …). Sous couvert d’un contrat de travail les « ex-traitants » engageaient d’anciens esclaves nouvellement affranchis comme main d’œuvre dans leurs exploitations. Effectivement, suite à l’abolition de l’esclavage, les propriétaires de terres agricoles se voient déposséder de la quasi totalité de leur force de production, engendrant dès 1850 des crises sur l’ensemble des produits récoltés par les esclaves avant 1848. Le besoin en main devient pressant. Du point de vue de l’ancien esclave, plusieurs questions se posent à lui suite à sa libération :
– Continuer à travailler dans ces conditions de travail, malgré un salaire (médiocre) pour vivre dans une société encore méprisante à leurs égards ?
– Retourner en terre natale ? Avec un accueil incertain…
– Dans quelles conditions de retour ? La mortalité forte en mer, l’épargne des immigrants, les lourdeurs et contradictions des textes sur le rapatriement
– Rester et tirer un trait sur ses origines à travers l’intégration mis en place par la Seconde République (bientôt balayée par Louis Napoléon Bonaparte) Autant d’interrogations qui n’ont laissé que très peu de temps et de marge de manœuvre, face à leurs faibles moyens, pour prendre leurs premières grandes décisions d’Hommes libres. Leur déracinement culturel, familiale, langagier leur a été contraint, comment repartir à zéro à partir rien ou presque rien. Beaucoup se sont résignés à continuer à travailler dans les plantations, se soulageant que leur statut avait changé… Légèrement.
Aux États Unis, à la suite de la défaite des sudistes lors de la guerre de sécession et des difficultés économiques qui en résultent, les directives du gouvernement central passent mal chez les anciens esclavagistes. Ils ont réussi à détourner la lois en exploitant la naïveté des anciens esclaves, en créant différents mouvements contestataires, racistes et répressifs tel que le Ku Klux Klan (KKK), fondé par six anciens généraux sudistes, amères de la défaite. Leurs objectifs étaient de réprimer les esclaves, voire de les tuer, pour ne pas qu’ils puissent jouir de leurs droits civiques. Le KKK était très structurée, il y avait une hiérarchie, des moyens matériels et financiers, ils s’organisaient au sein d’un territoire, d’un état et même entre les états, ce qui leur a permis de mettre en place un régime de ségrégation raciale grâce leur habilité face à l’utilisation de la loi. Il aura fallu presqu’un siècle pour que les droits civiques des descendants d’esclave puissent être réellement reconnus sur l’ensemble du territoire américain, suite à de nombreux amendements de la Constitution mais également de nombreux combats civiques menées par la population noire.
LE TRAVAIL DE MÉMOIRE SUR L’ESCLAVAGE
Nous venons de le constater, l’histoire de la traite négrière a été très longue et a connu différentes évolutions jusqu’à son abolition définitive tardive. Mais pour pouvoir retranscrire plus de quatre cent ans d’histoire, de façon très sommaire (en quelques lignes certes), il m’a fallu lire différents ouvrages, articles, recherches sur internet pour pouvoir croiser les informations qui y ont été extraites. L’objectif étant de pouvoir ensuite transmettre les informations pertinentes et cohérentes qui permettront, entre autre, de répondre au mieux à la question qui m’a été posée en classe : « Pourquoi y’a-t-il beaucoup de noirs en Amérique et en Afrique alors qu’ailleurs il y en a beaucoup moins ? ».
C’est pourquoi le mot objectivité présent dans ma problématique prend tout son sens. L’objectivité consiste à « être conforme à la réalité », ou à avoir « un jugement qui décrit les faits avec exactitude » ; et face aux élèves, notre devoir est de tendre vers le plus d’objectivité possible pour ainsi éviter les amalgames si fréquents dans les faits historiques. D’ailleurs Herbert Klein n’hésite pas à dire que même au niveau scolaire (de l’école primaire à l’université), les contre vérités ont encore beaucoup de poids face aux faits réels, notamment pour la traite négrière : « Pour le plus grand nombre, cette histoire n’est donc pas méconnue. Mais elle demeure mal connue, parce qu’elle est déformée par les ravages du « on dit » et du « je crois».
Cette recherche de la vérité des faits dans le passé n’est donc pas chose aisée, ce qui nous renvoie à la notion « d’historiographie » (que l’on peut résumer comme « l’écriture de l’histoire ») permettant alors la transmission et la manière de faire vivre la mémoire d’un fait historique, en l’occurrence pour ce qui nous concerne, la traite négrière. Comme l’évoque Pascal Blanchard et Isabelle VeyratMasson , l’histoire de l’esclavage renvoie au passé colonial de la France, qui reste un sujet de société clivant sur le plan national. Les stigmates de la guerres d’Algérie, de la Françafrique, etc. sont encore aujourd’hui plus que d’actualité face aux différentes crises identitaires observées ces dernières années et/ou à l’approche d’élections nationales. En effet, Françoise Vergès ajoute même « cette émergence inquiète de nombreux Français qui y voient (la mémoire du passé colonial)en bloc des attaques contre une certaines idée de la République » , cela signifie donc que pour certain,le travail de mémoire peut constituer une attaque donc un danger contre l’état français, et de fait, lapopulation préfère ne pas en entendre parler, Françoise Vergès parle alors « d’amnésie » . Christian Delacroix, François Dosse, Patrick Garcia et Nicolas Offenstadt évoquent le fait que l’esclavage
avait une grande place dans les débats politiques jusqu’à la fin du XIXème siècle mais son abolition a éteint toute discussion sur le sujet de la part des principaux protagonistes traitants (Etats Unis, Angleterre, France). Il existerait donc une historiographie des traites négrières depuis le début du 19 ème siècle, elle se justifierait par le besoin de comprendre pourquoi ce « laisser-aller » a pu durer plusieurs siècles. Elle s’est d’ailleurs construites autours de « mémoires orales » , c’est à dire des souvenirs de descendants direct d’esclaves et non pas de souvenirs de descendants de négriers ou esclavagistes « qui n’ont pas réclamé de devoir de mémoire » . Les descendants de captifs ont le sentiment que cette histoire a été minimisée et particulièrement les conséquences qu’elle a généré dans le paysage mondial. Les auteurs précisent qu’en France, les mémoires se sont également construites à travers les écrits, sauf qu’il y avait deux types de traces qui s’opposaient : les archives écrites rédigées par des européens coloniaux, aux dépens, des poèmes, chants récits, pratiques racontées et répétées oralement.
Ce n’est vraiment que pendant les années 30 que l’histoire, avec ses approches scientifiques, a permis de développer ce champ laissé « en jachère » ; puis en 1960, les travaux se sont multipliés en Afrique, en Amérique et en Europe. A partir de 1990, les recherches se sont élargies pour sortir d’une posture démographique et économique de la traite négrière. De plus, la dimension culturelle a été intégrée de manière beaucoup moins ethnocentré vis à vis des sociétés esclavagistes et des mouvements abolitionnistes. Il faut préciser qu’entre 1930 et 1990, plusieurs périodes sociétales et économiques sont propices à l’évocation de la mémoire de cette traite:
J’ai cependant quelques regrets dans l’exploitation pédagogique de cette thématique.
Je n’ai pas réussi à faire participer ma classe à un concours pour les écoliers, qui s’intitule « la flamme de l’égalité » initiée par Christiane Taubira, dont l’objectif est de faire vivre la mémoire de ce lourd et long passé. En janvier 2017, j’ai évoqué le sujet aux élèves, à savoir, la participation à un concours national autour de la question de l’esclavage (thème déjà travaillé par les CM2 l’an dernier) ce qui les a beaucoup stimulés.
En allant chercher les modalités de participation au concours, j’ai constaté sur le site que les projets de classe devaient être déposés le 13 février 2017. Or , j’avais compris que c’était les propositions de projets qui devaient être déposés à cette date. C’est à ce moment là que j’ai renoncé au concours, le temps m’aurait manqué. En effet, en étant à mi-temps, il aurait été difficile, sur deux jours et pendant plus d’un mois, de faire travailler les élèves sur ce projet, tout en étant à jour dans le travail à mener dans les autres disciplines (fondamentales notamment) ; d’autant plus qu’en histoire nous n’étions pas encore sur cette période historique, ce qui aurait peut être créer des confusions ou des incompréhensions, et l’on sait l’importance chez les élèves de maintenir une certaine cohérence chronologique vis à vis des faits historiques étudiés et/ou à étudier.
J’aurais également souhaité organiser un voyage au mémorial de Nantes pour clore ce chapitre et notamment faire vivre la mémoire de la traite négrière. La logistique étant trop complexe de par mon statut de PES (autorisation en circonscription, financement du voyage, temps nécessaire pour organiser, distance entre Lille et Nantes, etc.), j’ai dû y renoncer. Cependant, en séminaire d’histoire, il m’a été suggéré la possibilité d’aller visiter un bateau négrier à Dunkerque dont le port, par le passé, a participé, à une échelle moindre que Nantes, au commerce triangulaire. Il est vrai que cette piste semble plus pragmatique en terme de faisabilité et sera à organiser dès le début de la période.
CONCLUSION
Finalement, en repartant de la question de départ posée par l’élève de ma classe nous a permis de comprendre tout l’intérêt de l’apprentissage de l’histoire. C’est à dire, comprendre la question posée et la situer dans plusieurs périodes historiques qui s’enchaînent, ou plus précisément, de la Renaissance jusqu’à la seconde république (voire plus selon les pays) ; ce qui démontre également la très longue histoire de la traite négrière. C’est justement en développant cette histoire de l’esclavage de noirs que l’on a pu prendre conscience de l’ampleur et l’organisation de ce commerce au niveau mondial, des souffrances endurées, des combats menés qui ont mené à son abolition du point de vue de la loi, et un peu plus tard, du point de vue des actes ; bien qu’il y ait aujourd’hui encore des résurgences suites aux conséquences engendrées par cette traite (ségrégation raciale, Apartheid, esclavage moderne…). C’est à travers le déroulé de cette Histoire que l’on a pu s’interroger sur le but, l’intérêt et la façon de se remémorer ces événements marquants qui ont contribué, comme d’autres faits historiques, à construire le monde d’aujourd’hui, particulièrement la société française.
Une telle démarche, j’espère me permettra de pouvoir apporter la réponse à la question « naïve » de l’élève de la classe. En effet, la séquence pédagogique proposée a été conçu dans le but de ne rien cacher des différentes étapes de la traite négrière. Par ailleurs, c’est aux élèves d’aller chercher l’information à travers divers supports (photos, cartes, textes, vidéos, production d’écrits…), du travail en binôme et/ou seul et/ou en équipe. J’aurai l’occasion de vérifier l’efficience des séances proposées lors de la période 5.
D’un point de vue plus global, n’oublions pas qu’à partir des réponses à faire trouver par les élèves, il y a également un objectif transversal : comprendre le monde qui nous entoure afin de mieux s’y insérer en tant que futur citoyen, acteur de sa société.
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Table des matières
Introduction
A) La traite négrière
1) Qu’est ce que la traite négrière
2) Les étapes menant à la traite négrière
3) Les révoltes avant l’abolition
4) L’abolition en deux temps
5) Le lien entre la traite négrière et la société actuelle :la discrimination raciale, l’esclavage moderne, etc
B) Le travail de mémoire
C) La transposition didactique
1) Textes Officiels
2) La Séquence : pré-requis ; objectifs
Séance 1
Séance 2
Séance 3
Séance 4
Séance 5 et 6
Conclusion