Qu’est-ce que la production d’écrits ?
Apprendre à écrire aux élèves est une des missions fondamentales de l’école dans sa lutte contre l’illettrisme. Outre la copie de texte, c’est à travers la production d’écrits que l’élève acquiert cette compétence qui est utile et nécessaire dans tous les domaines d’enseignement. Par ailleurs, c’est à travers des projets d’écriture que l’élève apprend à écrire, à organiser sa pensée et ce, au delà de la production de mots ou de phrases.
Sa place dans les programmes
Tout au long de sa scolarité, l’élève apprend à produire des textes. D’abord à l’oral en dictée à l’adulte puis, progressivement, à l’écrit. Ainsi, il inscrit son activité dans « cet ensemble de connaissances et de compétences qu’il est indispensable de maîtriser pour accomplir avec succès sa scolarité, poursuivre sa formation, construire son avenir personnel et professionnel et réussir sa vie en société ». On perçoit ici l’enjeu fondamental d’acquérir cette compétence pour la vie future de l’élève.
La production d’écrit en français
Au cycle 3, les programmes nomment cette activité, rédaction : « La rédaction de textes fait l’objet d’un apprentissage régulier et progressif : elle est une priorité du cycle des approfondissements. Les élèves apprennent à narrer des faits réels, à décrire, à expliquer une démarche, à justifier une réponse, à inventer des histoires, à résumer des récits, à écrire un poème, en respectant des consignes de composition et de rédaction. Ils sont entraînés à rédiger, à corriger, et à améliorer leurs productions, en utilisant le vocabulaire acquis, leurs connaissances grammaticales et orthographiques ainsi que les outils mis à disposition (manuels, dictionnaires, répertoires.etc.) .»
Les programmes invitent les enseignants à imaginer une progression par cycle. Malheureusement, dans l’établissement où j’enseigne, cette progression n’a pas pu se mettre en place. Comme la répartition de cette partie du programme, entre la titulaire du poste et moi-même, est restée relativement floue, il n’y a pas eu d’harmonisation de nos pratiques pédagogiques. Les élèves l’ont donc pratiquée de manière ponctuelle avec la titulaire en suivant des propositions d’un manuel présent dans la classe : Bien lire à l’école. En ce qui me concerne, suivant les conseils didactiques de mon professeur de français de l’ESPE, j’ai préféré proposer des activités de production d’écrit lors des phases de réinvestissement des notions vues en français, afin que les élèves puissent s’approprier la notion et ne pas s’en tenir uniquement à des exercices d’application. J’ai aussi souhaité mettre en place le projet d’écriture en fin du deuxième trimestre afin que les élèves puissent réinvestir tout le savoir accumulé depuis le début de l’année dans les différents domaines du français. De plus, la production d’écrit est aussi présente dans toutes les matières au programme.
Transversalité de la rédaction
Pour le cours élémentaire deuxième année, les progressions complètent le B.O et distinguent les écrits dans les diverses activités scolaires de la rédaction d’un texte court .
La rédaction est présente dans toutes les activités scolaires et en cela elle permet la transversalité entre différentes matières. En effet, une production d’écrit collective est réalisée pour construire une trace écrite lors de la phase d’institutionnalisation d’une séance de découverte dans toutes les matières. Dans cette situation, c’est une dictée à l’adulte qui est faite. Le rôle de l’enseignant est prépondérant car il étaye grandement cet écrit par des questions rappelant les découvertes faites par les élèves lors de la situation problème, il reformule et met en page le texte produit. De plus, l’élève est amené à produire des écrits de façon autonome lors d’exercices tels que la résolution de problèmes en mathématiques et la réponse à des questions de compréhension en lecture. Mais la production d’écrit est également fortement présente en sciences expérimentales et technologie, notamment lors de l’émission d’hypothèses, la création d’une légende pour un schéma, la réalisation d’une affiche à l’issue d’une expérience. Dans l’exemple ci-dessus, on voit deux approches différentes du travail demandé. Le premier élève propose une production d’écrit complexe composée de plusieurs phrases alors que le second élève produit une liste de mots. Pour ce type d’écrit, l’enseignant n’intervient qu’à la fin pour corriger les fautes d’orthographe, il n’y a pas de travail de relecture qui est fait. Mais alors, quels sont les enjeux de la production d’écrit pour l’élève et pour l’enseignant ?
Le rapport à la production d’écrit
Écrire met en jeu de nombreuses opérations cognitives complexes. L’élève doit en prendre conscience et pour cela l’enseignant doit mettre en place un étayage méticuleux, un accompagnement structurant.
Du point de vue de l’élève
Le langage écrit se distingue du langage oral. Il demande à l’individu de réaliser trois séries d’opérations cognitives.
Tout d’abord, l’élève doit être en mesure de planifier son écrit. Il doit anticiper le produit fini en visualisant à l’avance l’écrit à produire au niveau de la forme et du contenu. En cela, il est impératif que l’élève soit conscient du destinataire, du lecteur potentiel. L’élève ne s’investit pas de la même manière s’il sait que seul l’enseignant lira son texte dans la perspective d’une évaluation. En cela, il est intéressant de travailler en projet avec une lecture qui se fera par les pairs ou les parents. Ainsi, l’élève peut être amené à opérer des choix suivant la situation de communication demandée. Une fois que le but, l’enjeu et le contenu du texte ont été identifiés par l’élève, ce dernier peut se faire une idée du type de texte à choisir, de sa silhouette et du matériel et support à utiliser. Dans ma classe, je n’ai laissé que peu de liberté à mes élèves à ce niveau en leur imposant soit un support papier, soit un support numérique. Mais, lors d’ateliers d’écriture pratiqués à l’ESPE dans le contexte des projets pour la classe (sous la direction de O. Bihouis et O. Levy), j’ai pu m’essayer à écrire sur du pain, des chips, des feuilles mortes et même du papier toilette. J’ai pu ainsi constater que le support d’écriture est un inducteur très intéressant à exploiter et qu’il induit un rapport créatif à l’écriture.
De plus, l’élève doit réaliser des opérations de mise en texte et en mot. Il doit ainsi faire appel à ses compétences langagières qui doivent être importantes. Un capital linguistique riche est donc indispensable. Il doit également avoir la capacité de produire une énonciation élaborée et travaillée. Accompagné par l’enseignant, l’élève doit être capable de cerner les principaux niveaux linguistiques de la mise en texte et en mots. Cela se situe notamment au niveau de la superstructure qui inclue la silhouette et la dynamique du texte, ainsi qu’au niveau de la linguistique du texte qui comprend l’énonciation , la cohérence interne et la progression sémantique . Enfin, l’élève doit porter son attention au niveau de la linguistique de la phrase qui met en jeu les relations syntaxiques, la gestion des phrases complexes et l’orthographe lexicale. C’est pourquoi des opérations de révision et de réécriture sont à mettre en œuvre au cours et à la fin de la production. L’élève doit ainsi prendre un nouveau point de vue distancié et se mettre à la place du lecteur pour percevoir les incohérences, les imprécisions, les fautes de mise en page et d’orthographe. Cela conduit l’élève à produire plusieurs jets avec à chaque fois des objectifs ciblés. Les élèves ont des compétences et des besoins inégaux dans tous ces domaines. Dans ma classe, je peux constater une plus grande difficulté de la part des élèves dont les parents ne sont pas francophones pour produire des structures de phrases correctes. De plus, certains élèves vivent le syndrome de la page blanche, pour se lancer dans l’écriture, ils ont besoin d’un accompagnement personnel et de la présence du maître. J’ai pu observer que les élèves en difficulté qui se dispersaient devant leurs copies vides étaient beaucoup plus imaginatifs et productifs avec un étayage à chaque étape qui requiert ma présence à leurs côtés ou lors d’activités de rédaction accompagnées du maître E. Le rôle de l’enseignant est donc prépondérant pour accompagner l’élève dans la réalisation des différentes étapes d’écriture. Mais quel est-il exactement ?
Du point de vue de l’enseignant
L’enseignant doit être conscient de toutes les difficultés rencontrées par les élèves. Or, en début d’année, n’ayant pas encore approfondi la question, il me semblait que le simple fait d’écrire des rédactions permettait à l’élève d’entraîner les savoirs vus en cycle 2 et de produire des écrits corrects. Mais, il n’en est rien. L’enseignant doit être conscient des problèmes que pose la situation d’écriture qu’il propose et de la nécessité de construire les outils qui permettront aux élèves de les résoudre. Pour l’entraînement pur, l’enseignant a la possibilité de mettre en place des cahiers d’écriture où les élèves peuvent librement s’exprimer. C’est un outil qui leur appartient et le maître n’y fait nulle correction. Mais lorsqu’il s’agit de situation d’écriture pensée par l’enseignant, ce dernier doit créer des outils pour lui et ses élèves. Les fiches de séquence et de préparation doivent avoir anticipé toutes les difficultés cognitives que peuvent rencontrer les élèves et établir des phases de travail qui les prennent en compte avec un étayage adapté. De plus, l’enseignant peut disposer d’une grille critériée qui servira d’évaluation diagnostique permettant une meilleure différenciation des compétences à travailler ainsi que des attendus pour l’élève concerné. Enfin, une feuille de route peut être fournie à l’élève lui permettant une autonomie dans la production et une auto-évaluation qui favorisera la correction pendant l’écriture, au sein même du premier jet. Ces outils sont indispensables pour amoindrir ou éviter un des principaux écueils de la production d’écrit : une écriture linéaire où l’élève écrit comme il parle.
Pour la création de l’abécédaire papier, face aux difficultés rencontrées par les élèves, j’ai usé d’une remédiation en APC où je les ai accompagnés, par petits groupes, pour construire le court texte demandé. Ce fut mon premier projet d’écriture, lors de la phase de réinvestissement d’une séquence sur l’ordre alphabétique en vocabulaire.
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Table des matières
Introduction
1. Qu’est-ce que la production d’écrits ?
• 1.1. Sa place dans les programmes
1.1.1. La production d’écrit en français
1.1.2. Transversalité de la rédaction
• 1.2. Le rapport de l’élève à la production d’écrit
1.2. Du point de vue de l’élève
1.2.2. Du point de vue de l’enseignant
• 1.3. L’organisation en classe d’un projet d’écriture
2. Un nouvel outil à l’école
• 2.1. Le numérique : un outil d’apprentissage recommandé
2.1.1.Etat des lieux de l’utilisation des TICE à l’école: les enquêtes ministérielles
2.1.2. Les recommandations ministérielles
2.1.3. Le projet d’école
• 2.2.Les différents outils disponibles pour la production d’écrit
2.2.1. Ecrire pour communiquer
2.2.2. Les logiciels d’écriture
• 2.3. Le livre numérique : un projet mené en classe
3. Comparaison des deux supports : du brouillon à l’objet livre
• 3.1. Le projet d’écriture
• 3.2. Du brouillon au texte définitif
3.2.1. Le 1er jet
3.2.2. Corrections et réécriture
• 3.3. L’objet livre
3.3.1. Rendu global
3.3.2. Un livre pour être lu
3.3.3. Traces : les mots et les écrits restent
Conclusion
Bibliographie
Annexes
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