Quels procédés de propagande utilisés dans les manuels scolaire de la Troisième République

Quels procédés de propagande dans les manuels scolaires ?

Cette seconde partie concernera les différentes représentations de l’idéologie républicaine, à savoir, comment les valeurs de la République sont elles représentées, et notamment au sein des manuels scolaires publiés durant cette période.

Méthode d’analyse

Pour cette analyse, il semble plus pertinent de s’intéresser plus particulièrement aux manuels traitant de l’instruction civique et morale ou encore des manuels de leçons de choses dont les contenus sont divers et variés, ce qui laisse plus de place aux auteurs pour y intégrer des éléments de propagande, en effet, il apparait dans les instructions officielles que ce soit cette discipline qui détienne le plus d’importance, traduisant son pouvoir de diffusion des valeurs républicaines. Pour ce faire, il a fallu déterminer par quelle méthode repérer ces signes de propagande dans les manuels. Pour cela, une grille d’analyse s’est avérée nécessaire. Celle-ci a été construite de manière à repérer efficacement l’objectif du manuel, ainsi que les procédés utilisés pour transmettre les valeurs ainsi que l’idéologie républicaine dans les écrits et documents utilisés.
Tout d’abord, il semble pertinent d’effectuer des recherches sur l’auteur du manuel analysé, puisque les convictions de celui-ci peuvent influencer fortement la teneur du manuel. En ce sens, une partie réservée à la présentation de l’auteur figure dans la grille d’analyse. La date de parution est également importante puisqu’elle permet de situer l’ouvrage en rapport avec les instructions officielles qui le précèdent, mais également en rapport avec les lois. A la suite de ces éléments, figure des informations générales sur le manuel, à savoir, la présentation globale de celui-ci, où sont répertoriées les annotations utiles figurant dans l’ouvrage telle qu’une lettre de l’auteur, ou des éditeurs exprimant l’objectif général du manuel. Les thèmes abordés dans le manuel sont également répertoriés puisque ceux-ci témoignent des valeurs développées par les républicains, par le biais des notions abordées. Viennent ensuite les types de documents utilisés dans le manuel ainsi que leur fonction relative au texte. Il est également pertinent de s’intéresser aux images renvoyées par ces documents, notamment si elles font appel à des symboles culturels.
La place de l’élève est également un facteur important à interroger, il est ici question de savoir si l’apprentissage se fait de manière active, où si l’enfant est uniquement passif et reçoit le savoir à maitriser. L’aspect communicatif du manuel reprend ces questions au sein de la grille d’analyse. Les types d’activités dispensées aux élèves sont à mettre en lien avec cette catégorie puisqu’elles sont directement influencées par l’aspect communicationnel de l’ouvrage, en effet, il est important de distinguer les activités d’apprentissage par transmission uniquement, aux activités qui engagent l’action de l’élève, qui peuvent prendre la forme de questions après une lecture, ou encore d’une discussion avec l’instituteur.
Pour cette analyse, nous nous appuierons en parallèle sur l’iconographie présente au sein du manuel puisque l’image est, comme nous l’avons cité précédemment, un outil important de propagande, en ce sens, il est nécessaire de travailler sur la fonction de celle ci dans le manuel, ainsi que sa fréquence par rapport à l’ensemble des thèmes étudiés.
L’axe d’analyse sera centré sur les valeurs dominantes dans l’idéologie républicaine en matière d’instruction, en ce sens, l’analyse sera effectuée par rapport à ces différents axes que sont le patriotisme associé à un désir de revanche contre la Prusse, l’importance de l’instruction dans une société républicaine, la laïcisation des écoles et des contenus d’apprentissages puis enfin le devoir civique associé à la morale citoyenne, et aux connaissances nécessaire pour un citoyen.

Dans les manuels scolaires de la IIIème République

Leçons de choses sous la IIIème République

Les premiers manuels à faire l’objet d’une analyse ont été rédigés par Paul Bert, député républicain de l’Yonne, puis ministre de l’éducation nationale de 1881 à 1882.
L’auteur ayant été un homme très engagé dans la lutte républicaine, au niveau politique notamment, il semble donc pertinent d’en étudier les influences au sein de ses manuels.
Le premier manuel, intitulé Cours élémentaire et moyen. Lectures et Leçons de Choses, publié aux éditions Picard-Bernheim en 1887 a donc été rédigé par Paul Bert. Cet ouvrage constitué de 217 pages vise à enseigner aux élèves, par le biais de textes tournés sous formes de récit de vacances, diverses notions de la vie quotidienne. Les thèmes abordés dans ce manuel sont variés, et appartiennent aussi bien au domaine scientifique, qu’au domaine de l’histoire française, en passant par le devoir civique de tout citoyen deFrance. Ceux-ci sont divisés en trois parties distinctes. Le récit s’organise en 49 « lectures », du départ en vacances jusqu’au retour. Ces « lectures » sont accompagnées de 152 gravures ayant pour fonction d’illustrer les notions abordées.
Par ailleurs, l’aspect communicatif du manuel montre plutôt une démarche transmissive même si les élèves sont à la fois passifs et actifs par rapport aux savoirs apportés. En ce qui concerne les activités où les élèves restent passifs, on peut constater des phases de résumer de lecture à connaître par cœur, alternés par les phases où les élèves sont plutôt acteurs, avec des exercices de questions et de discussions avec l’instituteur.
Néanmoins, ces phases restent très normatives et invitent donc les élèves à formuler des idées qui sont amenées par l’auteur. Les élèves sont donc acteurs dans le sens où les phases d’apprentissages telles qu’elles sont construites dans le manuel leur proposent des activités, mais le caractère très directif de ce manuel place l’apprentissage dans une pédagogie essentiellement transmissive, où le savoir est amené par le manuel ou l’enseignant, laissant peu de place à l’élève pour construire son propre savoir.
Dans ce manuel ayant pour objectif de répondre aux instructions officielles, on constate que de nombreuses lectures répondent directement aux idées promulguées par les républicains. En ce qui concerne la valeur rattachée au patriotisme qui semble très dominante dans les valeurs partagés par les républicains, les notions abordant notamment le devoir civique développent largement ce thème et usent de symboles de l’histoire française pour en transmettre les idées et enjeux. C’est le cas de la lecture IX intitulée « Le vieux soldat », ayant pour objectif de vanter les mérites des soldats français. Les différents procédés utilisés pour renforcer la transmission de ce message aux élèves sont tout d’abord d’insister sur le besoin de vengeance, par des phrases telles que « voilà de braves enfants qui, un jour, vengeront leurs ainés » (p. 41). En parallèle, les illustrations ont pour but de renforcer les idées transmises par le texte. Ainsi, une illustration mettant en scène les Prussiens a pour objectif de donner une opinion très négative de ceux-ci aux élèves.

L’instruction civique sous la IIIème République

Le second manuel a été rédigé par le même auteur mais présente un intérêt particulier en cela qu’il porte sur l’instruction civique et morale. Celle-ci étant au cœur du sujet développé ici, il est donc pertinent d’ajouter son analyse au corps de l’étude. Intitulé
L’instruction civique à l’école : notions fondamentales,ce manuel englobe l’ensemble des thèmes qui nous intéresse. Par ailleurs, il est complété de 76 gravures ayant pour fonction de compléter les notions abordées, on note également la présence minoritaire de cartes. La note des éditeurs précise pour cet ouvrage que l’apprentissage de ces notions doit se faire par lectures successives et non par un apprentissage « par cœur ». Pour autant, il ne propose pas une méthode ou l’élève est au cœur de son apprentissage, car il suggère néanmoins une phase de travail durant laquelle les élèves sont invités à apprendre le résumé des notions de telle sorte qu’il soit « gravé dans la mémoire ». Les exercices proposés sont du même type que ceux du manuel portant sur les leçons de chose du même auteur, à savoir, des questions sur les notions abordées, mais aussi des discussions avec l’instituteur. Néanmoins, le savoir reste acquis de manière transmissive par les élèves, qui ne construisent pas leurs savoirs eux-mêmes. Tout au long de l’ouvrage, les notions et mots à retenir sont typographiés en gras, ce qui les place en reliefs par rapport au reste des écrits et attire l’attention. Il faut d’ailleurs constater que les mots ainsi typographiés reflètent au maximum les idées républicaines, ainsi, peuvent être observées des phrases telles que « qui insulte ta patrie, insulte ta mère ». Ces mots sont également répétés à de nombreuses reprises pour en assurer l’apprentissage.
En ce qui concerne les thèmes abordés, ceux-ci s’inscrivent directement dans l’idéologie des républicains, ainsi peut-on voir dans la table des matières des sujets portant sur le service militaire, l’impôt, la justice, la législation de l’Eta t, la Révolution et également la liberté, l’égalité et la fraternité. Les titres en eux-mêmes sont assez transparents et laissent apercevoir les idées développées au sein de ce manuel comme étant directement inspirés de l’idéologie républicaine. Ce manuel vise donc à enseigner les droits et devoirs de tout bon citoyen républicain, conformément aux instructions officielles qui, comme cité précédemment, recommande en premier lieu aux instituteurs d’organiser une leçon d’instruction civique chaque jour.
Le patriotisme est donc évoqué de manière non négligeable au sein de ce manuel, il est d’ailleurs placé dès le début de l’ouvrage, ce qui lui donne une importance particulière.
Effectivement, le premier thème abordé dans le manuel est celui du service militaire. Une fois encore le devoir du citoyen est celui de participer à l’effort de guerre, néanmoins, ce chapitre ajoute à cette idée que tout homme en ayant l’âge se doit de participer, y compris les hommes assez riches pour s’acheter un remplaçant. Cela reprend l’idée d’égalité entre tous les citoyens défendue par les républicains. Il est d’ailleurs rappelé que c’est la « République », par le biais de « l’assemblée nationale » (pages 12, 13) qui a mis fin à cette pratique de remplacement. Par le biais de cet apprentissage, l’auteur fait ici l’apologie de la République et de son gouvernement. La réforme est présentée comme une humiliation, y compris pour les instituteurs. Une fois encore les gravures sont présentent pour compléter les notions abordées dans les écrits.
Il est important de constater les symboles républicains contenus dans celles-ci, tels que le buste de Marianne, représenté dans la gravure intitulée « Le tirage au sort ». Le sentiment de patriotisme est donc fortement suscité dans les premiers chapitres de l’ouvrage, néanmoins, afin de minimiser l’aspect guerrier, le chapitre suivant met en comparaison la politique de Napoléon III, présenté comme responsable de la défaite de 1870 et de la perte de territoire français, avec la politique des républicains où la guerre ne peut être décidée que par la Chambre de députés et le Sénat. La République est donc présentée comme le système politique du peuple, raisonné et réfléchi. Le développement d’un sentiment nationaliste étant souhaité, les chapitres suivants concernent l’amour de sa patrie, et usent de nombreux mots et phrases typographiés en gras, dont le message percutant vise à développer chez les élèves la fierté de leur pays, le devoir et l’envie de le défendre, dans l’éventualité d’une revanche contre les Prussiens. Les gravures sont nombreuses dans ces chapitres, elles sont donc un outil largement utilisé pour transmettre l’idéologie républicaine.
L’instruction des citoyens étant importante selon les républicains, afin de permettre à ceux-ci un vote intelligent, les chapitres suivants sont destinés à instruire les élèves sur le fonctionnement de l’administration française. Encore une fois, les écrits visent à légitimer les réformes républicaines, en cela, sont abordées des notions sur les impôts, la justice et le découpage de la France. La comparaison avec le régime précédent est encore une fois utilisée pour donner une vision positive de la République, ainsi, pour justifier l’impôt, l’auteur démontre que celui-ci est utile pour permettre aux nombreux soldats de se nourrir sans « menacer » ou « maltraiter » les populations comme c’était le cas auparavant, en ce sens, les citoyens se doivent d’être satisfaits de payer un impôt à la République. De nombreux chapitres sont ainsi au service de la République pour en faire l’éloge, par le biais d’une comparaison avec les autres régimes politiques, tels que la Monarchie ou l’Empire, comme c’est le cas de la leçon X, qui met au jour les divergences entre les différents régimes pour en faire ressortir les côtés négatifs en opposition aux avantages d’une République.
Dans le chapitre suivant, intitulé « Liberté – Egalité – Fraternité », l’auteur y expose la devise républicaine et profite de ces leçons sur le devoir civique de chacun pour transmettre aux élèves l’idéologie républicaine, ainsi, des lectures sont organisées autour de chaque terme de la devise. Encore une fois, afin d’illustrer le bienfondé de la République, la devise est mise en opposition avec le régime de Napoléon III, qualifié de despotique. Les lectures sont donc organisées autour de la devise républicaine et en explique les enjeux aux enfants en faisant apparaitre les valeurs et l’idéologie républicaine.
En ce sens, l’auteur vise essentiellement à faire l’apologie de la République en exposant les droits et devoir de tout bon citoyen. Ces propos sont appuyés par des illustrations, légendées de titres au caractère explicite, et reprenant les idées du texte qui les accompagne.

Résultats

L’étude de ces manuels a permis de distinguer divers procédés auxquels ont eu recours les auteurs afin de promouvoir l’idéologie républicaine dans leurs manuels. Tout d’abord, il faut noter que la substance même des écrits a pour but de transmettre des apprentissages fondés sur les valeurs républicaines, la subjectivité des écrits est très fortement visible au travers des valeurs véhiculées dans les propos des auteurs. Il s’agit donc là du premier procédé, utilisé de manière importante par les auteurs. Il est également appuyé par d’autres procédés, plus minimes, mais dont l’impact n’est pas négligeable
 Notions abordées : les notions que les auteurs décident d’aborder dans leurs ouvrages ne sont pas neutres, elles correspondent à une volonté politique de promouvoir des valeurs, ainsi que d’en imposer la légitimité.
 L’iconographie : en très grand nombre dans les manuels de primaire, elle a pour fonction de compléter les notions véhiculées par les écrits, par le recours à des images simples, légendées par des titres non équivoques. Les exemples intégrés au corps du dossier démontrent l’usage de symbole caricaturant, ainsi que de symboles culturels valorisant pour la France, comme celui de Jeanne D’arc.
 Typographie particulière : dans le second ouvrage, de nombreux mots, expressions ou phrases ont été typographié en gras afin d’attirer l’attention de manière plus importante par rapport au reste du texte. Ces mots, expressions ou phrases sont en général les idées fortes de l’idéologie républicaine, et permettent donc de les imprimer dans la mémoire des élèves.
 Mise en opposition avec les anciens régimes politiques ou monarchiques : dans chaque manuel analysé, l’auteur aborde le Second Empire, ou la Monarchie Absolue afin d’en dépeindre le despotisme envers le peuple.
Opposée à ceux-ci, la République est associée par les auteurs au régime du peuple, le seul qui lui permette d’exprimer son opinion, de jouir d’une liberté, d’une égalité entre tous les citoyens etc. Cela permet de dresser un tableau trèspositif de la République, et ainsi, de légitimer son pouvoir politique.
 Insister sur le besoin de revanche contre la Prusse : les manuels font de la défaite de 1870 une humiliation pour les français, et développent ainsi un patriotisme élevé dans la population, relié à l’obligation de participer au service militaire et à l’effort de guerre.
 Méthode essentiellement transmissive : les élèves se contentent de recevoir le savoir qui leur est fourni et ne le construisent pas par eux même.
L’analyse de manuels de la Troisième République a donc permis de mettre au jour différents procédés de propagande républicaine, cette propagande, assez explicite s’explique par la mise en place difficile du régime, qui dura plusieurs années avant de s’affirmer réellement en tant que telle. Pour ce faire, un travail a du être réaliser avec la population française, afin de donner une bonne image de ce régime, par le biais d’une transmission des valeurs républicaine, pour lesquelles les manuels d’école ont joué un rôle fondamental.
Il est également intéressant de transposer ce travail d’analyse aux manuels actuels, afin de savoir par quels procédés sont actuellement transmises les valeurs de la Cinquième République, établie depuis le 4 octobre 1958. Si la République est installée depuis longtemps en France lorsque celle-ci est proclamée, il n’en reste pas moins que l’idéologie républicaine se doit d’être transmise au peuple français. Les manuels scolaires étant aujourd’hui encore l’outil principal des enseignants dans les classes de primaire, il est donc pertinent d’étudier ceux-ci pour voir l’évolution des procédés de propagandes utilisés actuellement.

La République dans le cadre scolaire d’aujourd’hui ?

Cette partie a donc pour objectif d’effectuer une comparaison entre les procédés utilisés lors de la Troisième République au sein des manuels scolaires, et ceux utilisés dans les manuels actuels, répondant aux programmes officiels de 2008 et parfois encore de 2002. Il sera donc question d’une analyse de ces programmes, complétée par une analyse de manuels actuellement utilisés dans les classes d’école primaire, puis, d’une comparaison avec les manuels datant de la Troisième République.

Dans les programmes du 14 Février 2002 et du 19 Juin 2008

Dans les programmes officiels pour l’école primaire, parus le 14 Février 2002, il n’est pas question d’instruction civique en maternelle, mais elle apparait au sein du domaine « Vivre ensemble », néanmoins, celui-ci n’est pas centré sur le civisme, mais plus sur le développement de l’enfant, au milieu d’une collectivité telle que la classe, même si le respect des règles est abordé, c’est dans une optique de coopération avec les autre, plus que dans une optique citoyenne. Pour le cycle 2, on ne parle toujours pas de civisme ou decitoyenneté, mais on reste dans la discipline du « Vivre ensemble » organisé en un débat hebdomadaire réalisé en classe. Les élèves abordent les questions des valeurs républicaines, ainsi que les symboles de la République, l’ensemble des notions reste centré sur la citoyenneté et la vie de famille, et en société. L’éducation civique en tant que telle n’est abordée qu’à partir du cycle 3, et s’organise en leçons, complétées par un débat hebdomadaire. L’éducation civique n’est pas centrée ici sur la République et les valeurs républicaines, mais plus sur la citoyenneté et ce qu’elle implique. Cet enseignement a pour objectifs de former des citoyens, tournés vers l’ouverture au monde, et non centré sur la France uniquement. Il est à remarquer également que l’enseignement de la morale a disparu des contenus d’enseignement, puisqu’elle ne figure dans aucun des thèmes abordés par les instructions officielles. En cela, les programmes de 2002 marquent une différence importante avec ceux de 1882.
Les programmes parus le 18 Juin 2008 diffèrent largement de ceux de 2002. Tout d’abord, l’intitulé de l’enseignement centré sur les valeurs citoyennes et morales est identique à celui évoqué dans les programmes du 27 Juillet 1882, ainsi, l’éducation civiqueredevient l’instruction civique et morale, et la morale retrouve sa place au sein des contenus d’enseignements primaires. Néanmoins, la place qui est attribuée à l’éducation civique et morale est différente de celle qui les est donnée dans les instructions officielles de la Troisième République. Effectivement, si dans les programmes de 1882, l’instruction civique et morale occupe une place essentielle, puisqu’elle occupe la première place dans l’ensemble des enseignements, la place qui lui est assignée dans les programmes de 2008 est moindre, relayée derrière les disciplines telles que l’apprentissage du français, ou des mathématiques. Il semblerait donc que le besoin d’instaurer les valeurs de la République soit moins grand que lors de la Troisième République, ceci s’expliquant par l’acceptation du régime politique républicain par le peuple français, puisque la République est installée de manière durable et stable depuis la Troisième République. En ce sens, il semblerait que la nécessité de légitimer le régime républicain soit minorée par rapport aux besoins éprouvés par celle-ci en 1882.
Les contenus de cet enseignement révèlent tout de même des thèmes ayant une certaine importance puisqu’ils constituent un travail progressif mis en place tout au long del’école primaire :
• Au sein de l’école maternelle, l’instruction civique, représentée par le domaine du « devenir élève », vise à amener l’élève à vivre avec les autres en acceptant les règles de vie en société, tout en adoptant un comportement conforme à la morale. Il s’agit de prêter une attention particulière aux fondements moraux, à savoir, le respect de la personne et des biens d’autrui, mais également l’obligation de se conformer aux règles dictées par les adultes. L’accent est donc porté sur la morale, qui occupe une place importante dans les apprentissages des élèves en maternelle.
Ce domaine est travaillé par le biais d’activités collectives, telles que les jeux collectifs, mais aussi dans certaines écoles, lors d’ateliers philosophiques où les élèves sont invités à débattre sur ce qui leur est permis de faire ou non, au sein de l’école, de leur famille etc.
• Au cycle 2, le domaine du « devenir élève » laisse sa place à la discipline intitulée « instruction civique et morale ». Il est alors question d’aborder les règles de politesse et de comportements en société. Les élèves abordent plus précisément les principes de la morale travaillés sous forme de maximes illustrées. Les règles de la vie collectives sont travaillée à l’échelle de la classe, par le biais d’un règlement de classe à respecter, faisant apparaitre les notions de droits et devoirs. Enfin, un nouveau thème apparait, puisque les élèves ont également à reconnaitre et à respecter les emblèmes et symboles de la République, à savoir, le drapeau, le buste de Marianne, la Marseillaise, et ladevise républicaine « Liberté, Egalité, Fraternité ».
• Au cycle 3, les contenus restent sensiblement identiques à ceux abordés au cycle 2, mais subissent un approfondissement. Néanmoins, il est à noter que la notion de liberté est abordée, ainsi que les valeurs républicaines telles que l’égalité, la tolérance, ainsi que le respect d’autrui. Les symboles et emblèmes de la République française sont à connaitre, en y incluant les textes fondateurs de celle-ci, notamment la Déclaration des Droits de l’Homme et du Citoyen.
Il est donc intéressant de constater que si le contenu d’enseignement a évolué d’une façon importante, il reste néanmoins des similitudes quant aux valeurs à transmettre aux élèves. En ce sens, il semble pertinent d’effectuer une étude comparative des procédés utilisés dans les manuels scolaire, visant à inculquer ces valeurs aux élèves, afin d’en voir l’évolution.

Dans les manuels scolaires 

Instruction civique et morale en 2011

Les manuels soumis à une analyse concernent donc l’enseignement de l’instruction civique. La grille d’analyse utilisée sera identique à celle utilisée pour analyser les manuels datant de la Troisième République, afin de pouvoir effectuer une comparaison par la suite, qui soit aussi objective que possible.
Le premier manuel à être analysé est intitulé Instruction civique et morale, et a été rédigé par Chantal Delsol, appartenant à l’académie des sciences morales et politiques.
L’ouvrage publié en 2011, répond donc aux instructions officielles de 2008, et en cela, répond aux exigences de celles-ci. L’ouvrage est complété de divers types de documents, essentiellement des illustrations réalisées pour le manuel, qui ne sont pas extraites d’autres documents, mais également quelques photographies, ainsi que des cartes. Le manuel s’organise en lectures, suivies de questions, d’explication de vocabulaire, et d’éléments à retenir, comme l’indique le titre donné à cette phase : « retenez ». L’aspect communicatif de l’ouvrage est donc peu développé, puisque les activités sont essentiellement centrées sur la lecture, puis sur l’apprentissage de notions suite à des discussions. Les textes abordés appartiennent pour certains au répertoire français de poésie, comme les Fables de Lafontaine, en ce sens, on peut dire que l’auteure met l’accent sur l’aspect culturel pour organiser ses activités.
Le thème du patriotisme est repris dans l’ouvrage, il est donc encore d’actualité même s’il n’est pas étudié sous ce nom. Le chapitre « mon pays » aborde les sujets liés au patriotisme, en utilisant un poème de Victor Hugo, Les châtiments, de 1853 comme base de départ pour a leçon. Par le biais de ce poème, l’auteure dépeint une image négative de Napoléon III, décrit comme un dictateur avec la phrase suivante : « Victor Hugo a été exilé de France par Napoléon III parce qu’il avait écrit des propos injurieux à son propos ».
Néanmoins, les termes utilisés restent objectifs. Le sujet de la guerre est également approché, le texte suivant évoque les Spahis, présentés comme le symbole du patriotisme des colonies françaises. Ce texte est suivi d’une leçon, ou les expressions à retenir sont typographiées en gras, dans le but de les faire ressortir du texte. La phase « retenez » qui suit la leçon est alors constituée de ces expressions. Enfin, des maximes invitent à discuter autour des notions abordées dans ce texte. Ce chapitre est complété par une illustration, néanmoins, celle-ci reste neutre, puisqu’elle représente uniquement un petit village de France, l’iconographie n’a donc pas pour fonction ici de compléter les textes, mais simplement des les accompagner pour rendre le manuel plus ludique aux yeux des élèves.
Les valeurs républicaines sont abordées, à savoir, la liberté, l’égalité et la fraternité.
Pour chaque terme de la devise républicaine, un chapitre est rédigé, et explique les enjeux de chacun, la démarche reste la même pour chaque chapitre, c’est-à-dire, un poème suivi d’un extrait de roman traitant du thème souhaité, complété par une leçon et des expressions à retenir, ces expressions étant typographiées en gras dans le corps de la leçon. A ces valeurs se rajoutent l’apprentissage des emblèmes et symbole de la République : le drapeau, la Marseillaise, le buste de Marianne, le coq français, représentés par des photographies. On remarque que les photographies sont employées uniquement lorsqu’il s’agit de montrer les symboles de la République, alors que le reste de l’ouvrage est accompagné d’illustrations neutres. En cela, on peut constater que la photographie a pour fonction de montrer une forme de réalité de la République avec des représentations que les élèves connaissent bien, pour pallier le caractère abstrait de ce concept, aux yeux des élèves. Celle-ci est décrite comme le régime politique du peuple, en y associant desphotographiesde carte électorales et de citoyens allant voter.
L’auteure use donc de différents procédés pour transmettre les valeurs républicaines aux élèves, tout d’abord, la présence d’expressions à retenir qui sont constituées de sortes de slogans républicains, ceci amplifié par l’usage du caractère gras pour donner un caractère particulier à ces expressions. On peut aussi constater que l’auteure oppose les régimes totalitaristes avec l’exemple de Napoléon III, à celui de la République qui représente le choix des citoyens.

Education à la citoyenneté en 2008

Le second manuel, visant également l’apprentissage de l’instruction civique au cycle 3 développe une démarche quelque peu différente qu’il semble intéressant d’analyser. Ce manuel a été rédigé par Sophie Le Callennec, historienne et anthropologue spécialiste de l’Afrique Subsaharienne. L’ouvrage s’intitule Education à la Citoyenneté, et est publié en 2008, néanmoins, ayant été publié quelques mois avant les programmes officiels de 2008, celui-ci répond donc aux instructions officielles datant de 2002, mais reste néanmoins utilisé dans les classes de primaire, en ce sens, il me semble pertinent d’en analyser la démarche, tout en la comparant au premier manuel pour voir l’évolution des priorités en matière d’instruction civique entre 2008 et 2011, années de publication des deux manuels. Dans un premier temps, on peut remarquer que l’intitulé de l’enseignement a varié entre les deux périodes, passant de « l’éducation à le citoyenneté » en 2002, à « l’instruction civique et morale » en 2008, la morale est donc reprise dans les instructions officielles de 2008, alors qu’elle ne constituait pas une priorité en 2002. Les thèmes abordés dans cet ouvrage en sont la preuve puisqu’il n’est aucunement question de morale dans ce manuel. La priorité semble en effet être l’éducation à la citoyenneté, celle-ci étantabordée dans trois parties, sur les cinq qui constituent l’ouvrage.
Il est également important de noter que le thème du patriotisme reste absent dans le développement du manuel, en effet, s’il est question des valeurs républicaines telles que la liberté, l’égalité, la fraternité, le refus des discriminations, la laïcité, il n’est pas fait référence au patriotisme. Il semble là que ce soit une différence fondamentale par rapport aux autres ouvrages, pour lesquels il restait un thème important. L’aspect communicatif du manuel est également différent. L’auteur propose de nombreuses activités aux élèves, dont la diversité est intéressante, il est question ici de débats menés dans la classe, dedescriptions de document, de dossiers thématiques que l’élève a pour rôle d’analyser.
Même si le manuel propose des lectures, la proportion entre les documents et les textes à lire semble égale, ce qui en fait un ouvrage plus vivant, et qui permet aux élèves de faire d’autres activités que l’activité de lecture seule. De plus, une base de réflexion est proposéeaux élèves, qui sont donc acteurs de leurs savoirs, par le biais de recherches à effectuer. En cela, l’ouvrage publié en 2008 se distingue fortement de l’ouvrage publié en 2011. Par ailleurs, l’auteure a recourt à beaucoup références culturelles, afin de rendre l’ouvrage plus ludique pour les élèves, ainsi, divers documents représentent des objets ou encore des divertissements bien connus de tous, tels que des extraits de Boule et Bill ou encore Astérix. La présence de tels documents permet d’ailleurs une grande diversité de ceux-ci : photographies, illustrations, cartes, tableaux, peinture, extraits de bande dessinée etc.
L’usage d’une telle diversité de document laisse une grande place à l’image dans la transmission des valeurs républicaines. Afin de transmettre ces valeurs, il est question, comme dans l’autre manuel, d’un apprentissage des symboles et emblèmes républicains,néanmoins, le mode de transmission est différent, puisque c’est l’élève qui va chercher les informations.

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Table des matières
Introduction
I. Le catéchisme républicain 
a. L’implantation difficile de la Troisième République
b. Les valeurs rattachées à cette République
c. Dans les lois et Instructions Officielles
II. Quels procédés de propagande utilisés dans les manuels scolaire de la Troisième République
a. Méthode d’analyse
b. Dans les manuels de la Troisième République
1. Leçons de choses
2. Instruction civique
3. Morale
c. Résultats
III. Evolution actuelle 
a. Dans les programmes (2002, 2008, 2012)
b. Analyse de manuels
1. Instruction civique et morale en 2011
2. Education à la citoyenneté en 2008
c. Etude comparative avec les manuels de la Troisième République
Conclusion 
Bibliographie

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