Le père
Qu’est-ce que le père ?
Définition
Le mot père vient du latin « pater » qui signifie « ancêtre » ou « fondateur », mais peut avoir plusieurs sens. Au sens littéraire, le père est « l’homme qui a engendré ou qui a adopté un ou plusieurs enfants », « homme qui agit en père ». D’un point de vue juridique, il est « l’homme ayant autorité reconnue pour élever un, des enfants au sein de la cellule familiale qu’il les ait ou non engendrés » .
Le père n’est pas forcément celui qui fait un enfant à une femme, il peut être aux côtés de la femme et de l’enfant à naître tout en l’élevant et participant à son éducation sans pour autant être son géniteur, il peut être père adoptant ou non. Il est donc important de comprendre la différence entre le père et le géniteur. Selon le dictionnaire Larousse, (2) le géniteur ou génitrice vient du latin « genitor », signifiant « personne qui engendre quelqu’un, son père ou sa mère », « le père ou la mère physiologique, par opposition au père ou à la mère légal. » De ce fait, le géniteur, propre à la reproduction peut, dans certains modèles familiaux être une personne différente du père, où cette dernière « est une fonction qui se réfère au réel, ce n’est pas forcément le vrai du réel » (3). Signifiant ainsi, qu’il n’est pas le fondateur, la personne ayant engendrée cet enfant, mais celui présent dans le monde réel, à ses côtés.
Afin de définir au mieux qui est le père, il nous paraît légitime d’évoquer la notion de filiation. Cette dernière est définie au sens littéraire par « un lien de parenté unissant un être humain à ses ascendants, unissant un enfant à son père ou sa mère » (4). Comme nous allons le voir, c’est ce lien juridique qui sera fondateur de la parenté. Elle appartient au domaine du droit et pour cela, la filiation produit deux effets, (5) un « lien familial qui crée des droits et des devoirs réciproques entre parents et enfants ». C’est également ce qui permet d’identifier chaque individu pour pouvoir l’insérer dans le « maillage » de la parenté afin de lui donner sa propre place dans la société. Autrefois, la filiation était établie selon deux modes (6), la filiation légitime, liée au mariage ou la filiation naturelle, lorsque la naissance avait lieu en dehors du mariage. Or, depuis le 4 juillet 2005, ces deux modes de filiation ont été abrogés afin de laisser place à une filiation pouvant s’établir de quatre manières différentes .
Nous retrouvons, la filiation par l’effet de la loi via l’inscription de la naissance sur les registres de l’état civil. La filiation maternelle (8) s’effectue par la désignation de la mère dans l’acte de naissance (9). La filiation paternelle s’établit à l’égard du mari (10), lorsque l’enfant est né ou a été conçu pendant le mariage. Deuxièmement, la filiation s’effectue par la reconnaissance, dans l’hypothèse où les parents ne sont pas mariés (11). La filiation par la possession d’état a lieu lorsqu’un enfant ne bénéficie pas de la présomption de paternité et n’a pas été reconnu par son père. Enfin, la filiation par jugement a lieu lorsque le père de l’enfant refuse de le reconnaître.
Que signifie la paternité ?
Définition
La paternité vient du bas latin « paternitas ; -atis » qui se définit par le fait « d’être père », « état, qualité de père ». Elle signifie « le lien juridique qui unit le père à son enfant » (12). La paternité est un rôle social possédant à la fois une base biologique et culturelle. Même si elle est fondée sur un acte biologique qui est la procréation, elle est davantage sociale, nous parlons même « d’intervention sociale ». Aujourd’hui, nous souhaitons permettre aux pères de trouver leur juste place, celle que les couples souhaitent afin de « faire de ce moment fondateur une expérience unique et partagée » .
Évolution de la paternité
L’évolution de la paternité à travers le temps a été lente. Pendant de nombreux siècles, le père, s’il voulait bien l’être, n’était qu’autorité et puissance. Ce n’est qu’à partir de l’époque contemporaine, que son statut change, évolue pour devenir aujourd’hui, les pères que nous connaissons, ceux que nous appelons les « nouveaux pères », ceux qui ont la possibilité d’exprimer leurs sentiments concernant leurs enfants et qui s’investissent au sein de leur unité familiale.
Au cours de l’antiquité et plus particulièrement de la période romaine, le père incarne une figure de pouvoir, de toute puissance, appelée le « Pater familias », signifiant « le père de famille ». Il est le maître et juge de son enfant, il a le pouvoir de vie ou de mort sur ses enfants, ses femmes et esclaves. En réalité, les hommes sont « paters » et ne deviennent « paters familias » qu’après le décès de leur père à moins d’être émancipés (14). Le pouvoir de l’homme romain est considéré comme une référence universelle. La base juridique de la paternité repose sur la volonté de l’homme à vouloir être père. La paternité est vue comme une sorte d’adoption libre, la filiation entre le père et son enfant est avant tout volontaire, ainsi, n’est père, que celui qui se déclare comme tel (15). L’homme a tout à fait le droit de rejeter ses propres enfants et d’adopter d’autres fils qu’il n’a pas engendré (14). Lors d’un divorce, l’enfant reconnu par le « pater familias » reste la possession du père. Comme le stipule Jean Le Camus « l’évidence de la paternité se fonde sur la seule décision du père » (16). Nous pouvons alors conclure qu’à cette période, le « pater familias » ne devient pas père parce qu’il a engendré, mais parce qu’il a reconnu l’enfant lors de ce rituel où il le soulève du sol comme pour le faire naître une seconde fois. C’est alors la décision du père qui va déterminer la paternité.
Un nouveau système familial voit le jour, celui reposant sur la fidélité. Elle est définie par « le fait, pour un conjoint, un partenaire amoureux, d’être fidèle à l’autre, et, en particulier, de ne pas commettre d’adultère » (17). L’Antiquité voit alors apparaître deux figures paternelles opposées, le « pater familias » et le «père chrétien ». Ce dernier sous-entend que le seul créateur de ses «progénitures » venant au monde est Dieu, ainsi ses pouvoirs de père sont limités, contrairement au père Romain qui détient le pouvoir de toute puissance de vie ou de mort sur ses enfants.
Au Moyen-Âge, les familles sont nombreuses, le père ne s’occupe pas de l’éducation, la femme est seule dans ce rôle. Le nombre de mariages augmente car seul le père légitime, est l’homme étant marié à la femme. Puis, à partir du XIIème – XIIIème siècles, seul l’état de mariage peut légitimer la copulation. Le mariage devient ainsi la seule façon pour l’homme de pouvoir accéder à la paternité, c’est « la clef de voûte de l’édifice social, le pilier central », tout en sachant qu’à cette période dite Féodale, la paternité est une volonté de Dieu (14). Le père moyenâgeux ne possède jamais la certitude d’être le géniteur de l’enfant puisqu’à cette époque aucune méthode ne permet d’établir de preuves. Ainsi, l’homme mérite le statut de père s’il dispense une éducation chrétienne à son enfant (15). Au cours de la Renaissance, période marquant la fin du Moyen-Âge, les contacts corporels entre un père et son nouveau-né ne sont pas tolérés. Le père se tient toujours à une distance physique de la naissance mais n’est pas dépourvu de tendresse et d’affection. C’est à l’époque du Moyen-Âge que la paternité est vue pour la toute première fois comme éducative.
L’époque moderne, du XVIème au XVIIIème siècles, est nommée par les historiens comme l’âge d’or des pères. L’autorité paternelle est toute puissante, elle permet d’assurer le niveau de vie et l’éducation de l’enfant, de maintenir une unité familiale. Le père ne « pouponne » pas, il n’aide pas à enfanter, il possède d’importants droits et devoirs. Les échanges père-fils se réalisent seulement lors des rapports au travail ou à l’apprentissage .
Une évolution importante au fil des siècles de la paternité et de ses responsabilités, est marquée au cours de la période contemporaine. L’autorité paternelle commence fortement à être critiquée. Le père montre une volonté de s’occuper de son enfant, après la petite enfance, lorsqu’il atteint l’âge de raison, vers sept ans (14). Au XIXème siècle, l’homme est à la « tête de la famille », responsable de l’argent. Sa femme s’occupe des enfants, de leurs soins et de leur éducation. La famille reste sous la protection de l’homme. En 1960-1970, nous assistons à la période appelée « le baby-boom », où le taux de natalité est en augmentation importante (15). A cette même période a lieu un changement historique avec la disparition de la puissance paternelle au profit de l’autorité parentale. En 1980, le salaire unique, celui que l’homme apporte au foyer n’est plus suffisant pour subvenir aux besoins d’une famille de classe dite moyenne. Les femmes qui étaient jusqu’alors des « femmes au foyer », sans revenu, vont apparaître dans le monde du travail et obtenir un salaire afin de soutenir le père à subvenir aux besoins familiaux. A ce moment-là, la paternité s’est radicalement transformée et les « nouveaux pères » apparaissent comme affectueux, présents pour leurs enfants, investis dans leurs soins et leur éducation .
Actuellement, la femme a acquis de nombreux pouvoirs et rôles, elle n’est plus seule à élever les enfants, le père est « son adjoint éducatif ». Il s’est associé à la mère et n’est plus le seul responsable de l’éducation et de l’autorité des enfants. Nous constatons que la position patriarcale du père de l’ancien régime est oubliée et remplacée par une reconnaissance juridique de l’égalité parentale. De nombreuses avancées médicotechniques permettent de certifier la paternité d’un homme sur un enfant grâce à « l’empreinte génétique ». Nous pouvons conclure, que les pères du XXIème siècle souhaitent vivre avec l’enfant quelle que soit la composition familiale et pouvoir participer à leur éducation. Les hommes d’aujourd’hui ne veulent plus, pour la majorité, d’enfants pour « assurer une lignée» ou « transmettre un patrimoine génétique » mais pour pouvoir vivre l’expérience de la paternité tout en établissant des relations affectives avec l’enfant .
|
Table des matières
Introduction
1 Revue de la littérature
1.1 Le père
1.1.1 Qu’est-ce que le père ?
1.1.1.1 Définition
1.1.1.2 Que signifie la paternité ?
1.1.1.2.1 Définition
1.1.1.2.2 Évolution de la paternité
1.1.1.2.3 Devenir père
1.1.2 Rôles et fonctions du père
1.1.2.1 Droits et devoirs du père
1.1.2.1.1 L’autorité parentale
1.1.2.1.2 Les droits de congés dont bénéficient l’homme en devenant père
1.1.2.2 Les fonctions du père
1.1.2.3 Les rôles du père sur le développement psychologique et comportemental de l’enfant
1.2 La présence des pères à la naissance
1.2.1 Les accouchements avant la création des salles de naissances
1.2.2 Les salles de naissances
1.2.3 Évolution de la place du père en salles de naissances
1.2.3.1 Historique de la place des pères en salles de naissances
1.2.3.2 Accès des pères au bloc opératoire
1.2.3.3 L’entretien prénatal précoce (EPP)
1.2.3.4 Le projet de naissance
1.2.3.5 Comportement des pères en salles de naissances
1.2.3.6 Présence du père à la naissance lors de l’épidémie de COVID-19
1.2.4 Impact de la présence du père pour la femme
1.2.5 Lien père – nouveau-né en salles de naissances
1.3 La relation père – sage-femme
1.3.1 Les compétences de la sage-femme
1.3.2 La sage-femme aux côtés de la femme, du nouveau-né mais aussi du père
1.4 Le vécu du père
1.4.1 Impact sur la sexualité
1.4.2 Impact psychologique
2 Matériel et méthode
2.1 Problématique et hypothèses
2.2 Objectifs de l’étude
2.3 Type d’étude
2.4 Population étudiée
2.5 Critères d’exclusion
2.6 Faisabilité de l’étude
2.7 Outils employés
2.8 Mise en œuvre de l’étude
2.8.1 Les autorisations nécessaires
2.8.2 Test de l’outil et période de l’étude
3 Résultats
3.1 Caractéristiques de la population étudiée
3.1.1 L’âge des pères interrogés
3.1.2 Primi ou multi paternité
3.1.3 Catégories professionnelles
3.1.4 Statut marital
3.2 Concernant la/ les grossesses précédentes
3.2.1 Voie d’accouchement
3.2.2 Vécu des naissances passées
3.2.3 Impact de la présence des pères aux accouchements passés
3.2.4 Reprise des rapports sexuels après l’accouchement
3.2.5 Suivi psychologique après l’accouchement
3.3 La grossesse actuelle
3.3.1 La préparation à la naissance et à la parentalité
3.3.2 L’entretien prénatal précoce
3.3.3 Le projet de naissance
3.3.4 Information donnée sur les éventuelles urgences de l’accouchement
3.3.5 Devenir père
3.4 La présence des pères en salle de naissance
3.4.1 Gestion de la douleur
3.4.2 Transmission des informations
3.5 L’accouchement
3.5.1 Présence en salle de naissance
3.5.2 L’accouchement et la naissance
3.6 La césarienne
3.7 Rencontre des pères avec leur(s) nouveau-né(s)
3.8 L’accompagnement par la sage-femme
3.9 Ressenti global des pères sur la naissance
4 Discussion
4.1 Devenir père
4.2 La présence des pères à la naissance
4.2.1 Évolution de la place du père en salle de naissance
4.2.2 Accompagnement pendant la grossesse
4.2.2.1 L’entretien prénatal précoce
4.2.2.2 La préparation à la naissance et à la parentalité
4.2.2.3 Le projet de naissance
4.2.3 Accès des pères au bloc opératoire
4.2.4 Comportement des pères en salle de naissance
4.3 Lien père – nouveau-né
4.4 La relation père – sage-femme
4.5 Le vécu des pères
4.6 L’impact sur la sexualité
4.7 L’impact psychologique
4.8 Réponses aux hypothèses
4.9 Forces de l’étude, biais et problèmes rencontrés
4.10 Les propositions d’actions
5 Conclusion