Quand les travailleurs du développement font de la politique : les transformations des discours et pratiques du « paradigme du développement »

Les incidences du terrain

Mes recherches de terrain se sont déroulées en deux temps : un premier séjour de janvier à juillet 2011, au cours duquel j’ai effectué un stage au sein de la fondation Heifer Ecuador qui fut l’occasion d’exercer pleinement la méthode de l’observation participante dite « souterraine », aucune personne de l’organisation n’étant au courant de mes intentions de recherche. En revanche, à la fin de ce stage, j’ai exprimé ma volonté de réaliser une étude sur les interactions entre ONG et organisations paysannes et de revenir faire des recherches l’année suivante. Mon deuxième voyage (mars et avril 2012) a donc été un séjour de recherche officialisé par une convention d’accueil avec la FLACSO Ecuador, entièrement consacré à la réalisation d’entretiens avec des salariés de l’ONG et des membres des organisations paysannes avec lesquelles j’avais travaillé. La première phase de mon terrain se caractérise par un degré d’implication élevé, à temps plein, dans les activités de l’ONG et des organisations paysannes. Une immersion totale dans le monde du développement rural, pendant laquelle ma participation a prévalu sur l’observation. De retour en France, un long travail réflexif de mise à distance m’a permis de développer une capacité d’analyse sur les évènements vécus. C’est donc avec des questions de recherche formulées que je me suis lancée dans la deuxième phase de mon terrain, non sans une certaine appréhension quan t au nouveau type de relation qui allait s’établir avec mes « anciens collègues ». L’accueil de la FLACSO Ecuador m’a permis d’avoir accès à un fond documentaire riche. Les rencontres et discussions avec les chercheurs de cette institution ont également nourri ma réflexion.
Cette double entrée dans le terrain de recherche présente ses avantages et ses inconvénients.
C’est d’abord un atout indéniable car l’immersion au cœur des projets de développement m’a donné accès à des informations impossibles à obtenir d’une autre manière, qu’il s’agisse de documents internes, de débats internes à Heifer Ecuador, de conversations officieuses avec les équipes de terrain ou avec les dirigeants des organisations paysannes. Par ailleurs, comme le souligne Betty Espinosa, « la distance permet d’ignorer certaines questions qui deviennent incontournables à celui qui est proche » . Cet endossement du rôle d’acteur m’a également donné à vivre personnellement (en termes de responsabilités envers Heifer Ecuador) le rapport qui se met en place avec les organisations paysannes via le projet de développement. La manière dont j’ai été perçue comme « celle qui sait », celle qui possède le savoir, la compétence (« Usted sabe Ingeniera, diga no mas… » ) m’a projetée au cœur de ce rapport entre « développeurs » et « développés » au sein duquel la connaissance très vite m’a semblé être une ressource de premier plan. En outre, je n’ai jamais été réellement identifiée à un agent de développement à part entière, ni auprès des organisations paysannes, ni auprès des équipes de terrain d’Heifer Ecuador. Mon statut de « stagiaire volontaire blanche » (une « coopérante »), qui à première vue peut constituer bien des inconvénients, fut plutôt une source d’avantages : l’idée que je n’étais que de passage a pu inciter à la confidence, à la curiosité, à la confiance, dans les organisations paysannes comme dans l’ONG.
En revanche, mon accès aux organisations paysannes s’est fait uniquement à travers le projet de développement, ce qui constitue une limite dans la mesure où j’ai très peu observé et participé à leur vie en dehors du projet. De cette manière, les organisations ont pu parfois garder la maitrise de ce qu’elle voulait ou non me laisser voir. Une autre difficulté fut la gestion et l’explication de ma conversion d’acteur en chercheur. J’ai volontairement choisi de rester vague, justifiant ma recherche comme « un passage obligé dans mes études ». Cette stratégie m’a parut opportune afin de pas effrayer les acteurs.
Les chercheurs ne sont pas toujours bien perçus, ni par les organisations paysannes qui se sentent assimilées à des « parcs zoologiques » , ni par les ONG, qui les considèrent comme des intrus gênants voire dangereux. Cette méfiance peut s’expliquer par la politisation traditionnellement forte de la recherche en Equateur, qui plus est dans le contexte actuel, où les ONG font l’objet de critiques récurrentes de la part du gouvernement de Raphael Correa . Le monde de la recherche est divisé en deux, les soutiens de Raphael Correa faisant face aux chercheurs de « l’opposition ». L’élection, en avril 2012, du nouveau directeur de la FLACSO a donné lieu à un affrontement de ces deux camps.
Finalement, conserver le plus possible mon image de « coopérante » me permettait d’échapper à ces enjeux locaux. Il y avait aussi un autre avantage à préserver cette image : la relation avec les coopérants représente toujours pour les organisations paysannes l’espoir d’une opportunité pour un projet de développement, d’un contact pour aller à l’étranger. Les coopérants, même s’ils sont associés à l’ « occident développé », jouissent d’une certaine légitimité liée à la reconnaissance de leur engagement « sur le terrain ». Or le chercheur lui ne représente rien, il a « besoin » des organisations pour son terrain, mais les organisations n’ont pas besoin de lui. Je ne sais dans quelle mesure mon statut d’ancienne « coopérante » m’a permis de réaliser des entretiens de qualité, la confiance et le sérieux que m’ont accordés mes anciennes connaissances lors des entretiens, tant du côté des organisations paysannes que de l’ONG, sont dus en grande partie à ma présence six mois durant « dans l’action ».
Mon implication sur le terrain de recherche a donc probablement influencé mes choix théoriques dans l’approche de mon sujet. Manifestement, le rapport entre agents de développement et organisations paysannes et indigènes allait bien au de là de la simple mise en œuvre du projet, mais ne revêtait pas les mêmes significations pour les deux groupes. Je fus rapidement frappée par l’esprit de groupe qui régnait entre les agents de développement d’Heifer Ecuador, lesquels semblaient partager bien plus qu’un travail : ils partageaient un engagement, des convictions politico -religieuses, et manifestaient pour les membres des organisations paysannes de l’amitié, du dévouement (porté par un sentiment de révolte, d’indignation face à la situation des populations indigènes). Du côté des membres des organisations paysannes et indigènes, moins démonstratifs dans leurs émotions, j’ai ressenti beaucoup de fierté, du respect, de l’amitié parfois, mais j’ai aussi été confrontée à une tendance à éviter le conflit, une tendance au secret. Contrairement à moi, les agents de développement n’étaient pas fâchés par cette attitude. Ce point m’est apparu comme révélateur de certains mécanismes propres au projet de développement, intériorisés par les acteurs.
L’enjeu fut donc de trouver une approche théorique qui permette de rendre compte de ces diverses facettes de la relation, sans tomber dans l’instrumentalisme ni dans le sentimentalisme. Sous l’influence de ce terrain de recherche (notamment la première phase) et des différentes lectures évoquées précédemment, nous avons choisi de mobiliser trois approches théoriques, que l’on retrouvera tout au long de ce mémoire, pour analyser les rapports entre développés et développeurs.

Une approche par la sociologie de l’action publique

Nous pourrions décrire de manière simpliste la réalité que nous souhaitons étudier comme suit : des individus coopèrent (via une organisation) pour une cause (« le développement »),en collaboration avec d’autres individus qui coopèrent (via une autre organisation) pour une autre cause (« leur développement », c’est-à-dire leur reproduction sociale, économique, culturelle et politique sur un territoire donné). Il existe de multiples manières d’analyser les politiques publiques, depuis leur justification (construction d’un problème public) jusqu’à leur mise en œuvre. Parmi les différents courants, l’un d’eux nous semble plus adapté à la réalité schématiquement résumée plus haut: le courant de la street level bureaucracy (ou approche actor-oriented) qui suppose que l’analyse des politiques publiques doit s’intéresser plus aux acteurs qui la mettent en œuvre sur le terrain, qu’à ceux qui la promeuvent. Une telle approche implique dans notre cas de s’intéresser avant tout à l’action menée par les « agents de développement » des ONG, plus qu’à leur siège. Dans cette perspective, nous mettrons en parallèle les apports de Crozier et Friedberg avec les travaux, plus contemporains, de Bierschenk, Olivier de Sardan et Chauveau.
Pour Crozier et Friedberg, l’action collective organisée est un construit social, une solution (parmi d’autres), toujours contingente, indéterminée et arbitraire, à un problème, la coopération en vue de réaliser des objectifs communs, malgré des orientations individuelles divergentes.Cette action collective organisée comporte des effets pervers et un « effet de système ». Deux concepts nous semblent pertinents à réutiliser pour notre recherche, en premier lieu celui de « système de relais » : toute organisation possède un « environnement pertinent » , segmenté en relais. Chaque « relais » (un individu) représente un segment de l’environnement, qui fournit de l’information à l’organisation mais aussi représente l’organisation et ses intérêts auprès de son segment d’environnement. Cette situation confère un certain pouvoir à ces individus-relais, dès lors qu’ils apparaissent comme des « réducteurs d’incertitudes ». Cela nous amène au second concept, celui des « zones d’incertitudes », au cœur des rapports de pouvoir entre relais et organisation. Selon leur capacité à réduire les incertitudes, c’est -à dire par leur maitrise d’une certaine information, Crozier et Friedberg identifient différents types de pouvoirs . Ce sont là des outils qui peuvent permettre de penser les interdépendances qui se créent au niveau local entre organismes de développement et organisations paysannes, leurs asymétries (négociation, concession, marchandage, rapport de force, tâtonnements, coalition, affrontements etc.), mais aussi l’autonomisation de ces interdépendances. L’on pourra également s’inspirer des travaux de Michael Lipsky , qui dans ce même courant de la street level bureaucracy, examine les privatisations des politiques sociales sous Reagan : désormais, ce sont les travailleurs sociaux des non profit organizations qui composent cette nouvelle street level bureaucracy. Dans cette même perspective théorique, on trouve les travaux de Nicole P. Marwell , qui mettent en exergue les formes revisitées de clientélisme politique sous-jacentes à cette non profit street level bureaucracy issue de l’externalisation des politiques sociales américaines.

Vers la visibilité nationale du MICC et de la COMICH

Au cours des années 1980, le MCC (qui devient MIC en 1980) et le MICH acquièrent une visibilité nationale, en participant à plusieurs manifestations d’envergure provinciale puis nationale. Ils connaissent tout deux dans la décennie ultérieure un développement et une certaine professionnalisation de leur organisation, qui se légalise, se complexifie et se bureaucratise.
Le soulèvement indigène de juin 1990 qui ébranle l’Equateur et surtout sa capitale Quito eut des conséquences symboliques fortes : conséquence politique d’abord, puisque la CONAIE en sort reconnue interlocuteur légitime du gouvernement dans la négociation avec ce qui est désormais vu comme « le mouvement indigène équatorien ». La nouvelle labellisation « soulèvement indigène » est choisie pour qualifier cet évènement, plutôt que « grèves » et « manifestations », réservés pour le mouvement ouvrier et syndicaliste . C’est surtout une prise de conscience pour la société blanche métisse de la capitale comme de la province, que « ce sont les Indiens qui nourrissent le pays », et qu’ils ont une capacité de mobilisation importante. Le soulèvement a été planifié par la CONAIE le 25 avril 1990, lors d’une assemblée à Pujilí . Une commission avait été formée, composée de certains membres du MIC. Le soulèvement débuta le 28 mai à Quito, avec la prise pacifique de l’Eglise Santo Domingo (prise non programmée lors de la réunion) par des organisations paysannes et urbaines, comme la Coordination Populaire, pour exiger la résolution des conflits agraires. Mgr Victor Corral est appelé pour participer à une commission de médiation avec l’Evêque de Quito Mgr Gonzales. Mais la médiation est un échec, les occupants entament une grève de la faim, le dialogue ne reprendra que le 6 juin. Alors que les acteurs locaux (organisations urbaines et paysannes) mettent en avant les demandes de redistribution des terres, la CONAIE insiste sur les 16 points de son « Mandat National pour la Vie des Nationalités Indigènes » (Massal, 2005 :131). Julie Massal (Id.) évoque une conception différente de la stratégie politique selon les statuts des dirigeants: les dirigeants nationaux (CONAIE) considèrent la nécessité de l’Etat plurinational comme la revendication la plus importante, autour de laquelle viennent se greffer des revendications plus matérielles, alors que les dirigeants locaux mettent l’accent sur des revendications concrètes, des demandes de changement par la mobilisation sociale, et non par l’action au niveau législatif. Cette orientation des dirigeants locaux peut aussi s’expliquer, pour les plus anciens, par leur proximité initiale avec la FEI dans les années 1960 (discours faisant référence à un « système de classes »).
L’action collective dans la Sierra n’est lancée que le 2 juin 1990 : les communautés sont descendues du páramo vers les capitales provinciales, à l’appel du MIC et du MICH, et ont démarré le blocage de la panaméricaine (route qui relie Quito aux capitales provinciales), afin d’empêcher l’approvisionnement des villes. Ce n’est pas le pre mier soulèvement des organisations dans la Sierra.
La première action collective du MIC est le blocage de la route qui relie Latacunga à Quevedo en 1981, pour protester contre les tarifs abusifs des compagnies de transport. L’année suivante, le MIC se rend visible à la société blanche-métisse de la province lorsqu’il organise le premier soulèvement indigène, du 20 au 22 octobre 1982. Ce soulèvement sera particulièrement violent à Pujili, où se retrouvent les dirigeants les plus radicaux. Lors du soulèvement national de 1990, le MIC (récemment légalement constitué) et le MICH se surprennent eux-mêmes par leur capacité de convocation et de mobilisation.
Du 4 au 8 juin , les provinces de Cotopaxi et Chimborazo sont paralysées. Les indigènes de  Cotopaxi se sont rassemblés sur la Place d’El Salto (à Latacunga), où ils reçoivent des dons (aliments, couvertures) de la part de citadins en faveur du mouvement. Beaucoup de dirigeants séjournent brièvement en prison , accusés de vandalisme et de pillage des haciendas . Radio Latacunga diffuse les nouvelles du soulèvement et lutte contre la désinformation dans les communautés les plus éloignées, pendant que les femmes indigènes se chargent de convoquer les représentants des principales institutions politiques locales (notamment l’IERAC) et de les réunir sur la place pour écouter les revendications du mouvement (une déclaration de « reconnaissance » de ces revendications est même signée par les autorités locales). La presse locale est occupée pour l’empêcher de divulguer d e fausses informations. Les femmes se placent en tête du cortège pour le protéger de la répression militaire. Pour beaucoup, c’est la première fois qu’ils « descendent » à Latacunga la tête haute, avec les vêtements traditionnels, poncho et chapeau, « comme s’ils étaient chez eux » . Cette appropriation de la ville (Latacunga), de l’espace public « métisse » se fait dans la joie, le plaisir, la spontanéité, la libération. Le MIC et le MICH reconnaissent s’être sentis dépassés par l’am pleur prise par la mobilisation : « On ne pouvait plus les arrêter ».
Après ce succès, le MIC et le MICH connaissent dans les années 1990 un fort développement de leurs activités et de leur organisation, alors même que les critiques de la part des dirigeants des communautés et organisations affiliées se font de plus en plus sévères. Les questions portent majoritairement sur l’argent, comme le rapporte Maritza Salazar, assistante technique à Radio Latacunga puis au MIC : « Au début, quand le MIC a commencé à avoir des projets [années 1990], les gens disaient : « Alors, combien vont-ils nous donner ? », « le MICC a de l’argent, pourquoi n’en recevons nous pas ? On veut faire ça, et que le MICC mette l’argent. Que fait le MICC avec l’argent ? Les dirigeants s’enrichissent, le MICC les paye…”. Jamais un dirigeant n’a été payé. On a toujours été bénévoles, ce que l’on cherche, c’est que si un dirigeant est bénévole, que le MICC puisse au moins lui payer les déplacements, les repas, pour pas qu’il ne s’appauvrisse plus! ». Maritza Salazar, MICC, Entretien N°4.
Ce sont les comportements opportunistes ou clientélistes qui sont régulièrement dénoncées au sein même de l’organisation. José Toaquiza Chitupanta, ancien dirigeant responsable de la communication du MICC évoque « l’ambition du pouvoir et l’opportunisme ». Selon Gloria Jara, trésorière de la COMICH , son organisation n’y échappe pas : “En ce moment [depuis les années 2000] disons qu’il y a un décalage au sein de l’organisation [COMICH]. Il faut être honnête, on peut voir deux groupes, quelqu’un qui cherche à diriger à titre personnel, enfin, selon moi, et quelqu’un qui veut travailler pour la collectivité”. Gloria Jara, COMICH, Entretien N°1.

L’OSG, la réponse aux modes d’intervention de la coopération internationale

Les OSG, pour la coopération internationale, représentent une « forme de capital social induit » . Elles sont considérées comme le réceptacle du capital social présent dans les organisations de base (communautés, associations, coopératives). C’est pour cette raison qu’elles deviennent pour les organismes de développement le partenaire idéal des projets de « renforcement organisationnel »,de « développement communautaire » et d’ « empowerment » qui caractérisent la décennie des années 1990. Pour ce faire, les organismes de développement, parapublics (PRODEPINE, CODENPE , FODERUMA, PRONADER ) comme privés (ONG nationales comme le FEPP, ONG étrangè res comme Visión Mundial, Habitat, Heifer Ecuador) vont encourager massivement la création des OSG pour pouvoir y ancrer leurs projets de développement. Les OSG sont d’autant plus adaptées à ce nouveau discours que la coopération internationale promeut la « territorialisation » des politiques sociales : « penser les individus à partir du lieu où ils se trouvent » permet d’ignorer leur inscription dans une société qui génère des inégalités. Pour accéder aux projets quels qu’ils soient, les organisations paysannes ont donc intérêt à se regrouper au niveau paroissial ou cantonal. Elles doivent aussi réunir un certain nombre de conditions financières, un processus qui aboutit à l’exclusion des plus exclus. Cette fâcheuse tendance à la différenciation économique et sociale des OSG est même reconnue par les « défenseurs » du capital social (notamment Bebbington et Carroll ). Plusieurs études de cas réalisées par des chercheurs équatoriens montrent ces mêmes tendances. Nous retenons ici les études du FEPP et de PRODEPINE, réalisées par Victor Breton.
L’Etude de Victor Breton sur les changements idéologiques dans les orientations et les politiques de développement du FEPP de 1981 à 2000 montre comment le FEPP adapte ses programmes aux exigences et aux « tendances » de la coopération internationale. Le FEPP se distingue dès le départ des autres ONG par son choix de ne travailler qu’avec des OSG, dont il encourage directement la création. Ainsi, de 1981 à 1987, il abandonne le soutien aux organisations dans le cadre de la Réforme Agraire, pour adopter un discours en concordance avec le DRI promu par le gouvernement, dont l’idée centrale est que les OSG sont capables de porter leurs propres projets de développement. Ce postulat est facilement accepté par le FEPP, dont la philosophie s’alimente des principes de la théologie de la libération des Salésiens et de l’éducation populaire d’Eduardo Freire , et prône l’auto-développement et la libération de la domination par l’éducation et la découverte des Evangiles. Ainsi, avant 1981, le FEPP travaille déjà avec sept OSG (dont cinq dans le Chimborazo) qu’il a largement contribués à créer et renforcer (c’est le cas de l’OSG UCASAJ, Union des Paysans de San Juan, par exemple). C’est d’ailleurs à cette époque son objectif principal : « promouvoir la formation d’organisations paysannes provinciales là où elles n’existent pas et renforcer les existantes » (Ibid, p. 144). L’entrée dans la décennie 1990 est marquée par l’abandon de la rhétorique du développement rural intégral, remplacée par celle du renforcement organisationnel des OSG par des programmes de crédits, de formations techniques en administration, production et commercialisation, afin que « les paysans eux-mêmes deviennent les agents clés du développement à travers leur organisation locale » (FEPP, 1996b, 16-17). Le FEPP Riobamba (un bureau y a été ouvert en 1981) travaille alors avec huit OSG dans les paroisses de Cacha, Cumanda, Pallatanga et Cebadas. Suite à une évaluation reprochant la dispersion de l’action du FEPP, le FEPP Riobamba décide de rediriger ses programmes vers deux OSG ayant une bonne expérience en développement (c’est-à-dire ayant déjà été partenaires d’autres projets de développement) : la Jatun Ayllu de Guamote et la UCASAJ de San Juan (une des première OSG de Chimborazo, qui reçoit dès sa création le soutien du FEPP). Une étude similaire a été menée sur les actions de PRODEPINE, ONG équatorienne dont la création et le fonctionnement ont été financés par la Banque Mondiale, en partenariat avec l’Etat et les plateformes indigènes nationales, afin de mettre en œuvre la politique du CODENPE. Breton y voit la vitrine d’une nouvelle manière d’aborder la ruralité, une rhétorique de la participation et du capital social avant tout (Breton, 2005 :10). Dessiné par la Banque Mondiale et coordonné par les figures indigènes nationales, PRODEPINE crée une concurrence entre les organisations indigènes nationales pour en avoir le contrôle, et entre les organisations indigènes et la CODENPE.

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Table des matières
Chronologie politique de l’Equateur (chefs d’Etat) 
Liste des Abréviations
Introduction 
Transition démocratique, mobilisations sociales et coopération au développement en Equateur
Etat de l’art
Les incidences du terrain 
Une approche par la sociologie de l’action publique
Une approche par la sociologie des idées
Une approche par la sociologie des mouvements sociaux
Problématiques et hypothèses de recherche 
Partie 1- Des Evangiles aux agronomes, naissance et construction des mouvements indigènes de Chimborazo et Cotopaxi
I. Créer des espaces de revendications politiques indigènes
A. Mouvement de « communalisation », réformes agraires et luttes pour la terre
B. Les prémices du MICC et de la COMICH
C. Vers la visibilité nationale du MICC et de la COMICH
II. Le développement des OSG dans les provinces de Cotopaxi et Chimborazo : vers la dépolitisation du MICC et de la COMICH
A. Les transformations du social : développement rural, capital social et renforcement organisationnel
B. L’OSG, la réponse aux modes d’intervention de la coopération internationale
C. « Décennie perdue » ou « décennie gagnée » ?
III. Le MICC et la COMICH, des fabriques de dirigeants sans militants
A. La jeunesse, construction d’une identité paysanne indigène positive et active
B. L’âge adulte : politisation et acquisition de savoirs et techniques du développement
C. Des organisations de leaders sans militants
Partie 2 – Quand les travailleurs du développement font de la politique : les transformations des discours et pratiques du « paradigme du développement »
I. La rhétorique du développement chez HEIFER Ecuador
A. Une conception « technico-politique » du développement
B. Des pratiques de développement
C. Les représentations du monde rural : catégories d’action publique et rôles sociaux promus
II. Vers une dépolitisation des « politiques publiques internationales »
A. Le discours de la neutralité scientifique
B. Exigences de cohérence, de participation et de systématisation
C. Un projet qui véhicule des manières de penser, de communiquer et d’interagir
III. Le travail des équipes de terrain sur les projets de développement et l’identité de l’institution
A. La construction d’une identité collective parmi les équipes de terrain d’HEIFER Ecuador
B. Le travail identitaire de l’institution
C. La transformation de « l’esprit » de l’institution par les équipes de terrain
Partie 3 – D’ « en-haut » au terrain, vie et tentatives d’autonomisation du projet de développement
I. Immersion dans le quotidien d’un projet de développement
A. Les conditions de l’interaction
B. La réception des activités du projet de développement
C. « Faire quelque chose pour la communauté », ressources et logiques d’action des acteurs locaux du développement
II. Les organisations paysannes et indigènes face aux « dommages collatéraux » du développement
A. Bureaucratisation et querelles organisationnelles
B. Monétarisation, professionnalisation des organisations et différenciation sociale
C. Dépendance et clientélisme, les ultimes condamnations du développement
III. Quand le terrain renégocie et transforme le projet de développement
A. La négociation initiale du projet
B. La négociation quotidienne du projet
C. Un espace d’autonomie restreint, dépendant de l’autonomie de l’ONG vis à vis des bailleurs
de fonds
Conclusion
Bibliographie 
Sources 
ANNEXES 
Province de Cotopaxi 
Province de Chimborazo
Annexe 2 : Divisions territoriales politiques et administratives de l’Equateur
Annexe 3 : Notes de terrain. L’Encuentro Nacional, réunion annuelle des salariés d’Heifer Ecuador
Annexe 4 : Notes de terrain. Une réunion houleuse face à des bénéficiaires mécontents
Annexe 5 : Notes de terrain. Un concours d’attelage dans la communauté de Guantul (COMICH)
Annexe 6 : Notes de terrain. Un atelier de socialisation du CDR
Annexe 7 : Recensement des activités quotidiennes de l’équipe Sierra (six mois)
Annexe 8 : Liste des entretiens
Guide d’entretien – Agents de développement
Guide d’entretien – Dirigeants paysans / indigènes 
Guide d’entretien – Promoteurs

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