Provenance des métaux lourds

Provenance des métaux lourds

Contexte de l’ étude

Située en plein cœur du bouclier canadien, l’Abitibi-Témiscamingue est l’une des principales régions minières du Canada. La fonderie Home (Glencore – Xstrata Cuivre), située à Rouyn-Noranda, y traite du minerai de cuivre et des déchets informatiques, entraînant l’émission de métaux lourds tels que l’arsenic (As), le plomb (Pb), le mercure (Hg) et le cadmium (Cd) (Environnement Canada, 20 15). Il s’ agit de la principale source ponctuelle d’émissions atmosphériques de métaux lourds dans cette région (Savard et al., 2006a). La contamination aux métaux lourds est étudiée en Abitibi-Témiscamingue depuis les années 1980. Elle a été documentée dans les sols et les cernes de croissance des arbres (Savard et al., 2006a), les milieux aquatiques (Dixit et al., 2007), et dans la faune terrestre (Paré et al., 1999). L’Agence de santé et des services sociaux de l’Abitibi-Témiscamingue émet depuis les années 1980 un avis de non consommation des abats d’ orignal sur son territoire, en raison de hautes teneurs en cadmium (Gagné, 2009).

Cet avis public, basé sur des recherches effectuées sur 1′ orignal et 1 ‘ours noir (Ursus americanus) (Paré et al. , 1995; Crête et al, 1997; Paré et Jolicoeur, 2005), vise à prémunir les chasseurs contre un apport trop élevé en cadmium, provenant du foie et des reins de ces deux espèces. Parmi les chasseurs visés par ces recommandations se trouve le peuple anicinape, qui occupe le territoire de 1 ‘Abitibi-Témiscamingue depuis des millénaires et y pratique encore aujourd’hui ses activités traditionnelles de trappe, de chasse et de cueillette de subsistance (Côté, 1995). Inquiets face à la présence d’une source ponctuelle de contamination (la fonderie Home) au coeur de leur territoire traditionnel et préoccupés par leur sécurité alimentaire, les communautés de Kitcisakik, Pikogan, Winneway et Timiskaming ont initié ce projet de recherche afin d’évaluer le risque d’exposition aux métaux lourds lié à la consommation de viande sauvage. Le choix de l’espèce à étudier s’est arrêté sur le lièvre d’Amérique (Lepus americanus), un aliment d’une grande importance culturelle et traditionnelle.

Provenance des métaux lourds

Hors de l ‘ oecoumène, l’activité minière constitue une importante source de pollution industrielle (Hutchinson & Whitby, 1974; Makinen et al., 2010; UNEP 2010a,b; UNEP 2014; Pennington & Watmough, 2015). La transformation primaire du minerai dans les fonderies entraîne le rejet atmosphérique de multiples contaminants, notamment plusieurs métaux lourds tels que le cuivre, l’arsenic, le plomb, le mercure, le cadmium. (Parker & Ramer, 2001 ; Hou et al., 2006; Aznar et al., 2007). L’implantation de la fonderie Home en 1927 à Rouyn-Noranda a engendré dès l’année suivante une assimilation marquée de métaux lourds par les épinettes noires de la région (Savard et al., 2006b). Les émissions de dioxyde de souffre (S02), de métaux et de particules ont toutefois diminué sensiblement à partir des années 1980, suite à l’installation de systèmes de filtration et de récupération (Savard et al., 2004). Par exemple, entre 1965 et 2001, la fonderie Home a vu ses émissions annuelles de plomb (Pb) passer de 1400 à 65 tonnes et celles de cadmium (Cd) passer de 110 tonnes en 1975 à 2,5 tonnes en 2001 (Savard et al, 2006b). Le volume de déchets et de minerai traité a cependant augmenté à partir de 2010, lorsque la compagnie a récupéré l’approvisionnement de la fonderie Kidd Creek (Timmins, Ontario) à sa fermeture. Outre les apports anthropogéniques en métaux lourds, la nature géochimique des sols et des dépôts de surface influence aussi la disponibilité environnementale de certains éléments (Savard et al., 2006b.).

Risques pour la santé humaine

Au sommet de la chaîne alimentaire, les chasseurs, trappeurs et pêcheurs autochtones (p. ex. : Inuit, Dene et Métis) se trouvent directement interpellés par la problématique de la contamination environnementale (Berti et al., 1998; Ministère des Affaires Indiennes et du Nord Canada, 2003; Satarug et al., 2010; Martin, 2011). Une bonne partie de la diète des Premiers Peuples est encore aujourd’hui constituée d’aliments traditionnels, lesquels sont de plus en plus souvent pointés du doigt en raison de leur contamination potentielle ou avérée : poissons, petits et gros gibiers, baies sauvages, plantes comestibles et médicinales, etc. (Kuhnlein & Chan, 2000, Donaldson et al., 2010). Cela constitue une préoccupation majeure pour les autorités de santé publique (Suk et al., 2004; Gagné, 2009) et une source d’inquiétude pour les communautés concernées (Furgal et al., 2005; Willows, 2005). Les membres des communautés autochtones possèdent souvent une connaissance fine de leur territoire, et les trappeurs et chasseurs d’expérience savent reconnaître et évaluer son état de santé et celui des espèces qu’ils y récoltent (Wilson, 2003; Manitowabi and Shawande, 2011). Contrairement aux zoonoses et aux autres maladies animales concrètement détectables par les chasseurs et trappeurs, la contamination environnementale constitue, de par sa nature invisible, un risque insidieux et un nouveau paradigme auxquel doivent faire face les communautés autochtones (Wheatly, 1997; Furgal et al., 2005).

Même à faibles doses, une exposition chronique aux métaux lourds peut avoir des conséquences sérieuses sur la santé humaine (Tableau 1). Toutefois, l’impact sur la santé des aliments qui contiennent ces contaminants s’avère assez complexe à évaluer (Kuhnlein & Chan, 2000). L’évaluation des risques dépend de nombreux facteurs tels que le degré d’exposition, la masse corporelle, l’âge, le genre et la situation géographique (Suk et al., 2004). Les femmes enceintes et les enfants en bas âge sont souvent considérés comme étant les plus vulnérables, en raison de la fragilité du foetus et de l’enfant en développement (Curren et al., 2015). La consommation de certaines espèces plus sensibles à la pollution, la consommation d’abats ou encore le tabagisme, sont des habitudes pouvant augmenter le risque d’exposition (Cole & Keamey, 1997; Lemire et al., 2015). Les aliments du marché peuvent aussi contribuer à l’apport global en contaminants. Malgré les risques potentiels, la consommation de viande sauvage comporte aussi de nombreux bienfaits pour la santé : riche en minéraux et vitamines, faible en gras, sa récolte nécessite un exercice physique qui contribue à une bonne santé (Kuhnlein and Chan, 2000; Willows, 2005 ; Samson and Pretty, 2006).

Les individus qui consomment régulièrement des aliments traditionnels seraient moins à risque de souffrir de diabète ou d’obésité (Hlimi et al., 2011). Inversement, la transition alimentaire observée chez les Premiers Peuples depuis plusieurs décennies correspond à une détérioration notoire de la santé et une hausse de l’incidence d’ obésité, de diabète et de maladies cardiovasculaires au sein de ces communautés (Haman et al., 2010). En outre, le risque de consommer des aliments traditionnels peut s’avérer plus faible que le risque de ne pas en consommer (Furgal et al., 2005). Le risque perçu est souvent aussi plus grand que le risque réel (Furgal et al., 2010). Lors de 1′ évaluation des risques, il importe donc de dresser un portrait nuancé, tenant compte des avantages autant que des risques associés à la consommation d’aliments traditionnels (Donaldson et al., 2010, Laird et al., 2013).

Importance culturelle des aliments traditionnels

Les aliments traditionnels revêtent une grande importance culturelle pour les Premiers peuples du Canada (Pufall et al., 2011). Bien que la diète ait grandement changé depuis la création des réserves, la sédentarisation des familles et l’adoption en masse des aliments transformés, la nourriture traditionnelle procure encore en moyenne entre 15 et 51% de l’énergie quotidienne, le reste provenant des aliments du marché (Kuhnlein and Receveur, 1996; Samson and Pretty, 2006; Lemire et al., 2015). La viande sauvage est consommée sur une base hebdomadaire ou même quotidienne et la consommation est encore plus grande lorsqu’un aîné fait partie de la famille (Berti et al., 1998). Les chasseurs et cuisiniers traditionnels savent apprêter et apprécier pratiquement toutes les parties d’un animal.

À titre d’exemple, le museau et le foie d’orignal sont particulièrement appréciés par les aînés. La viande sauvage, très prisée lors de festins et d’événements spéciaux, fait partie intégrante de ce que les Anicinapek appellent nopimik mitcim, littéralement «nourriture des bois » (Bousquet, 2002). Les Anicinapek considèrent la forêt comme un « garde-manger » ou une «pharmacie» (Saint-Arnaud et al., 2009). Si plusieurs dizaines d’espèces faisaient autrefois partie de 1′ alimentation traditionnelle autochtone, on remarque désormais un intérêt marqué pour quelques espèces vedettes, surtout chez les jeunes générations (Samson and Pretty, 2006). Chez les Anicinapek, les espèces les plus consommées sont l’ orignal, le doré (Sander vitreus), le castor (Castor canadensis), la perdrix (Bonasa umbellus) et le lièvre d’Amérique (Bousquet, 2002; Bordeleau, 2009).

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Table des matières

AVANT-PROPOS
LISTE DES FIGURES
LISTE DES TABLEAUX
LISTE DES ABRÉVIATIONS
RÉSUMÉ GÉNÉRAL
CHAPITRE I INTRODUCTION GÉNÉRALE
1.1 Contexte de 1′ étude
1.2 Revue de littérature
1.2.1 Provenance des métaux lourds
1.2.2 Dispersion des métaux lourds dans l’environnement
1.2.3 Impacts des métaux lourds sur la faune
1.2.4 Risques pour la santé humaine
1.2.5 Importance culturelle des aliments traditionnels
1.2.6 Le lièvr e d’Amérique
1.3 Méthodologie générale
1.3.1 Choix de l’ espèce à étudier
1.3.2 Analyses des teneurs en métaux lourds
1.3.3 Enquête sur les habitudes alimentaires
1.3.4 Éthique et recherche participative
1.4 Objectifs et hypothèses de recherche
CHAPITRE II « IS IT STILL SAFE TO EAT TRADITIONAL FOOD? » ADDRESSING TRADITION AL FOOD SAFETY CONCERNS OF ANISHNAABEG COMMUNITIES
2.1 Abstract
2.2 Introduction
2.3 Material and Methods
2.3.1 Study area
2.3.2 Snowshoe hare sampling
2.3.3 He avy metal analysis
2.3.4 Statistical analyses ofheavy metal concentrations in hare
2.3.5 Interviews
2.3.6 Risk assessment
2.3.7 Ethics
2.4 Results
2.4.1 Heavy metal concentrations
2.4.2 Traditional food consumption
2.4.3 Exposure to he avy metals
2.5 Discussion
2.5.1 Heavymetals in snowshoe hare
2.5.2 Influence of a smelting facility
2.5.3 Influence of habitat type and quality
2.5.4 Anishnaabeg exposure to heavy metals
2.5.5 Additional exposure to heavy metals
2.5.6 Health risk assessment
2.5.7 Nutritional benefits oftraditional foods
2.5.8 Cultural benefits oftraditional foods
2.5.9 Collaborative approach to risk assessment
2.6 Conclusion
2.7 Acknowledgements
2.8 References cited
CHAPITRE III CONCLUSION GÉNÉRALE
ANNEXE A – ENQUÊTE SUR LES HABITUDES ALIMENTAIRES
ANNEXE B- GUIDE D’IDENTIFICATION DES PORTIONS DE LIÈVRE D’AMÉRIQUE
ANNEXE C- CERTIFICAT D’APPROBATION ÉTHIQUE
ANNEXE D – FORMULAIRE DE CONSENTEMENT
RÉFÉRENCES BIBLIOGRAPHIQUES

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