Propriétés magnétiques : du microscopique au mésoscopique

L’intérêt majeur des colloïdes superparamagnétiques, appelées communément billes magnétiques, consiste en l’apparition d’une forte aimantation à l’application d’un champ magnétique, qui disparaît instantanément dès que le champ est coupé. Leur petite taille (typiquement 1 µm) ainsi que le fait de pouvoir les manipuler à distance à l’aide d’un aimant puis de les redisperser instantanément les rend très intéressants pour la biochimie, où le nombre d’application est sans cesse croissant. En effet, leur surface peut être fonctionnalisée, ce qui en fait une alternative plus simple et plus douce à la chromatographie pour la séparation de biomolécules ou de cellules, à partir d’un milieu complexe. Elles servent également de matériau de base à des tests immunologiques de grande sensibilité [Liabakk et al., 1990]. Mais ces particules ont également un intérêt pour des applications plus fondamentales. Elles permettent par exemple de modéliser le comportement d’atomes dont l’énergie d’interaction peut facilement être variée en changeant la force du champ magnétique appliqué et ainsi d’analyser les phénomènes de transition de phase [Zahn et al., 1999]. Elles ont aussi été utilisées pour modéliser les phénomènes de nage des microorganismes à bas nombre de Reynolds [Dreyfus et al., 2005]. On trouve depuis les années 1990 des billes très magnétiques et très monodisperses dans le commerce auprès d’entreprises telles que Ademtech ou Dynal (qui fait maintenant partie du groupe Life Technologies).

Propriétés des grains superparamagnétiques 

Les grains que contiennent les billes magnétiques sont des particules de maghémite γ-Fe2O3. Une suspension de ces grains dans un liquide est appelée ferrofluide. C’est cette suspension dont nous allons détailler les propriétés.

Synthèse

Le ferrofluide servant de base à la fabrication des billes que nous utilisons est fabriqué selon le protocole Massart [Massart, 1981] : des ions Fe[II] et Fe[III] en solution aqueuse sont coprécipités sous forme d’oxyde de fer par passage en milieu alcalin. On obtient tout d’abord de la magnétite Fe3O4 qui s’oxyde ensuite en maghémite γ-Fe2O3 beaucoup plus stable. Le ratio Fe[II]/Fe[III] et le pH permettent de contrôler la taille des grains dont le diamètre moyen vaut typiquement 10 nm.

Propriétés magnétiques d’un ferrofluide 

La structure cristallographique de la maghémite est cubique et peut être décomposée en deux sous-réseaux occupés par les ions Fe[II] et Fe[III]. Comme ces deux types d’ions possèdent des spins différents, les moments magnétiques des deux sous-réseaux ne se compensent pas : la maghémite est dite ferrimagnétique et possède une aimantation permanente. Cependant, pour minimiser l’énergie magnétique créée, un bloc macroscopique de maghémite se divise en plusieurs domaines magnétiques, dits domaines de Weiss, dont l’aimantation possède une orientation différente [Feynman et al., 1964]. Le moment magnétique global du matériau est ainsi très faible. A l’interface entre les domaines se trouvent des zones où l’orientation des spins atomiques change progressivement : ce sont les parois de Bloch. La création de telles interfaces a un coût énergétique et par conséquent, en dessous d’une taille critique, il devient défavorable de séparer un matériau en domaines. Cette taille critique vaut environ 80 nm pour la maghémite [Butler and Banerjee, 1975].

L’anisotropie magnétique

La direction que prend le moment magnétique dans le grain n’est pas aléatoire. Il existe toujours une direction privilégiée appelée direction de facile aimantation. Elle résulte d’une anisotropie magnétique qui peut avoir plusieurs origines : magnétocristalline, de forme ou de surface. L’anisotropie magnétocristalline est une propriété intrinsèque du matériau considéré et provient de l’interaction entre les spins électroniques et le champ électrique créé par la structure cristalline (couplage spin orbite). Pour la maghémite, les directions de facile aimantation correspondent aux axes cristallographiques <110> de la maille cubique [Birks, 1950]. On définit l’énergie d’anisotropie Ea comme la barrière d’énergie à franchir par le moment magnétique pour pivoter d’une direction facile (la plus favorable énergétiquement) à une direction perpendiculaire à celle-ci (la plus défavorable énergétiquement).

Pour des particules non sphériques, l’anisotropie de forme peut jouer un rôle important. Pour une description rigoureuse de ce phénomène, on peut se reporter à Landau and Lifshitz [1960]. On donne ici une description qualitative. Commençons par introduire la notion de champ démagnétisant. Par analogie avec l’électrostatique, on peut considérer qu’il se forme des pôles Nord et Sud (fictifs) de part et d’autre d’un objet magnétique plongé dans un champ externe, de la même façon que des charges positives et négatives s’accumulent à la surface d’un dipôle électrique (FIGURE 1.3). Ces pôles créent à l’intérieur de l’objet un champ magnétique dans la direction opposée au champ extérieur. on conçoit que le nombre de pôles sera plus grand si le champ est orienté dans la direction du petit axe de l’ellipsoïde que selon son grand axe car le flux du champ à travers le grain est plus grand, d’où un champ démagnétisant plus important. Il se crée donc une direction de facile aimantation selon le grand axe. En revanche, dans le cas d’une sphère, le champ démagnétisant est identique dans toutes les directions et l’anisotropie de forme n’existe pas. L’anisotropie de forme varie également comme le volume.

Enfin, l’existence d’une couche surfacique désordonnée où les spins sont désorientés est à l’origine de l’anisotropie de surface [Néel, 1954], qui peut devenir prépondérante lorsque la taille diminue et que le ratio surface/volume augmente. L’axe d’anisotropie créé est localement perpendiculaire à la surface. L’effet se compense donc pour des particules sphériques et ne peut exister que lorsqu’il existe déjà une anisotropie de forme. L’énergie d’anisotropie est alors exprimée par Ea = KSS .

Dans le cas des grains de maghémite qui composent les billes magnétiques, il est difficile d’identifier la forme d’anisotropie mise en jeu. Plusieurs études, telle celle de Dormann et al. [1996] mettent en évidence une origine surfacique de l’anisotropie. Par des expériences de FMR (FerroMagnetic Resonance), Gazeau et al. [1998] concluent également que l’anisotropie est d’origine surfacique et de plus uniaxiale. L’irrégularité de la forme des grains (FIGURE 1.1) et l’existence d’une légère ellipticité (de l’ordre de 1.2) [Dubois, 1997] observées en microscopie électronique sont en accord avec ces résultats. Mais étant donné la polydispersité en taille des particules, il est difficile d’exclure des effets magnétocristallins pour les gros objets au moins .

Dans la suite, par souci de simplicité, le comportement dynamique des grains sera décrit comme s’il n’existait qu’un seul axe d’aimantation facile. Cette description peut facilement être extrapolée à une situation à plusieurs axes.

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Table des matières

Introduction
I Propriétés magnétiques : du microscopique au mésoscopique
1 Propriétés des grains superparamagnétiques
1.1 Synthèse
1.2 Propriétés magnétiques d’un ferrofluide
1.3 L’anisotropie magnétique
1.4 Couplage entre un grain et son moment magnétique .
1.5 Comportement des grains sous champ à l’équilibre
1.5.1 Évolution de l’aimantation avec le champ externe
1.5.2 Évolution de l’orientation des grains avec le champ externe
1.5.2.1 Biréfringence d’un ferrofluide
1.5.2.2 Évolution de la biréfringence avec le champ
1.6 Dynamique de l’orientation des grains
1.6.1 Effet des fluctuations thermiques
1.6.2 Couplage de l’orientation du grain et de son moment
1.6.3 Conclusion
1.7 Caractérisation expérimentale du ferrofluide
1.7.1 Caractéristiques physiques du ferrofluide
1.7.2 Dispositif expérimental
1.7.3 Étalonnage du montage
1.7.4 Évolution de la biréfringence du ferrofluide avec le champ
1.7.5 Récapitulatif des caractéristiques du ferrofluide
2 Étude expérimentale du couplage entre bille et champ magnétique
2.1 Description des billes utilisées
2.1.1 Nature et fabrication
2.1.2 Nombre de grains dans les billes
2.2 Les billes sont optiquement anisotropes
2.2.1 Principe de la DDLS
2.2.2 Réalisation pratique
2.3 Système expérimental
2.3.1 Instrumentation
2.3.2 Calcul de l’intensité lumineuse mesurée
2.3.3 Précautions pour mesurer le comportement des billes isolées
2.4 Comportement des billes isolées à l’équilibre sous champ
2.5 Évolution avec le nombre de grains
2.6 Dynamique des billes
2.6.1 Normalisation par la viscosité
2.6.2 Coupure du champ
2.6.3 Établissement du champ
2.7 Comparaison avec la littérature
Annexe A Synthèse de billes magnétiques
Annexe B Anisotropie optique d’une suspension de billes magnétiques
II Pression de croissance de filaments d’actine
3 Forces générées dans les systèmes biologiques : présentation et modélisation
3.1 Introduction
3.2 Mécanique du cytosquelette
3.2.1 Nature du cytosquelette
3.2.2 Propriétés générales du cytosquelette
3.2.3 Structures à base de microtubules
3.2.4 Structures à base de filaments d’actine
3.2.5 Structures à base de filaments intermédiaires
3.2.6 Conclusion
3.3 Forces générées par les microtubules
3.3.1 La ségrégation des chromosomes
3.3.2 Mesure de force générée par la polymérisation de microtubules
3.4 La migration cellulaire
3.4.1 Mécanisme
3.4.2 Mesure de force sur cellule entière
3.5 La propulsion intracellulaire de pathogènes
3.5.1 Description
3.5.2 Mesures de force sur des comètes d’actine
3.5.3 Mesures de force sur gels d’actine
3.5.4 Mesures de force sur filament unique
3.6 Biochimie de l’actine
3.6.1 Les filaments d’actine sont polarisés
3.6.2 Les protéines régulatrices
3.7 Comment la polymérisation génère-t-elle une force ?
3.7.1 Bilan thermodynamique hors équilibre
3.7.2 Aspects cinétiques
3.8 Modèles mécanistiques
3.8.1 Le modèle du Brownian ratchet
3.8.2 Le modèle du Brownian ratchet élastique
3.8.3 Le modèle entropique
3.8.4 Passage à N filaments
3.9 Généralisation à des géométries complexes
3.9.1 Simulations numériques
3.9.2 Modèles mésoscopiques
3.10 Vérification expérimentale des modèles
3.10.1 Test du Brownian ratchet sur les comètes
3.10.2 Mesures de forces sur une assemblée de filaments
3.11 Conclusion
4 Mesure de force dans une géométrie contrôlée
4.1 Introduction
4.2 Conditions expérimentales
4.2.1 Protéines
4.2.2 Greffage de la gelsoline sur les billes magnétiques
4.2.3 Conditions biochimiques
4.3 Mesure de force et de distance
4.3.1 La machine de force
4.3.2 Suivi cinétique
4.3.3 Mesures mécaniques
4.4 Modification du dispositif expérimental
4.4.1 Choix des billes
4.4.2 Marquage fluorescent
4.4.3 Nouveau protocole expérimental
4.5 Évaluation de l’erreur de mesure
4.6 Caractérisation des billes
4.6.1 Taille
4.6.2 Propriétés de surface
4.6.3 Densité de gelsoline greffée
4.6.3.1 Spectroscopie de fluorescence
4.6.3.2 Cytométrie en flux
4.6.3.3 Microscopie confocale
4.7 Conclusion
Conclusion

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