Les matériaux semiconducteurs à base de nitrures d’éléments III (composés III-N) tels que le GaN sont d’excellents candidats pour la réalisation de composants optoélectroniques opérant dans la gamme spectrale du bleu à l’ultra violet (UV) de par leur large bande interdite directe. Ce n’est qu’en 1994, après une amélioration considérable de la qualité cristalline du GaN et de son dopage de type p [Naka92] que la première Diode ÉlectroLuminescente (DEL) à base de ce matériau émettant dans le bleu fût réalisée par la société Nichia [Naka94]. Les dispositifs à base de GaN ont vu leur production considérablement augmentée ces dernières années et les enjeux économiques sont énormes. Ces matériaux semiconducteurs permettent d’atteindre des performances supérieures à celles obtenues avec les semiconducteurs disponibles auparavant, et les enjeux tant scientifiques que sociétaux et industriels sont énormes.
Propriétés générales des nitrures d’éléments III
Propriétés structurales
Les nitrures d’éléments III sont formés par l’association d’un élément de la colonne III (Ga, In, Al, B) et de l’élément N de la colonne V de la classification de Mendeleïev. Leurs alliages ternaires et quaternaires sont également définis comme des nitrures d’éléments III. Ces matériaux peuvent cristalliser selon deux phases: zinc-blende, de symétrie cubique, ou wurtzite, de symétrie hexagonale.
La croissance hétéro-épitaxiale des nitrures d’éléments III
Généralités
Étant donné qu’il n’existe pas de cristaux massifs de grande taille de GaN disponibles dans le commerce, la croissance de ce matériau est basée sur l’hétéro-épitaxie ou la croissance sur un substrat de nature différente . Ces différences engendrent des contraintes dans la couche de GaN hétéro-épitaxiée qui finissent par se relaxer et créer des dislocations dans le matériau. Celles-ci sont majoritairement des dislocations traversantes, c’est à dire se propageant de l’interface avec le substrat jusqu’à la surface de la couche de GaN. Leur nombre est en général de l’ordre de 10⁹ cm-2 [Yu04] pour du GaN épitaxiée directement sur substrat de saphir ou de SiC. Cette densité de défauts élevée limite énormément les performances et la durée de vie des dispositifs à base de GaN. C’est pourquoi le développement technologique ayant pour but la réduction du nombre de défauts structuraux est primordial. Les premiers critères pris en compte pour déterminer la conformité d’un substrat pour le GaN sont le désaccord de maille entre les deux matériaux et leurs coefficients de dilatation thermique respectifs.
La densité de dislocations du GaN épitaxié sur saphir ou carbure de silicium atteint typiquement une valeur de 10⁸⁻¹⁰ cm-2 [Yu04]. De tels défauts créent des centres de recombinaisons non radiatifs qui introduisent des états d’énergie dans la bande interdite et dégradent ainsi les propriétés optiques du matériau.
La contrainte biaxiale
Le GaN est obtenu par hétéro-épitaxie. Sa cristallisation s’effectue sur un germe, le substrat, dont le paramètre de maille est différent du sien. Le matériau subit alors des déformations au niveau atomique lorsque sa maille s’adapte à celle du substrat. Il s’agit du cas d’une contrainte biaxiale dans le plan perpendiculaire à celui de la croissance. La contrainte engendrée peut être soit en compression , ou en tension . Cela correspond respectivement au cas dans lequel le paramètre de maille du substrat est plus petit que celui du cristal épitaxié et inversement. La maille du cristal est alors déformée dans les trois directions de l’espace (axe a et axe c). Les champs des contraintes (σij) et les déformations relatives (εij) sont reliés par le tenseur des constantes élastiques (Cmn).
Les dislocations engendrées dans le GaN hétéro-épitaxié
Le matériau GaN hétéro-épitaxié est soumis à des contraintes comme nous venons de le voir dans la partie précédente. L’énergie emmagasinée due aux contraintes va alors se libérer au-delà d’une certaine épaisseur (de l’ordre de quelques nanomètres) et former des dislocations dans le cristal. La croissance hétéro-épitaxiale directe des nitrures d’éléments III sur des substrats fortement désaccordés tels que ceux décrits ci-avant prend la forme de micro-structures colonnaires ou de grains . La longueur de cohérence de ces grains suivant l’axe c (0001) est très grande devant celle contenue dans le plan. Ces grains sont désorientés les uns par rapport aux autres soit par une rotation autour de l’axe c (twist) soit par une inclinaison par rapport à l’axe c (tilt). Ces structures coalescent rapidement lors de la croissance, et des dislocations aux joints de grains sont alors créées de par leur désorientations respectives.
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Table des matières
Introduction générale
1. Les nitrures d’éléments III: propriétés générales, hétéro-épitaxie et épitaxie sélective. Intérêt de l’épitaxie sélective à l’échelle nanométrique
1.1 Propriétés générales des nitrures d’éléments III
1.1.1 Propriétés structurales
1.1.2 Propriétés optiques
1.1.3 Propriétés électriques
1.2 La croissance hétéro-épitaxiale des nitrures d’éléments III
1.2.1 Généralités
1.2.2 La contrainte biaxiale
1.2.3 Les dislocations engendrées dans le GaN hétéro-épitaxié
1.2.4 L’épaisseur critique
1.2.5 Les coefficients de dilatation thermique et la contrainte thermique
1.3 L’épitaxie sélective et la croissance latérale
1.3.1 Principe
1.3.2 Croissance sélective et latérale
1.3.3 Anisotropie, morphologie et conditions de croissance
1.4 L’épitaxie sélective à l’échelle nanométrique
1.4.1 Introduction
1.4.2 Mise en œuvre et principe
1.4.3 Aspects mécanique et théorique
1.4.4 Exemples d’application: croissance du GaN sur Si par NSAG
Conclusion du chapitre 1
2. Mise en œuvre de la micro et nano-épitaxie sélective du GaN
2.1 Dispositif expérimental
2.2 L’épitaxie sélective à l’échelle micrométrique ou SAG du GaN
2.2.1 Description de la SAG et Protocole expérimental
2.2.2 Le modèle de diffusion en phase vapeur ou VPD
2.2.3 Epitaxie sélective du GaN: influence de la nature et de la géométrie du masquage sur la sélectivité
2.2.4 Epitaxie sélective du GaN: profils d’épaisseur et simulation par le modèle VPD
2.2.5 Epitaxie sélective sur substrat de silicium (111)
2.3 Croissance de nanostructures de GaN: NanoSAG sur pseudo-substrats de GaN
2.3.1 Le masquage « nano »
2.3.2 Optimisation du procédé de nano-lithographie
2.3.3 Conditions de croissance
2.3.4 Epitaxie de nanostructures de GaN et caractérisations morphologiques
2.3.5 Homogénéité des nanostructures
2.3.6 Dynamique de croissance et limitation du modèle VPD
Conclusion de chapitre 2
3. Nano-hétéro-épitaxie sélective du GaN sur substrat de SiC-6H et pseudo-substrat d’AlN
3.1 Le nouveau masque
3.2 Hétéro-épitaxie sélective de nanostructures de GaN sur SiC-6H
3.2.1 Le choix du substrat
3.2.2 Caractérisation des substrats
3.2.3 Croissance de nano-hétéro-structures de GaN sur SiC-6H: influence de la pression dans le réacteur et caractérisation morphologique
3.2.4 Caractérisation par la spectroscopie Raman: la contrainte résiduelle
3.3 Caractérisations optiques et structurales par cathodoluminescence et Microscopie Électronique en Transmission
3.3.1 Caractérisation par cathodoluminescence
3.3.2 Caractérisation par Microscopie Électronique en Transmission (MET)
3.3.2.a Introduction et préparation des échantillons
3.3.2.b Caractérisations par MET des nanostructures de GaN épitaxiées par NSAG sur SiC
3.3.2.c Conclusion des analyses par MET
3.4 Hétéro-épitaxie sélective de nanostructures de GaN sur pseudo-substrat d’AlN
3.4.1 Le choix du pseudo-substrat ou template d’AlN
3.4.2 Caractérisation des substrats
3.4.3 Nano-épitaxie sélective du GaN sur pseudo-substrat d’AlN
3.4.4 Une conception de masque plus élaborée: vers la coalescence
Conclusion du chapitre 3
4. Caractérisations structurales par nano-diffraction des rayons X
4.1 Les masques de fer pour la localisation des nanostructures
4.2 Le « Advanced Photon Source » ou APS d’Argonne
4.3 Étude structurale des nanostructures par nano-diffraction des rayons X
4.3.1 Dispositif expérimental
4.3.2 Description des mesures effectuées
4.4 Caractérisations structurales des nanostructures par la nano-diffraction des rayons X – Aspect général
4.5 Le « χ-effect » et l’inclinaison des plan (0001) dans les nanostructures
4.5.1 Définition
4.5.2 Mesure du χ-effect dans les nanostructures
4.5.3 Discussions intermédiaires
4.6 Espace réciproque et mesure de la contrainte résiduelle selon l’axe c
Conclusion du chapitre 4
Conclusion générale
Références bibliographiques