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Propriétés des électrolytes polymères basés sur le PEO
Propriétés électrochimiques des électrolytes basés sur le PEO
Le PEO est un polyéther semi-cristallin ayant une température de fusion Tf ≈ 60°C et une température de transition vitreuse Tg ≈ -60°C. En mélange avec un sel de lithium pour former un électrolyte, les interactions entre le sel et la matrice polymère apportent une modification de ses propriétés. La conductivité ionique du PEO/sels de lithium atteint des valeurs remarquables pour un électrolyte polymère, de l’ordre de σ ≈ 1 mS.cm-1, au-delà de sa température de fusion Tf = 60°C (Fig. 3).[38] En revanche, en dessous de cette température, la conductivité chute brutalement d’au moins un à deux ordres de grandeur. Cette diminution est due à la cristallisation du polymère. En effet, même si l’ajout de sel dans la structure du PEO entraine la diminution de la cristallinité, il ne la supprime pas totalement. Il est généralement admis que deux facteurs expliquent cette diminution de conductivité, i) la mobilité des cations Li+ est beaucoup plus faible dans les zones cristallines,[39, 40] ii) les résistances aux interfaces zones amorphes/zones cristallines sont importantes.[41] (Plusieurs études antagonistes tendraient néanmoins à prouver que le transport ionique peut être favorisé dans les phases cristallines du PEO grâce à la structure formée entre le polymère et un sel de LiSbF6.[42, 43] Cette thèse a cependant été réfutée dans le cas de sels de natures différentes tels que le LiPF6). Ce phénomène rend le PEO inutilisable à température ambiante. Au-dessus de la température de fusion, l’augmentation de la conductivité en fonction de la température n’est pas linéaire et donne une indication sur le mécanisme de transport des ions.[44, 45] (voir § 1.2.3).
Certains facteurs liés à la structure de la chaîne polymère elle-même vont influencer la conductivité de l’électrolyte. Plusieurs équipes ont notamment étudié l’influence de la masse molaire de la matrice PEO.[38, 46–49] Ces études montrent que plus la masse molaire du polymère est faible, plus la conductivité augmente (dans des conditions identiques). De plus, les extrémités de chaînes jouent un rôle important sur la conductivité. A faible masse molaire (≈ 0,5 kg.mol-1), la présence de groupements hydroxyles[48] aux extrémités de chaînes diminuent la conductivité comparativement à des groupements méthyles.[49] L’étude systématique sur différentes extrémités et longueurs de chaînes confirme l’effet de ces paramètres sur les propriétés électrochimiques du PEO.[38] Ces deux tendances se vérifient principalement pour des masses molaires faibles, en deçà de la masse molaire critique d’enchevêtrement des électrolytes PEO/LiTFSI (Mn < 5,0 g.mol-1).
La forte affinité entre les doublets non liants de la fonction éther et le cation Li+ limite la mobilité de ce cation. La diffusion du Li+ est donc minimisée par rapport à celle de l’anion, résultant en une faible valeur du nombre de transport du cation, généralement inférieure à tLi+ < 0,3.[47]
La nature du sel de lithium utilisé, notamment l’énergie de cohésion de son cristal, ainsi que sa concentration[50] a une importance capitale sur toutes les propriétés de l’électrolyte. En 1989, Armand et al. proposèrent ainsi le LiTFSI qui deviendra le sel de référence dans les applications batteries à base d’électrolytes polymères de type SPEs. En effet même si certains sels de lithium sont solubles en toutes proportions dans le PEO, la conductivité n’évolue pas linéairement avec le taux de sel. Deux optima de conductivité sont généralement observés dans le cas du LiTf,[45] du LiTFSI[51, 52] et du LiBETI[53] (structures chimiques en Fig. 4) pour des rapports O/Li ≈ 16 et O/Li ≈ 8. De nombreuses recherches continuent de développer de nouveaux sels visant à augmenter encore les performances de ces électrolytes. Ces recherches sont principalement axées vers des dérivés d’imides fluorés (Fig. 4) analogues du LiTFSI comme le LiFSI[54] ou le LiBETI[53] (Fig. 4) et plus récemment des analogues asymétriques et/ou partiellement hydrogénés.[55–58] Ces sels sont 18 préférés à des sels classiquement utilisés dans les électrolytes liquides comme le LiPF6 ou le LiClO4, en raison de leur meilleure stabilité chimique, électrochimique et thermique. De plus, l’anion même s’il n’intervient pas dans les réactions électrochimiques d’une batterie, a plusieurs fonctions.
• Son volume et sa structure chimique ont une influence directe sur les propriétés électrochimiques de l’électrolyte. Sa très faible basicité induit par la délocalisation de la charge négative va permettre une excellente dissociation du sel dans le polymère. L’encombrement stérique lié à sa taille modifie sa mobilité, il aura donc aussi une influence sur le nombre de transport. En synthétisant un sel portant un anion plus volumineux et ayant une charge très délocalisée, le LiTTP (Fig. 4), Popovic et al. ont réussi à augmenter le nombre de transport jusqu’à tLi+ ≈ 0,9 dans le diglyme par comparaison au LiTf qui ne dépasse pas tLi+ ≈ 0,5 dans le même solvant.[59]
• Les propriétés mécaniques du PEO sont aussi impactées. La liaison sulfonimide ‘SO2-N-SO2’ très flexible permet une plastification du polymère entrainant la diminution de la Tg et une diminution de la cristallinité du matériau ayant pour effet d’augmenter la mobilité segmentaire favorable au transport ionique.[54]
• Il peut aussi permettre la stabilisation des interfaces électrodes/électrolytes en formant une couche de passivation stable au cours du cyclage. L’utilisation de LiFSI permet ainsi de stabiliser l’interface avec l’électrode en lithium métal au cours du temps contrairement à ce qui peut être
observé avec le LiTFSI (Fig. 6).[54, 60] A l’électrode positive et en présence de LiTFSI, la formation d’une couche de LiF a été identifiée à la surface du LFP.[61]
Malgré une stabilité électrochimique mesurée par voltamétrie cyclique pouvant atteindre 5,3 et 5,7 V vs Li+/Li (respectivement en utilisant le LiFSI et le LiTFSI),[54] la stabilité du PEO en système complet et les réactions aux interfaces formant la SEI (Solid Electrolyte Interface) ne sont que très rarement décrites. Dans le cas de solvants ‘classiques’ utilisés dans les électrolyte liquides, l’ESW diminue sensiblement en système complet, notamment avec les éthers linéaires qui ne sont généralement pas stables au-dessus de 4,5 V vs Li+/Li.[62] Récemment, il a été montré que l’organisation[63] et la structure[64] du PEO limitaient intrinsèquement l’ESW. La présence de groupements hydroxyles terminaux réduit l’ESW à 4,05 V vs Li+/Li en oxydation. Ces groupements ont aussi un impact négatif sur la cyclabilité en raison de la réduction de l’hydrogène de l’alcool terminal à l’électrode négative en Li0. Des extrémités de chaînes ‘protégées’ par des groupements méthyles permettent, quant à elles, de cycler une cellule Li/NMC entre 2,5 et 4,2 V vs Li+/Li.[64] La parfaite maitrise de la synthèse des polymères hôtes pour sels métalliques est donc indispensable pour éviter toute réaction parasite dans des applications batteries. Homann et al.[65] ont étudié de manière systématique l’oxydation du PEO en présence de différents matériaux actifs d’électrodes positives (Fig. 5) et montrent un plateau de potentiel à 4,6 V vs Li+/Li indépendamment du matériau d’électrode utilisé, de la masse molaire du PEO ou de la concentration en sel. Ce plateau de potentiel est attribué à l’oxydation du PEO. Cependant aucune discussion n’est proposée quant à l’effet catalytique des matériaux actifs d’électrodes sur l’oxydation des électrolytes qui peut intervenir dès 4,2 V vs Li+/Li dans le cas d’électrolytes liquides.[62, 66]
Pour ces raisons, aucune application utilisant des matériaux d’électrodes à haut potentiel n’a été développée (à ce jour) à l’échelle industrielle. Le LFP et le V2O5 sont donc généralement les seuls matériaux actifs d’électrodes positives utilisés en cellules complètes avec des électrolytes basés sur une matrice hôte PEO.
Comportement des électrolytes PEO/sels de lithium en cyclage
Cyclage galvanostatique en cellule symétrique Li0-Li0
Le cyclage galvanostatique en cellule symétrique permet d’évaluer le comportement des interfaces Li0/électrolyte et de déterminer la qualité des dépôts du lithium. Il permet aussi d’avoir une première idée du comportement du matériau au contact du lithium métal ainsi qu’un ordre de grandeur du régime utilisable avec l’électrolyte dans une cellule. L’importance du sel de lithium utilisé peut être mise en évidence grâce à cette méthode, en utilisant LiFSI plutôt que LiTFSI, les interfaces formées, en plus d’être beaucoup moins résistives, sont plus stables au cours du temps (respectivement ≈ 75 et 325 Ω.cm-2 pour le PEO/LiFSI et le PEO/LiTFSI après 30 jours).[54] L’utilisation d’un électrolyte PEO/LiFSI permet de cycler deux fois plus longtemps (≈ 200 heures) en cyclage galvanostatique (0,1 mA.cm-2),[60] alors qu’un électrolyte PEO/LiTFSI entre en court-circuit après 100h de cyclage en montrant des micro-courts-circuits (réversibles) dès 50h (Fig. 6 (A) et (B)). Le régime d’utilisation de ces électrolytes est aussi favorisé avec un électrolyte PEO/LiFSI, comme le montre la Fig. 6 (C), un régime de 0,2 mA.cm-2 peut être atteint avec cet électrolyte alors qu’un court-circuit intervient dès 0,1 mA.cm-2 pour le PEO/LiTFSI. En utilisant le LiBETI, Appetechi et al.,[67] réussissent à atteindre 480 cycles de 6h sans court-circuit à 0,2 mA.cm-2. Le sel de lithium utilisé joue donc un rôle fondamental dans la stabilité d’une cellule électrochimique, que ce soit calandaire ou au cours du cyclage.
En associant un PEO de faible masse molaire ayant des extrémités de chaînes contrôlées (Mn = 2 kg.mol-1, terminés par des fonctions méthyl éther) à un mélange de sel LiTFSI/LiFSI, le cyclage galvanostatique a pu être stabilisé jusqu’à 2500h (cycles de 4h).[64] Ici aussi, l’importance de la nature des extrémités de chaînes sur le cyclage est mise en évidence. En effet, un électrolyte basé sur un PEO terminé par des fonctions hydroxyles entraine l’oxydation de la surface du lithium métal qui a un effet désastreux sur la cyclabilité, la réduisant à une centaine d’heures dans les mêmes conditions.
D’autres familles de polymères étudiées
Pour s’affranchir des limites intrinsèques liées aux Polyéthers, plusieurs autres familles ont été proposées comme alternatives. Les propriétés recherchées pour ces matériaux sont : une large ESW (pour pouvoir utiliser des électrodes à plus haut potentiel), l’augmentation du tLi+, une conductivité à température ambiante plus élevée et l’augmentation du module d’Young.[6] Les principales familles de polymères étudiées dans la littérature sont les polycarbonates, les polyesters, les polycétones, les polyimines et les polynitriles, possédant tous des fonctions chimiques permettant la dissolution d’un sel.
Polycarbonates
Les polycarbonates suscitent un intérêt particulier en tant que matrices hôtes de sels de métaux alcalins.[88] La fonction carbonate possède en effet une constante diélectrique beaucoup plus élevée qu’une fonction éther, permettant une meilleure dissolution et séparation des charges lorsqu’un sel est ajouté dans ce type de matrice. L’idée d’utiliser des polycarbonates découle de l’utilisation de carbonates linéaires et cycliques comme solvants dans les électrolytes liquides ‘conventionnels’ (Ethylène Carbonate, Propylène Carbonate, DiMéthyle Carbonate…). Les recherches se sont principalement concentrées sur des polycarbonates aliphatiques en raison de leur dynamique de chaîne plus élevée que celles des polycarbonates aromatiques.[88]
Poly (Vinylene Carbonate)
Le Poly(VInylène Carbonate) (PVIC : Fig. 14) est le polymère du carbonate de vinylène utilisé comme additif dans les électrolytes liquides pour la stabilisation de la SEI des électrodes négatives en graphite. Ce polymère est amorphe et possède une Tg proche de la température ambiante (Tg ≈ 20°C). Les premiers travaux concernant ce polymère apparaissent dans la littérature en 1999 avec la publication de Wei et al.[89] décrivant la synthèse et la conductivité du PVIC mélangé au LiTf. Malgré une Tg proche de la température ambiante, les caractéristiques de cet électrolyte sont intéressantes, atteignant une conductivité de σ = 0,1 mS.cm-1 à 100°C (pour CO3/Li = 1). Les auteurs mettent en évidence une augmentation continue de la conductivité en fonction du taux de sel, contrairement à ce qui peut être observé dans le PEO, et ce malgré une cristallisation du matériau pour des taux de sels important (CO3/Li < 5).
Plus tard, Chai et al.[90] étudieront plus en détail ce matériau. En dehors de la conductivité, ils montrent une large ESW (4,5 V vs Li+/Li) et un nombre de transport élevé (tLi+ = 0,57). Ce matériau permet de cycler une cellule complète (LiLCO) restituant 84% de la capacité initiale après 150 cycles à 50°C, une performance tout à fait remarquable pour un électrolyte polymère ayant une telle Tg. Les investigations concernant ce polymère restent paradoxalement peu nombreuses.
Poly (TriMéthylène Carbonate)
Le Poly(TriMéthylène Carbonate) (PTMC : Fig. 15) est étudié dès 2001 en tant que matrice polymère pour des sels de métaux alcalins. Ce polymère semi-cristallin (ayant une cinétique de cristallisation très lente[91]), présente une Tg sub-zéro (Tg = -20°C), ce qui en fait un bon candidat comme électrolyte polymère. De plus au-delà d’une masse molaire de 100 kg.mol-1 le PTMC possède une longueur de chaîne assez élevée pour avoir une intégrité mécanique suffisante pour former un film.[92]
Deux groupes se sont intéressés à cette matrice. Smith et al. sont les premiers à décrire ce système[93–97] et ses propriétés électrochimiques avec différents sels. Brandell et al. ont poussé l’investigation jusqu’à l’utilisation en cellules complètes[61, 98–100] et ont récemment exploré des applications pour le transport de cations Na+.[24]
Les deux groupes mesurent une conductivité proche l’une de l’autre avec deux sels différents : σ ≈ 2*10-6 mS.cm-1 pour PTMC5/LiBF4[95] et σ ≈ 3*10-6 mS.cm-1 pour PTMC8/LiTFSI[99] à 60°C. Ces deux sels présentent les meilleures propriétés parmi ceux étudiés.[93, 94, 96, 97] En revanche l’évolution de la conductivité en fonction de la concentration est différente selon le sel utilisé. Dans le cas du LiBF4 et du LiPF6, plus le taux de sel est important, plus la conductivité croît,[95, 97] tandis qu’une concentration optimale comprise entre 8 < CO3/Li < 13 est observée pour le LiTFSI.[98]
Deux autres propriétés importantes ressortent de ces études. Comme dans le cas du PVIC, l’ESW est plus étendue que dans le cas du PEO et est supérieure à 4,5 V vs Li+/Li.[95–98] Cette valeur permet d’envisager l’utilisation de matériaux actifs d’électrodes positives à haut potentiel. Le nombre de transport du cation Li+ s’avère aussi être très élevé, atteignant tLi+ = 0,8.[100] Cette valeur exceptionnelle fait partie des plus élevées parmi les électrolytes polymères et s’approche des valeurs obtenues dans des électrolytes polymères à conduction unipolaire (Single-Ion Polymer Electrolytes (SIPEs)).
Le comportement de ces électrolytes en cellules complètes Li0PTMC5(LiTFSI)LFP et Li0PTMC5(LiBF4)LFP a été étudié par Sun et al.[99] La première conclusion tirée de cette étude est le meilleur comportement en cyclage d’un électrolyte utilisant LiTFSI. Dans le cas de l’utilisation du LiTFSI, malgré une bonne restitution de capacité après 100 cycles (153 mAh.g-1), il faut attendre le trentième cycle pour atteindre cette valeur (Fig. 16 (B)). Comme l’avait déjà montré une précédente étude,[98] les premiers cycles ne restituent qu’environ 10 mAh.g-1. Ces propriétés médiocres en début d’utilisation sont attribuées au mauvais contact interfacial entre l’électrode et l’électrolyte. Ce problème a pu être en partie corrigé en formulant l’électrolyte avec un oligomère du PTMC (DPn = 6) permettant d’améliorer le contact aux interfaces. Grâce à cette subtilité, il a été possible d’obtenir une capacité de 130 mAh.g-1 sur les premiers cycles. (Fig. 16 (C)).
Un des désavantages du PTMC est sa faible tenue mécanique. L’utilisation de polymère de haute masse molaire (> 100 kg.mol-1) permet d’obtenir une intégrité mécanique suffisante qui s’établit néanmoins au détriment de la mobilité de chaînes ce qui a une influence néfaste sur la conductivité. L’absence de cristallinité, dû à l’ajout de sel, et la Tg sub-zéro de ces électrolytes, limitent leur intégration dans des systèmes à plus grandes échelles. Une solution à ce problème est d’en faire des structures réticulées. Mindemark et al.[101] proposent un dérivé du PTMC portant une fonction latérale allyléther sur chaque motif de répétition. La présence de ce groupement latéral permet à la fois de diminuer la Tg (du polymère non réticulé comparé à un PTMC sans groupement latéral) et de permettre la réticulation chimique. Le gain apporté par la réticulation sur les propriétés mécaniques est considérable et permet d’augmenter le module d’Young jusqu’à 30 MPa. De plus, les électrolytes PTMC/LiTFSI réticulés de cette manière montrent une augmentation de la conductivité (σ = 4,3*10-4 mS.cm-1 à 25°C, CO3/Li = 5) d’un ordre de grandeur comparée à une matrice PTMC, due à l’effet plastifiant du groupement latéral. En cellule complète, une augmentation de la capacité lors des premiers cycles est également observée (comme dans le cas de PTMCs non réticulés) et est aussi attribuée aux mauvais contacts aux interfaces électrodes/électrolytes.
Poly(Ethylène Carbonate)
Parmi les polycarbonates, le Poly(Ethylène Carbonate) (PEC : Fig. 17) suscite un intérêt particulier comme électrolyte polymère[102] en raison de son niveau de conductivité élevée, de son nombre de transport élevé et de sa large ESW. Plusieurs sels ont été étudiés en mélange avec cette matrice polymère montrant deux comportements thermiques et électrochimiques différents en fonction de la concentration. Dans le cas du LiClO4 et du LiTf, l’ajout de sel augmente la Tg aboutissant à une diminution de la conductivité. Concernant les autres sels (LiTFSI, LiBETI, LiBF4, LiFSI),[103, 104] le comportement inverse est observé : plus la concentration augmente, plus la Tg diminue et plus la conductivité augmente. Les sels les plus étudiés restent LiTFSI et LiFSI. Malgré une conductivité modérée lorsque le taux de LiFSI dans l’électrolyte est faible (σ = 3*10-4 mS.cm-1 à 70°C, pour CO3/Li = 10), il a été possible d’atteindre une conductivité de σ = 3*10-2 mS.cm-1 à 30°C pour un taux de sel correspondant à CO3/Li = 0,53.[104–108]
Comme dans le cas du PTMC, le nombre de transport dans les électrolytes basés sur le PEC est supérieur à celui classiquement mesuré dans le cas des analogues PEO/sels de lithium (tLi+ ≈ 0,1-0,2) dépassant tLi+ > 0,5.[104, 109]
L’évaluation de l’ESW de ce matériau effectuée par voltamétrie cyclique a montré une stabilité à 0 V vs. Li+/Li en réduction et jusqu’à 4,5 V vs Li+/Li pour des faibles taux de sels. Une concentration importante en sel permet synergétiquement d’augmenter la conductivité et d’élargir la fenêtre de stabilité électrochimique. En effet, en augmentant le taux de sel de 10 mol% à 120 mol%, Tominaga et al. ont étendu l’ESW à 5,5 V vs. Li+/Li (sur électrodes de travail en acier inoxydable et en aluminium).[106] Ces deux études ont aussi démontré la passivation du collecteur de courant en aluminium lorsque le taux de sel est important (> 80 mol%), permettant d’éviter les problèmes de corrosion de ce collecteur pendant l’utilisation à long terme de la batterie.[108]
Cependant, une étude récente remet en question la stabilité de cette matrice hôte polymère face à des sels de lithium. En effet, selon cette étude, lorsque la concentration en LiTFSI est élevée (> 100 mol%), l’eau et le solvant (acetonitrile) résiduel mènent à la dégradation du polymère. Cette dégradation entraine la formation des monomères EC ou PC ce qui permet d’expliquer la diminution de la Tg et l’exceptionnelle conductivité de ces électrolytes.[110]
Des premières investigations concernant le comportement de cet électrolyte en cellule complète (Li0PEC0,53(LiFSI)LFP) ont montré des performances encourageantes sur 30 cycles Fig. 16 (B).[109] Ce matériau utilisé avec un taux de sel très élevé (188 mol%) permet un cyclage à 30°C restituant une capacité de 130 mAh.g-1, en faisant un des rares exemples de fonctionnement d’un accumulateur avec électrolyte polymère à ‘basse’ température (proche de la température ambiante).
Dérivés du PTMC et du PEC
De nombreux dérivés des deux précédentes structures (PTMC et PEC) portant des groupements latéraux ont été étudiés. La modification des structures avec la présence de fonctions latérales a pour but de diminuer la Tg afin d’augmenter la mobilité segmentaire des chaînes polymères. Intuitivement, il était prévu de favoriser le transport ionique en augmentant la dynamique des chaînes polymère. Brandell et al.[111–114] ont étudié deux analogues du PTMC portant des groupements latéraux alkyles, le PBEC et le PHEC (Fig. 19 (A)). Malgré une diminution significative de la Tg, aucun de ces analogues n’a réussi à surpasser les propriétés des électrolytes basés sur le PTMC en terme de conductivité (Fig. 19 (B)). Récemment, Ebadi et al.[114] ont prouvé expérimentalement et par modélisation, qu’un groupement pendant flexible, même s’il réduit la Tg, n’a pas forcément un effet bénéfique sur la conductivité du matériau. Les groupements latéraux présents diminuent la ‘concentration’ et la percolation des fonctions carbonates, rendant le passage d’un site de coordination à l’autre moins favorable : ils diminuent donc la mobilité des ions dans la matrice.
Parmi les dérivés du PEC, un focus peut être fait sur le Poly(Propylène Carbonate) (PPC), différent de la structure du PEC par la présence d’un groupement latéral méthyle. Ce polymère est faiblement semi-cristallin avec une Tg supérieure à la température ambiante (Tg = 34°C). Malgré une Tg plus élevée que le PEC, la conductivité du PPC5/LiTFSI (5 motifs PC par équivalent de LiTFSI) est proche de celle du PEC5/LiTFSI (σ ≈ 0,11 mS.cm-1 à 100°C). Lorsque la concentration en LiTFSI augmente, Li et al.[115] ont montré que le PPC surpasse les performances du PEC, atteignant une conductivité de σ = 0,6 mS.cm-1 à 30°C pour PPC1,25/LiTFSI. Ce matériau n’a cependant pas été utilisé en tant que tel en système complet probablement en raison de sa faible tenue mécanique. L’imprégnation d’une membrane en cellulose avec cet électrolyte montre un très bon comportement en terme de conductivité ionique (σ ≈ 0,3 mS.cm-1 à 20°C), une large ESW (≈ 4,6 V vs Li+/Li) ainsi qu’une très bonne tenue en cyclage en cellule Li/LFP (116 mAh.g-1 à 0,5 C avec rétention de cette capacité de 95% après 1000 cycles).[116] D’autres homologues du PEC, portant des chaînes latérales plus longues et de natures différentes ont été synthétisés et caractérisés par Tominaga et al.[117–119] Leurs études se sont portées sur des chaînes latérales ‘HC’ (HydroCarbon) et d’autres chaînes portant le motif GE (Glycidyl Ether) (Fig. 20).
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Table des matières
Références de l’introduction générale :
Chapitre I Etude bibliographique : Développement et progrès des électrolytes polymères pour applications batteries
Introduction
1. La référence PEO (PolyEthylene Oxyde)
1.1. La genèse des électrolytes polymères basés sur le PEO
1.2. Propriétés des électrolytes polymères basés sur le PEO
1.2.1. Propriétés électrochimiques des électrolytes basés sur le PEO
1.2.2. Comportement des électrolytes PEO/sels de lithium en cyclage
1.2.2.1. Cyclage galvanostatique en cellule symétrique Li0-Li0
1.2.2.2. Cyclage en cellule complète
1.2.3. Mécanisme de transport dans les électrolytes basés sur le PEO
1.3. La seule approche ‘tout-solide’ existante à l’échelle industrielle
2. D’autres familles de polymères étudiées
2.1. Polycarbonates
2.1.1. Poly (Vinylene Carbonate)
2.1.2. Poly (TriMéthylène Carbonate)
2.1.3. Poly(Ethylène Carbonate)
2.1.4. Dérivés du PTMC et du PEC
2.2. Polyesters
2.3. Polycétones
2.4. Polyalcools
2.5. Polymères azotés
2.5.1. Polyimines
2.5.2. Polynitriles
3. Electrolytes copolymères
3.1. Copolymères statistiques
3.2. Copolymères à blocs
3.3. Copolymères à architecture en peigne
4. Polymères ioniques
4.1. Poly(liquide ionique)s
4.2. Electrolytes polymères à conduction unipolaire : SIPEs
Conclusion
Références du chapitre I :
Chapitre II Synthèses et caractérisations (physico)chimiques, structurales et thermiques d’oligo et poly(triméthylène carbonate)
Introduction
1. Synthèse des blocs conducteurs ioniques PTMCs
1.1. ROP du TMC : état de l’art
1.2. Synthèse des PTMCs
1.2.1. ROP organocatalysée du TMC amorcée avec le 3-phenylpropan-1-ol
1.2.2. ROP organocatalysée du TMC amorcée avec des phénols
1.2.3. Déclinaison de la ROP organocatalysée à d’autres amorceurs
2. Caractérisations des PTMCs et leurs électrolytes
2.1. Analyse infrarouge des électrolytes
2.2. Analyses thermogravimétriques
2.2.1. Thermostabilité des PTMCs
2.2.2. Thermostabilité des électrolytes
2.3. Calorimétrie différentielle à balayage
2.3.1. Calorimétrie différentielle à balayage des PTMCs
2.3.2. Calorimétrie différentielle à balayage des électrolytes
2.3.2.1. Calorimétrie différentielle à balayage des électrolytes PTMCs/LiTFSI
2.3.2.2. Calorimétrie différentielle à balayage des électrolytes PTMCs/sels de lithium
2.4. Diffusion des rayons X aux petits et grands angles (SAXS/WAXS)
2.4.1. Analyses SAXS/WAXS des PTMCs
2.4.2. Analyses SAXS/WAXS des électrolytes PTMCs/LiTFSI
2.5. Analyses rhéologiques
Conclusion
Références du chapitre II :
Chapitre III : Synthèse et caractérisations (physico)chimiques, thermiques et structurales de copolymères à architecture macromoléculaire en peigne basés sur un squelette PPFS et des chaînes latérales conductrices ioniques PTMC et PEO
Introduction
1. Synthèse du squelette Poly(2,3,4,5,6-pentafluorostyrène)
1.1. Polymérisation du PFS : état de l’art
1.2. Polymérisation du PFS par catalyse Ziegler-Natta
1.2.1. Catalyse Ziegler-Natta : état de l’art
1.2.2. Protocole de polymérisation du PFS par catalyse Ziegler-Natta
1.3. Analyse thermogravimétrique du PPFS
1.4. Calorimétrie différentielle à balayage
1.5. Diffusion des rayons X aux petits et grands angles
2. Synthèse de copolymères à architecture macromoléculaire en peigne par substitution nucléophile aromatique du PPFS
2.1. Substitution nucléophile aromatique : état de l’art
2.2. Synthèse des copolymères à architecture macromoléculaire en peigne PPFS-g-PEO.122
2.2.1. Analyses thermogravimétriques
2.2.1.1. Analyses thermogravimétriques des copolymères à architecture macromoléculaire en peigne PPFS-g-PEO
2.2.1.2. Analyse thermogravimétrique des électrolytes PPFS-g-PEO/LiTFSI
2.2.2. Calorimétrie différentielle à balayage
2.2.2.1. Calorimétrie différentielle à balayage des copolymères à architecture macromoléculaire en peigne PPFS-g-PEO
2.2.2.2. Calorimétrie différentielle à balayage des électrolytes PPFS-g-PEO/LiTFSI
2.2.3. Diffusion des rayons X aux petits et grands angles (SAXS/WAXS)
2.2.3.1. Analyses SAXS/WAXS des copolymères à architecture macromoléculaire en peigne PPFS-g-PEO
2.2.3.2. Analyses SAXS/WAXS des électrolytes PPFS-g-PEO/LiTFSI
2.3. Synthèse des copolymères à architecture macromoléculaire en peigne PPFS-g-PTMC
2.3.1. Analyses thermogravimétriques
2.3.1.1. Analyses thermogravimétriques des PPFS-g-PTMC
2.3.1.2. Analyses thermogravimétriques des électrolytes PPFS-g-PTMC/LiTFSI
2.3.2. Calorimétrie différentielle à balayage
2.3.2.1. Calorimétrie différentielle à balayage des copolymères à architecture macromoléculaire en peigne PPFS-g-PTMC
2.3.2.2. Calorimétrie différentielle à balayage des électrolytes copolymères PPFS-g-PTMC/LiTFSI
2.3.3. Diffusion des rayons X aux petits et grands angles (SAXS/WAXS)
2.3.3.1. Analyses SAXS/WAXS des copolymères en peigne PPFS-g-PTMC
2.3.3.2. Analyses SAXS/WAXS des électrolytes PPFS-g-PTMC/LiTFSI
Conclusion
Références du chapitre III :
Chapitre IV : Caractérisations électrochimiques des homopolymères et copolymères à architecture macromoléculaire en peigne
Introduction
1. Caractérisations électrochimiques des électrolytes homopolymères PTMCs/sel de lithium
1.1. Stabilité électrochimique des PTMC/LiTFSI
1.2. Mesure de la conductivité ionique des électrolytes PTMC/sels de lithium
1.2.1. Influence de la nature du sel sur la conductivité des électrolytes PTMC/Sels de lithium
1.2.2. Influence de la masse molaire sur la conductivité ionique des électrolytes PTMC/LiTFSI.
1.2.3. Influence de la concentration en LiTFSI sur la conductivité des électrolytes PTMC/LiTFSI
1.3. Caractérisations des électrolytes PTMC/LiTFSI en cellules symétriques Li-Li
1.3.1. Détermination du nombre de transport
1.3.1.1. Influence de la nature du sel sur le nombre de transport des électrolytes PTMC/LiTFSI
1.3.1.2. Influence de la masse molaire des matrices sur le nombre de transport des électrolytes PTMC/LiTFSI
1.3.1.3. Influence de la concentration en LiTFSI sur le nombre de transport des électrolytes PTMC/LiTFSI
1.3.2. Cyclage galvanostatique
1.4. Caractérisations électrochimiques des électrolytes PTMC/LiTFSI en cellules Li-NMC
1.5. Discussion sur le mécanisme de transport ionique dans une matrice PTMC
2. Caractérisations électrochimiques des électrolytes copolymères à architecture en peigne
2.1. Mesure de la conductivité ionique des électrolytes copolymères à architecture en peigne
2.1.1. Mesure de la conductivité ionique des copolymères PPFS-g-PTMC/LiTFSI
2.1.2. Mesure de la conductivité ionique des copolymères PPFS-g-PEO/LiTFSI
2.2. Caractérisations des électrolytes en cellules symétriques Li-Li
2.2.1. Mesure du nombre de transport
2.2.1.1. Mesures du nombre de transport des électrolytes PPFS-g-PTMC/LiTFSI
2.2.1.2. Mesures du nombre de transport des électrolytes PPFS-g-PEO/LiTFSI
2.2.2. Cyclage galvanostatique
2.2.2.1. Cyclage galvanostatique des électrolytes PPFS-g-PTMC/LiTFSI
2.2.2.2. Cyclage galvanostatique des électrolytes PPFS-g-PEO/LiTFSI
2.3. Caractérisation des électrolytes copolymères à architecture en peigne en cellules complètes
2.3.1. Caractérisation des électrolytes PPFS-g-PTMC/LiTFSI en cellules Li/NMC
2.3.2. Caractérisation des électrolytes PPFS-g-PEO/LiTFSI en cellules Li/LFP
Conclusion
Références
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