Propriétés des plasmas astrophysiques

Les plasmas astrophysiques

Un plasma est un gaz de particules totalement ou partiellement ionisées. En raison de la charge électrique des particules qui le constituent, un plasma est un très bon conducteur, par opposition aux gaz neutres, qui sont isolants. Du fait de la grande mobilité des charges électriques dans un milieu conducteur, tout déséquilibre de charge dans un plasma se neutralise très vite, ce qui entraine une quasi-neutralité du milieu.

Exemples de plasmas

Les plasmas sont omniprésents dans l’Univers. Du fait des conditions qui y règnent, que ce soit en raison d’une faible densité de matière (milieux interplanétaire et interstellaire) ou d’une très haute température (étoiles, disques d’accrétion, etc.), l’essentiel de la matière s’y présente sous cet état. Deux exemples de ces plasmas sont montrés sur la Fig.1.1. Alfvén & Fälthammar (1963) ont distingué trois catégories de plasmas dans le système solaire : les plasmas de haute densité, les plasmas de moyenne densité et les plasmas de faible densité. Le plasma de haute densité correspond au plasma que nous trouvons à l’intérieur du Soleil. C’est un plasma opaque, où les photons sont continuellement absorbés et réémis par la matière. Dans le système solaire, ce plasma ne se trouve qu’à l’intérieur du Soleil, c’est-à-dire tout ce qui se situe sous la photosphère, la surface observable du Soleil. La densité de plasma de la photosphère et des couches inférieures est supérieure à 10¹³ cm−3 . De manière plus générale, il constitue les étoiles et les disques d’accrétion que nous pouvons observer dans l’Univers. Les plasmas de moyenne densité sont observables dans les régions de transition entre haute et basse densités. Ils constituent les couches les plus hautes du Soleil,telles que la chromosphère (∼ 10¹¹ cm−3 ) ou la couronne solaire (∼ 10⁷ cm−3 ), ainsi que les plus hautes couches des atmosphères planétaires. En ce qui concerne la Terre, par exemple, nous estimons que le plasma est de densité moyenne à partir d’environ 70 km d’altitude. À cette altitude se situe une couche appelée ionosphère (∼ 10⁵ − 10⁶ cm−3 ), où l’atmosphère est ionisée. Le plasma demeure de densité moyenne jusqu’à plusieurs rayons terrestres de distance. Dans un contexte plus large, les jets astrophysiques  rentrent en grande partie dans cette catégorie-là.

Les plasmas de faible densité sont aussi appelés plasmas non collisionnels. Dans le système solaire, ces plasmas sont essentiellement composés du vent solaire (∼ 5 cm−3 ), c’est-à-dire l’échappement permanent de matière solaire, ainsi que des échappements planétaires. Ils constituent également l’essentiel du milieu interstellaire, y compris certaines structures telles que des nuages de gaz de type nébuleuse. Les plasmas astrophysiques sont en général fortement ionisés, ce qui les distingue des plasmas faiblement ionisés que nous observons sur Terre au quotidien (foudre, lampe néon, etc.). Ces derniers ne sont généralement que partiellement ionisés et leur environnement est très différent des plasmas spatiaux. L’étude des plasmas astrophysiques a donc été un apport important notre connaissance des plasmas, qui permet aujourd’hui notamment de développer la physique des plasmas de laboratoire, notamment celle des tokamaks. Les tokamaks sont des systèmes toroïdaux dont le but est d’isoler magnétiquement un plasma de très haute énergie. Grâce à eux, nous espérons devenir capable d’exploiter l’énergie de fusion nucléaire.

La dynamique d’un plasma peut être étudiée de deux manières différentes. La première consiste à considérer le plasma comme une collection de particules. La seconde revient à le voir comme un ensemble macroscopique. Nous parlons d’approches cinétique et fluide, respectivement. Dans l’approche cinétique, nous nous attachons à la dynamique de la fonction de distribution des particules constituantes du plasma, considérées comme en nombre infini. Pour cela, nous utilisons une approche statistique et étudions les distributions de particules. Dans l’approche fluide, nous gommons les détails microscopiques pour ne regarder que la dynamique des grandeurs moyennes, telles que la densité, la vitesse d’ensemble ou la pression d’une population. Dans ce cas-là, le plasma est pensé comme un fluide (ou un ensemble de fluides).

modélisations du plasma, fluides comme cinétiques, sont abordées plus en détail, telle que la Magnéto-Hydro-Dynamique (MHD), qui décrit le plasma comme un fluide unique. Une autre propriété importante des plasmas est la collisionalité. Une collision, pour une particule dans un plasma, correspond à un changement de direction de la particule après avoir subi une série d’intéractions sur un temps donné. Un plasma est considéré comme collisionnel si l’échelle caractéristique lc du système est supérieure au libre parcours moyen λ des particules. Par conséquent, si nous nous rapportons aux catégories décrites dans la Sec.1.1.1, les plasmas de hautes et moyennes densités sont plus probablement collisionnels (lc > λ), tandis que les plasmas de faible densité sont le plus souvent non collisionnels (lc < λ). Les plasmas observables sur Terre sont généralement collisionnels. Cette propriété affecte notamment le concept de température dans le plasma. Dans un plasma collisionnel, toute fonction de distribution des particules non-Maxwellienne est instable. Le plasma est donc à terme composé de populations suivant la même loi de distribution Maxwellienne des vitesses, ce qui permet de définir une température unique, au sens thermodynamique du terme. Dans les plasmas non-collisionnels, ou faiblement collisionnels, en revanche, rien n’empêche deux populations avec des énergies très différentes de coexister spatialement. La température peut se définir pour chaque population en fonction de l’écart-type de la distribution de vitesse. Il est bien sûr toujours possible de déterminer une température moyenne totale.

Le gel du champ magnétique

Le couplage entre plasmas et champs électromagnétiques à grande échelle structure les milieux astrophysiques. Il repose sur la notion de gel du champ magnétique. Le gel du champ magnétique B signifie que les vitesses v du plasma et vgel du champ magnétique sont confondues dans la direction perpendiculaire au champ magnétique (nous verrons que la vitesse vgel du champ magnétique, définie plus loin dans l’Eq.1.11, est par définition perpendiculaire à B). La vitesse v correspond à la vitesse moyenne des particules du plasma, supposée identique pour toutes les espèces (ions et électrons). Pour comprendre le phénomène de gel, nous nous placerons dans un milieu stationnaire avec un plasma non-collisionnel et totalement ionisé. Nous considèrons que le plasma se déplace à une vitesse moyenne v uniforme. En l’absence de gradients de pression importants, nous déduisons des équations de la dynamique :

E = −v × B (1.7)

où E le champ électrique et B le champ magnétique. Cette relation est aussi appelée la loi d’Ohm idéale. Cette équation peut ensuite être injectée dans l’équation de Maxwell-Faraday :

∂B/∂t = −∇ × E

À partir des équations 1.7 et 1.8, nous déduisons :

∂B/∂t = ∇ × (v × B) (1.9)

Cette équation permet de faire le lien entre vitesse du plasma et champ magnétique. De ce lien résulte le caractère gelé du champ magnétique. Pour s’en convaincre, considérons le flux magnétique ΦB passant à travers la surface S, normale au champ magnétique, d’un élément fluide. La dérivée de ce flux s’écrit :

dΦB/dt = ∂ΦB/∂t + v · (∇ΦB) (1.10) .

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Table des matières

1 Introduction
1.1 Les plasmas astrophysiques
1.1.1 Exemples de plasmas
1.1.2 Propriétés des plasmas astrophysiques
1.1.3 Le gel du champ magnétique
1.2 La reconnexion magnétique
1.2.1 Historique de la reconnexion magnétique
1.2.2 Mécanisme de la reconnexion magnétique
1.2.3 Jet et champ de Hall
1.2.4 Le taux de reconnexion magnétique
1.3 La magnétosphère terrestre
1.3.1 Le cycle de Dungey
1.3.2 Les dérives de particules
1.3.3 Effets de rayon de Larmor fini
1.3.4 Missions spatiales magnétosphériques
1.4 Les ions froids magnétosphériques
1.4.1 Composition et origine du plasma magnétosphérique
1.4.2 Plumes magnétosphériques et apport de masse
2 Modélisation numérique de la reconnexion magnétique en milieu non-collisionnel
2.1 Aperçu des différents formalismes de modélisation numérique
2.2 Modèles descriptifs de plasmas astrophysiques
2.2.1 Le modèle cinétique de Vlasov
2.2.2 Le modèle de Vlasov Hybride
2.2.3 Modèles Magnéto-Hydro-Dynamiques
2.3 Simulations Particle-In-Cell (PIC)
3 Couche de courant asymétrique, reconnexion magnétique et importance de l’état initial
3.1 Introduction
3.1.1 Les équilibres cinétiques
3.1.2 Le modèle BAS
3.1.3 Plan du chapitre
3.1.4 Modèle numérique et normalisations
3.2 Impact des électrons sur l’équilibre BAS
3.2.1 Conditions initiales
3.2.2 Description générale et limitations
3.2.3 Effets cinétiques des électrons
3.3 Reconnexion magnétique asymétrique et conditions initiales
3.3.1 Conditions initiales
3.3.2 Relaxation de la couche de courant
3.3.3 Évolution du taux de reconnexion
3.3.4 Evolution des signatures de la reconnexion magnétique
3.4 Résumé et discussion
4 Impact des ions froids magnétosphériques sur la reconnexion magnétique
4.1 Introduction
4.2 Normalisations, modèle numérique, conditions initiales communes
4.3 Le champ électrique de Larmor
4.4 Effet de la température des ions froids sur la reconnexion magnétique114
4.4.1 Modélisation des ions froids
4.4.2 Comparaison des simulations avec et sans ions froids
4.4.3 Dynamique cinétique des ions froids à proximité de la ligne X
4.4.4 Dynamique cinétique avec et sans ions froids loin de la ligne X
4.5 Résumé et discussion
5 Signatures des ions froids le long des séparatrices magnétosphériques
5.1 Introduction
5.2 Signatures des ions froids
5.2.1 Régions de raréfaction et de compression des ions froids
5.2.2 Effet de rayon de Larmor fini : signature en forme de croissant
5.2.3 Comparaison des fonctions de distributions pour les différentes populations
5.2.4 Chauffage parallèle des ions froids aux séparatrices
5.3 Discussion
5.4 Conclusion
6 Conclusion

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