Propagation et réémission des ondes de Lamb dans une plaque immergée

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ONDES DE LAMB DANS UNE PLAQUE LIBRE

Les ondes de Lamb se propagent de manière quasiment similaire dans une plaque entièrement libre (sans couplage avec un milieu extérieur) et dans une plaque plongée dans un fluide, à condition que la masse volumique du fluide reste inférieure à la masse volumique de la plaque (Chimenti et Rokhlin 1990). Le cas d’une plaque libre est plus simple à étudier car les ondes de Lamb ne s’y atténuent pas. Ainsi pour parvenir à une bonne compréhension des phénomènes qui se passent dans une plaque immergée, il a d’abord été nécessaire d’étudier le cas de la propagation dans une plaque libre.

Présentation générale

Les ondes qui se déplacent dans des plaques ont été théorisées en 1917 par Horace Lamb (Lamb 1917) et portent son nom. On distingue classiquement deux catégories de modes de Lamb : les modes antisymétriques et symétriques, selon que la section de la plaque se déforme de manière symétrique ou pas (voir Figure 2). Cette appellation se base donc sur la symétrie ou non des déplacements normaux observés à la surface.
Figure 2: Schématisation des modes de Lamb antisymétriques ou de flexion (gauche) et symétriques ou de compression (droite)
Les modes antisymétriques et symétriques sont aussi appelés respectivement modes de flexion et modes de compression. Cette terminologie fait référence aux déplacements parallèles à la surface de la plaque qui induisent plutôt des efforts de flexion ou de compression (voir Figure 2). Ces différences entre déplacements normaux et parallèles seront détaillées dans la section I.2.3.

Équations de dispersion et fréquences de coupure

Les équations de dispersion permettent de calculer le nombre d’onde noté ? des différents modes de Lamb. Ces équations sont assez répandues dans la littérature (Castaings, Le Clezio, et Hosten 2002; Royer et Dieulesaint 1996; Rose 1999; Viktorov 2013)
Ces équations sont invariantes pour le produit fréquence-épaisseur. Les résultats seront donc affichés en fonction du produit ?.? en MHz.mm, ce qui permet d’utiliser les mêmes courbes même si l’épaisseur de la plaque change.
La Figure 3 montre les nombres d’onde des différents modes de Lamb calculés pour une plaque en acier inoxydable (??=5750⁡?/? et ??=3150⁡?/?). La résolution a été faite pour chaque mode par un algorithme de Levenberg-Marquardt qui cherche la racine des équations (1.1) et (1.2). On se limite pour l’instant à la recherche des racines réelles, les cas des racines complexes et imaginaires pures seront évoqués au début du chapitre IV. On sélectionne le mode voulu en jouant sur le nombre d’onde initial fourni à l’algorithme aux environs de la première fréquence (dite fréquence de coupure). Une fois qu’un mode est identifié, la même opération est répétée à une fréquence supérieure et la nouvelle initialisation du nombre d’onde est obtenue par extrapolation linéaire avec les deux solutions précédentes. Cette routine permet une résolution numérique assez rapide, mais son inconvénient est la recherche manuelle de la première solution de chaque mode aux alentours des fréquences de coupure.
Remarquons que cette numérotation donne des fréquences de coupure qui ne sont pas classées par ordre croissant. Ainsi pour ?=3, la fréquence de coupure correspondante pour les modes symétriques vaut 8,625 MHz.mm et elle est positionnée avant 6,3 MHz.mm (fréquence de coupure pour ?=4). De même pour les modes antisymétriques, 4,725 MHz.mm (?=3) est positionnée après 5,75 MHz.mm (?=2).
Si les harmoniques sont numérotées de façon stricte de cette manière (c’est-à-dire Am et Sm), elles ne seront pas classées par ordre croissant pour des fréquences croissantes. On aurait par exemple l’ordre suivant pour les modes antisymétriques A1, A3, A2, A6, A4, A7, A5 et A8. À notre connaissance un livre utilise cette convention (Royer et Dieulesaint 1996), mais toutes les autres publications lues classent simplement les harmoniques par ordre croissant avec la fréquence. Nous utiliserons donc cette dernière convention plus intuitive dans ce manuscrit (qui est déjà utilisée pour la Figure 3).

Structure des déplacements

Les ondes de Lamb font vibrer les particules de la plaque selon un mouvement elliptique, c’est-à-dire avec une composante de déplacement dans le sens de la propagation (axe ?) et une autre perpendiculaire à la propagation (axe ?). Les axes de référence ? et ? sont positionnés sur le schéma de principe de la Figure 2. Ces déplacements varient selon la position dans l’épaisseur de la plaque, c’est-à-dire selon l’axe ?. Leur expression analytique est rappelée dans les équations (1.5) et (1.6) qui sont détaillées dans (Royer et Dieulesaint 1996; Rose 1999; Viktorov 2013; Frank Pai, Deng, et Sundaresan 2015).
Notons que les deux composantes de déplacement ?? et ?? sont déphasées de ?2 (?? est déphasé de +?2 par rapport à ??). Quand le déplacement selon ?? est maximum, celui selon ?? est à zéro : elles sont en quadrature de phase. Numériquement, si le déplacement calculé ?? est réel, celui calculé sur ?? sera imaginaire pur et vice versa.
Les figures suivantes (Figure 4 à Figure 8) présentent quelques structures de déplacements des modes A0, S0, A1, S1 et S2 à quelques produits ?.? d’intérêt. Pour la visualisation, le déphasage de ?2 n’est pas pris en compte et les profils ?? et ?? sont affichés en phase (même si physiquement cette configuration n’existe pas). Pour aider à la visualisation de la section de la plaque, l’axe ? est positionné verticalement. Enfin les courbes sont normalisées pour que le déplacement maximum soit d’amplitude unité.
Comme attendu, les modes antisymétriques présentent un profil ?? symétrique par rapport au plan médian de la plaque ?=0 (Figure 4 par exemple), et le profil ?? des modes symétriques change de signe pour présenter des déplacements de signe opposé aux surfaces (Figure 5 par exemple).
Pour A0 et S0 (Figure 4 et Figure 5), les déplacements des deux composantes sont amortis au centre de la plaque à partir de 8 MHz.mm. La longueur d’onde de ces modes commence à devenir petite par rapport à l’épaisseur de la plaque, et ils tendent à se comporter comme deux ondes de Rayleigh sur chaque face de la plaque, avec de moins en moins de déplacements au centre. En revanche ce n’est pas le cas pour les autres modes.
Une discussion plus approfondie sur ce sujet est disponible dans (Viktorov 2013).
Quand la plaque sera plongée dans un fluide, on s’intéressera tout particulièrement à la réémission d’énergie dans le fluide, pilotée par les déplacements normaux aux surfaces des plaques, c’est-à-dire ?? en ? = ±
On peut déjà remarquer que la répartition de ce déplacement varie fortement en fonction du mode et de la fréquence : pour S0 (Figure 5), il est faible à 1 MHz.mm et dominant à partir de 2.5 MHz.mm. Il est relativement constant pour A0 (Figure 4) aux trois fréquences affichées. Pour A1 (Figure 6), il est faible à 2 MHz.mm, dominant à 4.5 MHz.mm et de nouveau moins important à 8MHz.mm. Pour S1 (Figure 7), il est quasiment nul à 4MHz.mm, dominant à 6.5 MHz.mm et un peu moins important à 8 MHz.mm. Enfin pour S2 (Figure 8), il est dominant à 5 MHz.mm, et dominé par ?? (? = ± ) à 8 MHz.mm. Nous retrouverons et quantifierons ce comportement lors de l’étude d’une plaque plongée dans un fluide dans la section I.3.2.

Propagation dispersive

Les ondes de Lamb se propagent de manière dispersive, c’est-à-dire que leurs caractéristiques de propagation (vitesse de phase et de groupe) varient avec la fréquence (voir Figure 9).

Distinction entre propagation peu et très dispersive

On peut a priori distinguer deux cas de propagation : une propagation peu dispersive, et une très dispersive.
Dans le cas d’une propagation peu dispersive, le paquet d’onde a tendance à garder sa forme initiale. L’enveloppe de l’onde se propage à la vitesse de groupe, et les oscillations à l’intérieur se propagent à la vitesse de phase. Les deux vitesses sont a priori différentes, mais le paquet d’onde garde à peu près sa forme d’origine du moment que les vitesses de groupe contenues dans la bande fréquentielle du signal varient peu. Des vidéos d’excellentes qualités illustrent ce type de propagation dans la version en ligne de (Luis Dean-Ben et al. 2010). La propagation sera toujours un peu dispersive (c’est-à-dire que le paquet d’onde aura toujours tendance à s’allonger) mais les effets seront peu visibles, d’où le terme de propagation peu dispersive.
Dans le cas d’une propagation très dispersive, le paquet d’onde envoyé se déforme et s’allonge. Cela arrive quand les vitesses de groupe présentes dans la bande fréquentielle du signal varient fortement : l’énergie contenue dans chaque composante fréquentielle se propage à des vitesses différentes, ce qui provoque un étalement temporel du signal initial. C’est le cas pour le mode S0 autour de 2 MHz.mm, dont la propagation est étudiée dans (Wilcox, Lowe, et Cawley 2001b) et montrée sur la Figure 10 : Figure 10: Propagation très dispersive du mode S0 autour de 2 MHz.mm (Wilcox, Lowe, et Cawley 2001b)
La mesure de la vitesse de groupe est plus complexe avec une telle propagation : l’enveloppe se déforme tellement qu’il est compliqué de mesurer son temps d’arrivée.
Faut-il utiliser le maximum de l’enveloppe comme point de repère ? Ou un seuil arbitraire ? Sans oublier que le résultat donné sera valable pour une fréquence, mais que cette fréquence est inconnue.

Application : localisation d’un défaut malgré la dispersion

Il est préférable d’avoir un paquet d’onde qui ne se déforme pas (ou peu) pour localiser un défaut. Dans le cas contraire la localisation devient doublement délicate : aussi bien dans le repérage du temps d’arrivée de l’écho que dans le choix de la vitesse de propagation. Nous présentons ici trois méthodes qui permettent de s’affranchir ou de travailler avec une propagation très dispersive.
Pour limiter l’étalement du paquet d’onde, on peut diminuer la bande passante du signal utilisé en augmentant la durée de la sinusoïde envoyée (le paquet d’onde). Mais en mode écho, cette technique augmente aussi la durée de la zone morte en début de propagation (la saturation initiale due à l’envoi du paquet d’onde). De plus la résolution sera diminuée : deux défauts proches pourront ne pas être différenciés. Ainsi pour chaque mode, il existe une durée temporelle optimale du paquet d’onde afin de limiter la dispersion et la durée du signal (Wilcox, Lowe, et Cawley 2001b, 2001a).
Pour limiter l’étalement du paquet d’onde, on peut aussi viser une propagation peu dispersive en se plaçant aux fréquences où la vitesse de groupe varie peu, c’est-à-dire à un palier plus ou moins large qui est caractérisé par un extremum local (maximum ou minimum) (Alleyne et Cawley 1992; Wilcox, Lowe, et Cawley 2001b). En dessous de 5 MHz.mm, c’est le cas pour A0 autour de 1.4 MHz.mm, S0 à 2.5 MHz.mm, A1 à 2.7 et 4.7 MHz.mm, S1 à 4 MHz.mm et S2 à 4.9 MHz.mm. Ces endroits sont facilement repérables sur les courbes de vitesse de groupe Figure 9.b.
Si d’aventure il n’est pas possible de se placer à une de ces fréquences, il existe une technique de post-traitement qui permet de corriger l’étalement du paquet d’onde et de visualiser le paquet d’onde dans sa forme originelle après une propagation dispersive (Wilcox 2003). À condition de connaître parfaitement la vitesse de groupe du mode qui se propage de manière dispersive, il est possible de rétro-propager numériquement les différentes composantes fréquentielles. On peut ainsi retrouver la forme originelle du signal positionné au nouveau temps d’arrivée. Cette technique a été utilisée dans (Prado et al. 2013) avec succès et a permis la localisation de défauts dans le cas d’une propagation très dispersive (A0 autour de 0.1 MHz.mm). Le résultat est affiché en Figure 11 : on observe une nette amélioration pour la détection et la localisation des défauts après correction de la dispersion.

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Table des matières

Introduction générale
Chapitre I – Propagation des ondes de Lamb : étude bibliographique
I.1 Contexte de l’étude
I.1.1 Contexte nucléaire
I.1.2 CND : définition et objectifs pour cette étude
I.1.3 Problématique
I.2 Ondes de Lamb dans une plaque libre
I.2.1 Présentation générale
I.2.2 Équations de dispersion et fréquences de coupure
I.2.3 Structure des déplacements
I.2.4 Vitesses de phase, de groupe, et d’énergie
I.2.5 Propagation dispersive
I.2.6 Propagation multimodale
I.2.7 Méthodes de mesure des vitesses
I.3 Leaky Lamb Waves (LLW) ou ondes de Lamb dans une plaque immergée
I.3.1 Réémission d’énergie dans le fluide environnant
I.3.2 Coefficients d’atténuation par réémission
I.3.3 Génération par un faisceau incident
I.3.4 Champ acoustique réémis par une plaque
I.3.5 Modèle de réémission de Bertoni et Tamir
I.4 LLW dans deux plaques parallèles immergées
I.4.1 Cas d’une plaque semi-immergée
I.4.2 Transmission des modes de Lamb dans la deuxième plaque
I.5 Conclusions
Chapitre II – Propagation et réémission des ondes de Lamb dans une plaque immergée
II.1 Propagation et atténuation par réémission
II.1.1 Hypothèses et données d’entrée du modèle théorique
II.1.2 Simulations par éléments finis
II.1.3 Expérimentation et méthodes de mesure de l’atténuation
II.1.4 Validation et discussion
II.2 Réémission en propagation multimodale
II.2.1 Théorie : modification du modèle de Bertoni et Tamir
II.2.2 Simulations par éléments finis
II.2.3 Expérimentation
II.2.4 Validation et discussion sur les champs acoustiques réémis
II.3 Conclusions
Chapitre III – Etude de la transmission d’une onde de Lamb de plaque en plaque et interférences associé
III.1 Propagation et attenuation dans la deuxième plaque
III.1.1 Théorie : modélisation basée sur l’énergie
III.1.2 Validation avec simulations par éléments finis
III.1.3 Expérimentation
III.1.4 Comparaison des mesures de vitesse et d’atténuation dans la deuxième plaque
III.2 Interférences d’une plaque sur l’autre en régime permanent
III.2.1 Calcul des déphasages théoriques
III.2.2 Simulations par éléments finis
III.2.3 Expérimentation
III.3 Conclusions
Chapitre IV – Application au Contrôle Non Destructif
IV.1 Réflexion d’une onde de Lamb sur un défaut
IV.1.1 Conversion de modes sur un défaut
IV.1.2 Coefficients de réflexion mode par mode
IV.1.3 Méthodes d’inversion pour évaluer l’état d’une plaque
IV.1.4 Conséquences et choix pour notre étude
IV.2 Choix du mode et de la fréquence pour le contrôle de plusieurs plaques
IV.2.1 Premier critère : optimisation de la transmission dans la nième plaque
IV.2.2 Deuxième critère : réflexion sur un défaut
IV.2.3 Cas des plaques d’épaisseurs différentes
IV.2.4 Conclusion
IV.3 Application à la détection de défauts plans traversants
IV.3.1 Étude de la réflexion
IV.3.2 Validation expérimentale du niveau d’amplitude reçu
IV.3.3 Choix de la meilleure configuration
IV.4 Application à la détection de défauts plans débouchants
IV.4.1 Étude de la réflexion
IV.4.2 Expérimentation
IV.5 Conclusions
Conclusion générale
Bibliographie

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