Propagation de photons sous champs magnétiques intenses

Un véritable défi expérimental

        Le lagrangien LHE de Heisenberg et Euler décrivant l’interaction du photon avec le vide quantique n’a jamais été validé expérimentalement. Le test de ce lagrangien nécessite l’utilisation de champs électriques et magnétiques très élevés. Aujourd’hui, de nombreuses installations de lasers très intenses [42], dont les puissances sont de l’ordre de l’exawatt (1018 W) voire même le zettawatt (1021 W) voient le jour en Europe (programme Extreme Light Infrastructure) et au Japon (programme Exawatt Laser in Japan). La seule expérience réalisée à ce jour [43] visait à mesurer la diusion photon/photon prédite par Euler et Kockel [9]. Toutefois, la sensibilité n’était pas susante et les auteurs ont donné une limite pour la section ecace de diusion de 18 ordres de grandeur plus basse que celle de prédite par l’électrodynamique quantique (σγγexp < 1.5×10−52 m2 contre σγγQED < 7.3×10−70 m2). Une autre voie pour tester ce lagrangien est de mesurer la biréfringence magnétique du vide. Différentes expériences ont été menées an de mesurer directement la modification de l’indice de réfraction de la lumière en présence de champ magnétique avant même les prédictions de la théorie. Morley réalisa en 1898 des mesures à l’aide d’un interféromètre de Michelson dont l’un des bras était exposé à un champ magnétique [44]. Il n’observa aucun effet, avec une sensibilité relative en indice de 10−8. C. C. Farr et C. J. Banwell [45] renouvelèrent l’expérience en 1932 et améliorèrent cette sensibilité : 2 × 10−9 , i.e. à quelques 15 ordres de grandeur de la sensibilité requise pour observer la valeur prédite par la théorie. Vu la difficulté de l’expérience, il fallut se résoudre à mesurer la biréfringence magnétique du vide de manière indirecte. En 1967, T. Erber propose différentes méthodes expérimentales pour tester la polarisation du vide [46]. Outre des techniques d’interférométrie et de mesures de fréquences, il propose de mesurer l’ellipticité ψ acquise par une lumière, de longueur d’onde λ

Description générale du montage optique

             Le dispositif expérimental est monté sur deux tables optiques différentes : une table  » laser  » et une table  » cavité  » reliées par une fibre optique [55]. La lumière infrarouge (λ = 1.064µm) est émise par un laser Nd :YAG (modèle MephistoM1000, de la marque Innolight). Le faisceau est polarisé suivant la direction verticale. La puissance lumineuse émise peut atteindre 1W. Ce laser est protégé de toute rétroréflexion par l’isolateur de Faraday FI1. Ce faisceau passe ensuite dans une première lame demi-onde HWP1 avant d’entrer dans le cube séparateur de polarisation PSC1 qui la réfléchit. Il est focalisé à l’aide de la lentille L1 sur un modulateur acousto-optique (AOM) [56] et le traverse une première fois. Le modulateur acousto-optique se trouve également au foyer objet de la lentille L2. Celle-ci achemine le faisceau dans la lame quart d’onde QWP quitransforme la polarisation linéaire en polarisation circulaire. Le sens de cette polarisation est inversé par réflexion sur le miroir M. La lumière ressort de la lame QWP avec une polarisation linéaire (mais perpendiculaire à celle qu’elle avait lors du premier passage), traverse une seconde fois le modulateur AOM, puis le cube PSC1. Le mode du laser est adapté dans les deux directions orthogonales au trajet lumineux par les lentilles cylindriques L3x, L4x d’une part et L3y, L4y d’autre part. La lumière traverse ensuite la lame demi-onde HWP2 qui sert à aligner sa polarisation sur les axes neutres de la fibre monomode à maintient de polarisation dans laquelle elle est injectée. La fibre permet à la fois de filtrer spatialement le faisceau et d’isoler mécaniquement la table  » laser  » de  » laser « sur laquelle se trouve un laser Nd :YAG et le modulateur acousto-optique (AOM) et la table  » cavité « comportant le modulateur électro-optique (EOM), la cavité Fabry-Perot à l’intérieur de laquelle est appliqué un champ magnétique transverse, et les photodétecteurs (voir le texte). la table  » cavité  » sur laquelle nous décrivons maintenant le trajet optique du faisceau. Celui-ci est focalisé à l’aide de la lentille L5 sur un modulateur électro-optique (EOM), nous verrons son rôle dans la partie 2.5. La polarisation est alignée sur les axes neutres de l’EOM avec la lame demi-onde HWP3 et le polariseur P1. La lame demi-onde HWP4 sert à ajuster la polarisation de la lumière avant de la faire traverser l’isolateur de Faraday à double étage FI2.

Génération de champ magnétique pulsé et transverse

Le principe Pour atteindre des champs plus intenses, il est nécessaire de travailler en régime pulsé : pour cela, on décharge (en quelques millisecondes) l’énergie emmagasinée dans des condensateurs dans des bobines résistives renforcées mécaniquement. Cette technique non destructive a permis d’atteindre jusqu’à 81 T dans la configuration longitudinale de Faraday au LNCMI-T On présente sur la partie gauche de la figure 2.6 la photographie d’un des générateurs BMV, et à droite le schéma du circuit électrique correspondant. Le générateur est constitué d’une alimentation en courant qui vient charger un ensemble de modules en parallèle. Chacun de ces modules est composé d’un condensateur (de capacité Cm) et d’une inductance de protection (Lm), la résistance de chaque module est notée Rm. L’expérimentateur pilote la décharge des modules via une fibre optique. Le déclenchement du tir s’opère via l’envoi d’un courant dans la gâchette d’un thyristor (un par module), qui est un interrupteur rapide basé sur la technologie des transistors. La synchronisation parfaite des thyristors permet de libérer l’énergie stockée dans les condensateurs des modules vers la bobine. Un courant d’intensité I s’établit dans le circuit et traverse la bobine (de résistance Rb et inductance Lb) qui génère le champ magnétique

Contrôle de la température des tubes traversant les cryostats

                 Nous le verrons dans le chapitre 3, les mesures de biréfringences magnétiques des gaz sont dépendantes de la température. Celle des tubes de l’enceinte à vide pénétrant à l’intérieur des cryostats doit donc être connue, contrôlée et le plus homogène possible pour que la densité de gaz le soit elle-même. Les mesures sont réalisées à la température de la salle blanche qui est régulée par un système d’air conditionné, elle avoisine, au degré près les 20C. Nous considérons qu’il s’agit de la température de l’enceinte ultravide ainsi que de son contenu. L’endroit critique se trouve au niveau des tubes traversant les cryostats. Nous avons évoqué en section 2.3.3, la présence d’un interstice régulièrement pompé qui sépare l’azote liquide dans laquelle baignent les bobines (T = 196C à pression ambiante) et le petit tube de l’enceinte à vide. L’infime espace (inférieur au millimètre) ne suffit pas pour isoler thermiquement ces deux parties. Il en résulte que la température du petit tube peut être très basse par rapport à la température ambiante. Le profil de température à l’intérieur du tube a été réalisé à l’aide d’une thermistance calibrée et est donné en figure 2.50. Nous constatons que la température diminue, au niveau du centre du cryostat jusqu’à 74C. Il en résulte inévitablement que le tube gèle : un bouchon de glace se forme entre la paroi interne du tube du cryostat et la paroi externe du tube de l’enceinte, générant ainsi un contact mécanique entre le cryostat et la table cavité et rendant ainsi impossible toute mesure optique. Nous avons d’abord pensé à enrouler autour du petit tube un fil chauffant de manganin. Il s’agit d’un alliage composé de cuivre, de manganèse et de nickel possédant une forte résistivité et donc capable de transférer une quantité de chaleur suffisante au tube en inox autour duquel il est enroulé. Précisons qu’il y avait en fait deux enroulements de fils inversés, de façon à ne pas confectionner un solénoïde générant un champ magnétique longitudinal dans l’enceinte. Une thermistance a été fixée sur la paroi externe du petit tube, le courant d’alimentation du manganin était alors asservi sur une consigne de température fixée à 20C. Le profil de température a été réalisé à l’aide d’une thermistance calibrée et est présenté sur la figure 2.50. On remarque que la température reste plus proche de la température ambiante, mais varie de plusieurs degrés au niveau de la bobine. La chaleur transmsise par l’enroulement de manganin ne se répartissait pas uniformément dans le tube d’inox. Nous avons essayé plusieurs profils d’enroulements plus ou moins uniformes, sans succès. Le fait de faire circuler un flux d’air comprimé entre la paroi interne du tube du cryostat et externe du tube de l’enceinte à vide s’est révélé bien plus efficace : le profil de température est alors plus homogène, la température ne varie pas de plus de 1C au niveau de la bobine (voir figure 2.50). Le flux d’air comprimé est coupé au moment de chaque tir de façon à ne pas introduire de vibration et de bruits dans la détection optique. Nous avons mesuré la diminution de température au centre du cryostat sans air comprimé : elle est inférieure à 1C en deux minutes. Il s’agit du temps dont nous disposons pour charger le générateur et effectuer le tir. A droite, avec chauffage du tube avec un fil de manganin (N), la température est positive, mais varie beaucoup au niveau de la bobine. La circulation d’air comprimé entre les tubes du cryostat et de l’enceinte à vide homogénéise bien mieux le profil de température (•). L’incertitude sur les valeurs de la température est de 0.1 magnétiques (dans les gaz) sont données, en échelle absolue de températures, à (293 ± 1) K. Les éléments centraux du dispositif expérimental ont été caractérisés en détail dans cette partie. Nous abordons dans le chapitre suivant l’utilisation de notre appareil pour la mesure de biréfringences magnétiques.

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Table des matières

1 Introduction et contexte expérimental 
1.1 Le vide quantique 
1.2 Interactions de la lumière avec le vide quantique en présence de champs externes 
1.3 Mesure de la biréfringence magnétique du vide : un test de l’électrodynamique quantique
1.4 Un véritable dé expérimental 
2 Caractérisation du dispositif expérimental 
2.1 Introduction
2.2 Mesure d’ellipticité par polarimétrie croisée 
2.2.1 Relation entre ellipticité et biréfringence : les paramètres clés
2.2.2 Description générale du montage optique
2.2.3 Mesure des intensités des faisceaux ordinaire et extraordinaire
2.2.4 Mesure d’ellipticité à partir des intensités des faisceaux ordinaire et extraordinaire
2.2.5 Polariseur et analyseur de l’expérience BMV
2.3 Champ magnétique transverse 
2.3.1 Génération de champ magnétique pulsé et transverse
2.3.2 Caractérisation du champ magnétique
2.3.3 Cryogénie
2.4 Cavité Fabry-Perot ultrane 
2.4.1 Rappels sur l’interféromètre Fabry-Perot
2.4.2 Caractérisation de la cavité Fabry-Perot de l’expérience BMV
2.5 Système d’asservissement 
2.5.1 Méthode de Pound-Drever-Hall
2.5.2 Éléments du système d’asservissement
2.5.3 Performances du système d’asservissement
2.6 Enceinte ultravide
2.6.1 Description de l’enceinte expérimentale
2.6.2 Pompage et contrôle de la pression de l’enceinte ultravide
2.6.3 Contrôle de la température des tubes traversant les cryostats
3 Mesures de biréfringences magnétiques 
3.1 Introduction
3.2 Acquisition et analyse des données expérimentales 
3.2.1 Acquisition des données
3.2.2 Analyse des données
3.3 Mesure de la biréfringence magnétique de gaz 
3.3.1 Objectif
3.3.2 Biréfringence magnétique du diazote
3.3.3 Biréfringence magnétique de l’hélium
3.3.4 Effets systématiques
3.4 Limites supérieures de la biréfringence magnétique du vide 
3.4.1 Résultats expérimentaux
3.4.2 Recherche d’effets systématiques
3.4.3 Limitations de notre sensibilité actuelle
3.4.4 Comparaison avec les autres limites établies dans le monde
3.4.5 Améliorations futures
4 Photons sous champs magnétiques et physique hors Modèle Standard 
4.1 Introduction 
4.2 De la théorie de l’électrodynamique quantique à la physique hors Modèle Standard 
4.2.1 Le problème CP fort
4.2.2 L’axion
4.2.3 Dérivation du lagrangien : couplage entre champs axionique et photonique
4.3 Principales expériences à la recherche de l’axion dans le monde
4.3.1 Expériences astrophysiques à la recherche de l’axion
4.3.2 Expérience du mur brillant
4.4 A la recherche de l’axion à l’aide de rayons X
4.4.1 Dispositif expérimental
4.4.2 Résultats
4.4.3 Comparaison avec les autres expériences
4.5 Lien avec l’expérience BMV 
5 Conclusions et perspectives 
5.1 Conclusions 
5.2 Perspectives 
Annexe A
Annexe B
Annexe C

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