Freins à la diffusion de la PEMFC
Les piles à combustible sont en développement depuis les 50 dernières années et pourtant restent relativement absentes sur les marchés à grande échelle . Bien que certains pays tels que le Japon, l’Allemagne, les Etat-Unis ou la Corée du Sud ont largement investi dans ce type de technologie, celle-ci reste en retard dans bien des parties du monde.
On peut attribuer ce retard à trois aspects : un aspect socio-économique, un aspect technologique et un dernier lié aux performances du système. Du point de vue socio-économique, le public accepte encore mal cette technologie qu’il connaît peu et utilise un hydrogène qui a laissé de mauvais souvenirs (explosions de dirigeables par exemple).
Par ailleurs, les prix de production puis d’acquisition sont encore beaucoup trop élevés. A titre d’exemple, le système µ-CHP le plus mature vendu au Japon coûte encore 25 000$ le kW trois ans après son lancement . Concernant les verrous technologiques, on peut citer la nécessité de produire de l’hydrogène pur et stable, ou encore le stockage du réactif ainsi produit.
Enfin, le frein au développement qui nous intéresse ici porte sur la performance du système tant en termes de rendement que de durée de vie. Le rendement actuel est situé autour de 25-30% et devrait pouvoir atteindre 35-40% (pour mémoire : dans une voiture, rendement maximal du moteur au gasoil (diesel) = 45%, moteur essence = 35%). La durée de vie, quant à elle, est actuellement de 2000 à 3000 heures alors que 8000 heures sont nécessaires pour les applications mobiles et 100 000 pour les applications stationnaires.
Dans cette thèse, nous nous attachons à proposer des solutions pour contribuer à étendre la durée de vie. La prévention de défaillances conduisant à un arrêt de la production d’énergie peut s’effectuer grâce à plusieurs axes de recherches : travail sur le design, amélioration des matériaux, gestion intelligente de la santé du système et/ou de l’énergie produite, etc. La gestion intelligente de la santé du système peut être réalisée grâce au Prognostics and Health Management (PHM). En effet, cette discipline permet de prendre des décisions au bon moment sur l’utilisation du système, d’en optimiser l’utilisation, d’anticiper et éviter les défaillances.
Description et fonctionnement d’une PEMFC
Qu’est-ce qu’une pile à combustible ?
La pile à combustible est un système électrochimique convertissant de l’énergie chimique en énergie électrique par le biais d’une réaction d’oxydo-réduction. De cette réaction émane aussi de la chaleur. Le cœur d’une pile à combustible, aussi appelé stack, est un assemblage de cellules élémentaires associées en séries. Chacune de ces cellules est constituée de plusieurs composants:
2 joints d’étanchéité (sealing gasket), 2 électrodes : anode et cathode, auxquelles sont accolées des couches de diffusion gazeuses (GDL), 1 électrolyte : la membrane, 2 connecteurs bipolaires (bipolar plates).
Le fonctionnement de la pile et le rôle de ses composants sont maintenant décrits de manière un peu plus détaillée. Bien que les réactions aux électrodes se passent en simultané, pour faciliter l’explication on part du phénomène se passant à l’anode pour aller vers la cathode.
Composants et fonctions
Intéressons nous maintenant plus précisément au rôle de chacun des composants du stack. Une bonne compréhension de la nature et des fonctions de chacun d’entre eux s’avérera nécessaire lorsque nous étudierons en détail les phénomènes de dégradations se produisant dans le stack .
Les plaques bipolaires :Les plaques bipolaires constituent l’ossature du stack. Elles isolent les cellules individuelles, conduisent le courant entre les cellules, facilitent la gestion de l’eau et de la température (en l’absence de plaques de refroidissement) et fournissent des canaux pour l’alimentation en gaz réactifs comme pour l’évacuation des produits.
Les caractéristiques idéales du matériau pour ces plaques sont, entre autres, une conductivité électrique élevée, une forte résistance à la corrosion, une grande force mécanique, de faibles résistances de contact et thermique, une faible perméabilité aux gaz réactifs ou encore pas de friabilité .
Les couches de diffusion gazeuses :La couche de diffusion gazeuse (GDL), avec sa nature poreuse, joue un rôle essentiel pour assister les réactions d’oxydation de l’hydrogène et de réduction de l’oxygène dans les couches catalytiques. Elle permet aux réactifs de se diffuser des canaux d’arrivée jusqu’aux sites actifs électro-catalytiques. La GDL facilite aussi la gestion de l’eau dans la couche catalytique et dans la membrane en permettant à la vapeur d’eau couplée aux réactifs de se diffuser, assurant ainsi une humidité suffisante dans la membrane. Elle aide dans un même temps à évacuer l’eau liquide produite du côté de la cathode hors de la pile et empêche ainsi les noyages qui bloqueraient les sites actifs. Les GDL sont connectées électriquement à l’encre catalytique et offre une structure de support pour les couches de catalyseur. De plus, elles sont conductrices électriquement pour assurer le transfert d’électrons entre la couche catalytique et les plaques bipolaires. On trouve principalement deux grandes familles de GDLs : les papiers carbones (GDL non-tissées) et les tissus carbones (GDL tissées) .
Des données aux décisions : le PHM
Architecture CBM et PHM :La demande grandissante en fiabilité, disponibilité et sécurité est un facteur déterminant pour assurer l’expansion et la dissémination de tout nouveau système industriel. La maintenance a été introduite comme un moyen pour atteindre ces exigences au cours de la vie du système. Les stratégies de maintenance ont progressé de la maintenance corrective à la maintenance préventive puis ensuite à la maintenance conditionnelle (Condition-Based Maintenance, CBM).
De nombreux travaux sont apparus pour définir le périmètre de la CBM . Ils diffèrent sur la forme des architectures logicielles à mettre en œuvre (locale, distribuée, par modules, etc). Le standard fédérateur est la OSA/CBM (Open System Architecture for Condition-Based Maintenance) proposé par le groupe MIMOSA qui a par la suite fait l’objet d’une normalisation. La structure proposée est définie dans l’optique d’une implémentation informatique d’une maintenance intelligente. Elle est composée de 7 couches fonctionnelles :
Acquisition de données. Ce module fournit au système des données numériques issues de capteurs ou de transducteurs (acquisition, sauvegarde et sécurisation).
Traitement de données. Les signaux issus des capteurs sont traités afin d’extraire des descripteurs représentant l’évolution de l’état du système au cours du temps.
Détection d’état. Le module de détection compare les données en ligne (descripteurs extraits) avec certaines valeurs attendues ou connues ; il doit également être capable de générer des alertes en fonction de seuils préalablement fixés.
Diagnostic. Sur la base de l’état détecté, ce module détermine si le système ou composant surveillé est dégradé ou non, et suggère les causes probables de défaillance.
Pronostic. Ce module s’appuie sur les données issues des modules précédents afin de prédire l’état futur du système ou du composant surveillé, et de donner une estimation de la durée de fonctionnement avant défaillance (Remaining Useful Life – RUL).
Aide à la décision. Sa fonction principale est de recommander des actions de commande / maintenance pour faire fonctionner le système jusqu’à l’accomplissement de sa mission. Cette phase est notamment basée sur les estimations de RUL.
Présentation. Ce module reçoit les informations de tous les modules précédents. Il peut être construit sous forme d’une IHM (Interface Homme-Machine).
Pronostic et PEMFC : une problématique quasi vierge
Le pronostic des PEMFC est une problématique complètement nouvelle, en particulier à l’échelle du stack.
Au début de cette thèse, seul un travail , publié l’année précédente, portant sur la prédiction de la décroissance de la surface active des électrodes était présent dans la littérature. Dans cet article, le pronostic est réalisé à partir d’une extension du filtre de Kalman (l’Unscented Kalman Filter – UKF). Les limites majeures de cette approche sont, d’une part, qu’elle ne s’intéresse qu’à un seul composant (l’électrode) et, d’autre part, que les expérimentations associées ne sont réalisées que sur une seule cellule.
Le pronostic au niveau du stack a ensuite commencé à se développer sous l’impulsion notamment de la fédération de recherche FCLAB . Tout d’abord, avec certains travaux présentés dans ce manuscrit . Puis des approches tant orientées données que basées sur des modèles sont apparues. D’autres approches orientées données ont également été proposées dans le cadre du IEEE PHM Data Challenge 2014 pour la prédiction de l’état de santé à base de mesures d’impédance ainsi que pour l’estimation du RUL à partir de données de tension .
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Table des matières
Introduction générale
I Vers le pronostic des PEMFC
1 Motivations, positionnement et objectifs
1 Motivations
2 Description et fonctionnement d’une PEMFC
3 Des données aux décisions : le PHM
4 Le PHM des PEMFC
5 Le pronostic des PEMFC – un nouvel axe de recherche
6 Synthèse partielle
2 Mettre en œuvre du pronostic de PEMFC
1 Problématique et verrous
2 Évaluer la performance
3 Formalisation du cadre de travail
4 Synthèse partielle
II Étude préliminaire du comportement des PEMFC
3 Pronostic à base de modèles empiriques simples et de filtre particulaire
1 Prérequis
2 Pronostic basé sur du filtrage particulaire
3 Tests et discussion
4 Synthèse partielle
4 Pronostic intégrant des perturbations ponctuelles
1 Modélisation des phénomènes réversibles
2 Tests et discussion
3 Synthèse partielle
III De la dégradation de la PEMFC au modèle pour le pronostic
5 Étude de la dégradation des PEMFC
1 Objectifs et démarche
2 État de l’art des dégradations de la PEMFC
3 Analyse et classification
4 Synthèse partielle
6 Modélisation de la dégradation
1 Élaboration du modèle de dégradation
2 Extraction de la dégradation : pré-traitement des données
3 Validation du modèle
4 Synthèse partielle
IV Pronostic à base de filtre particulaire
7 Éléments théoriques
1 Approche bayésienne non-linéaire
2 Filtrage particulaire
3 Synthèse partielle
8 Filtre et pronostic
1 Pourquoi utiliser le FP pour le pronostic ?
2 Types de filtres et procédures de ré-échantillonnage utilisées dans les applications de pronostic
3 Mise en œuvre et problèmes pratiques
4 Pronostic basé sur la sortie du FP
5 Évaluation et interprétation de l’incertitude
6 Synthèse partielle
9 Pronostic de PEMFC à base de filtre particulaire
1 Pronostic de PEMFC
2 Analyse des résultats
3 Vers une cartographie du pronostic de PEMFC
4 Synthèse partielle
Conclusion et perspectives
Références
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