Projets de remise en forme et de mise en conservation des huit paires de chaussures  

Projets de remise en forme et de mise en conservation des huit paires de chaussures  

Projets de remise en forme et de mise en conservation des huit paires de chaussures

L’objectif de ce travail de diplôme est la remise en forme des huit paires de chaussures et la caractérisation des paramètres de reproductibilité pour le traitement d’objets similaires. Cette partie présente l’élaboration du projet de remise en forme en fonction des caractéristiques et des risques établis précédemment par le diagnostic. Dans un premier temps, nous énumérerons les raisons qui peuvent motiver un traitement de remise en forme, avec les avantages et les inconvénients induits. Dans un second temps, les objectifs attendus de la remise en forme seront établis. À la suite de tests, nous indiquerons quelles méthodes d’assouplissement temporaire du cuir ont été retenues pour chaque paire de chaussures. Enfin, la logique de confection des supports de stockages sera abordée.

Pourquoi remettre en forme ?

Les objets muséaux très déformés ne sont plus représentatifs de leur fonction, de leur particularité technologique et de leur esthétique. Les altérations associées (déchirures, fractures, pertes d’éléments) posent également des problèmes de conservation. Un traitement de remise en forme d’objets peut donc être motivé par leur stabilisation structurelle, leur exposition ou leur étude.
Deux causes majeures de déformations se distinguent ; celles liées à l’utilisation et celles initiées par les conditions de conservation ou les manipulations. Les premières renseignent sur le mode et la fréquence d’utilisation, alors que les secondes sont davantage liées à de l’inattention. Partant de ce postulat, les déformations d’usages seront conservées alors que les déformations postérieures auront tendance à être traitées. L’objectif étant de « limiter le degré de remise en forme à la révélation de la nature de l’objet »138. Lorsque la souplesse du cuir le permet, l’insertion de supports internes peut suffire à modifier et conserver la morphologie. À l’inverse, la remise en forme d’un cuir rigide implique l’apport d’une substance induisant une souplesse temporaire ou définitive. Un traitement de remise en forme d’un objet en cuir rigide est donc invasif, modifie la perception morphologique d’un objet, et comporte des risques d’altérations mécaniques et de modifications d’aspect (brillances, altération des couleurs, etc.).
D’autre part, un objet remis en forme peut prendre beaucoup plus de place et induire des problématiques de stockage dans les réserves restreintes des musées. Ainsi, il convient de mettre  longs et impliquent généralement des étapes préalables (dépoussiérage, nettoyage, éventuellement des consolidations), et post-traitements (nettoyage de zones jusqu’alors inaccessibles, confection de supports internes pour conserver la remise en forme).

Dépoussiérage et nettoyage

En accord avec les conservateurs attachés aux unités patrimoniales concernées par le corpus d’étude, aucun dépôt n’a été considéré suffisamment significatif pour être conservé. Dans le cadre de ce travail, la remise en forme sera effectuée par apport d’eau (cf. Méthodes d’assouplissement du cuir p.58) : le dépoussiérage et nettoyage auront donc pour but majeur de retirer les différents éléments exogènes solubles à l’eau. L’intérêt est de limiter les risques de migrations de poussières ou dépôts dans la porosité du cuir ou encore d’éviter les phases de solubilisations et cristallisation des éventuels sels présents si la H.R.E est atteinte lors du traitement.
En raison de la présence potentielle de résidus toxiques (cf. 12.3 Résidus toxiques issus d’anciens traitements biocides ? p.130), le dépoussiérage sera effectué avec un aspirateur équipé d’un filtre HEPA, exclusivement dédié aux objets contaminés. Également, les gants à usage unique et les masques respiratoires FFP3 seront jetés, dès le retrait pour les gants et chaque fin de journée pour les masques.
La blouse sera lavée individuellement en machine à laver et les outils et la place de travail seront nettoyés en fin de journée à l’éthanol. Afin de ne pas risquer la migration d’éléments exogènes dans la porosité du cuir pendant des nettoyages chimiques, les procédés mécaniques (microfibres, gommes, éponges) seront privilégiés. Des traitements physico-chimiques seront envisagés seulement en cas de risque important d’altération du cuir par traitement mécanique.
Les zones inaccessibles avant remise en forme, en raison de la rigidité et de la déformation des cuirs, seront dépoussiérées et nettoyées au fur et à mesure du traitement. Aucune consolidation préalable à la remise en forme n’est à envisager dans le cas du corpus étudié. Une attention particulière sera cependant donnée aux éléments les plus fragiles (décors, parties mobiles, zones altérées, etc.). Dans le cas de traitements ou des objets doivent être consolidés avant la remise en forme, il convient de ne pas utiliser d’adhésifs sensibles à l’eau si les remises en forme sont envisagées par apport d’eau. HE-Arc CR, Master of Arts HES-SO in Conservation-restoration Ruynat Lucile, Remise en forme et élaboration de supports de conservation de huit paires de chaussures en cuir semi-tanné, 16 juillet 2018

Remise en forme

Degrés de remise en forme

o Patron versus morphologie d’usage Les chaussures, comme tous les vêtements, tendent à s’adapter à la morphologie humaine et aux mouvements. Cependant, à l’instar du patron en « T » de nombreux hauts de vêtement à manches, le patron des chaussures n’est pas toujours représentatif de la forme qu’elles prennent quand elles sont portées.
Du point de vue de la conservation, il est préférable de remettre en forme un objet avec un minimum de plis, et donc de revenir à la morphologie du patron. D’un autre côté, nous pouvons nous demander : « à quoi bon remettre en forme un objet s’il n’est pas représentatif de son utilisation lorsqu’il est porté ? ». Ces deux points de vue se discutent au cas par cas.
Dans le cadre de notre travail, et à la suite des discussions avec les conservateurs du musée, nous avons pris le parti d’une remise en forme significative de l’objet porté, tout en veillant à ne pas générer de tensions et de risques de fractures par la présence de plis rabattus. Le but est de prendre en considération les pleins et les vides du corps et d’ainsi évider l’aspect d’objets « gonflés comme un ballon de baudruche »140. Types de déformations Le type de déformation influence beaucoup la compréhension de la morphologie d’un objet. En effet, l’humain peut avoir certaines capacités à remodeler mentalement un objet s’il est aplati – surtout dans le cas d’objets aussi familiers que des chaussures – mais cela s’avère nettement plus compliqué lorsque l’objet n’est plus qu’une masse pliée . En ce sens, nous considérons le dépliage des objets comme un objectif de remise en forme.

Méthodes d’assouplissement du cuir

Différentes méthodes sont employées pour remettre en forme ou conserver la flexibilité des cuirs. Nous avons déjà évoqué l’utilisation de graisses, mais d’autres produits ont pu être utilisés tels que des agents humectants (polyéthylène glycol, glycérol).
Dans le cadre de ce travail, les objets ne sont plus utilisés suivant leur fonction d’origine ; un assouplissement temporaire est donc suffisant. En ce sens, des traitements aqueux permettent un assouplissement temporaire du cuir sans l’ajout définitif d’un matériau exogène qui en complexifie la composition et dont les conséquences à moyen ou long terme peuvent être néfastes142. Les molécules d’eau ajoutées créent des liaisons hydrogène avec l’eau libre et les groupements polaires présents dans le cuir formant une gaine autour des fibres et améliorant les propriétés plastiques143. Cependant l’eau, bien que dans la composition du cuir, peut engendrer des processus d’altération irréversibles de dénaturation du collagène. Pour ces raisons, différentes méthodes sont mises en œuvre dans le milieu de la conservation-restauration visant à limiter et contrôler son apport. (cf. : Principales méthodes d’humidification en CR p.136)
Étude et tests des méthodes d’apport d’eau En raison de leurs complémentarités, deux méthodes d’apport d’eau ont été retenues dans le cadre de ce travail ; l’utilisation de membrane SympaTex® pour des remises en formes locales et l’enceinte humide pour le traitement de l’intégralité d’un objet.
Bien que certains objets de l’étude soient imprégnés de graisses hydrophobes, les cuirs semi-tannés sont théoriquement toujours capables de fixer des molécules d’eau grâce à leurs sites polaires non engagés dans les pontages avec les tanins144. D’autre part, des tests de solubilité des pigments ont été effectués avec un bâtonnet ouaté légèrement humide tamponné en surface ; les pigments rouges des bottes Hunza se sont révélés très sensibles .

Membrane SympaTex®

Le SympaTex® est composé d’une membrane poreuse à la vapeur d’eau et d’un feutre en polyester. La finesse des pores (0.2 µm) laisse passer l’eau liquide très progressivement et en petite quantité. Ce matériau permet de favoriser la diffusion de l’eau en surface tout en limitant la pénétration à cœur du cuir. Des lingettes intissées Sontara®145 imprégnées d’eau osmosée seront placées sur le feutre de la membrane SympaTex®. Cet apport d’eau indirect évite la saturation en eau de la membrane poreuse du SympaTex® et limite le risque de formation de gouttelettes d’eau en surface de l’objet. Le système d’humidification sera recouvert de film alimentaire pour limiter l’évaporation de l’eau, et le contact entre la membrane SympaTex® et le cuir sera favorisé par une mise sous poids ou par leur maintien avec des aimants .

Avantages :

La membrane SympaTex® permet une intervention de remise en forme localisée d’objets partiellement déformés ou ne pouvant pas être entièrement humidifiés à cause d’éléments décoratifs ou de zones particulières sensibles à l’eau.

Inconvénients :

L’utilisation de membrane SympaTex® couvre la surface traitée et aucun contrôle visuel ne peut être effectué en temps réel. Le cuir pouvant réagir très vite et/ou de manière subite, l’efficacité du traitement sera vérifiée toutes les 30 secondes ou minutes en fonction de la sensibilité des objets. Il y a des risques de formation de contraintes entre les zones humidifiées et les zones non traitées, pouvant amorcer des altérations associées (fractures, déchirures) notamment dans les zones structurellement fragilisées. D’autre part, lorsqu’un objet est très déformé, il n’est pas évident d’établir un contact satisfaisant entre la membrane et la surface de l’objet. Le traitement par petites zones implique un temps d’intervention parfois très long.

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Table des matières

Remerciements
Table des matières
Résumé
Abstract
Zusammenfassung
Introduction  
1. Contexte du travail 
1.1. Le choix du corpus
1.2. Conditions de conservation
1.2.1. Gestion des collections au musée du quai Branly-Jacques Chirac
1.2.2. Conditions de conservation passées
1.3. Valeurs culturelles
1.4. Toxicité et protection
2. Étude des huit paires de chaussures 
2.1. Technologie de fabrication
2.1.1. Détermination de l’espèce animale d’origine
2.1.2. Procédés de transformation de la peau et fabrication des chaussures
2.1.3. Synthèse animale d’origine et tannage
2.2. Constat d’état
2.2.1. Caractérisation des altérations
2.2.2. Quantification de la rigidité
2.2.1. Caractérisation des déformations
2.2.2. Analyses instrumentales (Température de dénaturation, pH, IRTF)
2.2.3. Synthèse observations et analyses
2.3. Diagnostic et pronostic des altérations
2.3.1. Déformation des objets
2.3.2. Processus de rigidification des cuirs
2.3.3. Altérations associées à la déformation et à la rigidification
2.3.4. Autres caractéristiques à considérer
3. Projets de remise en forme et de mise en conservation des huit paires de chaussures  
3.1. Pourquoi remettre en forme ?
3.2. Dépoussiérage et nettoyage
3.3. Remise en forme
3.3.1. Degrés de remise en forme
3.3.2. Méthodes d’assouplissement du cuir
3.3.3. Supports internes lors du traitement de remise en forme
3.4. Supports internes de stockage
4. Mise en œuvre des traitements de remise en forme et confection de supports de stockage 
4.1. Dépoussiérages et nettoyages
4.2. Traitement de remise en forme
4.3. Réalisation des supports de stockage
4.4. Estimation du temps de traitement
4.5. Recommandations de conservation et d’exposition
4.5.1. Conditions de stockage
4.5.2. Manipulations
4.5.3. Conditions d’exposition
5. Bilan et discutions 
5.1. Étude et traitement
5.2. Reproductibilité
6. Conclusion générale 
7. Liste Références bibliographiques  
7.1. Documentation générale sur le cuir et les chaussures
7.2. Littérature associée aux contexte socio-culturelles et à la technologie de fabrication des
chaussures du corpus
7.3. Caractérisation de l’état de dégradation
7.4. Analyses
7.5. Traitements
7.6. Communications orales
8. Liste des figures 
9. Liste des tableaux 
10. Liste des abréviations  
11. Lexique/glossaire 
12. Annexes 
12.1. Protocoles d’analyses
12.1.1. Prise d’échantillons
12.1.2. IRTF-AT
12.1.3. Mesures de la température de dénaturation par DSC
12.1.4. Analyses protéomiques par MALDI-TOF
12.1.5. Mesure du pH
12.1.6. Micro-décolorimètre
12.2. Processus d’altérations chimiques impliquant la dénaturation du collagène
12.3. Résidus toxiques issus d’anciens traitements biocides ?
12.3.1. Spot tests
12.4. Principales méthodes d’humidification en CR
12.5. H.R.E des sels
12.6. Fiches objets
13. Liste des produits et des fournisseurs  
14. Liste annexes complémentaires 

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