« En opposition avec les sociétés traditionnelles, notre culture technologique parle de plus en plus de projet. » [OB1]
Cette tendance, évoqué par Boutinet se traduit dans beaucoup de domaines comme l’économie, l’architecture ou la pédagogie. En aménagement, il détient une place prépondérante dans le vocabulaire utilisé par les professionnels et décideurs politiques. Ce travail de recherche renvoie plus spécifiquement au thème des projets d’aménagements opérationnels. Il traite de la procédure ZAC établie par la loi d’orientation foncière (LOF) en 1967 et ayant fortement évolué depuis.
La problématique générale a pour but de questionner la pratique de cette procédure et notamment son niveau de formalisation. L’aménagement opérationnel apparaît comme un domaine où le savoir-faire des praticiens détient une place importante. L’objectif est de déterminer si ce ressenti s’avère juste. Pour ce faire, dans un premier temps une définition des notions utilisées au sein du développement est présentée. La problématique et la démarche de recherche sont ensuite précisées. Le développement se décompose en trois grandes parties. La première détaille les trois grandes catégories de projets d’aménagement et établit une typologie des procédures d’aménagement. La seconde situe la procédure ZAC dans l’ensemble des procédures d’aménagement et expose un synopsis de celle-ci. Enfin, une dernière partie se concentre sur l’analyse de la relation AMO/MO/procédure ZAC dans une étude de cas de la ZAC « La zone des Horts » à Cruscades dans l’Aude.
Projet/ projet d’aménagement/projet urbain
Un type de projet d’aménagement fait l’objet de la question générale de recherche. Le projet est tout d’abord lié à une volonté individuelle ou collective. La définition du dictionnaire Larousse spécifie :
« Un projet est un ensemble d’actions relatives à l’organisation d’une volonté. » [OL1] Le projet donne forme à une intention particulière en détaillant un cheminement d’actions à suivre. Boutinet donne une raison historique de son développement : « Cette notion qui incarne une figure de conduite d’anticipation, s’est développée sous l’impulsion des avancées scientifiques et technologiques des sociétés prospectives. » [OB1] Elle traduit une volonté de maîtrise sur l’espace terrestre pour l’aménager et mieux l’habiter. L’enjeu du projet est de savoir pour prévoir, à travers sa démarche il s’agit d’explorer le futur pour mieux le domestiquer. Le projet s’inscrit dans le temps, il a une durée qui est déterminée par sa réalisation ; une fois réalisé il cesse d’exister. Pour son élaboration, sa mise en œuvre et son évaluation le projet nécessite l’établissement d’une méthodologie. L’élaboration, première grande étape du projet peut se subdiviser en trois sous-étapes qui sont : l’analyse de situation ou diagnostic, l’esquisse d’un projet possible et la stratégie entrevue. L’objectif de l’élaboration est de passer de l’abstraction des idées à la réalité spatiale. L’analyse de la situation comprend quant à elle un examen minutieux et objectif de l’ensemble des paramètres qui agissent sur l’auteur en train de décider son projet. Cette étape a un double objectif ; elle doit permettre d’appréhender avec plus de facilité le terrain mais aussi d’identifier les opportunités existantes. De ces dernières va émerger un projet possible qui dans ses aspects opératoires constitue un compromis entre les finalités et les besoins du projet. Le projet justifie de sa faisabilité par les choix stratégiques énoncés qui gouvernent l’action au regard des circonstances.
L’élaboration est suivie par la réalisation qui peut elle-même se décomposer en trois sous-étapes : la planification, la gestion des écarts et l’évaluation. La première incarne le futur désiré entrevu à travers les moyens perçus pour y parvenir. Elle est détaillée dans une programmation des phases d’action à mener. La gestion des écarts s’opère au cours de la mise en pratique du projet à travers la réalisation des actions planifiées. Cette réalisation provoque des écarts dans lesquels il appartient aux acteurs d’instaurer une limite de tolérance. Enfin, le guide de la réalisation du projet est son évaluation qui peut intervenir durant toute cette étape et est basé sur un ou plusieurs des indicateurs suivants qui sont détaillés dans le dictionnaire de sociologie :
– « l’efficacité : rapport entre les objectifs d’actions fixés et les résultats obtenus ;
– l’efficience : mise en relation entre les ressources utilisées, les modalités de leur utilisation et les résultats produits ;
– la cohérence : rapport avec les objectifs fixés et les actions qui en résultent ;
– la pertinence : relation entre la cohérence et l’environnement du projet. » [OA1]
La dernière grande étape est l’analyse du projet qui peut intervenir à tout moment au cours du processus. Elle vise à apprécier la philosophie générale d’un projet à travers ses différents composants et leurs relations et porte sur la prise en compte de sept paramètres essentiels :
– « la situation problème
– les acteurs engagés dans le projet
– les visées et buts explicités
– les motifs invoqués
– les stratégies en présence et les moyens utilisés
– les résultats obtenus à court et moyen terme
– les effets secondaires non voulus, engendrés et leurs conséquences. » [OA1]
L’aménagement requiert ainsi l’anticipation du projet pour être réalisée. De plus, la démarche de projet est largement utilisée en aménagement car le contexte dans lequel il se développe lui est particulièrement propice et le rend efficace. En effet, l’aménagement est un domaine dont la pratique est à base multidimensionnelle (spatiale, relationnelle et temporelle). L’aménagement fait intervenir beaucoup d’acteurs d’origine, de profession, d’habitude différentes sur un espace en constante évolution physique et sociologique. La condition de complexité inhérente au choix du projet dans la résolution d’un problème est ainsi pleinement remplie. Les projets d’aménagement nécessitent ainsi la prise en compte de trois paramètres fondamentaux :
– « la négociation permanente entre les différentes instances de la collectivité qui cherche à maîtriser son espace ;
– le temps avec ses délais et son indétermination
– l’espace avec l’identification de contraintes et ce qui constitue sa singularité. » [OA1]
Plusieurs schémas en deuxième partie illustrent les étapes essentielles du projet et son adaptation au domaine de l’aménagement. Une autre expression, projet urbain, a été identifiée au sein de plusieurs références apparaissant proche de la notion de projet d’aménagement.
« Celle-ci désigne une démarche faisant partie de la planification urbaine [OM1], mais faisant partie ou ayant des caractéristiques du champ de l’action [OA2]. » Plus simplement le projet urbain vise plus particulièrement une ou des transformation(s) urbaine(s), le plus souvent articulée(s) à une stratégie urbaine d’ensemble. Cette notion recouvre une multiplicité de significations selon les catégories d’acteurs considérés liées à leur profession respective. Elles vont du simple dessin urbain, appliqué à l’échelle du quartier, à la définition d’une stratégie d’agglomération, voire à sa programmation. Des composantes peuvent être tout de même identifiées. Le projet urbain représente une forme d’action sur les territoires qui peut se justifier notamment par la nécessité de réguler les effets des logiques socio-économiques engendrant des processus d’occupation spontanée des territoires. Il répond de plus à une démarche de conception globale notamment sur le contenu programme même si la phase de réalisation obligera un partage sectoriel du projet. Cette expression est notamment souvent utilisée par les responsables politiques locaux dans leur présentation des actions qu’ils entendent mener sur un territoire. Dans ce cas le projet urbain, initialement appliqué à la ville et donc touchant à l’intérêt public, est confronté à la contradiction suivante :
« L’élaboration d’une stratégie à moyen terme et le rythme beaucoup plus court de la vie municipale. » [OC2]
La portée stratégique du projet urbain peut être limitée et celui-ci ne devenir qu’un outil de légitimité. Cette notion apparaît comme une « notion à la carte » dans son utilisation. C’est pourquoi le choix de l’expression projet d’aménagement a été préféré dans la typologie présentée en deuxième partie. Le schéma de la page suivante, illustrant les étapes clés du projet est inspirée du livre suivant : Boutinet J.P., 1996, Anthropologie du projet, 4ème édition PUF.
Stratégie/ planification/ projet d’aménagement stratégique
Ces termes sont utilisés dans le développement notamment afin de différencier les
projets d’aménagement. « La stratégie est par son sens étymologique liée à deux notions : l’armée et le fait de conduire. La stratégie est l’art de coordonner une action. » [OL1] Contrairement à la tactique dont l’enjeu est limité dans le temps et dont les activités sont spécifiques, la stratégie a un objectif global à plus long terme. Appliqué au domaine de l’aménagement du territoire, un projet stratégique est donc caractérisé par l’élaboration d’un document détaillant des enjeux, dont découlent des objectifs pour un territoire donné ; les objectifs peuvent être ensuite détaillés en propositions d’actions. Les documents d’aménagement stratégiques ont été instaurés par le législateur afin que les opérations d’aménagement est une cohérence entre elles et qu’il y ait une unité d’ensemble. Ils permettent aux personnes publiques de mieux gérer l’utilisation de leur territoire. « Les documents stratégiques précisent le parti pris en matière d’aménagement, ils donnent les orientations principales en matière d’urbanisme, et pour certains édictent les règles applicables sur un espace déterminé. » [MM1] Ces documents, essentiellement régis pas le code de l’urbanisme n’ont pas tous la même valeur. Ils obéissent à une hiérarchisation très précise qui est détaillée en deuxième partie. « Contrairement à la stratégie, la planification quant à elle détaille une programmation d’actions et d’opérations à mener sur un domaine précis, avec des objectifs et des moyens précis et sur une durée précise. » [OM1] Le plan concrétisant la planification peut faire partie d’une stratégie, celle-ci étant plus générale et permanente et moins détaillée. Ainsi, en théorie la stratégie vient donc en amont de la planification et un document de planification peut faire partie d’un document stratégique. Les deux notions sont même parfois associées par l’expression « planification stratégique », pour définir la suite d’étapes s’étendant en amont vers le projet et sa conception, en aval vers sa réalisation. Elle assure l’articulation entre l’amont du projet et son aval opératoire. Dans les références consultées et dans la pratique de l’aménagement, il apparaît que les deux qualificatifs sont utilisés pour désigner les mêmes éléments. Dans le souci de simplifier la différentiation des projets d’aménagement, l’utilisation du terme « stratégique » a été choisie dans la typologie présentée en deuxième partie. Un projet d’aménagement stratégique a une portée temporelle et établit la programmation des opérations futures sur sa durée légale de validité ou au-delà. Ce type de projet d’aménagement se différencie des projets qualifiés d’opérationnels.
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Table des matières
INTRODUCTION
PARTIE 1 DEFINITIONS DES NOTIONS UTILISEES, PROBLEMATIQUE, DEMARCHE
1. Définitions des notions utilisées
11. Projet/ projet d’aménagement/projet urbain
12. Stratégie/ planification/ projet d’aménagement stratégique
13. Opération/urbanisme opérationnel/projet d’aménagement opérationnel
14. Procédure
15. Modèle/ modèle procédural
16. Art de faire/savoir-faire
2. Précision de la problématique et démarche de recherche
21. Précision de la problématique
22. Démarche
23. Recherche bibliographique et entretiens
a) Résultats de la recherche bibliographique
b) Synthèse des résultats des entretiens
c) Réorientation de la problématique spécifique
PARTIE 2 TYPOLOGIE DES PROJETS ET DES PROCEDURES D’AMENAGEMENT
1. Typologie des projets d’aménagement
11. Cycle 1 : maître d’ouvrage/ maître d’œuvre, projet stratégique/ opérationnel
12. Cycle 2 : maître d’œuvre/ projet conceptuel
2. Typologie des procédures d’aménagement
21. Procédures liées aux projets d’aménagement stratégiques
22. Procédures liées aux projets d’aménagement opérationnels
PARTIE 3 LA ZAC
1. Réglementation de la ZAC
11. Historique et définition
12. Etapes principales
13. Création de la ZAC
14. Réalisation de la ZAC
15. Synthèse et financement de la ZAC
2. La pratique de la ZAC : étude de cas
21. Origines du projet
22. Etapes importantes
23. Eléments méthodologiques identifiés
24. Outil d’évaluation, gage de qualité
25. Réponse à la question spécifique et générale
CONCLUSION
BIBLIOGRAPHIE
SCHEMAS, FIGURES ET TABLEAUX
TABLE DES ILLUSTRATIONS
LISTE DES ABREVIATIONS
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