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Population
Les critères d’inclusion étaient toutes les femmes mineures de moins de 15 ans à la date de conception de la grossesse prises en charge dans les services de gynécologie-obstétrique au CHU de Marseille. Etaient inclues toutes les patientes de cette tranche d’âge, quel que soit l’issue de la grossesse, suivies au CHU : grossesse évolutive (accouchement d’un enfant né vivant), fausse-couche précoce ou tardive, interruption médical de grossesse (IMG) ou interruption volontaire de grossesse (IVG).
Les critères d’exclusion étaient toutes les patientes de 15 ans ou plus le jour estimé du début de la grossesse
Recueil de données
Les données étaient recueillies à partir des dossiers médicaux des patientes.
Pour les patientes ayant eu une IVG médicamenteuse ou chirurgicale, les numéros de dossiers identifiés de mineures étaient relevés. Parmi eux, l’âge de chaque patiente à la date du début de grossesse estimée était calculé grâce à l’échographie de datation. Cette échographie était retrouvée dans le dossier. Seuls les dossiers concernant les mineures de 15 ans à la date estimée du début de grossesse étaient retenus.
Pour les dossiers des patientes ayant accouché ou ayant eu une IMG ou une fausse couche au CHU, les dossiers étaient sélectionnés grâce à une recherche informatique auprès du programme de médicalisation des systèmes d’information incluant le service (maternité de l’Hôpital Nord et de l’Hôpital de la Conception), la période d’étude (entre janvier 2013 et décembre 2017), la catégorie d’âge de la patiente (très jeune mineure), le diagnostic (« surveillance grossesse désirée » ou « non désirée », « accouchement d’un enfant vivant » ou « accouchement d’un enfant né sans vie » incluant donc les accouchements, les IMG, les fausses couches précoces ou tardives, les IVG ). Parmi les dossiers sélectionnés, l’âge de chaque patiente à la date du début de grossesse était estimé par l’échographie de datation. On ne retenait que les dossiers concernant les mineures de 15 ans à la date estimée du début de grossesse.
Fiche de recueil des données
Le recueil des données était fait sur un formulaire (Annexe 1). Les données colligées portaient sur le profil socio démographique de l’adolescente dans un premier temps. La deuxième partie du formulaire s’intéressait au profil gynéco-obstétrical de l’adolescente. La troisième partie concernait le suivi de la grossesse quel qu’en soit l’issue. La quatrième partie portait sur le déroulement de l’accouchement. La cinquième partie concernait le profil du nouveau né si il s’agissait d’un accouchement. La sixième partie était sur les suites de l’accouchement. Enfin la dernière partie s’intéressait au déroulement du suivi post IVG.
Analyse statistique
Les données anonymisées étaient saisies dans un fichier Excel. La vérification de la saisie des données était réalisée en deux temps : au cours de la saisie par la présence de contrôles sur les valeurs autorisées et à l’issue de la saisie par description de chaque variable et la recherche d’incohérences entre variables dépendantes. Une procédure d’anonymisation des données était attribuée.
L’analyse statistique était réalisée par le Service d’Evaluation Médicale (pôle Santé Publique, APHM) à l’aide du logiciel SPSS (v20), après le gel de la base de données. Une analyse descriptive était conduite sur la totalité des variables recueillies afin de décrire le profil sociodémographique, le profil gynécologique, le suivi de grossesse, le déroulement de l’accouchement, le profil de l’enfant et le devenir. Les variables quantitatives étaient décrites par la moyenne, l’écart-type et l’intervalle de confiance à 95% de la moyenne, la médiane, le minimum et le maximum. Les variables qualitatives étaient décrites par la fréquence en nombre et en pourcentage de chaque modalité. Les relations entre les critères décrivant le profil patient et les critères décrivant les modalités de prise en charge étaient étudiées à l’aide de méthodes uni variées : coefficient de corrélation, test du Chi2 ou test de comparaison de moyennes selon la nature des critères. Le seuil de significativité est fixé à p < 0.05 en situation bilatérale.
Une demande d’autorisation auprès du comité d’éthique a été réalisée avant le début de l’étude.
Caractéristiques de la population :
Profil sociodémographique
Parmi les 472 dossiers étudiés, 348 patientes ont été exclues car elles étaient mineures mais âgées de plus de 15 ans lors du début de grossesse et 48 dossiers étaient perdus. Ainsi, au total, 78 patientes étaient finalement incluses dans notre étude, représentant 0.14% des grossesses, et 0.24% des IVG suivies dans le centre.
Le profil sociodémographique de la population est détaillé dans le Tableau 1.
L’âge moyen des patientes était de 14, 4 ± 0.63 ans (extrêmes : 13 ans-15 ans) : 6 patientes de l’étude avaient 13 ans (8%), il s’agissait des patientes les plus jeunes, 32 patientes avaient 14 ans (41%) et 40 patientes avaient 15 ans (51%).
Sur les 78 patientes de l’étude, 39 patientes ont accouché (50%), 37 patientes avaient eu une IVG (47,4%), une patiente (1,3%) avait eu une fausse couche spontanée précoce et une patiente (1,3%) une fausse couche tardive. Aucune patiente n’avait eu d’IMG.
La majorité des patientes (40 patientes ; 51%) étaient inclues entre le premier janvier 2013 et le 31 décembre 2014, le nombre restait stable à 13 patientes inclues en 2015 et en 2016 (17%) et 12 patientes inclues en 2017(15%).
La majorité des patientes (60%, n=32) était d’origine française (métropole ou DOM TOM). Parmi elles, 24 patientes étaient originaires des Bouches du Rhône (75%). Les jeunes filles d’origine « hors France Métropolitaine » menaient davantage leur grossesse à terme que les jeunes filles d’origine « France Métropolitaine » (84.6% vs 22.2%, p <0.0001).
Deux patientes étaient connues du système judiciaire dans le cadre d’une « action éducative en milieu ouvert » (3%). Une patiente était accompagnée par l’aide sociale à l’enfance (1%).
Plus d’un tiers des patientes (n= 23; 38%) n’étaient pas scolarisées pendant la grossesse. Les jeunes filles scolarisées avaient plus recours à l’IVG que les non scolarisées (92.1% vs 8.7%, p<0.0001).
Pour les 68 patientes dont la situation familiale était spécifiée dans le dossier médical, 6 n’avaient plus de contact avec leur famille au cours de la grossesse (9%). Il n’existait pas de différences significatives pour le choix entre IVG et grossesse menée à terme entre les patientes qui avaient des contacts avec leur famille et le père de l’enfant et celles qui n’en avaient pas (p>0.05).
Chez les 59 patientes pour lesquelles l’information était connue, le plus grand nombre habitait au domicile familial (56%). Néanmoins, il est à noter que 2 patientes (soit 3%) étaient sans domicile fixe.
Profil gynéco-obstétrical
L’âge moyen des premières règles était de 11.4 ± 1.08 ans [extrêmes : 10 ans – 14 ans] et le délai entre la ménarche et la grossesse actuelle était de 2.9 ± 1.08 ans [extrêmes : 1an -5ans]. Sept patientes avaient des antécédents gynéco-obstétricaux: trois patientes avaient subi une fausse couche, une patiente avait été victime de viol à 11 ans, une avait été prise en charge pour une plaie vaginale, une patiente avait subi une chirurgie d’adénofibrome du sein gauche et une patiente avait déjà eu un enfant. Trois des 78 patientes de l’étude (soit 4%) avaient déjà eu un suivi gynécologique avant la grossesse. Dans ces trois cas, ce suivi avait été réalisé par un gynécologue obstétricien. Toutes les patientes ayant eu un suivi avaient un moyen de contraception lors du début de grossesse et l’une d’entre elles avait utilisé la contraception d’urgence.
Chez les 56 patientes pour lesquelles l’information était présente dans le dossier médical, 39 n’avaient pas de contraception au moment du début de grossesse (70%). Sur les 17 patientes ayant un mode de contraception avant la grossesse, il s’agissait du préservatif pour presque la moitié (8 patientes (47%)). Six patientes utilisaient une contraception oestro progestative (35%) et 3 patientes avaient utilisé la pilule du lendemain (18%) soit 5% de toutes les patientes dont le mode de contraception apparaissait dans le dossier. Toutes celles qui avaient une contraception avant cette grossesse avaient eu recours à l’IVG. Les jeunes filles n’ayant pas de contraception avant cette grossesse avaient plus tendance à mener à terme leur grossesse que celles ayant une contraception (51.3% vs 0%, p< 0.0001).
Treize patientes avaient donné une explication concernant l’échec de la contraception. Pour 3 d’entre elles la grossesse était survenue suite à un premier rapport sexuel (23%), deux patientes avaient oublié leur pilule (15%), une patiente avait mal compris les consignes (8%) et une autre patiente n’avait pas compris car ne savait pas lire (8%).Une patiente n’avait plus d’ordonnance de pilule (8%). Les autres explications étaient la mauvaise tolérance de la pilule (n=1, 8%), l’arrêt de la pilule (n=1, 8%), une utilisation occasionnelle (n=1, 8%) et le dysfonctionnement d’une contraception mécanique (n=1, 8%). Enfin une des grossesses était issue d’un viol (8%), pour cette patiente étrangère les démarches juridiques avaient été faites dans son pays d’origine.
Le dépistage des infections sexuellement transmissibles avait été réalisé chez 48 patientes, et s’était avéré positif chez 7 d’entre elles (15%).
Description du parcours de soins des mineures de moins de 15 ans enceintes
Chez 5 patientes, le terme de déni de grossesse a été mentionné dans le dossier médical sans plus d’information sur le délai de prise en charge (13%). A noter qu’en plus de ces 5 patientes, chez les patientes ayant mené la grossesse à terme 6 femmes sur les 39 de l’étude n’avaient pas été suivies pendant la grossesse soit 15,4%.
Le suivi général des patientes :
Le premier intervenant dans le suivi de la grossesse et le lieu de suivi de grossesse sont détaillés en Annexe 2.
Le premier intervenant pour la prise en charge de la grossesse était en majorité l’hôpital (46%). Sur les 78 patientes, 10 avaient consulté aux urgences gynécologiques (13%) et 2 aux urgences pédiatriques (2,5%). Pour 9 d’entre elles, il s’agissait du premier intervenant au cours de la grossesse (12%). Trois patientes seulement avaient consulté un pédiatre (4%) et pour la plupart la consultation était dédiée au risque lié à la prématurité de l’enfant à naître.
Chez les 62 patientes pour lesquelles cette notion était mentionnée dans le dossier, 95% (n=59) avaient eu un entretien avec une assistante sociale ou une conseillère conjugale. Néanmoins, seulement 13 patientes (17%) avaient vu un psychologue et 5 un psychiatre (6%) sur les 78 patientes. Seuls 24% des dossiers ont une trace de passage en réunion médico psycho sociale. Qu’il s’agisse des patientes ayant accouché ou eu une IVG ou une fausse couche, plus de 10% (n=8) sortaient de l’hôpital sans moyen de contraception. L’implant était le moyen de contraception choisi par la moitié des jeunes filles en sortant de l’hôpital (n=38, 50%). Plus d’un tiers d’entre elles choisissaient la pilule (n=29,38%). Enfin, une patiente avait opté pour le préservatif (1%).
Grossesse menée à terme :
Sur les 39 grossesses menées à terme, 11 (28%) étaient considérées comme non ou peu suivies par le personnel soignant. Pour les 28 patientes pour lesquelles l’information était mentionnée dans le dossier médical, le terme moyen du premier contact médical pendant la grossesse était de 24.1 ± 11.1 semaines d’aménorrhées (SA) [extrêmes : 12SA- 40SA]. Quinze des 39 patientes étaient fumeuses pendant la grossesse (38%). Parmi les complications retrouvées, 3 patientes présentaient du diabète gestationnel (8%), 4 étaient hospitalisées pour menace d’accouchement prématuré (11%) et 2 patientes pour pyélonéphrite (5%). Le terme moyen de l’accouchement était 37,8 ± 1.8 semaines d’aménorrhées [extrêmes : 34 SA – 43SA]. Trois patientes (soit 8%) avaient accouché prématurément avant 37 semaines d’aménorrhées. Pour les trois patientes il s’agissait d’une prématurité moyenne (entre 32 et 36+6 SA). Une patiente avait fait une fausse couche tardive à 22 SA. Six patientes avaient eu une césarienne soit 15.4% des patientes.
Les caractéristiques des nouveaux nés étaient un poids de naissance de 3028± 465 grammes [extrêmes : 1645 ; 4080]. Le pourcentage de nouveaux nés avec un poids inferieurs à 2500 grammes était 13% (n=5). Deux nouveaux nés (soit 2,5%) étaient porteurs d’une malformation (duplication digestive et pieds varus équins bilatéraux), 3 nouveaux nés étaient hospitalisés en réanimation à la naissance pour détresse respiratoire (soit 8%).
Dans le post partum, la durée moyenne d’hospitalisation était de 4.5 ± 1.57 jours [extrêmes : 3 ; 9]. Trois patientes étaient sorties contre avis médical (8%). Pour les 37 patientes ayant accouchés un suivi était organisé avec la Protection Maternelle et Infantile(PMI) pour 23 patientes (62%) et avec un gynécologue en ville pour 4 patientes. Pour 2 patientes un suivi était prévu à la sortie avec une assistante sociale (5%). Une patiente avait bénéficié du dispositif PRADO pour l’aide au retour à domicile (3%) et une autre patiente avait été prise en charge dans une maison mère enfant (3%). Six patientes n’avaient aucun suivi en sortant de la maternité (16%).
Les I.V.G.
Le terme moyen de réalisation des IVG était 9.2 ± 3.2 SA [6 ; 22]. Parmi les 37 patientes ayant eu recours à l’IVG, 13 patientes avaient eu une IVG chirurgicale soit 35% des patientes. Seulement 76% des patientes (n=28) s’étaient rendues à la consultation post IVG. Pour 34 des 37 patientes (92%), le compte rendu de l’entretien avec l’assistante sociale ou la conseillère conjugale était retrouvé dans le dossier et mentionnait principalement les accompagnants présents, la maturité de la jeune fille vis-à-vis de la grossesse, la contraception envisagée ainsi que la scolarité en cours. Pour 35 des 37 patientes (95%), aucun compte rendu d’entretien avec une psychologue n’était retrouvé dans le dossier. Lorsqu’il était présent, on retrouvait majoritairement des éléments sur le contexte familial et la scolarité en cours. La moitié des patientes était accompagnée par leurs mères (n=19, 51%), 3 étaient accompagnées par leur conjoint (8%) et 3 étaient accompagnées par leurs soeurs (8%). Dans les autres accompagnants présents, on retrouvait : une tante (n=3,8%), une accompagnatrice du foyer ou du planning familial (n=3,8%), une cousine (n=2, 5%), la belle-soeur de la patiente (n=1,3%), la belle-mère de la patiente (n=1,3%), une amie (n=1, 3%). Enfin une patiente était venue avec une assistante maternelle (3%).
Aspect médico-légal
Pour 12 patientes (15%) une mesure sociale ou judiciaire avait été instituée pendant la grossesse ou dans le post partum.
Trois des mesures concernaient l’enfant à naître (soit 8% des patientes ayant accouché) : 2 signalements avaient été envoyés au procureur de la république. Un signalement avait été réalisé devant l’absence de suivi de la grossesse et un autre suite à la sortie précoce des suites de couches sans prise en charge sociale. Une information préoccupante avait été transmise au conseil général via la cellule de recueil, d’évaluation et de traitement des informations préoccupantes (CRIP) car la patiente refusait les prises en charge médico psycho sociales proposées.
Neuf mesures concernaient les jeunes filles (soit 12% des patientes de l’étude). Deux patientes avaient été placées ou mises sous protection judiciaire dans le cadre de violences intra familiales. Pour deux autres patientes une déclaration de fugue avait été faite au décours d’une hospitalisation ou d’une consultation. Pour une des patientes l’assistance sociale avait organisé une mise sous tutelle ainsi qu’une aide pédagogique à domicile pendant la grossesse. Pour une patiente un certificat médical initial descriptif avait été réalisé suite à des disputes conjugales avec notamment « réception d’un coup de pied sur le ventre ». Une des patientes avait été prise en charge par le secours catholique au décours et une était en cours de demande d’asile. Une déclaration au « juge » par le service des grossesses à risque avait été réalisée à 34 semaines d’aménorrhées pour une patiente devant l’absence de suivie.
La question des violences, agressions sexuelles ou viol ayant précédé ou au cours de la grossesse apparait dans 7 des 78 dossiers étudiés au cours de notre étude (9%). Il n’y avait aucune information sur le sujet dans les 71 autres dossiers. Une grossesse avait été révélée suite à un viol (1%). Une allégation de viol était rapportée par 2 patientes (2,5%). Il existait un doute sur le consentement lors du rapport pour une patiente et la question avait été posée et notée dans le dossier (1%). Une patiente avait été victime d’agressions sexuelles (1%) et deux patientes avaient rapporté des violences pendant la grossesse (2,5%), pour l’une d’entre elle une plainte avait été déposée suite à la réalisation d’un certificat médical initial descriptif.
L’âge du partenaire était recueilli chez 32 patientes sur les 78 (soit 41% des patientes). Celui-ci était majeur dans 58% des cas (n=18). L’âge moyen du partenaire était de 19.1 ±5.4 ans [extrêmes : 14 ; 40]. Il n’y avait pas plus de démarches sociales ou judiciaires réalisées chez les patientes dont le conjoint était majeur que chez celles dont le conjoint était mineur (27% vs 61%, p>0,05). Parmi les 46 patientes pour lesquelles cette information était recueillie dans le dossier, 38 avaient encore un contact avec le père de l’enfant (83%).
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Table des matières
1. INTRODUCTION
2. MATERIEL ET METHODE
2.1. Population
2.2. Recueil de données
2.3. Fiche de recueil des données
2.4. Analyse statistique
3. RESULTATS
3.1. Caractéristiques de la population
3.1.1. Profil sociodémographique
3.1.2. Profil gynéco-obstétrical
3.2. Description du parcours de soins des mineures de moins de 15 ans enceintes
3.2.1. Le suivi général des patientes
3.2.2. Grossesse menée à terme
3.2.3. Les I.V.G
3.3. Aspect médico-légal
4. DISCUSSION
5. CONCLUSION
6. TABLEAU 1
7. BIBLIOGRAPHIE
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