L’insuffisance rénale chronique est une affection, souvent progressive, entraînant une perte des fonctions d’épuration et des fonctions métaboliques du rein. Elle constitue un grave problème de santé publique du fait de l’augmentation constante du nombre des patients nécessitants un traitement de suppléance couteux (dialyse ou transplantation), mais aussi par sa morbidité et sa mortalité. En Europe, plus de 250.000 patients sont sous dialyse. La moitié d’entre eux environ, peut espérer recevoir une greffe de rein (1). Au 1er janvier 2009, en France, on estime à 68 000 le nombre de personnes recevant un traitement de suppléance par dialyse ou greffe rénale (soit plus d’une personne pour 1000) (2). Lors d’une étude sur le profil épidémio-clinique et le devenir des insuffisants rénaux chroniques bénéficiaires d’hémodialyse au CHU HJRB Antananarivo Madagascar, il y avait 59 patients candidats à une hémodialyse.
Généralités
Définition
L’insuffisance rénale chronique se définit par une réduction chronique (> 3 mois) du débit de filtration glomérulaire (DFG) < 60 ml/min. selon la formule de Cockcroft et Gault ou DFG < 60 ml/min/1,73 m2 selon la formule MDRD simplifiée. Le terme « maladie rénale chronique » concerne l’ensemble des individus ayant soit une IRC (DFG < 60), soit une anomalie rénale chronique, biologique (protéinurie, anomalie du sédiment urinaire ou des fonctions tubulaires), radiologique ou histologique. (4) (5) L’insuffisance rénale chronique terminale, c’est le DFG <15 ml/ min/1,73 m2 avec nécessité de traitement de substitution .
Epidémiologie
La maladie rénale chronique est une composante importante des maladies chroniques non transmissibles qui sont responsables de pandémie actuellement. L’incidence et la prévalence de l’insuffisance rénale chronique sont en progression constante. Cela est dû au vieillissement de la population et à l’augmentation des pathologies vasculaires ou métaboliques (hypertension artérielle et diabète) ayant un retentissement rénal. Un individu de 70 ans a 70 fois plus de risques d’avoir une IRC qu’un individu de 40 ans (8). L’homme est touché deux fois plus que la femme. (9). En France, on estime qu’environ 50 000 patients sont traités pour insuffisance rénale chronique, dont environ 35 500 traitées par dialyse, en Décembre 2007. (10 (11) Au canada, l’insuffisance rénale chronique touche près de 6% de la population générale et plus de 20% des sujets de plus de 65 ans (8). Dans les pays en développement, l’IRC constitue une épidémie silencieuse. Sa prévalence n’est pas bien déterminée et sous estimée (12). A Madagascar, peu d’études sur l’insuffisance rénale chronique ont été réalisées.
Physiopathologie
La physiopathologie de l’IRC implique des mécanismes initiaux spécifiques de la néphropathie causale ainsi que des mécanismes de progression non spécifiques (13). Cette progression intervient quelle que soit la cause de l’insuffisance rénale et se poursuit même lorsque l’agression initiale est interrompue (14). Les mécanismes responsables de la progression de l’IRC sont mis en jeu par la réduction du nombre de néphrons fonctionnels ou “réduction néphronique” et font intervenir des voies communes, responsables de modifications fonctionnelles et morphologiques des structures rénales saines restantes, initialement adaptatives, mais secondairement délétères (14). Les altérations de l’hémodynamique intra rénale, l’hypertension systémique et l’activation de la fibrogénèse interstitielle rénale par les protéines filtrées jouent un rôle très important (4). Lorsque la masse rénale est réduite, le débit plasmatique glomérulaire et la pression capillaire hydraulique intra-glomérulaire ainsi que le débit de filtration glomérulaire par néphron individuel sont nettement augmentés dans les structures rénales restantes. Ces modifications hémodynamiques intra-rénales aboutissent au développement de lésions glomérulaires non spécifiques appelées “glomérulosclérose” et à l’insuffisance rénale. Toute maladie rénale réduisant le nombre de néphrons fonctionnels, induit une vasodilatation compensatoire de l’artériole afférente qui permet la transmission d’une fraction plus importante de la pression systolique jusque dans le lit capillaire glomérulaire. Ces sujets sont spécialement sensibles à l’hypertension artérielle et inversement la réduction drastique du niveau tensionnel ralentit la vitesse et la sévérité des lésions glomérulaires. La protéinurie joue un rôle aggravant très important dans l’IRC. Plus la protéinurie est abondante, plus le risque de progression vers l’insuffisance rénale terminale est important. Le degré de protéinurie est parallèle à l’hyperfiltration glomérulaire. La réabsorption des protéines filtrées au niveau de l’interstitium péritubulaire stimule la libération des cytokines et des médiateurs de l’inflammation (TGFß). Certaines des protéines filtrées et réabsorbées conservent une activité biologique favorisant les lésions tubulaires et la fibrose interstitielle (facteur de croissance, complément, complexe fer-transferrine). Le syndrome urémique fait référence aux stades plus avancés d’IRC. Sa physiopathologie peut être divisée en deux parties : d’une part, celles qui sont la conséquence de l’accumulation des produits de métabolisme protéique et, d’autre part, celles qui sont la conséquence de la perte des fonctions rénales, telles que l’homéostasie hydrique et électrolytique, et la synthèse de certaines hormones .
Diagnostic
Affirmer l’insuffisance rénale
La manière la plus précise pour estimer la fonction rénale est le calcul du taux de filtration glomérulaire en mesurant la clairance d’une substance exogène comme l’inuline ou des traceurs isotopiques (51Cr-EDTA, iohexol, 125I-iothalamate). Toutefois, ces techniques sont difficiles à réaliser en pratique clinique. On utilise donc une substance endogène, la créatinine sérique en utilisant des formules qui prennent en compte l’âge, le sexe, la race et le poids .
Affirmer son caractère chronique
Devant une insuffisance rénale, il est recommandé d’éliminer une insuffisance rénale aiguë et d’affirmer le caractère chronique de celle-ci (5). Les arguments en faveur du caractère chronique de l’insuffisance rénale sont groupés en 3 types de critères :
• critères anamnestiques : l’existence d’antécédents familiaux de néphropathie, d’antécédents personnels de diabète, d’hypertension artérielle, d’infections urinaires hautes récidivantes, d’uropathie, de maladie athéromateuse, la prise chronique de médicaments néphrotoxiques, l’existence antérieure d’une protéinurie, d’une hématurie, d’une créatininémie élevée ;
• critères biologiques : l’existence d’une anémie normochrome normocytaire arégénérative, d’une hypocalcémie ;
• critères morphologiques : l’existence d’une diminution de la taille des reins à l’imagerie (diamètre bipolaire < 10 cm à l’échographie rénale). La taille des reins peut cependant ne pas être diminuée si la maladie rénale initiale est un diabète, une amylose, et peut même être augmentée en cas de polykystose rénale.
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Table des matières
INTRODUCTION
PREMIERE PARTIE : RAPPELS THEORIQUES
I. Généralités
1.1 Définition
1.2 Epidémiologie
1.3 Physiopathologie
1.4 Diagnostic
1.4.1 Affirmer l’insuffisance rénale
1.4.2 Affirmer son caractère chronique
1.4.3 Préciser le stade de l’atteinte rénale et son rythme évolutif
Tableau 1 : Stades de l’insuffisance rénale chronique
1.4.4 Diagnostic étiologique de l’insuffisance rénale chronique
1.5 Les complications de l’insuffisance rénale chronique
1.5.1 Les désordres hydro-électrolytiques
1.5.2 Les complications cardio-vasculaires
1.5.3 Les troubles hématologiques
1.5.4 Les conséquences métaboliques, endocriniennes et nutritionnelles
1.5.5 Les troubles neuro-musculaires
1.5.6 Les troubles digestifs
1.6 La prise en charge thérapeutique de l’IRC
– Préparer les patients au traitement de suppléance
Tableau 2 : Les interventions en fonction du stade de la maladie rénale chronique et de l’insuffisance rénale chronique
Stades
Définitions
Interventions
1…..
Maladies rénales chroniques : DFG
> 60 ml/min/1,73m2
2…..
Insuffisance rénale modérée : DFG =
30-59 ml/min/1,73 m2
• Vaccination contre l’hépatite B
3…..
15-29 ml/min/1,73 m2
4…..
Prise en charge palliative ou traitement ou traitement de suppléance (dialyse ou transplantation)
Remarque : Chaque stade inclut les interventions du ou des stades précédents
DEUXIEME PARTIE : NOTRE ETUDE
I. Matériels et méthodes
1.1 Type d’étude
1.2 Recrutement des patients
1.3 Les paramètres de l’étude
II. Résultats
2.1 Données épidémio-cliniques
2.1.1 La fréquence
2.1.2 L’âge
2.1.3 Le genre
2.1.4 La race
2.1.5 Le poids
2.1.6 Le syndrome œdémateux
2.1.7 L’hypertension artérielle
2.1.8 Le diabète
2.1.9 Le tabac
2.2 Les données paracliniques
2.2.1 La créatininémie et la clearance de la créatinine
2.2.2 L’anémie
2.2.3 La calcémie
2.2.4 Le taux du potassium et du sodium
2.2.5 L’uricémie
2.2.6 La protidémie
2.2.7 La protéinurie
2.2.8 L’hématurie
2.2.9 L’échographie abdominale
2.3 Données étiologiques
TROISIEME PARTIE : DISCUSSION ET SUGGESTIONS
I. DISCUSSION
II. SUGGESTIONS
CONCLUSION
BIBLIOGRAPHIE