Profil des infections à Pseudomonas diagnostiquées au service des maladies infectieuses et tropicales

Les infections en milieu hospitalier étaient, avant l’ère des antibiotiques, dominées par les germes anaérobies et par l’infection streptococcique qui décimaient opérés, traumatisés et accouchées. L’apparition des antibiotiques a radicalement transformé ce problème, sans pour autant le faire disparaitre. L’efficacité même de ces drogues à créer une illusion temporaire, néfaste car elle eut pour conséquence première de faire oublier ou négliger les règles de l’hygiène hospitalière, moins celle de l’asepsie, toujours de rigueur si nécessaire, que celles de l’activité de soins en milieu septique. Les infections à germes Gram négatif par contre ont évolué différemment sur ce plan, puisqu’elles sont dues au fait de l’apparition de plus en plus fréquentes de souches véritablement terrifiantes [1]. Parmi elles les infections à Pseudomonas. Pseudomonas aeruginosa constitue l’espèce type la plus importante du genre Pseudomonas. Elle pose depuis quelques décennies de réels problèmes thérapeutiques. Il représente à lui seul 90% des bactéries de ce groupe isolées en clinique humaine. Pseudomonas est un germe ubiquitaire qui est incriminé dans de nombreuses infections aigues et chroniques en milieu communautaire [2]. Ce germe est également un pathogène opportuniste responsable d’infections nosocomiales sévères avec 10 à 20% des infections nosocomiales [2]. Le milieu hospitalier constitue une source majeure de contamination croisée par Pseudomonas aeruginosa. Ce pathogène se caractérise par son impressionnant capacité à devenir résistant à toutes les classes d’antibiotiques. Ainsi le traitement des infections à ces germes devient rapidement un casse-tête. Aujourd’hui, à l’ère de la résistance accrue des germes aux antimicrobiens, un autre problème soulevé est la résistance aux carbapénèmes. C’est ainsi qu’en 2017, l’OMS plaçait Pseudomonas aeruginosa résistante aux carbapénèmes sur la liste des pathogènes d’importance critique [3]. Aujourd’hui, de nombreux efforts sont faits pour la recherche sur de nouveaux antibiotiques capables d’agir sur ces bactéries.

Définition

L’étymologie du mot Pseudomonas viendrait du grec pseudo (faux) et monas (unité). C’est le botaniste allemand Walter Migula, qui, en 1894, créa le terme Pseudomonas pour la ressemblance des cellules à ceux des Monas nano flagellés, à la fois en taille et en mobilité active. » Monas fut inventé par le naturiste danois Otto Friedrich Müller en 1773 pour décrire un genre d ‘ »infusoires » qualifié de  » vermis discret, simplicissimus, pellucidus, est appelé ainsi en raison de la couleur bleu verdâtre des colonies bactériennes [4]. L’infection à Pseudomonas est due le plus souvent au Pseudomonas aeruginosa, et peut toucher tous les organes du corps (Clarke 1990). Dans la plupart des cas, les infections à Pseudomonas deviennent sérieuses pour l’organisme infecté souffrant d’autres affections ou chez le patient hospitalisé [5].

Historique

Carle Gessard (1850-1925), jeune pharmacien parisien, intrigué par la coloration azurée qui revêtait certaines plaies purulentes, chercha de milieux de culture en milieux de culture la cause. Ainsi en 1882, il isola la bactérie. Au début du vingtième siècle, les chercheurs Emmerich et Loew, s’intéressant à l’antagonisme bactérien identifièrent en 1899 la première substance chimique douée d’activité antibiotique, la pyocyanase, produite par Pseudomonas aeruginosa, le bacille pyocyanique, enzyme protéolytique capable de détruire notamment le vibrion cholérique et le bacille diphtérique. Ce qui ouvra le chemin aux nombreux essais thérapeutiques à cette époque, avec beaucoup de cas d’échec et parfois des accidents mortels. Pendant la première guerre mondiale, certains soldats blessés, voyaient leurs plaies, surinfectées par Pseudomonas aeruginosa, s’échappant du pus bleu. Le développement de l’hospitalisation et des explorations invasives dans les années 60 70, connut de graves répercussions par la présence du germe chez les patients hospitalisés. La fin du vingtième siècle, marquée par la résistance bactérienne, fait qu’aujourd’hui, qu’on soit en face de souches de Pseudomonas aeruginosa et aussi de Staphylococcus aureus résistantes à tous les agents antibactériens connus [6].

Épidémiologie

Incidence ou prévalence 

La prévalence des infections à Pseudomonas aeruginosa varie en fonction du type d’établissement de santé. Selon les données d’incidence de l’enquête Réa-RAISIN de 2009 en France, elle était à 7,8% pour les centres hospitaliers spécialisés et établissements psychiatriques, à 12,3 % pour les cliniques (médecine, chirurgie, obstétrique) de moins de 100 lits. Des disparités sont également observées en fonction des services. Les services de réanimation ont une forte endémicité pour le bacille pyocyanique, 15 % des infections nosocomiales contre environ 10 % dans les services de médecine et de chirurgie [7]. En 2013, il était la premiére cause IAS (15%) devant le staphylocoque doré [8]. Les principales infections étaient les pneumopathies (21,2 %), les infections urinaires (14,8 %) et les bactériémies (11,9 %) [7]. Selon l’ENP 2017, Pseudomonas aeruginosa était le quatriéme micro organismes isolés des infections nosocomiales (6,28%) et le Pseudomonas spp et apparentés avait 0,92% de prévalence [9]. Au USA, selon Lark et al , les Pseudomonas occupaient en 2000, la sixième place des micro-organismes isolés soit 5%[10]. Elles représentent 3,8% des bactéries en France [11].

Létalité
En France, les bactérièmies à Pseudomonas aeruginosa ont un pronostic sévère avec une mortalité de 30 % en moyenne [11]. Le taux de mortalité est élevé pour la forme septicémique de l’ecthyma gangronosum et est d’environ 15% pour la forme non septicémique de la maladie. Pseudomonas avec les staphylocoques, les streptocoques, et les entérobactéries sont responsable de 90% des cas de kératite bactériennes et complique la kératite monoculaire et Pseudomonas en serait responsable à environ 65% [13]. La pneumonie à Pseudomonas, en particulier du type bactériémique, est associée à une mortalité qui se produit généralement 3-4 jours après les premiers signes ou symptômes de l’infection pulmonaire ou extra-pulmonaire. La pneumonie sous ventilation assistée causée par Pseudomonas aeruginosa est associée à des taux de mortalité plus élevés (estimés à être aussi élevé que 68%) que les PVA causées par d’autres organismes infectieux [12].

Facteurs favorisants 

Les études de Falagas et Kopterides [14], d’une durée de vingt années (1985- 2005) avaient mis évidence plusieurs types de facteurs de risque d’acquisition de Pseudomonas aeruginosa notamment multi-résistant dans les services de réanimation adulte.
● Liés à l’hôte : antécédents d’hospitalisation ou de colonisation à Pseudomonas aeruginosa, comorbidités (scores de gravité élevés), diabète et bronchopneumopathie chronique obstructive sont fréquemment identifiés.
● Liés à la prise en charge : durée d’hospitalisation, intubation, ventilation mécanique prolongée, les traitements antibiotiques (particulièrement les carbapénèmes et les fluoroquinolones) constituent les facteurs de risque les plus souvent retrouvés.
● Liés à l’environnement : la présence de la bactérie dans les points d’eaux représente également un facteur de risque important.

Physiopathologie

Le bacille pyocianique présente la particularité d’être virulent chez l’individu normal, et au contraire très pathogéne chez le sujet dont les moyens de défense sont altérés. Pollack a classifié les infections à Pseudomonas aeruginosa en 3 stades :

➤ Stade I : Colonisation
Rare chez les sujets sains, une faible partie de la population peuvent avoir des colonisations du côlon . Les patients hospitalisés ont une fréquence de colonisation plus élevée par altération des mécanismes de défense de l’hôte .
– L’hôpital est le réservoir de ce germe,
– L’antibiothérapie à large spectre supprime la flore microbienne normale du sujet en particulier au niveau du tube digestif
– Les etats pathologiques graves et qui en retour favorise l’adhérence du germe par ses pili ou ses fibrilles aux épithéliums des muqueuses orale , pharingée et respiratoire Cette colonisation peut ensuite étre accentué par des lésions locales dues à une intubation endotrachéale, à une infection virale ( grippe ), à des brulures , à des chimiothérapies anticancéreuses , et est exacerbée par toute antibiothérapie . Pseudomonas aéruginosa peut augmenter par la production d’un glycocalix (manteau de carbohydrate produit par de nombreuses espéces bactériennes) qui entoure la bactérie et contribue à sa fixation aux cellules épithéliales ou à tout corps étranger, comme par exemple les cathéters intraveineux, les sondes urinaires ; et le protége contre les anticorps, le complément , les polynucléaires et les macrophages.
➤ Stade II : envahissement des tissus.
Production d’enzymes extracellulaires (toxines) : élastases, protéases alcalines et peut etre aussi cytotoxines et hémolysines. Les élastases et les protéases entrainent des lésions nécrotiques de la peau, du poumon, de la cornée, des petits vaisseaux donnant des lésions caractéristiques de la peau, l’ecthyma gangronosum. C’est cette combinaison de lésions de nécrose locale et de destuction des petits vaisseaux qui est à la base des propriétés invasives de Pseudomonas aeruginosa.
➤ Stade III : ce sont les lipopolysaccarides de Pseudomonas aeruginosa l’endotoxine et à l’exotoxine A qui entre en jeu. L’endotoxine joue un role dans l’activation de la coagulation de la fibrinolyse et des systémes des kinines et du complément de même que dans la production de prostaglandines et de leucotriénes, dans la libération des béta-endorphines et de cytokines dont le tumor necrosis factor. La fièvre, le choc, la CIVD (relativement rare avec Pseudomonas aeruginosa) et le SDR de l’adulte sont consécutifs à l’interaction de plusieurs voire de l’ensemble de ces facteurs. L’exotoxine A est semblable à la toxine diphtérique et inhibe les synthèses protéiques. Elle peut être responsable de choc [16].

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Table des matières

INTRODUCTION
1. Définition
2. Historique
3 Épidémiologie
3.1 Incidence ou prévalence
3.2 Létalité
3.3 Facteurs favorisants
3.4 Physiopathologie
3.5 Agent pathogène
3.5.1Classification
3.5.1.1 Classification actuelle
3.5.2Caractéres bactériologiques
3.5.2.1 Morphologie
3.5.2.2 Caratéres culturaux
3.5.3.3 Marqueurs épidémiologiques
3.5.2.3 Formation du biofilm
3.5.3Facteurs de virulence
3.5.2.6 Sensibilité aux antibiotiques
3.5.2.7 Résistance aux produits désinfectants
3.6 Réservoir naturel et mode de transmission
4 Signes
4.1 TDD : bronchopneumopathie à Pseudomonas aeruginosa de l’adulte jeune immunocompétent
4.1.1Phase de constitution de l’abcés
4.1.2Phase d’ouverture bronchique : vomique
4.1.3Phase d’évacuation bronchique
4.1.4Évolution
4.1.5Complications
4.2 Formes cliniques
4.2.1Formes topographiques
4.2.1.1 Formes urinaires
4.2.1.2 Formes cutanées
4.2.1.3 Formes cérébro-méningées
4.2.1.4 Formes oculaires
4.2.1.5 Formes auriculaires
4.2.1.6 Formes ostéoarticulaires
4.2.1.7 Bactériémie
4.3 Formes étiologiques
4.3.1Formes selon le terrain
4.3.1.1 Formes au cours de la BPCO
4.3.1.2 Formes au cours de la mucoviscidose
4.3.1.3 Formes au cours de l’infection à VIH
5 Diagnostic biologique
6 Traitement
6.1 Traitement curatif
6.1.1Buts
6.1.2Moyens
6.1.3Indications
6.2 Traitement préventif
CONCLUSION

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