Profil des cas de retraitement de tuberculose suivis au service des maladies infectieuses et tropicales

La tuberculose représente un problème de santé publique au niveau mondial. Chaque année, près de 10 millions de cas sont notifiés et au cours des 5 dernières années, elle a été la principale cause infectieuse de décès, se classant ainsi au dessus du VIH/SIDA. L’OMS estime que 10,4 millions de personnes ont contracté la tuberculose en 2016. La majorité des cas est survenue en l’Asie du Sud-Est (45 %) et en Afrique (25 %) [66]. Même s’il a été noté une amélioration dans la détection des cas et une réduction de l’incidence de 1,5 % par an entre 2014-2015 [67], les progrès doivent être encore maintenus afin de mettre fin à l’épidémie de la tuberculose d’ici 2035. En effet, la stratégie de lutte contre la tuberculose approuvée lors de l’Assemblée mondiale de la Santé en 2014, a pour objectifs de réduire de 95 % le nombre de décès et de 90 % l’incidence d’ici 2035 par rapport à 2015 [45]. Aujourd’hui, la tuberculose pharmacorésistante est une menace persistante, avec 490 000 cas de tuberculose multirésistante (TB-MR) apparus en 2016 et 110 000 autres sujets sensibles à l’isoniazide, mais résistants à la rifampicine (TB-RR). Le diagnostic de la TB-MR s’est nettement amélioré avec l’avènement du Gen-Xpert permettant non seulement d’isoler le Mycobacterium tuberculosis, mais aussi de tester la sensibilité à la rifampicine. L’observance au traitement et le suivi des patients traités représentent les principales stratégies pour prévenir la survenue de la TB-MR. Au Sénégal, le dépistage de la TB et le suivi des cas sont assurés par les centres de traitement tuberculose (CDT). En effet, la TB y sévit de façon endémique. Et, en 2016, l’incidence était estimée à 140 cas pour 100 000 habitants avec un taux de détection des cas de 60 % et la létalité de 25 décès pour 100 000 habitants. La proportion des cas de tuberculose multirésistante était de 0,9 % chez les nouveaux cas et 19 % chez les cas déjà traités .

Le service des maladies infectieuses et tropicales (SMIT) du centre hospitalier national universitaire (CHNU) de Fann fait partie des 78 centres de traitement tuberculose que compte le Sénégal. La prise en charge des patients se fait conformément aux directives du Programme National de lutte contre la Tuberculose (PNT). Près de 300 patients y sont traités chaque année. Des études antérieures ont été menées sur l’issue de traitement des cas tuberculose [4, 57], mais peu de travaux [26] se sont intéressés aux cas de retraitement. L’étude effectuée en 2012 avait retrouvé que les cas de retraitement représentaient 3,86 % de l’ensemble des cas et le taux de guérison était de 29,4 % .

Définition

La tuberculose est une maladie infectieuse transmissible et non immunisante due à une mycobactérie bacille acido-alcoolo-résistante (BAAR), aérobie strict communément appelé bacille tuberculeux dont la variété la plus répandue est représentée par le bacille de type humain, Mycobacterium tuberculosis. Il existe une définition et cadre de notification pour la tuberculose selon l’OMS.

Tuberculose bactériologiquement positive

On parle de cas de tuberculose confirmé bactériologiquement lorsque la positivité de l’échantillon biologique a été établie par examen microscopique de frottis, mise en culture ou TDR approuvé par l’OMS (par exemple Xpert MTB/RIF). Ces cas devraient à chaque fois être notifiés que le traitement ait ou non commencés.

Tuberculose bactériologiquement négative

Un cas de tuberculose diagnostiqué cliniquement désigne un sujet qui ne remplit pas les critères de confirmation bactériologique, mais chez qui la forme évolutive a été diagnostiquée par un clinicien ou un autre praticien médical, lequel a décidé de mettre en place un traitement antituberculeux complet. Cette définition englobe les cas diagnostiqués sur la base d’anomalies radiographiques ou d’une histologie évocatrice et les cas extrapulmonaires non confirmés en laboratoire. Les cas diagnostiqués cliniquement dont la positivité bactériologique est établie par la suite (avant ou après la mise en route du traitement) doivent être reclassés avec les cas confirmés bactériologiquement.

Nouveau cas 

Les nouveaux patients n’ont jamais reçu de traitement antituberculeux ou suivent un tel traitement depuis moins d’un mois.

Cas de retraitement

Les patients ayant déjà reçu un traitement antituberculeux pendant un mois ou plus. Ils sont classés selon le résultat thérapeutique de leur dernière cure, comme suit :
➤ Les patients en rechute ont déjà reçu un traitement antituberculeux, ont été, à la fin de leur dernière cure, classés dans la catégorie guérison ou traitement terminé, et sont aujourd’hui diagnostiqués comme présentant un épisode récurrent de tuberculose (rechute proprement dite ou nouvel épisode dû à une réinfection).
➤ Les patients traités après un échec thérapeutique sont ceux qui ont déjà été traités pour la tuberculose et chez qui la dernière cure n’a pas fonctionné (échec thérapeutique).
➤ Les patients traités après avoir été perdus de vue ont déjà reçu un traitement antituberculeux et ont été déclarés perdus de vue à l’issue de leur dernière cure. (On parlait auparavant de « patients traités après interruption ».)
➤ Les autres patients déjà traités sont ceux qui ont déjà reçu un traitement antituberculeux, mais chez qui les résultats de la dernière cure sont soit inconnus, soit non documentés.

Historique

La tuberculose est une maladie ancienne qui existe vraisemblablement depuis au temps préhistorique. C’est une infection dont les origines remonteraient à l’apparition du genre humain et de la vie en société, mais dont l’unité nosologique et étiologique n’avait été reconnue qu’à partir du 19ème siècle. Des délabrements tissulaires tuberculeux ont été identifiés dans les os des momies égyptiennes qui datent de 3000 à 2400 ans avant Jésus Christ. De même en Inde et en Amérique latine, on trouve des signes de présence de la tuberculose vers 2000 ans avant Jésus Christ. Au 18ème et 19ème siècle, la tuberculose était responsable de 25 % des décès dans les villes européennes, devenant ainsi un problème majeur de santé publique.
➤ En 460 avant Jésus-Christ, HIPPOCRATE avait décrit des tubercules dans des ulcérations et des pleurésies ainsi que les premiers « traitements ». Il désigna la tuberculose sous le terme grec « physis » qui v eut di re l’affaiblissement et le dépérissement progressif des malades qui en étaient atteints.
➤ ARISTOTE en avait soupçonné le caractère contagieux.
➤ La tuberculose est reconnue comme une maladie infectieuse due à un micro organisme par GIRO LAMO FRACASTERO (1478-1553) à la période de la Renaissance. Au XVIIIe siècle, des idées nouvelles et des travaux commencèrent à se développer malgré la persistance de la confusion nosologique, mais on connaissait déjà l’intérêt d’éloigner les malades de la tuberculose des villes vers les campagnes.
➤ Entre 1774 et 1816, LAURENT BAYLE décrit le granulome de la miliaire et les aspects anatomiques de la phtisie.
➤ LAENNEC ( 1819) avait établi que la tuberculos e pouvait atteindre d’autres organes que les poumons
➤ En 1854, RILLET et BARHEZ publient 27 cas de fistules bronchiques liées à la maladie.
➤ JEAN ANTOINE VILLEMIN (1865), après avoir prouvé par méthode expérimentale la transmission de la tuberculose, a pu affirmer que cette maladie était due à un microbe invisible avec les moyens techniques de l’époque. Il a conclu qu’on pouvait s’en protéger par des mesures visant à éviter la contagion.
➤ En 1882, ROBERT KOCH médecin allemand identifia le bacille qui porte depuis son nom, et c’est la date de cette découverte qui est célébrée chaque année par une journée mondiale, les slogans variant en fonction des urgences de l’heure.
➤ BOUCHARD et BECLERE en 1907 appliquèrentles rayons X , découverts en 1886 par ROENTGEN, au diagnostic de la tuberculose pulmonaire.
➤ VON PIRQUET en 1907 et MANTOUX en 1909 développèrent les premières applications cliniques de l’allergie tuberculeuse par l’usage des tests cutanés tuberculiniques.
➤ CALMETTE et GUÉRIN par ensemencement répété (230 fois) de 1906 à 1921 d’une souche virulente de Mycobacterium bovis avaient rendu cette dernière inoffensive, tout en lui gardant son caractère antigénique, celui d’induire une allergie. C’est le point de départ de la vaccination au Bacille de Calmette et Guérin (BCG), d’abord de façon limitée en 1921, puis dans tout le monde entier à partir de 1924.
➤ FORLANINI en 1912 appliqua la collapothérapie dans le traitement de la tuberculose pulmonaire
➤ WAKSMAN, BUGIE, SCHATZ, FELDMAN et MINSHAW avaient montré en 1944 que la streptomycine modifiait l’évolution de la tuberculose
➤ E n 1952, l’isoniazide fut introduit dans le traitement de la tuberculose ; à partir de 1956, l’éthionamide et le prothionamide furent commercialisés en 1969, la rifampicine confère au traitement antituberculeux son profil actuel alors que l’Ethambutol ne fut disponible en France qu’en 1970. Le Pyrazinamide était découvert en 1952, il fut abandonné à cause de ses effets secondaires puis réutilisés à faible dose à partir de 1968 et avait permis de réduire la durée du traitement.
➤ La tuberculose a connu une recrudescence à travers les pays développés à partir du début des années 1980 avec l’avènement de l’infection au VIH/SIDA.

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Table des matières

INTRODUCTION
1. Définition
1.1. Tuberculose bactériologiquement positive
1.2. Tuberculose bactériologiquement négative
1.3. Nouveau cas
1.4. Cas de retraitement
2. Historique
3. Épidémiologie
3.1. Dans le monde
3.2. Au Sénégal
4. ÉTIOPATHOGÉNIE
4.1. L’agent pathogène
4.1.1. Le germe
4.2. Source et transmission de la maladie
4.3. Évolution naturelle du bacille dans l’organisme
4.3.1. Primo-infection
4.3.2. Tuberculose évolutive
4.3.3. Facteurs de risque de développer une tuberculose évolution
5. MANIFESTATIONS CLINIQUES DE LA TUBERCULOSE
5.1. Types de description : la tuberculose pulmonaire commune chez l’immunocompétent
5.1.1. Les signes cliniques
5.1.2. Les signes paracliniques
5.1.2.1. Imagerie
5.1.2.2. Biologies
5.2. Autres formes cliniques
5.2.1. La miliaire tuberculeuse
5.2.2. Les formes extrapulmonaires
5.2.2.1. La tuberculose ganglionnaire
5.2.2.2. Pleurésie tuberculeuse
5.2.2.3. Tuberculose ostéo-articulaire
5.2.2.3.1. Tuberculose rachidienne
5.2.2.3.2. Ostéo-arthrite tuberculeuse
5.2.2.4. Tuberculose du système nerveux central
5.2.2.4.1. Méningite tuberculeuse
5.2.2.4.2. Tuberculomes intracrâniens
5.2.2.5. Tuberculose abdominale
5.2.2.5.1. Tuberculose péritonéale
5.2.2.5.2. Tuberculose gastro-intestinale
5.2.2.6. Tuberculose uro-génitale
5.2.2.7. Autres localisations de la tuberculose
5.2.2.7.1. Péricardite tuberculeuse
5.2.3. Les formes selon le terrain
5.2.3.1. La tuberculose chez le nourrisson et l’enfant
5.2.3.2. La tuberculose chez la personne immunodéprimée infectée par le VIH
6. Traitement
6.1. Traitement curatif
6.1.1. Buts
6.1.2. Moyens
6.1.2.1. Médicaments antituberculeux
6.1.2.1.1. Les antituberculeux de première intention
6.1.2.1.2. Les antituberculeux de seconde intention
6.1.2.2. Moyens adjuvants
6.1.3. Principes du traitement antituberculeux
6.1.3.1. Bilan pré-thérapeutique
6.1.3.2. Schémas thérapeutiques
6.1.3.3. Protocoles thérapeutiques
6.1.4. Surveillance thérapeutique
6.2. Traitement préventif
6.2.1 La prévention de la transmission, dépistage des sujets infectés
6.2.2 La vaccination par le vaccin Bilié de Calmette et Guérin
6.2.3 La chimioprophylaxie antituberculeuse
6.2.3.1 Principes et indications
7. Programme national de lutte contre la tuberculose (PNT) au Sénégal : recommandations et directives
7.1. Historique/Organisation
7.2. Missions
7.3. Objectifs
7.4. Directives de dépistage de la tuberculose
7.4.1 Cas suspect de tuberculose
7.4.2 Diagnostic de la tuberculose
7.4.3 Définition des cas de tuberculose
7.5. Concepts de prise en charge de la tuberculose
7.6. Issues de traitement des cas de tuberculose
CONCLUSION

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