Production et consommation de viande de veau
Les différents types de veau
Le veau nourrisson, aussi appelé laiton, et le veau de boucherie (de lait) répondent à la définition communautaire. Le premier âgé de une à deux semaines, après ingestion du colostrum, est destiné aux éleveurs. Le second, celui qui nous intéresse dans ce travail, est vendu vers quatre mois à un poids de 140-200 kg vif en fonction de l’origine [50]. Ainsi, on distingue des « veaux légers » issus de races laitières et des « veaux lourds » de races allaitantes [71]. Sous le terme de veau, on désigne également des jeunes bovins fournissant une viande bovine particulière : il s’agit du veau de Saint Etienne et du veau de Lyon.Le veau de Saint Etienne est un bovin limousin non sevré consommant également des fourrages et du concentré. Il est abattu à l’âge de 7-9 mois à un poids de 250-350 kg. Le veau de Lyon est un bovin mâle limousin sevré, engraissé et abattu entre 12 et 14 mois à un poids allant de 400 à 450 kg. Cette production est par conséquent complètement différente de celle du veau de boucherie. Il n’y d’ailleurs pas de confusion entre les deux : la viande n’a pas l’allure classique de celle du veau et sa commercialisation se cantonne essentiellement aux régions géographiques dont elle porte le nom. Ainsi, le veau de boucherie qui nous intéresse ici est un animal très jeune nourri exclusivement au lait en élevage intensif et sa consommation peut paraître d’autan plus surprenante que sa viande est par conséquent totalement dépourvue de marbré et persillé et donc de sapidité (a priori). Quelles sont donc les qualités de cette viande ?
Tendance générale de la consommation des produits animaux en France
La consommation des produits animaux a considérablement augmenté depuis l’après-guerre. A l’heure actuelle, la consommation des calories d’origine animale représente plus de 40% de la ration calorique contre à peine 30% en 1950, avec une régression des glucides et une augmentation des lipides [30]. Les dépenses consacrées aux denrées d’origine animale représentent 7,5% de l’ensemble des dépenses de consommation et 45% des dépenses alimentaires en 1995 [30]. Néanmoins, depuis les années 1980, la situation s’est stabilisée, le discours alarmiste des nutritionnistes aidant couplé vraisemblablement à une certaine saturation de la consommation (le fameux « mur des estomacs »).Cet essor des denrées animales s’est traduit par une croissance de la consommation des volailles, de la charcuterie et des produits transformés (conserves, plats cuisinés) qui dépassent même en terme de dépenses les viandes non transformées. D’ailleurs, la consommation des viandes de boucherie a amorcé une baisse qui affecte le cheval depuis 1964, le veau depuis 1967, le boe uf depuis 1980 et l’agneau depuis 1991 [30]. Les graphiques 2 et 3 illustrent ce déclin. La saturation progressive de la consommation implique une croissance très limitée du marché des viandes et par conséquent une concurrence accrue.D’où la nécessité impérieuse de se différencier, de faire valoir un avantage comparatif que ce soit par le prix, la qualité, des informations nutritionnelles et sanitaires. Cela suppose la construction d’une image qui reste malgré tout à la merci de l’instabilité des comportements du consommateur et à la pression des médias pour qui parfois information rime avec désinformation.
Evolution de la consommation depuis les années 1950
Les graphiques 2 et 3 illustrent le déclin de la consommation de veau. Ceci peut paraître paradoxal quand on connaît les procès faits aux viandes rouges et l’attrait de plus en plus marqué du consommateur pour les viandes maigres. En fait, cette tendance remonte à 1968 et est la conséquence d’une dégradation de la qualité moyenne de la viande de veau non compensée par une baisse des prix, la rendant ainsi moins attractive que les autres viandes [45]. En outre, la dinde, substitut acceptable en terme d’usage et de goût et bénéficiant de prix attractifs, constitue un concurrent redoutable .Depuis 1950, on distingue ainsi quatre périodes bien visibles sur le graphique 4. De 1949 à 1967, la consommation de veau produit de façon traditionnelle (avec le lait de la mère ou d’une nourrice) augmente mais reste très sensible au prix. En 1968, la consommation chute sévèrement en raison d’une baisse de la qualité imputée à la rationalisation de la filière (« veaux en batterie ») et à la cherté de cette viande. Le 1er boycott de la consommation de cette viande de veau intervient en 1973. A partir de 1974, la consommation se redresse en raison d’une baisse des prix (gains de productivité et importation de veaux hollandais moins chers) mais aussi d’une modification de la demande (baisse de l’élasticité-prix). Mais le boycott de 1980 stoppe cet élan. Depuis, la consommation est désespérément orientée à la baisse ; d’autant plus que la viande de veau reste une viande chère et à la merci des crises de confiance du consommateur et de la conjoncture économique.
En France et en Europe
En 2000, la production européenne de veau de boucherie s’établissait à 5 770 000 têtes soit 777 200 tec. Cette production est en fort recul [34] : la Communauté produisait en effet 6 350 000 veaux en 1991 et même 7,5 millions avant la crise de 88-89. Ce recul, valable au niveau français également comme l’illustre le graphique 13, s’explique certes par un déclin de la consommation mais aussi par les effets de l’évolution des filières viandes et lait que nous envisagerons ultérieurement. France est toujours le premier producteur de l’Union Européenne devant l’Italie et les Pays-Bas (graphique 14) mais sa contribution à la production communautaire ne cesse de se dégrader (graphique 13) passant de 46,2% en 1980 à 35,9% en 1991 tandis que l’Italie et les Pays-Bas gagnaient respectivement 5,4 et 5,2 points .Les Pays-bas ont une production originale : non seulement elle ne correspond pas à la même définition du veau français mais en plus elle est totalement destinée à l’exportation (près de 83% en 1991) [12]. Leurs exportations vers la France ont même augmenté de 10 000 tonnes depuis 1989 représentant aujourd’hui 17,6 % de la production française et même 50% si l’on compte les veaux produits dans les entreprises françaises à capitaux hollandais [70]. A vrai dire, la France est en situation chronique de sous-production : en 1999, le déficit s’élevait à 350 000 têtes soit 47000 tec
Un secteur dynamique et fortement concurrentiel
Au niveau européen, les opérateurs français de la filière font plutôt figure de nains : Collet, leader français, pèse 3,5 fois moins que le groupe néerlandais Van Drie et rivalise à peine avec » T Boer En Zonen » (Hollandais lui aussi). Le 3ème français Denkavit n’est d’ailleurs pas français mais lui aussi hollandais! [5] Ces différences de taille au niveau national et européen aboutissent à des restructurations, phénomène favorisé il est vrai par les crises successives et des distorsions de concurrence où la raison du plus fort est de mise.En 98, Voréal a ainsi été racheté par Besnier (devenu Lactalis) ; le hollandais Schills a répliqué en s’emparant de Vals, propriété de Sodiaal qui l’avait lui-même ravi à Sanders. Cette année là , Serval était également sur le marché, aiguisant l’appétit de plusieurs néerlandais trouvant là une façon de s’implanter dans le premier marché d’Europe dans de ce domaine [5]. 40 Une façon de résister à cette tendance (mais c’est aussi une façon de promouvoir le veau plus efficacement) est la constitution d’alliances : ainsi, en l’an 2000, afin de résister à la concurrence des entreprises hollandaises 4 à 10 fois plus importantes et de rester compétitives, les établissements Collet et la branche vitellière du groupe Lactalis (Tendriade) ont conclu un accord de partenariat créant ainsi le premier abatteur de veau en France avec 400 éleveurs, 250 000 veaux par an et un chiffre d’affaire de 2 milliards de francs [77].
|
Table des matières
INTRODUCTION :
PARTIE 1 : Production et consommation de viande de veau
1.Définition du veau
1.Définition réglementaire du veau et de la viande de veau
2.Les différents types de veau.
2.Caractéristiques de la viande de veau
1.Perception de la viande de veau
2.Valeur nutritionnelle de la viande de veau
2.1 Les protéines
2.2 Teneur en lipides
2.3 Autres constituants
2.4 Cas particulier du foie de veau
3 Caractères organoleptiques de la viande de veau
3.1 La couleur
3.2 La tendreté
3.3 La jutosité
3.4 La flaveur
4 Comparaison avec le veau lourd à l’ensilage (Pays-Bas
4.1 Aspect général
4.2 Comportement à la cuisson
4.3 Qualités organoleptiques
a) Panel entraîné (experts)
b) Panel de consommateurs
3.Consommation de la viande de veau
1.Tendance générale de la consommation des produits animaux en France
2.Une tendance à la baisse pour la viande de veau
2.1 Evolution de la consommation depuis les années 1950
2.2 Consommation actuelle
3.Profil du consommateur de viande de veau en France
3.1 Effet de la situation géographique
3.2 Effet des catégories socio-démographiques
3.3 Lieu d’achat
4.Stratégie de différenciation par la qualité et l’innovation
4.1 Les effets de la différenciation qualitative
4.2 Les outils de la différenciation qualitative
4.2.1 Les labels agricoles
4.2.2 La certification de conformité de produit
4.2.3 Viandes certifiées Agriculture Biologique
4.2.4 Les marques commerciales individuelles et collectives
4.3 Segmentation de l’offre par l’innovation produit
4.3.1 Pourquoi segmenter ?
4.3.2 Les cibles visées
4.4 Marketing et communication
4.4.1 Quelques exemples de communication menées par l’Interprofession
4.4.2 Un exemple de plan marketing (le cas de Tendriade)
4.Caractéristiques de la production de veau de boucherie
1.Quelques chiffres
1.1 En France et en Europe
1.2 Production en Midi-Pyrénées
2.Une production intégrée
2.1 Les sociétés d’intégration
2.2 Un secteur dynamique et fortement concurrentiel
2.3 Les éleveurs
2.3.1 Une production essentiellement secondaire
2.3.2 Des éleveurs intégrés à 95 % [63
3.Une production au carrefour des secteurs lait et viande
3.1 Composantes du coût de production
3.2 Influence des quotas laitiers
3.3 Influence de la production de jeunes bovins
3.4 Influence du marché de la poudre de lait
3.5 Influence des mesures de soutien aux secteurs lait et viande
3.5.1 Conséquences de la prime Hérode
3.5.2 Conséquences de la prime de la mise en marché précoce
4.Les défis à relever
4.1 La maîtrise des coûts
4.2 La reconnaissance du rôle de régulation de cette filière
4.3 La mise aux normes Bien-être
PARTIE 2 : Le challenge de la mise aux normes Bien-être
1.Notion de bien-être
1.Les différents points de vue
1.1 Le point de vue des ligues de protection animale
1.1.1 Des griefs recevables sur le fond
1.1.2 Des arguments extrémistes
1.2 Le point de vue des consommateurs
1.3 Le point de vue des producteurs
1.4 Le point de vue du législateur
2.Définition du bien-être animal
3.Les méthodes de mesure du bien-être du veau
3.1 L’ergonomie
3.2 La mesure des préférences
3.3 La mesure de l’inconfort
3.3.1 Des critères sanitaires
3.3.2 Des critères de production
3.3.3 Les réactions physiologiques au stress
3.3.4 Le comportement
2.Logement et bien-être
1.Case individuelle et ergonomie
2.Influence du logement sur le comportement
3.Influence du logement sur la physiologie
4.Influence du logement sur les critères zootechniques
5.Influence du logement sur les critères sanitaires
6.Les dispositions réglementaires [35
3.Alimentation et bien-être
1.Influence du mode de distribution
2.Influence d’une adjonction d’aliments solides
3.Influence de la teneur en fer de l’aliment
3.1 Anémie et comportement
3.2 Anémie et état physiologique
3.3 Anémie, performance zootechnique et état sanitaire
4.Relation bien-être de l’animal et comportement de l’éleveur
5.Conséquences techniques et économiques de la mise aux normes bien-être
1.Les différents systèmes de logement possibles
1.1 Utilisation du D.A.L
1.2. Le seau individuel
2.Les aides allouées à la mise aux normes
2.1 Les aides de l’OFIVAL
2.2 Les aides octroyées par les intégrateurs
3.Comparaison technico-économique des trois systèmes de logement
3.1 Résultats économiques
3.1.1 Des investissements variables (Tableau 9)
3.1.2 Des marges aussi variables
3.2 Résultats zootechniques
3.3 Impact sur le travail de l’éleveur
PARTIE 3 : Impact de la mise aux normes sur le plan sanitaire et enquête auprès des vétérinaires
1.La pathologie digestive
1.Diarrhées infectieuses
1.1 Les germes en cause
1.1.1 Les bactéries
1.1.2 Les virus
1.1.3 Les parasites
1.2 Influence des nouvelles normes
1.3 Mesures prophylactiques8
2.Autres troubles non infectieux
2.1 Le « ruminal drinking »
2.2 Ulcérations de la caillette.
2.3 Autres troubles digestifs
2.La pathologie respiratoire
1.Etiologie
2.Impact des nouvelles normes
3.Prophylaxie
3.Les pathologies émergentes
4.Réalisation d’une enquête auprès de vétérinaires intervenant dans la filière
1.Méthodologie
1.1 Méthode d’administration du questionnaire
1.2 Traitement et exploitation des résultats
2.Présentation des résultats
2.1 Caractéristiques des élevages suivis par les vétérinaires
2.2 Impact sanitaire de la mise aux normes
a) Impact sur les pathologies digestives
b) Impact sur les pathologies respiratoires
c) Impact sur les pathologies émergentes
2.3 Impact sur les frais vétérinaires de la mise aux normes
2.5 L’avenir de la filière selon les vétérinaires
2.6 Jugement des nouvelles normes par les vétérinaires
Références bibliographiques
Annexe I : Arrêté du 20 janvier 1994
Annexe II : questionnaire veau de boucherie
Annexe III : illustrations des systèmes techniques
Annexe IV : le marché du veau en l’an 2000
Télécharger le rapport complet