Production agricole et fertilisation

Production agricole et fertilisation

Les besoins des plantes

Aujourdโ€™hui, la majeure partie de notre alimentation repose sur la production vรฉgรฉtale pour nourrir directement les รชtres humains ou les animaux dโ€™รฉlevage qui seront consommรฉs (Mazoyer and Roudart 1997). Les plantes au contraire sont des organismes autotrophes qui produisent leurs propres tissus organiques ร  partir de molรฉcules inorganiques prรฉlevรฉes dans leur environnement : les nutriments. Les vรฉgรฉtaux contiennent une grande partie dโ€™eau. ร€ lโ€™รฉchelle atomique, au moins 17 nutriments essentiels au dรฉveloppement des plantes ont รฉtรฉ recensรฉs (Frausto da Silva and Williams 2001; Danforth 2009). Parmi eux, le carbone (45% de la masse sรจche, fixรฉ lors de la photosynthรจse), lโ€™oxygรจne (45% de la masse sรจche, impliquรฉ dans la respiration) et lโ€™hydrogรจne (6% de la masse sรจche, impliquรฉ dans la balance osmotique, les rรฉactions biochimiques, etc.). Ces trois รฉlรฉments proviennent de lโ€™air et de lโ€™eau absorbรฉs par la plante. Ensuite, les trois nutriments primaires pour la croissance des plantes (Danforth 2009; Raven 2014) sont lโ€™azote (1,5% de la masse sรจche, constituant des protรฉines, de la chlorophylle et des acides nuclรฉiques), le phosphore (0,2% de la masse sรจche, impliquรฉ dans de nombreuses rรฉactions biochimiques et constituant de lโ€™ADN) et le potassium (1% de la masse sรจche, impliquรฉ dans la photosynthรจse et de nombreuses autres fonctions). Dโ€™autres nutriments secondaires (calcium, magnรฉsium, soufre) et micronutriments (bore, chlore, cuivre, fer, manganรจse, molybdรจne, zinc et nickel) sont aussi nรฉcessaires ร  la croissance des plantes (Danforth 2009) et composent les 1,3% restant de la masse sรจche (Raven 2014). Selon la loi de Liebig sur le minimum (Liebig 1855), la croissance dโ€™une plante est limitรฉe par le nutriment qui vient ร  manquer en premier. ร‰tant donnรฉ leur importance pour le fonctionnement des plantes et leur disponibilitรฉ naturelle dans les sols, les 3 รฉlรฉments limitant la croissance des plantes sont principalement lโ€™azote (N), le phosphore (P) et le ย potassium (K). Par exemple, la production de 100 quintaux de grains de blรฉ exporte avec le grain environ 180 kg N, 65 kg P exprimรฉ en P2O5 et 50 kg K exprimรฉ en K2O (calculรฉ dโ€™aprรจs COMIFER 2013, 2019). Toute sociรฉtรฉ basant sa subsistance sur lโ€™agriculture doit donc trouver le moyen de restituer la fertilitรฉ des sols cultivรฉs et compenser les exports de nutriments des rรฉcoltes pour garantir une production alimentaire pรฉrenne.

Le modรจle dominant actuel : la fertilisation minรฉrale

La pratique classique pour satisfaire les besoins en nutriments des rรฉcoltes consiste ร  utiliser des fertilisants ou engrais, cโ€™est-ร -dire des matiรจres comprenant des nutriments nรฉcessaires ร  la croissance des plantes. Au cours du XXe siรจcle, la production agricole a trรจs fortement augmentรฉ par lโ€™utilisation de fertilisants minรฉraux dโ€™origine industrielle (Erisman et al. 2008). En effet, chaque annรฉe, environ 200 millions de tonnes dโ€™engrais minรฉraux sont consommรฉs et cette consommation est susceptible de continuer ร  augmenter dans les prochaines annรฉes (FAO 2019). Les principaux engrais utilisรฉs sont les engrais azotรฉs (environ 110 millions de tonnes), les engrais phosphatรฉs (environ 50 millions de tonnes, exprimรฉes en P2O5) et les engrais potassiques (environ 40 millions de tonnes, exprimรฉes en K2O).

Alternatives aux engrais minรฉraux

Des alternatives aux engrais minรฉraux existent. Cโ€™est par exemple le cas des effluents dโ€™รฉlevage qui reprรฉsentent environ 275 millions de tonnes en France. Cependant, ils sont dรฉjร  en trรจs grande partie valorisรฉs directement ร  la pรขture ou aprรจs rรฉcupรฉration dans les bรขtiments dโ€™รฉlevage (Houot et al. 2014). De plus, les fourrages et grains utilisรฉs pour nourrir les animaux sont en partie fertilisรฉs avec des engrais minรฉraux (Le Noรซ et al. 2017) : les nutriments des effluents dโ€™รฉlevage viennent donc en partie et indirectement des engrais minรฉraux. De nouvelles ressources potentielles ont รฉtรฉ identifiรฉes, en particulier issues des dรฉchets urbains conventionnels (biodรฉchets, dรฉchets verts, etc.). Cependant, cela ne reprรฉsente que quelques millions de tonnes au niveau de la France et des flux insuffisants dโ€™azote, de phosphore et de potassium ร  substituer aux engrais minรฉraux, hormis autour de certaines zones urbaines (Verger et al. 2018). Les boues de stations dโ€™รฉpuration sont quant ร  elles dรฉjร  valorisรฉes en agriculture ร  hauteur de 60-70% en France (Houot et al. 2014). Elles permettent le recyclage dโ€™une part non nรฉgligeable de phosphore, mais reprรฉsentent nรฉanmoins des flux mineurs ร  lโ€™รฉchelle nationale ร  la fois pour lโ€™azote et le phosphore (Le Noรซ et al. 2018).

Une autre stratรฉgie (seulement valable pour les apports dโ€™azote) peut รชtre lโ€™utilisation de lรฉgumineuses qui permettent de fixer directement lโ€™azote de lโ€™air (Billen et al. 2012). Elles peuvent รชtre intercalรฉes entre diffรฉrentes cultures non fixatrices dโ€™azote et fournir une partie de lโ€™azote ร  travers leurs rรฉsidus de culture. Cependant, ces restitutions sont gรฉnรฉralement de lโ€™ordre de quelques dizaines de kilogrammes dโ€™azote par an (Peoples et al. 2009; Chambre dโ€™agriculture de Seine-et-Marne 2017), ce qui est souvent insuffisant pour couvrir les besoins de cultures ร  haut potentiel de rendement. Le dรฉveloppement des lรฉgumineuses en parallรจle dโ€™un changement de rรฉgime alimentaire reste toutefois un รฉlรฉment clรฉ pour rรฉduire les besoins en fertilisants azotรฉs des systรจmes de culture (Billen et al. 2012).

Gestion de la fertilisation azotรฉe

Dans les systรจmes conventionnels des climats tempรฉrรฉs, la gestion de la fertilisation azotรฉe se fait en grande partie ร  lโ€™annรฉe. Par exemple, pour la production de cรฉrรฉales, les apports sont gรฉnรฉralement faits au printemps, pรฉriode ร  laquelle les cรฉrรฉales ont besoin dโ€™azote pour leur croissance. En France, la mรฉthode du bilan est largement utilisรฉe pour calculer les apports dโ€™azote (COMIFER 2013). Cette mรฉthode prend en compte les besoins de la culture ainsi que les fournitures du sol qui correspondent principalement aux reliquats en azote dans le sol ร  la sortie de lโ€™hiver, ร  la minรฉralisation de la matiรจre organique du sol, des rรฉsidus de culture du prรฉcรฉdent et des produits organiques รฉventuellement apportรฉs au cours de la culture. Le bilan des besoins et de la fourniture du sol donne la dose complรฉmentaire dโ€™azote minรฉral ร  apporter pour atteindre un rendement annuel visรฉ. Dans les systรจmes biologiques, la gestion de la fertilisation azotรฉe se fait plutรดt ร  lโ€™รฉchelle de la rotation en utilisant des lรฉgumineuses et des fertilisants organiques et ร  long terme en entretenant la fertilitรฉ du sol (Kรผstermann et al. 2010).

Un point important pour la gestion de la fertilisation azotรฉe est lโ€™efficacitรฉ des fertilisants. En effet, les cultures absorbent lโ€™azote sous forme minรฉrale : ammonium (NH4) ou nitrate (NO3). En opposition aux engrais azotรฉs minรฉraux qui ne contiennent que des formes minรฉrales de lโ€™azote (lโ€™urรฉe est considรฉrรฉe comme une forme minรฉrale รฉtant donnรฉ son hydrolyse rapide), les fertilisants organiques (digestat, lisier, fumierโ€ฆ) contiennent une proportion plus ou moins grande dโ€™azote organique. Ainsi lโ€™intรฉrรชt fertilisant de ces produits organiques va dรฉpendre de leur teneur en azote minรฉral et de la vitesse de minรฉralisation de leur azote organique pour pouvoir รชtre absorbรฉ par les cultures. Cette fraction organique peut รชtre plus ou moins stable et difficile ร  dรฉgrader, rรฉsultant en une efficacitรฉ en tant que fertilisant azotรฉ plus ou moins grande lโ€™annรฉe de lโ€™apport (Agehara et Warncke 2005; Gaskell et Smith 2007).

Outre la dynamique de minรฉralisation de la fraction organique, lโ€™efficacitรฉ fertilisante va รฉgalement dรฉpendre du risque de volatilisation de la fraction azotรฉe sous forme ammoniacale (Trochard et al. 2019). Celle-ci se produit principalement au moment de lโ€™รฉpandage et est favorisรฉe par la teneur en azote ammoniacal du fertilisant (au moment de lโ€™รฉpandage ou aprรจs hydrolyse de lโ€™urรฉe), des pH du sol et du fertilisant รฉlevรฉs, et par la durรฉe de contact du fertilisant avec lโ€™air (elle est plus longue pour les produits solides). De plus, lโ€™ammoniac est un polluant de lโ€™air qui a un impact nรฉgatif sur la santรฉ ร  travers la formation de particules fines et sur lโ€™environnement par acidification et eutrophisation (Sutton et al. 2011) .

Les diffรฉrents fertilisants azotรฉs (minรฉraux et organiques) peuvent avoir des efficacitรฉs fertilisantes diffรฉrentes. Le coefficient apparent dโ€™utilisation de lโ€™azote (CAU) et le coefficient dโ€™รฉquivalence engrais (KEQ) sont souvent utilisรฉs pour quantifier cette efficacitรฉ fertilisante dโ€™un engrais sur une saison culturale (Figure 1-5, Rรฉseau PRO 2015). Le CAU correspond ร  la proportion apparente de lโ€™azote apportรฉ par le fertilisant absorbรฉ par la culture. Le coefficient dโ€™รฉquivalence engrais correspond au rapport entre le CAU du fertilisant testรฉ par rapport ร  celui dโ€™un engrais minรฉral. Il indique ร  quelle dose dโ€™engrais minรฉral correspond le mรชme apport dโ€™azote avec un fertilisant organique. Par exemple, avec un KEQ de 50% pour un engrais organique, deux fois plus dโ€™azote devront รชtre apportรฉs pour obtenir la mรชme efficacitรฉ quโ€™avec un engrais minรฉral sur une saison culturale. Le KEQ dโ€™un fertilisant est souvent trรจs fortement corrรฉlรฉ ร  sa teneur en azote minรฉral, ainsi quโ€™ร  la rapiditรฉ de la minรฉralisation de lโ€™azote organique quโ€™il contient. Ainsi, les digestats ayant une proportion รฉlevรฉe dโ€™azote minรฉral vont avoir un KEQ รฉlevรฉ de 40 ร  60% (Gutser et al. 2005) quand dโ€™autres fertilisants ayant une forte proportion dโ€™azote organique auront un KEQ plus faible, par exemple 10 ร  20% pour un fumier bovin (Gutser et al. 2005). Plus le KEQ sera รฉlevรฉ, plus le comportement du fertilisant se rapprochera de celui dโ€™un engrais minรฉral et plus la dose dโ€™azote total ร  apporter pour une mรชme efficacitรฉ immรฉdiate sera proche de la dose dโ€™azote efficace nรฉcessaire. Ces KEQ peuvent รชtre utilisรฉs directement par les agriculteurs pour lโ€™รฉtablissement de leur plan prรฉvisionnel azotรฉ (COMIFER, 2013). Ils ne restent cependant que des ordres de grandeur, la valeur fertilisante azotรฉe des produits rรฉsiduaires organiques (PRO) dรฉpendant de nombreux facteurs (sols, climat, pratiques et conditions dโ€™apportsโ€ฆ).

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Table des matiรจres

Chapitre 1 Introduction gรฉnรฉrale
1. Production agricole et fertilisation
1.1. Les besoins des plantes
1.2. Le modรจle dominant actuel : la fertilisation minรฉrale
1.3. Alternatives aux engrais minรฉraux
1.4. Gestion de la fertilisation azotรฉe
2. La gestion actuelle des excrรฉtats humains
2.1. Le systรจme alimentation/excrรฉtion
2.2. Composition des eaux usรฉes
2.3. Traitements des eaux usรฉes
2.4. Un systรจme linรฉaire
3. Lโ€™urine humaine en agriculture
3.1. Une ressource autrefois valorisรฉe
3.2. La sรฉparation ร  la source de lโ€™urine et les filiรจres de valorisation
4. Cadre et objectifs de la thรจse
4.1. Le projet Agrocapi
4.2. Objectifs et structure de la thรจse
References
Partie 1 Caractรฉristiques des traitements de lโ€™urine et des urinofertilisants
Chapitre 2 – Revue des urinofertilisants
Abstract
Key words
1. Introduction
1.1. Disconnection between sanitation and agriculture
1.2. Human urine, the missing link
1.2.1. An essential part of wastewater
1.2.2. Fresh urine
1.2.3. Source separation and treatment
1.3. Scope of the study
1.4. Literature recovery
2. Characteristics of the treatments
2.1. Storage
2.2. Acidification
2.3. Alkalinization
2.4. Nitrification
2.5. Mixture with solid organic substrates
2.6. Phosphorus precipitation
2.7. Volume reduction post-treatments
2.7.1. Evaporation
2.7.2. Distillation
2.7.3. Forward osmosis
2.7.4. Reverse osmosis
2.7.5. Freezing-thawing
2.7.6. Lyophilization
2.7.7. Membrane distillation
3. Comparisons between treatments and resulting fertilizers
3.1. Nutrient concentration
3.1.1. Nitrogen
3.1.2. Phosphorus and other nutrients
3.2. Fertilizing efficiency and related impacts
3.2.1. Nitrogen and phosphorus use efficiencies
3.2.2. Application
3.2.3. Gaseous emissions
3.2.4. Other impacts linked to field application
3.3. Contaminants
3.3.1. Trace metals
3.3.2. Pharmaceutical residues
3.3.3. Pathogens
3.4. Treatment inputs
3.4.1. Energy
3.4.2. Chemicals and organic matter inputs
4. Synthesis and perspectives
References
Supplemental material
SM 2-1. Nutrient extraction and other urine treatments
SM 2-2. Pharmaceuticals post-treatments
References
Partie 2 – Efficacitรฉ fertilisante azotรฉe et impacts associรฉs
Chapitre 3 – Efficacitรฉ fertilisante azotรฉe en conditions contrรดlรฉes
Abstract
Key words
1. Introduction
2. Material and methods
2.1. Urine-based fertilizers
2.2. Greenhouse experiment
2.3. Nitrogen use efficiency and mineral fertilizer equivalent
3. Results and discussion
3.1. Urine-based fertilizers characteristics
3.2. Biomass production and nitrogen uptake
3.3. Mineral fertilizer equivalent
4. Conclusion
References
Supplementary material
SM 3-1. Detailed soil analysis
SM 3-2. Analysis method for plant and fertilizers
SM 3-3. Nitrogen residues at the end of the experimentation
Chapitre 4 – Efficacitรฉ fertilisante azotรฉe et mesures de volatilisation ammoniacale en conditions rรฉelles
Abstract
Key words
1. Introduction
2. Material and methods
2.1. Fertilizers tested
2.2. General characteristics of the field experiments
2.3. Mineral fertilizer equivalent experiments
2.4. Substitution experiments
2.5. Nitrogen use efficiency in organic agriculture
2.6. Ammonia volatilization
2.7. Statistical analyses
3. Results and discussion
3.1. Physico-chemical characteristics of the fertilizers and pathogens
3.2. Mineral nitrogen equivalent for organic and urine-based fertilizers
3.3. Mineral fertilizer equivalents of urine-based fertilizers and comparison to other organic fertilizers
3.4. Fertilization strategies
3.4.1. Complete substitution of mineral fertilizers using urine-based fertilizer is possible
3.4.2. Use of urine-based fertilizers in organic agriculture
3.5. Ammonia volatilization
4. Conclusion
References
Chapitre 5 – Mesures de volatilisation en conditions contrรดlรฉes
1. Introduction
2. Matรฉriel et mรฉthode
2.1. Fertilisants testรฉs
2.1. Dispositif expรฉrimental
2.2. Expรฉrimentations
2.3. Statistiques
3. Rรฉsultats et discussion
4. Conclusion
Rรฉfรฉrences
Chapitre 6 Conclusion gรฉnรฉrale

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