Prodiges, presages et reves premonitoires dans les guerres des trois derniers siecles de la republique romaine

« Les Romains aiment à être considérés comme « les plus religieux des hommes », entendant par cela que, dans toutes leurs activités, privées ou publiques, ils doivent composer avec la présence constante du divin » . La religion est au cœur de la vie des Romains. De ce fait, les dieux sont présents partout, notamment dans les guerres. Au cours des trois derniers siècles de la République, Rome mène des guerres sur plusieurs fronts. Au Ier siècle, la République est minée par des conflits fratricides qui engendrent un désordre et une angoisse sans précédent chez les Romains. Cette situation de guerre incessante favorise l’intervention de plus en plus fréquente des dieux dans les conflits à travers les prodiges, les présages et les rêves prémonitoires. La présence de ces phénomènes a été plus fréquente durant la période allant du IIIème au Ier siècle av. J.-C. En effet, cette période est marquée par des conflits incessants. Les Romains faisaient des guerres parfois pour étendre leur domination, pour se défendre ou entre eux. Et les dieux ne rataient jamais l’occasion de se manifester à travers les prodiges, les présages et les rêves prémonitoires.

Le terme prodigium est un signe prophétique qui relève du divin. George Edon le définit comme étant un « effet qui arrive contre le cours ordinaire des choses » . Autrement dit, le prodige est un phénomène indépendant de la nature humaine et se manifeste par des tremblements de terre, des animaux qui parlent, des pluies de sang, des enfants qui naissent avec des têtes difformes, des pluies de viande, etc. Il est considéré comme un évènement défavorable, angoissant et jetant une peur terrible sur la population, montrant ainsi que la pax deorum est rompue. Ces événements confirmaient la discorde entre les actes posés par les hommes et la volonté des dieux. Par conséquent, les immortels devenaient furieux et abattaient leur furor sur la population.

Cependant, après la deuxième guerre punique le prodige va évoluer et se confond avec le présage qui est le signe annonciateur des événements futurs « et la distinction entre les deux phénomènes s’estompe ». Cette mutation est causée par les crises engendrées par la deuxième guerre punique (218 av. J.-C. à 201 av. J.-C.) et l’influence de l’hellénisme. En effet, cette guerre que les Romains ont livrée contre Carthage est marquée par d’innombrables revers. Cet état de fait va jeter la psychose chez la population de l’Urbs favorisant ainsi une nouvelle ossature de la religion romaine c’est-à-dire l’intégration de nouveaux dieux.

Au même titre que les prodiges, les rêves prémonitoires ont été un facteur déterminant dans les guerres romaines. Ainsi, d’après Ernout et Meillet Somnium qui signifie « songe » ou « rêver de » est dérivé du mot somnus qui veut dire sommeil. Ce mot est personnalisé et divinisé. Autrement dit, il est considéré comme le fils d’Erébe et de la nuit . Dans ce même ordre d’idée, G. Edon définit le rêve comme « un ensemble de chose qu’on croit voir ou entendre ou sentir en dormant » . En effet, les généraux durant leur sommeil reçoivent des signes qui leur permettent de connaitre l’issue heureuse ou malheureuse des conflits. Les rêves prémonitoires sont des phénomènes importants dans les dissensions romaines dans la mesure où ils permettent aux généraux de connaitre l’issue de la bataille et surtout d’haranguer les troupes, afin de les mener à la victoire finale. Dans les guerres romaines l’aval et la présence des dieux sont importants, car ils interviennent dans toutes les circonstances de la guerre.

DEFINITIONS ET POINTS COMMUNS ENTRE LES PRODIGES, LES PRESAGES ET LES REVES PREMONITOIRES

La guerre reste un phénomène récurrent à Rome surtout au cours des trois derniers siècles de la République. De ce fait, les Romains livraient des guerres internes et externes. Et dans ces dissensions, l’évocation des dieux était fréquente à travers les prodiges, les présages et les rêves.

Les prodiges, les présages et les rêves prémonitoires : définitions 

« Ville sacrée dont les origines se confondent avec l’histoire des dieux, Rome a toujours lié les pratiques religieuses à chacun des événements de sa vie publique ou militaire et de la famille ». C’est ainsi que la religion se manifestait dans toutes les circonstances de la vie par différents signes. Ainsi, les immortels intervenaient dans les guerres par l’intermédiaire des prodiges, des présages et des rêves prémonitoires. Dans ce premier point, nous allons définir ces différents termes.

Les prodiges 

Le terme prodige du latin prodigium renferme une double signification. Il est d’abord perçu comme un « phénomène extraordinaire par lequel les dieux manifestent leur colère ». Autrement dit le prodige est un évènement qui est en contradiction avec l’ordre naturel des choses. « On parle de prodige quand un événement ou une manifestation est ou parait être en contradiction avec les lois de la nature. » Le prodige est un fait extraordinaire qui se manifeste par des anomalies, des monstruosités, des pluies de pierres, des tremblements de terre, des éclairs dans un ciel dégagé… Le prodige est l’expression du courroux des dieux. Il n’existe pas de prodige favorable : « tout évènement échappant aux lois naturelles provoquait l’effroi.»  L’apparition des prodiges provoque un climat d’inquiétude, de peur et d’angoisse chez les Romains.

« La notion de prodige suppose un ordre détruit, un équilibre rompu. C’est lorsque les choses n’obéissent pas aux « lois naturelles ou divines » que l’homme peut s’attendre à toutes sortes de surprises, des plus insignifiantes aux plus bouleversantes : naissance de monstre par exemple, dans la reproduction des êtres, mort brutale, catastrophes terrestres ou atmosphérique ; aussi, le  prodige se présente-t-il pour un fait tragique, du moins dramatique. C’est en tant que drame de l’anormal que le prodige inquiète et interpelle l’homme, en tant que tel également, il intéresse la divination, la religion en générale.» .

Le prodige revêt, par ailleurs, d’autres significations. En effet, le prodige peut annoncer des évènements heureux pour Rome. En effet, cette situation a été constatée au cours de la deuxième guerre punique plus exactement en l’an 204 avant J.-C. où les Romains avaient pensé qu’ils partiraient en Afrique pour combattre et que la fin d’une guerre si dévastatrice se profila à l’horizon. Cette situation donnait l’espoir que la guerre arriva à son issu. Et il y eut selon Tite Live un prodige annonçant la fin de la guerre. Voici en quels termes il s’exprime :

« Cela avait rempli les esprits de superstitions, ils inclinaient à annoncer des prodiges et à y croire. On n’en racontait que d’avantage on avait vu deux soleils ; pendant la nuit, il y’avait eu des moments de clarté à Setia, on avait aperçu une trainée de feu allant de l’orient à l’occident ; à Tardacine une porte, à Anagnia une porte et le rempart, à plusieurs endroits, avaient été frappés de la foudre ; dans le temple de Junon Sospita, à Lanuvium, il s’était produit un bruit accompagné de craquements affreux.» .

Cela montre que dans certaines circonstances les prodiges annoncent des événements heureux pour Rome. C’est dire que, d’autre part, les prodiges peuvent être perçus comme des évènements qui annoncent l’issue heureuse des guerres. Les prodiges peuvent être donc des phénomènes qui annoncent des évènements bénéfiques pour l’Urbs. De ce fait, les prodiges ne seront plus considérés comme la colère des dieux mais plutôt des faits qui donnent de l’espoir au peuple par rapport à des problèmes notamment les conflits. En guise d’illustration, nous citons Valère Maxime qui dit : « le récit des prodiges, heureux ou malheureux, entre aussi dans le plan de mon ouvrage. »  Ce passage montre que le prodige peut être un événement heureux ou malheureux. Si le prodige se limitait à un fait qui annonce les évènements malheureux l’auteur des Actions et Paroles Mémorables se contenterait de dire qu’il raconte les prodiges malheureux. Et Raymond Bloch dit que : « ces prodiges avaient pris une allure hellénistique et que loin d’être le signe constant de la colère des Dieux, ils pouvaient être aussi bien favorables que funestes, annoncent à la cité son avenir ou consacrant le charisme de son chef. »  Ceci atteste l’évolution et le changement de connotation notés chez les prodiges romains. Les conséquences de la deuxième guerre punique et l’influence de l’hellénisme sont à l’origine de ce changement de connotation. Mais, certains auteurs rejettent l’idée même de divination.

Celle-ci se définit comme étant « l’art de connaitre la pensée des dieux.»  Et Cicéron réfute tout art visant à connaitre la pensée des dieux. Dans son ouvrage De divinatione, il rejette la divination. En effet, il fait parler dans le premier livre son frère Quintus qui est un stoïcien et naturellement un partisan de la divination. Celui-ci soutient que ces phénomènes viennent des dieux. Et dans le deuxième livre, Cicéron vient en charge pour démanteler les arguments avancés par Quintus. Pour étayer ce propos, nous évoquons Cicéron qui dit :

« Tu as défendu, dit-je, Quintus, avec grand soin et en stoïcien, l’opinion des stoïciens et j’ai particulièrement goûté le choix que tu as fait de nombreux exemples empruntés à l’histoire romaine, exemples éclatants que tu as mis en pleine lumière comme ils le méritaient. Il faut maintenant répondre à tes arguments, je veux le faire sans rien affirmer, je poserai des points d’interrogations tout le temps, j’émettrai surtout des doutes et je garderai de la méfiance à l’égard de moi-même. Si en effet je prétendais affirmer quoi que ce fût en le donnant comme certain, je parlerai en devin, moi qui nie la divination. » .

Les présages

Le présage se définit comme étant le « signe envoyé aux hommes par les dieux pour les confirmer dans leur entreprises ou, au contraire, les en détourner »  Du fait de leur pietas, c’est-à-dire, de leur « attitude qui consiste à remplir scrupuleusement ces devoirs aussi bien envers les dieux qu’envers sa patrie et ces parents et ces amis.» , les Romains n’entreprenaient aucune initiative sans consulter au préalable les immortels afin de vérifier si ceux-ci étaient favorables ou nom. Pour illustrer nos propos, nous utilisons un passage de Cicéron : « Autrefois on n’entreprenait rien d’important, même d’ordre privé, sans prendre les auspices. »  Le présage annonce «l’avenir mais ne le détermine pas.»

Il laisse la liberté aux Romains. En effet, ceux-ci ont la liberté d’agir sur lui par des paroles, le transformer voire même le rejeter.

Parmi les présages, nous avons l’auspice du latin auspicium. Ce dernier vient «de avis, oiseau, et specio, voir. Au sens étroit du terme, l’auspicium est un présage fourni par le vol des oiseaux.»  Autrement dit, l’auspice est un présage qui annonce l’avenir par l’observation du vol des oiseaux. Toutefois, « très tôt son acception s’est étendue et le mot désigna des présages divers : foudre, tonnerre, appétit des poulets sacrés. » . Ainsi, avant toute entreprise importante les Romains consultaient d’abord les dieux. De ce fait, l’expression « prendre les auspices » était couramment utilisée par les Romains.

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Table des matières

INTRODUCTION GENERALE
PREMIERE PARTIE GUERRES, PRODIGES, PRESAGES ET REVES PREMONITOIRES
INTRODUCTION DE LA PREMIERE PARTIE
CHAPITRE I : DEFINITIONS ET POINTS COMMUNS ENTRE LES PRODIGES, LES PRESAGES ET LES REVES PREMONITOIRES
CHAPITRE 2 : LA PRESENCE DES PRODIGES, DES PRESAGES, DES REVES PENDANT LES GUERRES ROMAINES
DEUXIEME PARTIE : L’INTERPRETATION ET LA MANIPULATION DES PRODIGES, DES PRESAGES ET DES REVES PREMONITOIRES DANS LES GUERRES DU IIIEME AU IER SIECLE AV. J.-C.
INTRODUCTION DE LA DEUXIEME PARTIE
CHAPITRE 1 : LES INTERPRETATIONS DES PRODIGES, DES PRESAGES ET DES REVES PREMONITOIRES
CHAPITRE 2: LA MANIPULATION DES PRODIGES, DES PRESAGES ET DES REVES PREMONITOIRES
CONCLUSION
INDEX GENERAL
BIBLIOGRAPHIE

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