Processus physiologique du vieillissement du sujet âgé
Système nerveux
Concernant le système nerveux central, nous pouvons constater une diminution du nombre de neurones corticaux (ainsi que la diminution de connexions entre eux), un appauvrissement de la substance blanche et de certains neurotransmetteurs intracérébraux (principalement l’acétylcholine). Ceci a comme principale conséquence un ralentissement de la transmission synaptique ainsi qu’une augmentation du temps de réaction.
Au sujet du système nerveux périphérique, on constate une diminution du nombre de fibres des périphériques entraînant une diminution de la sensibilité proprioceptive et donc pouvant favoriser l’instabilité posturale. On constate également une altération de la mémoire motrice. Celle-ci regroupe l’ensemble des programmes moteurs acquis au cours de la vie. Celle-ci permet une adaptation plus rapide et précise concernant le geste et la posture. En cas de dégradation du mouvement ou d’immobilité prolongée, il peut apparaître une diminution des automatismes concernant l’équilibre, l’adaptation posturale ou la marche [3].
Système cardiovasculaire
Outre les modifications anatomiques concernant l’appareil cardio-vasculaire notamment, l’augmentation de la masse cardiaque et de l’épaisseur pariétale du ventricule gauche qui est à l’origine du moins bon remplissage ventriculaire, nous constatons une diminution de la fréquence cardiaque maximale et d’effort. Ainsi lors d’efforts trop importants, le système cardiovasculaire est dans l’incapacité de répondre à la demande [4].
Système respiratoire
Un certain nombre d’éléments de l’appareil respiratoire vont être remaniés ou altérés au cours du vieillissement entraînant une augmentation du volume résiduel (VR : air qui reste dans les poumons après une expiration forcée), une diminution de la VO2 max (quantité maximale d’oxygène que nous pouvons utiliser lors d’un effort), une diminution de la compliance pulmonaire souvent associée à une rigidité thoracique provoquant une diminution de la capacité respiratoire. De plus, nous constatons une diminution des calibres des bronches ainsi qu’une diminution de la pression partielle en oxygène. Par ailleurs, l’activité des cils de la muqueuse est amoindrie, la toux devient moins efficace rendant la personne âgée plus sensibles aux infections [4].
Système osseux
Nous constatons une réduction de la densité minérale osseuse appelée ostéopénie. Elle débute vers 45 ans chez la femme et 55 chez l’homme. La vitesse et l’ampleur de la perte osseuse n’est pas la même entre les deux sexes, elle est plutôt progressive chez l’homme alors que chez la femme on observe une accélération de 5 à 10 ans après la ménopause sous effet hormonal. De plus, le thorax devient plus rigide du fait de l’ossification des cartilages costaux.
Par ailleurs, concernant le vieillissement du cartilage articulaire, nous observons un amincissement et une altération de ses propriétés mécaniques [5].
Système visuel
Au cours du vieillissement la personne âgée se retrouve gênée lors de la lecture de près. Ceci est principalement dû à la diminution du pouvoir d’accommodation de l’œil. La personne âgée est aussi sujette à une opacification progressive du cristallin réduisant la vision [6].
Système auditif
L’audition de la personne âgée se retrouve altérée et s’accompagne d’une perte neurosensorielle permanente. Cette perte est à l’origine d’une presbyacousie touchant principalement les sons aigus [6].
Système proprioceptif
La proprioception, ou sensibilité profonde, désigne la perception consciente ou non de la position des différentes parties du corps et de leur tonus. Elle comprend différentes sensibilités, la kinesthésie (sensibilité au mouvement), la statesthésie (sensibilité à la position), la pallesthésie (sensibilité aux vibrations) et la baresthésie qui est la sensibilité à la pression. Au cours du vieillissement, nous observons une diminution du nombre de récepteurs musculo-tendineux et articulaires pouvant affecter cette sensibilité profonde. Il est à noter que cette diminution du nombre de récepteurs au niveau du pied peut être à l’origine d’apparitions d’oscillations posturales et peut donc provoquer des troubles de l’équilibre et engendrer des chutes [7].
Vieillissement du système d’équilibration
L’équilibre est la capacité de rester dans une position stable en état statique ou en déplacement. Notre équilibre repose sur trois entrées sensorielles, dont les informations recueillies vont créer une image mentale de la situation dans le cortex pariétal postural.
-Entrée visuelle : Elle permet d’avoir un référentiel vertical, il existe de nombreuses causes d’handicaps visuels dont la plupart peuvent être traitées (glaucome, rétinopathie diabétique, la dégénérescence maculaire liée à l’âge). En outre, on constate une nette diminution du contraste liée à une difficulté d’adaptation au noir. Ce qui explique en partie les chutes nocturnes. L’entrée visuelle est une voie sensorielle prépondérante qui contribue au maintien de l’équilibre et est d’autant plus marquée au cours du vieillissement.
-Entrée vestibulaire : le système vestibulaire informe en permanence le cerveau de la situation de la tête et de son déplacement. C’est une entrée sensorielle moins utilisée que la précédente mais elle reste indispensable et intéressante à développer en cas de risque de chute.
-Entrée proprioceptive : Comme évoqué précédemment, il s’agit de de la capacité du corps à se repérer par rapport à son environnement ainsi que la capacité à percevoir la position et les déplacements des différents segments corporels. Le nombre de ces récepteurs diminue avec le vieillissement, notamment autour de la cheville et de la voute plantaire qui sont deux localisations importantes dans la transmission d’informations proprioceptive. De plus, il existe une dégénérescence de la gaine de myéline des nerfs périphériques diminuant ainsi la vitesse de l’influx nerveux provenant de ces récepteurs proprioceptifs ce qui peut donc favoriser les chutes par manque de réactivité.
Au sujet de la stratégie d’équilibration, on constate une différence entre les personnes âgées et les sujets jeunes. En effet, les personnes âgées adoptent plutôt une stratégie de hanche, c’est-à-dire qu’ils régulent leur stabilité autour de l’articulation de la hanche contrairement aux sujets jeunes qui utilisent plutôt la cheville. L’explication de cette différence est principalement due à une raideur de cheville qui compromet cette stratégie de cheville .
Evaluation de l’équilibre
Il existe de nombreuses échelles d’évaluation pour tester l’équilibre et la marche du sujet âgé. Cependant, elles s’avèrent rarement prédictives d’un risque de chute. En effet, comme expliqué précédemment, l’équilibre n’est qu’un des facteurs de risque de chute. En revanche ces tests, en plus de posséder une certaine fiabilité, permettent d’observer avec une grande précision les anomalies de la marche et de l’équilibre du sujet âgé [15],[16]. Voici ces tests :
Echelle d’équilibre de Berg (Berg balance scale)
Ce test évalue l’équilibre en observant la performance de la personne âgée au cours de 14 mouvements habituels de la vie quotidienne. Le système de cotation est une échelle à 5 niveaux, chaque mouvement est noté de 0 (mauvais) à 4 (bon). Le score total est de 56, un score supérieur ou égal à 45 signifie que le sujet possède une bonne autonomie motrice.
Les qualités métrologiques du BBS
Validité de contenu : la validité de contenu du BBS a été démontrée dans plusieurs études [17],[18],[19]. Le concept d’équilibre serait donc bien couvert par les items proposés
Validité de critère : Les résultats obtenus avec le BBS sont assez comparables à ceux obtenus avec d’autres outils de mesure du même type, comme la bonne corrélation trouvée avec le Dynamic Gait Index (r = 0,67) chez les personnes âgées ou l’excellente corrélation avec les résultats au Fugl-Meyer (r = 0,90 à 0,92) chez les personnes ayant vécu un AVC.
Sensibilité : La sensibilité du BBS pour identifier les personnes âgées à risque de chute est en revanche faible (53 %). Néanmoins ce résultat est compréhensible et s’explique par le caractère multifactoriel des chutes.
Spécificité : La spécificité du BBS pour déterminer les personnes âgées qui ne sont pas à risque de chute est excellente (96 %).
Fidélité test-retest : La fidélité du BBS est excellente relativement à la stabilité des résultats dans le temps (r = 0,91) quand la condition de la personne ne varie pas.
Fidélité inter-juges : La fidélité des résultats au BBS entre les évaluateurs est aussi excellente (r = 97), donnée importante quand les évaluateurs ne sont pas toujours les mêmes.
Réponse au changement : Une variation dans le score global de 3,3 à 6,3 points, selon le score initial obtenu par la personne, serait un indicateur significatif de changement dans l’équilibre de la personne.
Avantages et limite du BBS
Au vu des résultats de plusieurs études le BBS est considéré comme un outil valide et fidèle pour évaluer le risque de chute chez les personnes âgées [17],[18]. Il est important de noter cependant qu’il existe cependant un faible effet de plafonnement lorsque le BBS est utilisé chez des personnes qui n’ont jamais chuté auparavant [20],[21]. Les épreuves ne mettant pas suffisamment au défi les gens qui ont un haut degré d’équilibre, l’outil ne permet pas toujours de prédire leur futur risque de chute [21]. Il a l’avantage d’être sécuritaire pour les personnes évaluées. Il ne demande pas une formation préalable aux évaluateurs et le matériel est peu coûteux [22]. En revanche, certains évaluateurs trouvent l’évaluation longue à effectuer. Sans expérience, elle peut prendre jusqu’à 30 minutes. C’est pourquoi certaines personnes auront tendance à utiliser une échelle d’évaluation similaire, le mini best test, dont les principales qualités sont une durée de réalisation plus rapide, une meilleure sensibilité au changement que l’échelle de Berg, une haute fidélité et validité et pour finir un effet plafond plus faible [23].
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Table des matières
1 INTRODUCTION
1.1 Le vieillissement
1.1.1 Généralités
1.1.2 Définition de personne âgée
1.1.3 Les chiffres concernant le vieillissement en France
1.2 Processus physiologique du vieillissement du sujet âgé
1.2.1 Système nerveux
1.2.2 Système cardiovasculaire
1.2.3 Système respiratoire
1.2.4 Système osseux
1.2.5 Système visuel
1.2.6 Système auditif
1.2.7 Système proprioceptif
1.2.8 Système musculaire
1.2.9 Vieillissement du système d’équilibration
1.2.9.1 Evaluation de l’équilibre
1.2.9.1.1 Echelle d’équilibre de Berg (Berg balance scale)
1.2.9.1.2 Le test Timed up and go (TUG)
1.3 La chute chez les personnes âgées : un objectif de santé publique
1.3.1 Définition de la chute
1.3.2 Les facteurs de risque de la chute
1.3.3 Les conséquences des chutes
1.3.4 Prévention des chutes : l’entraînement de l’équilibre
1.3.4.1 Réalité virtuelle, jeux vidéo et équilibre
1.4 Définition et fonctionnement de la technologie de réalité virtuelle
1.4.1 Histoire et évolution de la réalité virtuelle
1.4.2 Réalité virtuelle et prévention des risques de chute chez les personnes âgées, Pourquoi ?
2 Méthodologie de recherche
2.1 Critère d’éligibilité pour les études de cette revue
2.1.1 Type d’étude
2.1.2 Population/pathologie
2.1.3 Intervention
2.1.4 Comparateur
2.1.5 Objectif/ Critère de jugement
2.2 Méthodologie de recherche des études
2.2.1 Source documentaires investiguées
2.2.2 Équation de recherche utilisée
2.3 Extraction et analyse des données
2.3.1 Sélection des études
2.3.2 Extraction des données
2.3.2.1 Méthode
2.3.2.2 Les participants
2.3.2.3 L’intervention
2.3.2.4 Les comparateurs
2.3.2.5 Le critère de jugement
2.3.2.6 Les résultats
3 Résultats
3.1 Description des études
3.1.1 Diagramme de flux
3.1.2 Études exclues
3.1.3 Études incluses
3.2 Risque de biais des études incluses
3.2.1 Grille d’analyse utilisée
3.2.2 Synthèse des biais retrouvés
3.3 Effets de l’intervention
3.3.1 Critère de jugement principal
3.3.2 Résultat des études incluses
4 Discussion
4.1 Analyse des principaux résultats
4.2 Applicabilité des résultats en pratique clinique
4.3 Qualité des preuves
4.4 Biais potentiels de la revue
5 Conclusion