Processus d’accréditation des Laboratoires de Biologie Médicale

Naissance de l’assurance qualité

Avant d’être appliquées au domaine de la santé, et notamment à la biologie médicale, les notions d’assurance qualité se sont surtout développées au XXème siècle dans le domaine militaire et industriel (1). Ainsi, à la fin de la Seconde Guerre mondiale, Deming, mathématicien et physicien américain, développe la notion du cycle Plan Do Check Act (PDCA) appliquée initialement à la statistique pour le processus de fabrication industrielle (2). Le cycle PDCA, aujourd’hui connu sous le nom de « roue de Deming » (Figure 1) est un cycle dynamique reposant sur l’amélioration continue et la maîtrise des processus contribuant à un système efficace du processus de management, qui selon Deming contribue à 94 % à la qualité finale du produit (3). Sa philosophie sur les bonnes pratiques de management de la qualité est construite autour de 14 points basés à la fois sur la compréhension et la connaissance (2). Selon lui, la qualité requiert l’implication de tous les acteurs de l’entreprise. La roue de Deming est composée de 4 étapes : planifier, préparer, définir (Plan) / faire, mettre en oeuvre (Do) / vérifier, analyser, contrôler, évaluer (Check) / agir, améliorer, décider (Act) (2). Les premières normes d’assurance qualité sont mises en place dans l’armée des États-Unis.

En 1942 d’abord, naît Acceptance Quality Level (AQL) qui définit des procédures pour l’acceptation des lots, puis s’en suit le Statistical Quality Control (SQC) qui introduit la notion d’un contrôle final des produits par des inspecteurs. Ce système qui se limite à des contrôles sur le produit fini reste cependant imparfait et évolue ensuite vers un autre système d’assurance qualité appelé Statistical Process Control (SPC) qui utilise une approche préventive basée sur la maîtrise du processus par l’utilisation de cartes de contrôle. Le contrôle se fait en cours de production du produit et non plus uniquement sur le produit final, permettant de diminuer le nombre de produits non conformes, et d’identifier les causes de non-conformités afin d’entreprendre des actions correctives et préventives (1). En France, l’assurance qualité n’est apparue qu’à la fin des années 1950 lors des premiers échanges technologiques avec les américains qui utilisaient encore le SQC à cette époque. C’est la commission de l’énergie atomique et la compagnie de l’électricité de France qui ont commencé à employer la notion de l’assurance qualité plus connue sous le nom de « sûreté de fonctionnement » (1).

Management qualité et « qualité totale »

Juran, considéré comme le principal fondateur des démarches qualité, publie en 1951 une monographie intitulée Juran’s Quality Control Handbook (4) qui est encore aujourd’hui considérée comme une référence. Il a développé le principe de Pareto selon lequel 80 % des problèmes viennent de 20 % des causes, autrement dit il convient de chercher les causes les plus fréquentes pour les résoudre en premier. Il insiste sur la dimension humaine de la gestion de la qualité et souligne le rôle primordial de la direction de l’entreprise dans le déploiement de la qualité par la suppression de la résistance au changement, l’instauration de la communication et de la formation pour l’ensemble des acteurs de l’entreprise. Comme pour Deming, le principe de l’amélioration continue est au coeur de la qualité dès la conception du produit (4,5). Le concept de qualité totale (Total Quality Control ou TQC) est inventé par Feigenbaum (6). Il évoluera ensuite vers le concept du Total Quality Management (TQM) qui considère l’entreprise comme un système, un processus prenant en compte un ensemble d’activités corrélées, interactives dans leur globalité (5). En 1962, Ishikawa publie un manuel sur la maîtrise de la qualité proposant des outils qui permettraient de résoudre 95 % des problèmes (7). L’outil le plus connu est le diagramme causes – effet encore appelé « arête de poisson » (Figure 2) : toutes les causes aboutissent à un seul effet. Cet outil permet d’identifier toutes les causes possibles à un problème et de mettre en place en amont des actions préventives (7). Ce concept est à la base du principe des « 5 M » pour Matières/Main d’oeuvre/Matériel/Méthodes/Milieu, utilisé pour élaborer la maîtrise des risques d’un processus (8).

Référentiels et normes ISO

Conjointement aux évolutions des concepts de l’assurance qualité, une structuration et une standardisation des documents se mettent en place avec l’apparition de référentiels, et notamment des normes ISO 9000. Ces normes sont rédigées par un organisme international de normalisation créé en 1947, dont le siège est à Genève et qui est composé de 164 pays (9). Le terme ISO vient du nom dérivé grec isos signifiant « égal », ainsi quel que soit le pays, la langue, la forme abrégée du nom de l’organisation est toujours ISO. La création de ces normes a pour but d’harmoniser les nombreuses normes développées à travers le monde dans différents secteurs, et dont la multiplication avait causé une confusion dans les milieux industriels (1,9). Les entreprises peuvent prouver le bon fonctionnement de leur Système de Management de la Qualité (SMQ) à travers ces normes ISO, en obtenant une certification par un organisme extérieur. La certification est définie comme une assurance écrite sous la forme d’un certificat, donnée par une tierce partie, qu’un produit, service ou système est conforme à des exigences spécifiques (9). Cet organisme collabore avec le Comité Européen de Normalisation (CEN) créé en 1961, qui est composé de 34 pays européens, et dont le siège est à Bruxelles. Il a pour rôle d’élaborer et de définir des normes au niveau européen couvrant plusieurs secteurs (10). Au niveau national c’est l’Association Française de NORmalisation (AFNOR), créée en 1926 et faisant partie des membres de l’ISO et du CEN (Figure 3), qui a pour rôle de normaliser les normes françaises. Elle est en charge de recenser les besoins en normes nouvelles, coordonner les programmes de normalisation, promouvoir la normalisation, produire des normes françaises, participer à la rédaction de normes européennes et internationales, représenter les intérêts français dans les instances internationales, et de diffuser les normes (11).

Concept des Bonnes Pratiques du Laboratoire (BPL)

Les BPL sont définies comme étant un système de garantie de qualité portant sur le mode d’organisation des études de sécurité non cliniques ayant trait à la santé et à l’environnement et sur les conditions dans lesquelles ces études sont planifiées, réalisées, contrôlées, enregistrées, archivées et diffusées (18). Inspirées des BPL publiées en 1976 par la Food and Drug Administration (FDA) aux États-Unis, connues sous le nom de GLP pour Good Laboratory Practice, elles ont été créées par l’Organisation de Coopération et de Développement Économiques (OCDE) en 1981. Initialement cantonnées au contrôle des produits chimiques, ces BPL se sont étendues à plusieurs domaines d’activités (produits pharmaceutiques, pesticides, produits alimentaires, cosmétiques, médicaments vétérinaires) donnant lieu à une première révision en 1997 et permettant de garantir la qualité, la reproductibilité et l’intégrité des données afin qu’elles puissent être reconnues au niveau international sans qu’il soit nécessaire de reproduire les études (19,20). Les BPL exigent ainsi la mise en place d’un système interne au laboratoire devant vérifier que l’étude est conduite en conformité avec le protocole et les procédures opératoires, et que les faits rapportés sont exacts. Nous retrouvons le cycle PDCA ou roue de Deming au sein de ces BPL : Prévoir/Exécuter/Contrôler – Tracer/Améliorer.

Elles sont contrôlées par 3 autorités en France, l’ANSM, l’Agence Nationale de SÉcurité Sanitaire de l’alimentation, de l’environnement et du travail (ANSES), et le Groupe Interministériel des Produits Chimiques (GIPC). Une section « Laboratoire » a été créée au sein du COFRAC dans le but d’apporter un soutien au GIPC en adoptant un rôle d’expert dans la reconnaissance de la conformité aux principes des BPL. Le COFRAC organise les inspections de surveillance, assure le recrutement et la formation des inspecteurs et des experts techniques. Un référentiel (LAB BPL REF 05) est relatif au règlement pour l’évaluation de la conformité aux principes de BPL (21). En 1989, des normes européennes EN 45000 ont été rédigées par le CEN réglementant la biologie médicale. Ces normes inspirées des normes ISO 9000 sont centrées sur le domaine des essais et de la certification mais ne traitent pas de l’inspection. Elles vont évoluer et la majorité d’entre elles seront transformées en « Guide ISO/CEI » ou donneront naissance aux normes de la série NF EN ISO 17000 dont la NF EN ISO 17025 créée en 1999 pour les laboratoires d’étalonnages et d’essais (22).

Guide de Bonne Exécution des Analyses de biologie médicale (GBEA) C’est le 4 décembre 1994 qu’apparaît au Journal officiel de la République française le premier référentiel opposable pour tous les LBM. Ce référentiel connu sous son acronyme « GBEA » (28), a pour objectif d’instaurer et de formaliser l’assurance qualité au sein des LBM. Ce guide décrit les conditions d’exécution des analyses et propose, sans en imposer, des moyens pour aboutir à un système de qualité satisfaisant et garantir un résultat fiable au patient. Il couvre toutes les étapes de l’analyse d’un échantillon, de son prélèvement à la remise du résultat. L’application de ce référentiel va permettre de mettre en place un système documentaire avec la rédaction de procédures, et de modes opératoires. Toutefois ce guide adopte une démarche statique avec une absence de vision dans le temps et est très axé analytique. Le système d’assurance qualité se résume à la rédaction de procédures sans prendre en compte la partie management essentielle au bon fonctionnement d’un système de qualité, et qui sera introduite dans la norme NF EN ISO 15189. Toutefois, un laboratoire a la possibilité de mettre en place ce dernier point, par une démarche volontaire d’accréditation par le COFRAC. Les arrêtés du 26 novembre 1999 (29) et du 26 avril 2002 (30) viennent apporter quelques modifications à la version de 1994. Ces modifications portent principalement sur la métrologie, l’informatique, le transport des échantillons, la biologie moléculaire et l’immunohématologie.

Le GBEA est composé de 6 chapitres abordant les règles de fonctionnement du laboratoire dont le système d’assurance qualité, les obligations de la direction, la sécurité du personnel, les installations, les équipements, l’entretien des locaux, le matériel et réactifs, l’informatique, mais aussi les règles générales d’exécution des analyses au travers de la rédaction de procédures concernant le prélèvement, la validation, la transmission et l’archivage des résultats, la conservation des échantillons après analyse (31). Le GBEA centré sur l’acte de biologie médicale, oblige le biologiste à se concentrer davantage sur les phases préanalytique et postanalytique renforçant ainsi sa responsabilité sur l’ensemble de la réalisation d’un examen de biologie médicale. Il fait l’objet d’inspections menées par les Directions Régionales des Affaires Sanitaires et Sociales (DRASS) regroupées depuis 2010 au sein des Directions Régionales de la Jeunesse, des Sports et de la Cohésion Sociale (DRJSCS).

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Table des matières

INTRODUCTION
ÉTUDE BIBLIOGRAPHIQUE
1. Démarche d’accréditation au Laboratoire de Biologie Médicale
1.1. Historique du concept de qualité
1.1.1. Naissance de l’assurance qualité
1.1.2. Management qualité et « qualité totale »
1.1.3. Référentiels et normes ISO
1.2. Qualité dans les Laboratoires de Biologie Médicale
1.2.1. Contexte normatif et évolution
a) Premières exigences réglementaires : loi n° 75-626 du 11 juillet 1975
b) Instauration d’un Contrôle National de Qualité (CNQ)
c) Concept des Bonnes Pratiques du Laboratoire (BPL)
d) Notions d’accréditation et de certification dans la réforme hospitalière des années 1990
e) Guide de Bonne Exécution des Analyses de biologie médicale (GBEA)
f) Années 2000 : état des lieux de la qualité dans les Laboratoires de Biologie Médicale et projet de réforme
g) Réforme de la biologie médicale de 2010
1.2.2. Accréditation des Laboratoires de Biologie Médicale
a) Définition de l’accréditation
b) Organisme accréditeur
c) Portée d’accréditation
d) Processus d’accréditation des Laboratoires de Biologie Médicale
e) Déroulement de l’audit
1.3. Norme NF EN ISO 15189 et application en sérologie infectieuse
1.3.1. Norme NF EN ISO 15189
1.3.2. Application en sérologie infectieuse
2. La toxoplasmose
2.1. Le parasite
2.1.1. Structure du parasite
a) Tachyzoïte
b) Bradyzoïte
c) Oocyste
2.1.2. Cycle parasitaire
a) Cycle sexué chez l’hôte définitif
b) Cycle asexué chez les hôtes intermédiaires
2.2. Épidémiologie
2.2.1. Mode de contamination
a) Transmission par l’ingestion d’oocystes
b) Transmission par l’ingestion de kystes
c) Transmission par le biais des tachyzoïtes
2.2.2. Fréquence
a) Séroprévalence de la toxoplasmose
b) Fréquence de la toxoplasmose congénitale
2.2.3. Prévention primaire – Règles hygiéno-diététiques
2.2.4. Génotypes
2.3. Aspects cliniques
2.3.1. Toxoplasmose chez le patient immunocompétent
2.3.2. Toxoplasmose congénitale
2.3.3. Toxoplasmose chez le patient immunodéprimé
2.4. Diagnostic biologique de la toxoplasmose
2.4.1. Diagnostic sérologique
a) Cinétique des anticorps antitoxoplasmiques
b) Techniques sérologiques de première intention
c) Techniques de seconde intention
2.4.2. Diagnostic direct
2.4.3. Stratégie diagnostique
a) Rôle du CNR dans l’évolution des pratiques de diagnostic de la toxoplasmose
b) Recommandations et stratégie diagnostique selon le contexte clinique
2.5. Prise en charge thérapeutique
2.5.1. Traitement chez un patient immunocompétent
2.5.2. Traitement chez la femme enceinte
2.5.3. Traitement chez l’enfant
2.5.4. Traitement chez un patient immunodéprimé
2.5.5. Traitement de la toxoplasmose oculaire
ÉTUDE PERSONNELLE
1. Matériel et méthodes
1.1. Outils et moyens utilisés
1.1.1. Documents du COFRAC
a) Documents de RÉFérence (REF)
b) Guides Techniques d’Accréditation (GTA)
c) Documents d’INFormation (INF)
d) FORMulaires (FORM)
1.1.2. Outils de la qualité
a) Cycle PDCA (roue de Deming)
b) Diagramme de Gantt
c) Tableau de bord et gestion documentaire
d) Analyse des Modes de Défaillance de leurs Effets et de leur Criticité (AMDEC)
e) Méthode Qui ? Quoi ? Où ? Quand ? Comment ? Combien ? Pourquoi ? (QQOQCCP)
f) Réunions
1.2. Démarche mise en oeuvre dans le diagnostic de la toxoplasmose au sein de l’UF de Parasitologie – Mycologie
1.2.1. Positionnement de l’UF au sein du Plateau de Biologie Hospitalière et état des lieux de l’accréditation des examens
a) Présentation de l’UF de Parasitologie – Mycologie
b) Démarche d’accréditation
1.2.2. Circuit de prise en charge d’une analyse de toxoplasmose
a) Phase préanalytique
b) Phase analytique
c) Gestion des calibrations, des maintenances et des contrôles
d) Phase postanalytique
1.2.3. Stratégie d’utilisation des techniques sérologiques au sein de l’UF
1.3. Dossiers de vérification de méthodes
1.3.1. Dossiers de vérification de méthodes d’une technique quantitative
a) Tests faisant l’objet d’un essai sur site
b) Tests faisant l’objet d’une étude bibliographique
1.3.2. Dossiers de vérification de méthodes d’une technique qualitative
a) Tests faisant l’objet d’un essai sur site
b) Tests faisant l’objet d’une étude bibliographique
1.4. Audit croisé
1.4.1. Préparation à l’audit croisé
1.4.2. Déroulement de l’audit croisé
a) Réunion d’ouverture
b) Évaluation sur site
c) Synthèse des auditeurs et réunion de clôture
2. Résultats
2.1. Phase préanalytique
2.2. Phase analytique
2.2.1. Dossiers de vérification de méthodes des tests quantitatifs (SH FORM 43)
a) Tests qui ont fait l’objet d’un essai sur site
b) Tests qui ont fait l’objet d’une étude bibliographique
2.2.2. Dossiers de vérification des tests qualitatifs (SH FORM 43)
a) Tests qui ont fait l’objet d’un essai sur site
b) Tests qui ont fait l’objet d’une étude bibliographique
2.2.3. Procédures dégradées
2.2.4. Habilitation technique pour la sérologie automatisée de la toxoplasmose sur l’Architect i2000
2.3. Gestion des contrôles et des maintenances
2.3.1. Gestion quotidienne des CIQ sur l’Architect i2000
2.3.2. Suivi à moyen et long terme des CIQ sur l’Architect i2000
a) Suivi à moyen terme
b) Suivi à long terme
2.3.3. Gestion de la période probatoire sur l’Architect i2000
2.3.4. Gestion des EEQ et CIL en sérologie de la toxoplasmose
2.3.5. Maintenance journalière de l’EUROBlot Master
2.4. Phase postanalytique
2.4.1. Validation biologique des examens du sérodiagnostic de la toxoplasmose
2.4.2. Habilitation à la validation des examens du sérodiagnostic de la toxoplasmose
2.4.3. Gestion de la sérothèque
2.5. Audit croisé
2.5.1. Les points forts relatifs aux exigences techniques (chapitre 5 de la norme NF EN ISO 15189)
2.5.2. Les points forts relatifs au management (chapitre 4 de la norme NF EN ISO 15189)
3. Discussion
4. Conclusion
BIBLIOGRAPHIE
TABLE DES ILLUSTRATIONS
TABLE DES TABLEAUX
TABLE DES MATIERES
ANNEXES

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