Dans le contexte actuel de la transition énergétique et de lutte contre le réchauffement climatique, la gestion « intelligente » d‘énergie électrique à partir des productions intermittentes et fluctuantes est en pleine évolution. C‘est dans cette situation que nous aborderons dans la première partie de ce chapitre les problématiques spécifiques des énergies renouvelables intermittentes. Nous focalisons notre étude sur l‘évaluation de leurs impacts sur la qualité du réseau électrique et sur l‘intégration des systèmes de stockage d‘énergie. Le couplage de plusieurs sources de natures différentes, entraine des problématiques de dimensionnement, de qualité d‘énergie et de la durée de vie des Unités de Stockage d‘Energie (USE). nous proposons un état de l‘art sur les différentes stratégies de gestion d‘énergie existantes dans la littérature avec ou pas la volonté d‘une prise en compte de la durée de vie des USE. Enfin, les points clés sur lesquels nous focalisons notre travail sont mis en exergue. Les démarches scientifiques et les objectifs à atteindre durant cette thèse sont décrits.
Problématiques spécifiques des énergies renouvelables intermittentes
De nos jours, l‘échelle de la demande d‘énergie électrique produite par les sources d‘énergie renouvelables augmente. Les énergies issues des éoliens, des hydroliens et des photovoltaïques sont intermittentes et ne sont pas produite à la demande, mais selon les conditions météorologiques et de la géographie. Cependant, l‘énergie éolienne varie à cause des caractéristiques stochastiques du vent, qui non seulement impacte la qualité de l‘énergie mais aussi augmente les pertes de puissance sur les lignes de transmissions et le coût de fonctionnement des dispositifs [BRU 16], [ZHA 17].
Problématiques liées à l’intermittence
L‘une des problématiques des énergies renouvelables est leur caractère intermittent. La difficulté de prévoir la vitesse du vent ou celle de la marée, dans le cas de la production éolienne ou hydrolienne, provoque une incertitude sur l‘énergie produite. Cette incertitude sur l‘énergie produite devrait être palliée par les capacités de production des réserves contrôlables pour satisfaire les sollicitations en période de pointe. Les énergies renouvelables sont différentes des autres sources d‘énergie, elles sont dépendantes du temps et ne sont pas forcément disponibles à la demande. C‘est pour cette raison que les capacités de productions de substitution doivent être en mesure de démarrer quasi instantanément lors d‘une sollicitation. Ainsi, la modulation exigée de la production entraine souvent une perte d‘énergie par faute de demande ou de stockage. La variabilité d‘une heure sur l‘autre, d‘une minute sur l‘autre, d‘une seconde sur l‘autre peut entraîner une sous-production ou une surproduction avec des changements rapides de signe en cours de journée. De plus, cette production aléatoire est souvent source de fluctuations de puissances susceptibles d‘impacter le réseau électrique [BEL 18], [COU 08], [REM 12], [BRI 16].
Problématiques liées à l’impact des fluctuations des énergies renouvelables sur la fréquence et la tension du réseau
Comme tout moyen de production, les systèmes de production d‘énergie renouvelable, dans le but de leurs raccorder au réseau, doivent respecter un certain nombre de contraintes liées au fonctionnement des systèmes électriques. Les énergies renouvelables avec leur caractère aléatoire et intermittent posent des difficultés de gestion aux opérateurs de systèmes électriques et celles-ci sont accentuées dans le cas où le niveau de pénétration des énergies renouvelables sur le réseau électrique est important [CHA 13]. Les gestionnaires des réseaux ont défini des moyens et modalités usuels pour garantir la qualité des systèmes électriques. Les systèmes d‘énergie électrique cependant peuvent être caractérisés par la fréquence et les différents niveaux de tension.
La stabilité de la fréquence d‘un système électrique est régie à tout instant par l‘équilibre entre la production et la consommation. Le réglage de la fréquence dans le réseau électrique est hiérarchisé, il y a en tout trois réglages pour établir la fréquence du réseau à sa référence. Le réglage primaire de fréquence est une régulation automatique de fréquence du réseau, il est très rapide, son temps de réponse est de l‘ordre de la seconde. Il rétablit l‘équilibre entre la production et la consommation et évite une variation importante de la fréquence. Le réglage secondaire intervient une dizaine de seconde après la stabilisation de la fréquence par le réglage primaire et il dure quelques minutes. Lorsque le réglage secondaire s‘est trouvé insuffisant pour ramener la fréquence à sa valeur nominale, le réglage tertiaire intervient pour compléter ce dernier et aussi pour compenser la différence entre la production et la consommation lors de variations lentes des écarts. Son temps de réaction est de l‘ordre de 15 minutes. Cependant, les variations des énergies renouvelables, en particulier celles des énergies éoliennes, entrainent des fluctuations sur la fréquence du réseau. Comme la réaction de la boucle de régulation de la vitesse des groupes de production classiques est rapide, ces fluctuations peuvent activer le réglage primaire de ces groupes et faire appel à leurs réserves primaires. Pour éviter d‘utiliser la réserve destinée à la régulation de fréquence en cas de déséquilibre, les gestionnaires des réseaux ont défini un seuil limite de ces fluctuations dans des « codes réseau » [AIM 16] [IKN 14].
Quant à la tension, son maintien dans une certaines plages de variations est un élément important de la qualité de la fourniture de l‘énergie électrique. Comme pour la fréquence, les réglages de tension sont aussi hiérarchisés et sont classés selon leurs temps de réaction. Le réglage primaire de tension intervient sur une durée de l‘ordre de plusieurs dixièmes de seconde sur la tension aux bornes des groupes pour corriger les variations de la tension. Le réglage secondaire est moins rapide que le réglage primaire, sa constante de temps est de l‘ordre de quelques minutes de façon à éviter les interactions avec le réglage primaire et à diminuer les contraintes sur les groupes. Le réglage tertiaire réévalue les consignes de tension des nœuds pilotes de chaque zone de réglage selon des critères technico-économique et coordonne le plan de tension entre les différentes zones de réglage secondaire, pour exploiter le réseau en assurant au mieux sa sûreté. Sa durée est estimée à quinze minutes, [AIM 16]. Toutefois, les fluctuations causées par les énergies renouvelables, notamment les énergies éoliennes, induisent des fluctuations sur la tension du réseau causées par la puissance réactive que l‘on appelle « effet flicker » [AIM 16], [IKN 14].
Intégration des systèmes de stockage d’énergie dans les systèmes de production éolienne et hydrolienne
Les prévisions de la production et de la consommation d‘énergie sont primordiales pour la stratégie de la gestion de l‘énergie électrique. Cependant, les systèmes stockage d‘énergie permettent de fournir l‘énergie lorsqu‘il n‘y a plus de vents dans le cas de la production éolienne. En effet, ils influent significativement sur l‘arbitrage énergétique. Dans les périodes creuses l‘énergie est achetée à faible coût et est revendue dans les périodes de pointes couteuses. Cela diminue l‘emploi des centrales de pointes qui ne fonctionnent qu‘en cas forte demande, [DIA15], [BOY 06], [AIM 16].
De plus, l‘hybridation des systèmes de stockage ou sources d‘énergie aide à normaliser l‘utilisation de la source principale ou de fournir un complément d‘énergie lorsque cette dernière est à son énergie maximale. Ils existent des systèmes de stockage à court terme qui fournissent rapidement de grandes puissances sur une courte durée et les systèmes de stockage à long terme permettent de compléter les périodes où les vents sont faibles et participent dès lors à maintenir la puissance fournie au réseau. Nous pouvons citer respectivement les supercondensateurs et les batteries électrochimiques. L‘association de ces deux sources permet de gagner en rapidité et en efficacité dans le cadre de la gestion d‘énergie. En fait l‘hybridation permet de lisser la puissance grâce au stockage à court terme, d‘améliorer la fiabilité, de réduire la taille de stockage et le coût de production, [COR 20], [DES 17], [KIM 20], [KRU 17].
Les unités de stockage jouent également un rôle sur les réserves d‘exploitation pour la réglementation de l‘électricité, du démarrage d‘un système après une panne à l‘échelle du système (panne électricité). Récemment, leur rôle évolue dans la contribution à la stabilité des systèmes électriques et à l‘amélioration de la capacité des éoliens dans le contrôle des frequence, [YAN 20]. Leur choix depend des puissances nominales, des capacités énergétiques, de la densité d‘énergie et du temps de réponse, [ISM 19].
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Table des matières
Introduction générale
Chapitre 1 : Problématiques de gestion d’énergie électrique issue des éoliens et hydroliens
1.1 Introduction
1.2 Problématiques spécifiques des énergies renouvelables intermittentes
1.2.1 Problématiques liées à l‘intermittence
1.2.2 Problématiques liées à l‘impact des fluctuations des énergies renouvelables sur la fréquence et la tension du réseau
1.2.3 Intégration des systèmes de stockage d’énergie dans les systèmes de production eolienne et hydrolienne
1.3 Difficultés de couplage multi-source
1.3.1 Absence d‘un profil de mission standard
1.3.2 Problématiques liées aux pics de consommations
1.4 Impacts des défauts des convertisseurs de puissance sur le fonctionnement des systèmes multi-sources
1.4.1 Impact des défauts de court-circuit ou de circuit ouvert d‘un convertisseur d‘électronique de puissance
1.4.2 Impact des défauts de commande sur le fonctionnement d‘un convertisseur d‘électronique de puissance
1.4.3 Fonctionnement en mode dégradé
1.5 Différentes stratégies de gestion d‘énergie
1.5.1 Méthodes de gestion d‘énergie à base de règles
1.5.2 Méthode de gestion d‘énergie à base d‘optimisation
1.6 Stratégies de gestion d‘énergie basées sur l‘amélioration de la durée de vie des unités de stockage d‘énergie
1.7 Objectifs de la thèse et démarches scientifiques
1.8 Conclusion
Chapitre 2 : Caractérisation des supercondensateurs par méthode de spectroscopie d’impédance
2.1 Introduction
2.2 Généralités sur les supercondensateurs
2.2.1 Principe de fonctionnement des supercondensateurs
2.2.2 Différentes technologies de supercondensateurs
2.2.3 Mécanisme de stockage d‘énergie au sein des supercondensateurs
2.3 Modélisation des supercondensateurs
2.3.1 Modèle d‘impédance d‘un supercondensateur
2.3.2 Modèle analytique d‘une ligne de transmission
2.4 Présentation de la méthode de caractérisation par spectroscopie d‘impédance avec identification des paramètres des supercondensateurs
2.5 Banc de caractérisation des supercondensateurs par approche fréquentielle
2.6 Evolution des paramètres des supercondensateurs
2.6.1 Impact de la température sur les résistances et capacités des supercondensateurs
2.6.2 Impact du taux d‘ondulation du courant DC sur les résistances et capacités des supercondensateurs
2.6.3 Variation des résistances et capacités des supercondensateurs en fonction de la fréquence d‘ondulation du courant continu
2.6.4 Impact de la température et de la fréquence d‘ondulation du courant sur les résistances et capacités des supercondensateurs
2.7 Validation du modèle proposé
2.8 Limites du modèle de SC issu de la caractérisation fréquentielle
2.9 Conclusions
Chapitre 3 : Caractérisation et Modélisation des supercondensateurs par la méthode temporelle
3.1 Introduction
3.2 Modélisation des supercondensateurs par approche temporelle
3.2.1 Modèle de base en circuit RC
3.2.2 Modèle à deux branches
3.2.3 Modèle de supercondensateurs retenu pour la caractérisation
3.3 Caractérisation des supercondensateurs par approche temporelle
3.3.1 Présentation du banc de tests
3.3.2 Méthode d‘identification des paramètres des supercondensateurs
3.3.3 Evolution des paramètres des supercondensateurs
3.3.3.1 Variations des résistances et des capacités des supercondensateurs en fonction du nombre des cycles
3.3.3.2 Variations des résistances et des capacités des supercondensateurs en fonction de la valeur moyenne du courant
3.3.3.3 Variations des résistances et des capacités des cellules de supercondensateurs en fonction du taux d‘ondulation du courant continu
3.3.3.4 Impact de la température sur les résistances et capacités des cellules de supercondensateurs
3.3.3.5 Impact de la température et du taux d‘ondulation du courant sur les résistances et capacités des supercondensateurs
3.4 Notions de vieillissement des supercondensateurs
3.5 Modèle électrique basé sur le vieillissement des supercondensateurs
3.6 Validations du modèle et discussions
3.6.1 Validations du modèle électrothermique de supercondensateurs
3.6.2 Efficacité du modèle comportemental proposé
3.7 Conclusions
Conclusion générale