Parmi les nombreuses substances chimiques pouvant contaminer les milieux aquatiques et terrestres : les médicaments. Ces derniers font depuis tout récemment l’objet d’une préoccupation majeure (Halling-Sorensen et al.,1998; Daughton et Ternes,1999; Heberer, 2002). Parce que les médicaments sont fabriqués et administrés dans le but de provoquer un effet biologique (Zuccato et al., 2000), leur présence dans les eaux n’est pas seulement d’un intérêt scientifique mais aussi d’un intérêt public (Scheytt et al., 2005). Depuis les années 80 et grâce, notamment, aux progrès de l’analyse physico-chimique, de nombreuses molécules pharmaceutiques sont détectées dans l’environnement et leur présence dans les effluents et les boues de stations d’épuration urbaines, le milieu aquatique et les sols, est établie à l’échelle mondiale. (Joss et al., 2005 ; Bernhard et al.,2006 ; De Wever et al., 2007) .
La première mise en évidence de la présence de médicaments dans les eaux remonte à 1976 (Hignite et Aznaroff 1977). De nombreux travaux ont depuis lors confirmé l’ubiquité des substances médicamenteuses dans les eaux de surface et les eaux souterraines (Ternes 1998 ; Stumpf et al., 1999 ; Ternes et al., 2001). La raison pour laquelle les substances médicamenteuses constituent un problème environnemental, est liée à leurs effets biologiques spécifiques non seulement sur l’homme, mais aussi sur les organismes aquatiques (Doll et Frimmel, 2003). Des études menées dans plusieurs pays ont permis de montrer la présence de plus de 80 produits pharmaceutiques dans des eaux usées urbaines à des concentrations variant du ng/l au µg /l (Kümmerer, 2001; Heberer. 2002 ; Miège et al., 2006).
La persistance des médicaments dans l’environnement varie en fonction de leurs propriétés physico-chimiques (Metcalfe et al., 2003; Paxeus et al., 2004). L’utilisation croissante et la disposition inadéquate de ces derniers engendrent des apports continus conduisant à leur présence et «persistance» dans les milieux écologiques. (Golet et al., 2003) Pour atteindre le sang et les organes et traverser les membranes cellulaires des organismes, les médicaments doivent nécessairement être absorbables, hydrosolubles et liposolubles (Buser et al., 1999). De plus, ils doivent être assez persistants dans l’organisme afin de produire leurs effets avant d’être éliminés (Jones et al., 2001). Ces caractéristiques sont comparables à celles de nombreuses substances toxiques et xénobiotiques connus (Van Coillie, 2005). En raison de cet usage inadapté et inconsidéré de ces produits, couplé à la capacité d’adaptation des microorganismes et aux possibilités de transferts génétiques (Saye et al., 1990; Ashelford et al.,1997) ces substances constituent un vrai danger écotoxicologique. ( Jones et al., 2005) .
Problématique liée à la présence de produits pharmaceutiques dans l’environnement
La problématique environnementale concernant les médicaments est liée au fait qu’ils soient développés pour avoir des effets sur le vivant puis rejetés même en faible quantité dans l’environnement. En effet ces molécules sont nécessairement absorbables, hydrosolubles ou liposolubles et plus ou moins persistantes dans l’organisme afin de produire un effet (Steger- Hartmann et al., 1997) . Elles peuvent être éliminées via les urines à plus de 80 % sans transformation, ainsi plusieurs questions se posent quant à un possible impact environnemental sur la faune et la flore (Ferrari et al., 2003).
Définition de substance pharmaceutique
Les substances pharmaceutiques sont des molécules possédant des propriétés curatives, préventives ou administrées en vue d’établir un diagnostic. Elles sont classées selon :
– L’effet pour lequel elles sont conçues (Antibiotiques, Analgésiques…),
– Leur structure chimique (parmi les Antibiotiques : Quinolones, Céphalosporine…),
– Leur mode d’action (anti-métabolites ou agents alkylants) (Roig, 2008).
Leurs propriétés physicochimiques leur confèrent des capacités de franchissement des membranes biologiques, elles sont généralement considérées comme des polluants émergents compte tenu du récent intérêt dont elles font l’objet, et sont souvent classées dans une catégorie que l’on qualifie de « micropolluants » car les concentrations retrouvées dans les milieux aquatiques sont de l’ordre du nanogramme ou du microgramme par litre (Roig, 2008). Les produits pharmaceutiques, qui sont conçus pour être des substances biologiquement actives, peuvent aussi être source de préoccupation par leurs interactions possibles avec les organismes non ciblés dans l’environnement mais aussi pour les humains (Klavarioti et al., 2009). Ils sont généralement lipophiles et résistants à la biodégradation, ayant ainsi un grand potentiel d’accumulation et de persistance dans l’environnement (Paxeus, 2004).
En outre, les produits pharmaceutiques peuvent être stables dans l’environnement ou soumis à des transformations biotiques et/ou abiotique, et parmi les transformations abiotiques, la photo-dégradation qui est le processus d’élimination le plus important, ce qui conduit parfois à la formation de produits beaucoup plus toxiques que les composés parentaux (Isidori et al., 2009).
Médicaments dans l’environnement
Les premiers rapports sur les produits pharmaceutiques dans les eaux résiduaires et dans les eaux de surface ont été publiés aux États-Unis dans les années 70. Dans un premier temps les produits pharmaceutiques vus comme des contaminants de l’environnement n’ont pas reçu beaucoup d’attention jusqu’à ce que le lien a été fait entre l’ethynylestradiol et ses effets sur les poissons (Carlsson et al., 2006 ; Kim et al., 2009 ). Depuis, une attention scientifique a été particulièrement dédiée à la présence de produits pharmaceutiques dans l’environnement (Calamari et al., 2003). Ceci a abouti à un nombre croissant de détection de produits pharmaceutiques dans une variété d’échantillons de l’environnement, les eaux de surface, les eaux souterraines (Jones et al., 2001 ; Tixier et al., 2003 ) , de l’eau potable et de l’eau de mer (Reddersen et al., 2002) .
Plus de 150 produits pharmaceutiques de différentes classes thérapeutiques ont été détectés avec des concentrations atteignant le µg/l dans diverses matrices environnementales (Heberer. 2002), incluant une grande variété de composés tels les hormones, les régulateurs de lipides, les antibiotiques, anticancéreux et d’autres cytotoxiques, antiépileptiques, etc (Gros et al., 2008).
Différentes sources des substances pharmaceutiques dans l’environnement
Une fois administrés, après leur action pharmacologique, les produits pharmaceutiques sont excrétés avec les urines ou matières fécales dans l’eau sous une forme native inchangée (composé parent) et/ou sous forme de métabolites actifs qui entrent dans le système aquatique par différentes manières et à des degrés variables (Andreozzi et al., 2003; Fent et al., 2006). Ils peuvent remonter la chaîne trophique aquatique dans les eaux de surface, souterraines et sont même présents dans l’eau du robinet (Isidori et al., 2007).
Les concentrations atteignant les eaux de surface dépendent de plusieurs facteurs, dont certains théoriquement prévisibles, tels que le métabolisme et la dégradabilité, ainsi que d’autres imprévisibles, tels que l’élimination inadéquate (Zuccato et al., 2005). Ces produits se retrouvent alors dans le réseau d’eaux usées et sont traités à des degrés différents dans les stations d’épuration. Une autre voie de contamination du milieu naturel n’est pas à négliger, elle concerne les médicaments rejetés avec les déchets ménagers pouvant ainsi polluer les sols et les eaux souterraines en cas d’enfouissement en décharge. (Fent et al., 2006).
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Table des matières
Introduction Générale
Chapitre I : Synthèse bibliographique
I. Problématique liée à la présence de produits pharmaceutiques dans l’environnement
1. Définition de substance pharmaceutique
2. Médicaments dans l’environnement
3. Différentes sources de substances pharmaceutiques dans l’environnement
4. Devenir des substances pharmaceutiques dans les systèmes aquatiques
4.1 Les phénomènes de dégradation en milieux naturels
4.1.1 La photodégradation
4.1.2 La biodégradation
4.1.3 Distribution des substances pharmaceutiques dans la phase aqueuse
4.1.4 Phénomènes de sorption
5. Transferts aux organismes aquatiques
5.1 La toxicité aigüe des substances pharmaceutiques
5.2 La toxicité chronique
5.3 Effets cocktail des substances pharmaceutiques
5.4 Toxicité des métabolites
II. Stress oxydant : quand l’oxydation phosphorylante mitochondriale devient une source radicalaire
1. Les différentes espèces radicalaires de l’oxygène
2. Systèmes de défenses antioxydants
3. La mitochondrie
3.1 Fonctions
3.2 La mitochondrie et la production de ROS
III. Généralités sur la Paramécie
VI. Généralités sur les xénobiotiques utilisées
1. Le Paracétamol
2. L’Ibuprofène
Chapitre II : Physiologie et Morphologie
Introduction
1. Matériel et méthode
1.1 Matériel biologique
1.2 Matériel chimique
1.2.1 Paracétamol
1.2.2 L’ibuprofène
2. Méthode
2.1 Culture de Paramecium tetraurelia
2.2 Conduite a l’essai
2.3 Cinétique de croissance cellulaire
2.4 Calcule du pourcentage de réponse
2.5 Taux de mortalité
2.6 Taux de malformation
2.7 Nombre de vacuoles digestives
3. Résultats
3.1 Effet du paracétamol et de l’ibuprofène sur la croissance
3.2 Effet du paracétamol et de l’Ibuprofène sur le pourcentage de réponse (PR)
3.3 Evaluation du taux de mortalité
3.4 Modifications morphologique
3.4.1 Taux de malformations
3.4.2 Evaluation du nombre de vacuoles digestives après exposition au Paracétamol et à l’Ibuprofène
Discussion
Chapitre III : Biochimie et Polarographie
Introduction
1. Méthodes
1.1 Dosage des métabolites
1.1.1 Dosage des protéines
1.1.2 Dosage des glucide
1.1.3 Dosage des lipides
1.2 Etude Polarographique
1.2.1 Principe du dosage
2. Résultats
2.1 Effets du paracétamol et de l’ibuprofène sur l’évolution du taux des protéines
2.2 Effets du paracétamol et de l’ibuprofène sur l’évolution du taux des lipides
2.3 Effets du paracétamol et de l’ibuprofène sur l’évolution du taux de glucides
3. Effet du paracétamol et de l’ibuprofène sur le métabolisme respiratoire des paramécies
Discussion
Chapitre IV : Etude du stress oxydant
Introduction
1. Matériel et méthodes
1.1 Mesure de l’activité Catalase (CAT)
1.2 Dosage du taux de glutathion (GSH)
1.3 Mesure de l’activité GST (glutathion S-transférase)
1.4 Mesure de l’activité Ascorbate-peroxydases (APX)
1.5 Mesure du malondialdéhyde (MDA)
2. Résultats
2.1 Effet du paracétamol et de l’ibuprofène sur les variations du taux de CAT
2.2 Effet du paracétamol et de l’ibuprofène sur le taux de GSH
2.3 Effet du paracétamol et de l’ibuprofène sur les variations du taux de GST
2.4 Effet du paracétamol et de l’ibuprofène sur l’évolution d’APX
2.5 Effet du paracétamol et de l’ibuprofène sur l’évolution du taux de MDA
Discussion
Conclusion Générale