Problématique de la grossesse a partir de 35 ans

Historique

Les grossesses tardives ou pré- ménopausiques datent du temps de la Bible. Ainsi Sarah avait 90 ans quand elle donnait naissance à Isaac, rapporte ce livre saint.
Obtenir une grossesse chez une femme post ménopausique avec les progrès modernes de la fécondation in vitro, en particulier le don d’ovocyte, avait attiré l’attention des médias.
Dans la période contemporaine la plus vieille femme à donner naissance s’appelle Rosana C. ; elle a accouché à l’âge de 63 ans et 3 mois par don d’ovocyte (Corson).
La plus vieille à porter spontanément une grossesse est une Brésilienne ; elle a accouché à l’âge de 56 ans (Corson).
Le couple qui aurait le plus procréé semble avoir vécu en Sibérie au 18e siècle. L’église rapporte 67 de leurs enfants et la mère a accouché de son dernier enfant à l’âge de 47 ans 8 mois.
Devant les progrès de la fécondation se pose la question d’éthique.
L’âge peut il être une barrière à la maternité ?
Le taux de femmes sans enfants à l’âge de 35 ans a doublé aux USA depuis 1925 et en 1994 un tiers des naissances était issue des femmes de 35 ans et plus (Corson).

Aspects scientifiques de la fécondité

Une précision mérite d’être portée sur certains concepts.
Fécondité : c’est la possibilité pour un couple d’avoir des enfants.
La courbe de la fécondité qui représente le fait d’avoir donné naissance à un enfant, suit une évolution décroissante avec l’âge des femmes dans une population naturelle (c’est-à-dire sans recours à une contraception).
Mais le fait à souligner est qu’avant 35 ans, les femmes fertiles ont une fécondité qui n’est pas supérieure à la population générale et l’évolution des deux courbes est parallèle. Après 35 ans, la fécondité des femmes fertiles baisse plus vite que celle de la population générale, donc, outre
l’augmentation du taux de femmes stériles, la fécondité des femmes fertiles chute rapidement.
La diminution de la fonction ovarienne avec des ovocytes de mauvaise qualité et la diminution du taux d’implantation sont les raisons essentielles de la diminution de la fertilité. Les autres facteurs à considérer sont : la fréquence des rapports sexuels, l’endométriose, l’anovulation, les facteurs mécaniques, les maladies inflammatoires, les anticorps antispermatozoïdes et les facteurs psychologiques.
? fécondabilité : De la notion de fécondité peut être calculée la probabilité de concevoir au cours d’un cycle.
Comme la fécondité, l’évolution de la fécondabilité moyenne dans une population standard varie peu avant 30 ans puis baisse rapidement à partir de 35 ans.

Problématique de la grossesse à partir de 35 ans

Les problèmes obstétricaux

Il est généralement supposé que les femmes de 35 ans et plus ont un risque accru de complications durant la grossesse [29]. Pendant des années plusieurs études ont examiné les pathologies médicales survenant chez les femmes d’âge avancé, mais il y a peu de faits établis. Les complications habituelles de la grossesse après 35 ans sont le diabète, l’hypertension artérielle, les maladies cardio- vasculaires, les maladies trophoblastiques, les anomalies placentaires, les anomalies utérines et les grossesses multiples avec un taux élevé de grossesse gémellaire dizygote.

Les pathologies vasculaires gravidiques

Il est bien connu que les maladies cardio-vasculaires augmentent avec l’âge.Le plus important effet de l’âge avancé sur le système cardio- vasculaire est la perte progressive de la conformité.
Les études histologiques de la paroi des vaisseaux supportent que l’âge diminue les réactions de l’endothélium vasculaire. Une adaptation importante de la grossesse est l’établissement d’une élévation du flux et une baisse de la résistance circulatoire appelée circulation hyperdynamique. Ces changements normaux de la grossesse paraissent être opposés à celles connues pour l’âge avancé. Les données actuelles montrent que les niveaux de la pression diastolique et systolique augmentent avec l’âge. En général cela augmente de 2 à 4 fois le taux les deux hypertensions (chronique et gravidique), comprenant la pré- éclampsie [29].
La principale complication dans l’association hypertension artérielle et grossesse est la toxémie gravidique avec ses complications : élévation du taux de retard de croissance in utero, de prématurité, mort foetale in utero, hématome rétro- placentaire.
Le taux d’hypertension artérielle double après 40 ans (8,5% avant 35 ans et 15,3% après 40 ans)

Maladie Diabétique

Le diabète est une maladie métabolique chronique dans laquelle nous avons deux (2) types :
– Type I : caractérisé par une insuffisance absolue en insuline développé dans l’enfance ou dans l’adolescence.
– Type II : il y a une carence relative en insuline soit à cause d’une réduction de la sensibilité périphérique à l’insuline, soit une diminution de la capacité pancréatique de libérer une quantité suffisante d’insuline en réponse au pic. Cette diminution serait relative à une augmentation de la fibrose des îlots de Langherhans du pancréas. L’obésité est un facteur de risque très important pour l’incidence du diabète.
Dans les conditions de stress comme la grossesse, les diabètes de type II asymptomatiques peuvent devenir symptomatiques. Dans la seconde moitié de la grossesse, la résistance à l’insuline augmente de 2 à 3 fois.
Quand la réserve limitée d’insuline est déjà insuffisante, le diabète gestationnel peut apparaître. Dans la plupart des cas les conséquences cliniques se limitent à la macrosomie. Cependant quand, la grossesse a été longtemps précédée par une hyper insulinémie, cela peut augmenter le risque de complications vasculaires comprenant l’hypertension artérielle gestationnelle, la pré éclampsie et le retard de croissance in utero. Selon KATWIJK et al. [41], l’âge joue un rôle important dans la survenue du diabète gestationnel. Ceci apparaît clairement dans son tableau ci- dessous.

Prise de poids

La prévalence de l’obésité est en augmentation progressive dans les pays occidentaux, et la surcharge pondérale de la grossesse est donc une situation fréquente.
La grossesse s’accompagne d’une prise pondérale moyenne de 12,5kg. Il serait illusoire et néfaste de conseiller systématiquement cette évolution à chaque femme : en fonction de la corpulence de départ, la prise pondérale tant pour la croissance du foetus que pour l’évolution du corps maternel, s’échelonne entre 6 et 18kg. Ainsi la surveillance se doit d’être précoce notamment en présence « des facteurs de risque pondéral » : surpoids préexistant à la conception, l’âge supérieur à 35 ans, sédentarité, troubles du comportement alimentaire, antécédent de prise de poids majeur pendant une grossesse précédente chez la patiente ou une de ses proches parentes, absence prévisionnelle d’allaitement [28].
Une prise excessive de poids au cours de la grossesse a des effets délétères sur le déroulement de la grossesse et de l’accouchement.
Les grossesses chez les femmes obèses sont marquées par une incidence élevée de complications maternelles (diabète gestationnel, HTA, toxémie) et foetales (macrosomie, anomalie de la fermeture du tube neural, mortalité périnatale). Le taux de césarienne est également plus élevé, essentiellement en raison des complications de la grossesse. Ces risques sont significativement accrus même pour des surcharges pondérales modérées et augmentent avec le niveau d’obésité. A long terme, on observe une augmentation du risque d’obésité et de diabète de type 2 chez la mère, ainsi qu’une plus grande fréquence de l’obésité chez l’enfant [31].

Anomalies du placenta

Le risque de placenta praevia est corrélé à la multiparité. L’augmentation du risque de placenta praevia, régulièrement retrouvé après 35 ans, n’était pas toujours retrouvée chez la nullipare dans les publications. (encycl med chir) Bien qu’il ait été déclaré que le décollement placentaire et le placenta praevia sont plus courants chez les femmes âgées, cette association n’est plus attestée par les études récentes [29].

Pathologies gynécologiques

En dehors du simple vieillissement, il est clair que plus le temps passe, plus le risque d’avoir une pathologie gynécologique augmente, de même que le temps qui passe permet l’aggravation de l’affection : c’est le cas de l’endométriose et des fibromes. L’endométriose s’aggrave avec le temps et une femme sur trois aura un fibrome après 35 ans. [46]
La co-existence d’un fibrome et d’une grossesse peut entraîner des troubles de gravité inégale.
– Au cours des premiers mois de la grossesse :
L’avortement représente le risque majeur. Il est en général précoce, hémorragique et compliqué de rétention placentaire.
L’existence d’une grossesse pourra avoir des conséquences sur le fibrome (avec poussée passagère d’hypertrophie douloureuse, risque de nécrobiose aseptique, accident de compression).de même, le fibrome a des conséquences sur la grossesse : causes de présentation anormale.
– Lors de l’accouchement qui est souvent prématuré, et surtout gêné dans son déroulement par l’insuffisance fonctionnelle de l’utérus fibromateux, il y a fréquemment une dystocie dynamique.
– En présence d’un fibrome pelvien, la grossesse évolue en général sans trop de trouble, le fibrome ne se complique pas mais l’accouchement par les voies naturelles est impossible. Le fibrome constitue un obstacle prævia irréductible qui impose la césarienne.
– Lors de la délivrance il faudra se méfier d’une hémorragie de la délivrance par décollement placentaire incomplet.
– Les suites de couches sont souvent compliquées d’accidents thromboemboliques.
Une maladie sexuellement transmissible multiplie le risque de stérilité par 7,5 et en cas de salpingite par 32 ; de même les antécédents chirurgicaux (l’appendicectomie) multiplient le risque d’infertilité par 4,7.

Issue de la grossesse

L’âge avancé expose la femme à au moins 3 fâcheux risques qui sont la fausse couche spontanée, la grossesse ectopique et la mortinaissance.

Fausse couche spontanée

La qualité du conceptus baisse avec l’âge de la mère. Cela est bien démontré par le taux des fausses couches qui augmentent avec l’âge. Le risque de fausse couche est élevé dans la population des femmes de 40 ans et plus [25].
La fausse couche précoce est plus élevée chez les femmes de 30 ans et plus indépendamment de leurs antécédents obstétricaux. A 35 ans 1/5e des grossesses connaît une issue défavorable ; à 42 ans ce taux est augmenté de moitié. A 21 ans le taux de grossesses ectopiques est de 1,4 %, ce taux atteint 6,9 % à 44 ans.
L’augmentation du risque de fausse couche spontanée en fonction de l’âge a été retrouvée par plusieurs auteurs [14, 29, 59]. Cela est principalement dû à l’augmentation des aberrations chromosomiques. En effet, jusqu’à 60 % des produits d’avortement présentent une anomalie. Cependant, il y a aussi des fausses couches avec des embryons génétiquement normaux.
Toute fois il y a une association croissante du risque d’achondroplasie, schizophrénie, syndrome de Marfan, syndrome d’Apert et des anomalies du système nerveux central.

Mort foetale in utero (MFIU)

Le risque de MFIU est accru chez les gestantes âgées et peut s’expliquer de façon logique par l’augmentation des complications obstétricales observées dans cette population.

Les anomalies chromosomiques

La plupart des anomalies chromosomiques foetales et en particulier la trisomie 21 ont un risque de survenue qui s’élève avec l’âge maternel [25].
L’incidence de ces anomalies est de 1,2% à 38 ans jusqu’à 6,9% à 45 ans. La probabilité de trouver une trisomie 21 est de 0,5% entre 35 et 37 ans, et de 1,5 après 38 ans [13].
Le taux de trisomie 21 en procréation naturelle passe de 1 /1600 naissances vivantes à 20 ans à 1/64 naissances à 42 ans. Cette notion est retrouvée en insémination artificielle avec sperme du donneur (IAD), le taux de trisomie 21 passe de 1,5‰ avant 38 ans à 44‰ après 38 ans.

Le travail d’accouchement

Les études avaient démontré une augmentation de travail prolongé parmi les gestantes âgées. Cela peut être expliqué par la détérioration de la fonction myomériale avec l’âge, due à une perte de la sensibilité des récepteurs de l’ocytocine ou le remplacement progressif du muscle utérin par du collagène.

Pronostic maternel

La mort maternelle est définie par la classification internationale des maladies comme « le décès d’une femme survenu au cours de la grossesse ou dans un délai de 42 jours après sa terminaison, quelque soit la durée ou la localisation, pour une cause quelconque déterminée ou aggravée par la grossesse ou les soins qu’elle a motivés mais ni accidentel ni fortuit ».
Le risque de décès maternel est corrélé à l’âge : il est minime entre 20-24 ans reste faible jusqu’à 29 ans ; augmente ensuite très fortement et est 3 à 4 fois plus élevé à 35-39 ans, 12 fois plus élevé après 45 ans.

Cadre et lieu de l’étude

L’hôpital du Point « G » a été construite en 1906. Il est situé sur une colline à laquelle il emprunte son nom. Le point « G » correspond au niveau par rapport à la mer à Dakar.
Il a été fonctionnel en 1912 sous l’administration de médecins militaires relevant de la section mixte des médecins et infirmiers coloniaux basés à Dakar (Sénégal).
Erigé en hôpital en 1959, l’hôpital du Point « G » a eu le statut d’établissement public à caractère administratif (EPA) en 1992 doté de personnalité morale et de l’autonomie financière suivant la loi 92.025 /A.N.R.M du 05/10/92. En 2002 il est devenu un établissement public hospitalier (EPH) suivant la loi N°02-048 du 22 juillet 2002. Géographiquement l’hôpital est bâti sur une colline située au nord de la ville de Bamako à 8 Km du centre ville, face à la colline de Koulouba, et, sur la route de Kati d’où il reçoit beaucoup de parturientes référées ou évacuées. Il couvre une superficie de 25 hectares.
Parmi les 16 services que compte cet hôpital il y a un bloc opératoire comprenant 5 salles d’opération. Il existe une salle pour le service de gynécologie obstétrique pour les interventions programmées. Pour les interventions d’urgence, notre service partage une salle avec les autres services de chirurgie. Le bloc opératoire comprend également une unité de stérilisation centrale.
Le service de gynécologie obstétrique a été créé en 1912. Il était dirigé d’abord par des chirurgiens expatriés français puis par des chirurgiens maliens.

Type d’étude

Il s’agit d’une étude rétrospective cas–témoins.
Les cas étaient constitués par des gestantes de 35 ans et plus et les témoins étaient des gestantes de 20 à 34 ans. Nous avons choisi cette tranche d’âge car il s’agit de l’âge optimal pour la procréation.

Période de l’étude

L’étude a concerné la période du 1er janvier 1985 au 31 décembre 2003 soit 19 ans.
Cette période nous a permis d’avoir un échantillon statistiquement significatif et de suivre l’évolution des activités sur 19 ans.
On distingue cinq (5) périodes :
• de 1985 à 1987 le service était sous la responsabilité des missionnaires français.
• de 1987 à 1995 il s’agit des premières années d’expérience d’un malien comme gynécologue obstétricien chef de service. Le service a commencé une garde autonome de 1992 à 1994. Le partogramme a été remplacé en 1994 par le partogramme national élaboré par la division santé familiale et communautaire dans le cadre du programme national de la périnatalité.
• 1996-1997 période des travaux de réhabilitation du service.
• 1998-2001 au terme de cette période le service ne joue plus le rôle de 3e niveau ; l’essentiel du staff technique ayant été affecté à l’hôpital Gabriel Touré
• 2002-2003 il n’y avait qu’un seul médecin gynécologue obstétricien qui était le chef de service.

Population d’étude

La population d’étude était constituée par toutes les femmes enceintes admises dans le service de gynécologie obstétrique pendant la période d’étude quel que soit le motif. La plupart de ces gestantes sont soit référées ou évacuées. Lorsqu’elles sont admises directement, il s’agit le plus souvent des habitantes du village du Point « G » ou de Koulouba et environnants, parfois démunis ou célibataires, ayant fait peu ou pas de consultations prénatales, généralement en deuxième phase du travail d’accouchement.

Echantillonnage

Nous avons procédé à un échantillonnage systématique de tous les cas et de tous les témoins. Ainsi au total 2896 gestantes de 35 ans et plus ont été répertoriées et 12597 gestantes de 20-34 ans.

Déroulement de l’enquête

Le questionnaire initial a été établi dans le cadre de enregistrement systématique de tous les dossiers d’obstétrique du service. Une maquette de saisie a été conçue par un résident en gynécologie- obstétrique et validée en réunion de staff. Ainsi les étudiants dans le service faisant fonction d’interne ont été chargés de la saisie de ces dits dossiers de l’établissement. Ce travail a commencé en 2000. Ils ont saisi l’essentiel des dossiers de 1991 à 2000.
Pour parfaire à ce travail nous avons décidé de compléter le fichier par la saisie des dossiers de 1985 -1990 et 2001-2003 ; et compléter 1991-2000. Une équipe de 10 étudiants en 6e- 7e année de médecine a été formée à cet effet pour la saisie. L’encadrement et l’assistance technique étaient fournis par un gynécologue obstétricien qui était le résident de 2000. La saisie avait lieu tous les jours pendant quatre mois. Le nettoyage des données a été assuré par une triple vérification de chaque dossier enregistré.
Contraintes : nous avons été obligé de compléter certaines informations à partir du registre des chirurgiens. Il s’agissait des cas dont la prise en charge a été effectuée par les chirurgiens mais dont les malades étaient gardés dans le service de gynéco- obstétrique pendant la période de garde mixte.
A l’hôpital national du point « G » il n’existe pas de service de néonatologie et les nouveau-nés qui nécessitaient une réanimation étaient pris en charge par l’équipe de garde du service de gynéco- obstétrique ou de réanimation dans les cas sévères.
L’examen du nouveau-né était effectué par le gynécologue qui avait en charge de poser le diagnostic des malformations.

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Table des matières

I – INTRODUCTION – OBJECTIFS
II – GENERALITES
2.1. Historique
2.2. Aspects scientifiques de la fécondité
2.3. Problématique de la grossesse a partir de 35 ans
III – METHODOLOGIE
IV –RESULTATS
V – COMMENTAIRES – DISCUSSION
VI – CONCLUSION – RECOMMANDATIONS
VII – REFERENCES
VIII – ANNEXES

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