Prise en charge d’une femme enceinte par le bataillon de marins-pompiers de Marseille

En 2014, 2 269 femmes enceintes ont été prises en charge par le Bataillon de MarinsPompiers de Marseille (BMPM) représentant 3 % des interventions sanitaires du Bataillon (1). Le BMPM est une unité militaire placée pour emploi sous l’autorité du maire de Marseille. Le BMPM assure la protection de Marseille depuis la mise sous tutelle de la ville le 29 juillet 1939, suite à l’incendie des Nouvelles Galeries qui a nécessité l’intervention des marins-pompiers de Toulon. Depuis juillet 2014, le BMPM est commandé par le viceamiral Charles-Henri Garié, secondé par le capitaine de vaisseau Philippe Vernerey. L’organigramme du BMPM est détaillé en annexe [ANNEXE I] (2).

Le BMPM est scindé en deux groupements opérationnels, un Nord et un Sud. Il regroupe 17 centres d’incendies et secours (CIS) permettant l’arrivée du premier véhicule d’intervention en moins de 10 minutes sur l’ensemble du territoire marseillais. [ANNEXE II] S’y ajoutent un centre technique, un centre médical et un centre opérationnel d’incendie et secours de la ville de Marseille abritant le centre de réception des appels aux 18 et 112. Avec plus de 300 interventions et 1000 appels par jour, la fréquence des départs est d’environ 5 minutes (2). Plus de 80% des missions du BMPM relève du secours à la personne et de la prise en charge des blessés et des malades. En 2014, le BMPM disposait de 39 véhicules d’aide et de secours aux victimes (VSAV) armés en permanence et de 3 ambulances de réanimation. Le coût d’une intervention est estimé à 944 euros, classant le BMPM comme l’un des services d’incendie et secours les moins chers de France (1).

Trois des six ambulances de réanimation du service médical d’urgence (SMUR) assurant la couverture médicale urgente de la ville, sont armées par le BMPM, qui participe aussi à la régulation médicale au Service Aide Médicale Urgente (SAMU)-Centre 15 des Bouches-du-Rhône. Le site de régulation médicale est implanté sur le site de l’Assistance Publique des Hôpitaux de Marseille (AP-HM) de la Timone. La régulation médicale est un acte médical pratiqué par téléphone par un médecin régulateur (3). La décision médicale repose sur l’ensemble des éléments à la disposition du médecin régulateur. Plusieurs conduites à tenir sont possibles : la prescription médicamenteuse par téléphone, l’orientation du patient vers une consultation médicale, l’intervention d’un médecin sur place, le recours à un transport sanitaire en ambulance, le recours aux sapeurs-pompiers ou aux secouristes (à Marseille aux marins-pompiers), l’envoi d’une équipe médicale mobile d’urgence et de réanimation (3). Les principaux motifs d’appels vers les services d’urgences concernant les femmes enceintes sont : l’accouchement imminent, les douleurs abdominales, les céphalées, la fièvre et les métrorragies (4). En 2009, seulement 24 accouchements inopinés étaient pris en charge par le BMPM (5). En 2016, 58 accouchements inopinés ont été réalisés à Marseille, dont 30 grâce aux SMUR armés par le BMPM.

Cette étude s’intéresse à la prise en charge des femmes enceintes par les équipes des VSAV du BMPM notamment au recueil des informations constituant le bilan de la femme enceinte et sa transmission. Le bilan est défini comme étant la phase de recueil d’informations permettant d’évaluer une situation et l’état de la personne prise en charge. « Il doit être suffisamment rapide pour ne pas retarder ni la demande de renfort, ni la mise en œuvre des gestes de secours. » .

L’équipe VSAV est composée d’un conducteur, d’un secouriste équipier et d’un chef d’agrès plus ancien et plus expérimenté et qui bénéficie de formations complémentaires. C’est le chef d’agrès, responsable de l’équipe, qui réalise le bilan de la femme enceinte. La fiche d’intervention secouriste est utilisée pour chaque intervention de VSAV. Elle est présentée en annexe [ANNEXE III]. Lorsqu’une case rouge est cochée, un avis médical est obligatoire : c’est le cas pour la case « femme en couche ». Un appel est donc effectué au médecin régulateur qui décide alors si le déplacement de la femme est possible, et/ou si l’envoi d’un SMUR est nécessaire. Si l’accouchement n’est pas imminent, la femme est alors transportée vers l’une des 5 maternités marseillaises en privilégiant la maternité de suivi de la femme qu’elle soit publique ou privée ou le niveau nécessaire selon les facteurs de risque présents. En effet, Marseille dispose de deux maternités de niveau III, une de niveau IIb et deux de niveau IIa selon le classement des maternités par le niveau de soins néonatals disponibles . Une passation entre l’équipe du VSAV et l’équipe de la maternité (en général une ou plusieurs sages-femmes) est alors réalisée et un double de la fiche d’intervention est donnée.

Pour devenir chef d’agrès, plusieurs formations sont nécessaires. Une formation initiale militaire et maritime est dispensée au Centre d’instruction naval de Saint Mandrier. Ensuite, une formation élémentaire de onze semaines est dispensée à l’école des marins-pompiers de la marine. Celle-ci permet aux marins-pompiers d’armer les VSAV et les engins de lutte contre l’incendie en tant qu’équipier. La formation du secouriste équipier comprend un exposé interactif sur l’accouchement inopiné et les hémorragies génitales fait par un médecin du BMPM d’une durée d’environ 3 heures. Deux niveaux de formation de chefs d’agrès existent : le niveau III et le niveau IV. La formation complémentaire de chef d’agrès de niveau III, d’une durée de sept semaines est possible après 4 à 5 ans d’expérience en tant que secouriste équipier. Deux mises en situation avec mannequin sont alors pratiquées : convulsions chez la femme enceinte et accouchement inopiné.

MATERIELS ET METHODE 

Afin de répondre à ces objectifs, une étude descriptive, multicentrique a été réalisée. Un questionnaire anonyme a été utilisé comme outil de recueil de données. Pour construire ce questionnaire, [ANNEXE IV] une phase pré-exploratoire a été nécessaire. Il a fallu déterminer qu’elles étaient les informations ciblées et pertinentes qui devaient être recueillies par un service d’urgence lors de la prise en charge d’une femme enceinte. Un entretien avec un formateur de chefs d’agrès et plusieurs échanges avec un médecin du BMPM ont été réalisés.

La lecture de plusieurs documents de référence a été nécessaire : le guide opérationnel des secours à la personne du BMPM rédigé en 2013 par le médecin Daniel Meyran (6) et des recommandations formalisées d’expert concernant les urgences obstétricales extra- hospitalières éditées par la Société Française d’Anesthésie Réanimation (SFAR) et la Société Française de Médecine d’Urgence (SFMU) en 2010 (8). Les critères du score de Malinas A, utilisés dans la régulation téléphonique, ont aussi été pris en compte .

Le questionnaire comprenait trois parties :
– la première partie était composée de renseignements permettant d’identifier les caractéristiques du chef d’agrès : caserne, âge, sexe, année(s) d’expérience(s), niveau de formation du chef d’agrès.
– la seconde partie était composée de treize questions, chacune portant sur une information ciblée et pertinente à demander à la femme enceinte. Pour chacune de ces informations, il était demandé la fréquence de demande, ainsi que la destination de la transmission, et le cas échéant, les raisons pour lesquelles l’information n’était pas transmise. Les 13 informations retenues étaient :
▪ la date prévue d’accouchement (6) (9)
▪ le nombre d’embryons (6)
▪ la gestité (6) (9)
▪ la parité (6) (9)
▪ l’antécédent de césarienne (8) (9)
▪ le caractère pathologique de la grossesse actuelle (6) (9)
▪ les mouvements actifs fœtaux (8) (9)
▪ les contractions (fréquence, durée, intervalle et intensité)(6) (8) (9)
▪ les métrorragies (6) (8) (9)
▪ la perte de liquide (6) (8) (9)
▪ la couleur du liquide (6) (9)
▪ l’envie de pousser (8)
▪ la présentation fœtale (6) (9)
– la dernière partie du questionnaire était composée de trois questions portant sur le contexte général de la prise en charge d’une femme enceinte : difficultés particulières, optimisation de la transmission et souhait d’un complément de formation.

La population cible était composée de la totalité des chefs d’agrès du BMPM, soit 602, dont 295 pour le secteur Sud et 307 pour le secteur Nord. Le terrain était composé de 15 CIS sur les 17 du BMPM de Marseille intra-muros. Le CIS du Frioul a été exclu pour des raisons pratiques de distribution et le CIS de Luminy a été considéré comme trop petit par les autorités du BMPM. Le critère d’inclusion était d’être chef d’agrès VSAV du BMPM. Le critère de non-inclusion était : les secouristes exerçant dans les VSAV mais n’ayant pas le niveau de formation de chef d’agrès. Le critère d’exclusion était les questionnaires sans réponses aux questions de la seconde partie. L’étude a pu se réaliser après l’accord du vice-amiral Charles-Henri Garié, commandant le BMPM et l’aide du Médecin en chef François Topin qui a planifié la distribution des questionnaires. Avant sa diffusion, le questionnaire a été testé auprès de 10 chefs d’agrès du CIS de Saint-Just. Les modifications ont porté essentiellement sur la forme.

Validité de l’étude

Intérêts

En 2005, une étude a été réalisée sur la formation des marins-pompiers de Marseille à l’accouchement inopiné (10). Les chiffres de 2009 montrent que 24 accouchements ont été réalisés par le BMPM, dont seulement 10 avant l’arrivée de l’ambulance de réanimation et de l’équipe médicale alors que le BMPM est intervenu pour 2269 femmes en couches en 2014 (1) (5). Seul 1.05% des femmes enceintes prises en charge ont accouché de manière inopinée. La prise en charge des femmes enceintes par le BMPM n’est donc pas centrée sur la pratique de l’accouchement inopiné. Le choix de l’étude s’est donc porté sur le recueil et la transmission des informations nécessaires au bilan de la femme enceinte, systématique lors d’une intervention, et réalisé par les chefs d’agrès. La lecture et l’élaboration des réponses aux questionnaires ont permis indirectement aux chefs d’agrès de bénéficier d’un rappel sur les informations à recueillir lors de la prise en charge des femmes enceintes. L’impact de cette étude sur la qualité du recueil et de la transmission est difficilement mesurable. La sage-femme doit « être capable de travailler en coopération et en réseau avec les autres professionnels » (11). Cette étude a porté l’attention sur une catégorie de professionnels faisant partie du paysage périnatal à Marseille. Elle a permis de mettre en avant l’intérêt porté aux bilans réalisés par les chefs d’agrès. Actuellement, la plupart des professionnels de santé ne reçoivent pas de formation spécifique à la transmission, c’est pourquoi il est apparu important d’étudier la transmission d’information à l’arrivée d’une patiente prise en charge par le BMPM. Cette transmission doit en effet être rapide et exhaustive dans l’intérêt de la qualité et de la sécurité des soins .

Biais

Dans cette étude, des biais ont été identifiés. Même si le questionnaire a été l’outil de recueil considéré comme le plus pertinent, les réponses aux questions sont subjectives, notamment à cause de l’échelle de mesure des fréquences de recueil : « toujours, souvent, parfois, jamais ». Suivant la perception du chef d’agrès, les notions « souvent » et « parfois » peuvent différer. Le recueil étant basé sur du déclaratif, certaines réponses ont pu être orientées vers ce que le chef d’agrès pensait être des « bonnes réponses ». La distribution et l’élaboration des réponses aux questionnaires se sont effectués tous les matins lors du changement d’équipe, les chefs d’agrès n’étaient donc pas seuls pour répondre au questionnaire, cela a donc pu influencer les réponses. La présence d’une hiérarchie militaire a pu susciter l’obligation de répondre au questionnaire. La sélection des 13 informations ciblées et pertinentes a été effectuée par le chercheur, limitant l’objectivité de l’étude. Cette part de subjectivité est modérée par les références bibliographiques utilisées pour la sélection des informations.

Limites

L’étude quantitative par questionnaire a limité l’exploration des réflexions personnelles, des valeurs et des facteurs humains. L’analyse des difficultés rencontrées par les chefs d’agrès aurait pu être plus développée grâce aux techniques d’entretiens.

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Table des matières

INTRODUCTION
MATERIELS ET METHODE
RESULTATS
1. Caractéristiques de la population étudiée
2. Recueil et transmission des informations ciblées et pertinentes
3. Difficultés rencontrées lors de la prise en charge, propositions d’optimisation et souhait de formation
4. Evaluation de la qualité du recueil et de la transmission
ANALYSE ET DISCUSSION
1. Validité de l’étude
1.1. Intérêts
1.2. Biais
1.3. Limites
1.4. Généralisation des résultats
2. Analyse et discussion des principaux résultats
2.1. Caractéristiques de la population étudiée
2.2. Le recueil d’informations
2.3. La transmission des informations
2.4. Evaluation de la qualité du recueil et de la transmission
2.5. Raisons pour lesquelles les informations ne sont pas connues et difficultés rencontrées
2.6. La transmission interprofessionnelle
2.7. L’attention des sages-femmes
3. Propositions
3.1. Une fiche bilan complémentaire
3.2. La formation des étudiants sages-femmes
3.3. La formation des chefs d’agrès
3.4. Perspectives
CONCLUSION
BIBLIOGRAPHIE
ANNEXES

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