Rappel Embryologique
Les ébauches des membres apparaissent au début de la première semaine, les bourgeons des membres inférieurs apparaissent un peu plus tard que ceux des membres supérieurs et conservent ces retards tout au long du développement. Les palettes des pieds se forment à la 6e semaine, la formation des orteils se présente sous forme de sillons irradiés. Parallèlement à l’évolution de la morphogenèse extérieure, on assiste à une condensation mésenchymateuse dans les bourgeons des membres et vers la 6e semaine, les matrices cartilagineuses préfigurant les os du membre sont reconnaissables. L’ossification des os des membres se fait par ossification enchondrale, c’est à dire une évolution en 3 phases:
• une phase mésenchymateuse pendant les deux premiers mois de la vie intra – utérine ;
• une phase cartilagineuse ;
• une phase osseuse, avec intervention des cartilages de croissance (du 50e jour à 90e jour).
La croissance du pied se fait d’une façon exponentielle:
• à deux mois et demi, le pied mesure 4,5mm,
• à quatre mois, il est de 45mm.
A la naissance, la diaphyse osseuse est habituellement complètement ossifiée mais les deux extrémités, les épiphyses, sont encore cartilagineuses. Et une plaque cartilagineuse va persister temporairement entre les centres d’ossification diaphysaire et épiphysaire: c’est la cartilage de conjugaison. La croissance du pied se caractérise par deux types de noyaux d’ossification :
• les uns sphéroïdes présentant une croissance rayonnante centrifuge (astragalienne et calcanéenne),
• les autres prismatiques avec croissance longitudinale, proximo-distale pour les phalanges et le premier métatarsien ; disto-proximale pour les 4 métatarsiens.
A la naissance, seuls les points d’ossification de l’astragale, du calcanéum, des diaphyses métatarsiennes et phalangiennes sont présents, parfois celui du cuboïde. Et le pied mesure 75mm avec une ossification de 25% et une large divergence astragalocalcanéenne. Les articulations synoviales apparaissent à la 5e semaine, et à la 6e semaine, les cavités articulaires. A la 7e semaine apparaissent les premiers éléments musculaires. Puis les éléments se différencient en deux contingents : ventral postérieur (fléchisseur) et dorsal antérieur (extenseur) et vont perdre leur caractère métamérique et deviennent ensuite des tissus musculaires. Les nerfs se développent parallèlement et établissent des connexions intimes avec les cellules musculaires.
Le squelette du pied normal
Le squelette du pied est formé par 26 os divisés en 3 groupes : le tarse, le métatarse et les phalanges.
a. Le tarse : Il est composé de 7 os, disposés en 2 rangées:
-le tarse postérieur, constitué de 2 os superposés:
• l’astragale ou talus: articulaire avec l’extrémité inférieure des 2 os de la jambe (articulation tibio-tarsienne ou de la cheville),
• le calcanéum ou calcaneus: sous l’astragale et articulaire avec lui (articulation sous astragalienne) le débordant en arrière formant le relief du talon,
-le tarse antérieur, constitué de 5 os:
• le scaphoïde en dedans articulaire avec l’astragale (articulation médio tarsienne de CHOPART), ou os naviculaire,
• le cuboïde en dehors du scaphoïde articulaire avec le calcanéum (articulation, médio – tarsienne de CHOPART),
• les 3 cunéiformes, comptés de dedans en dehors, interposés entre le scaphoïde et les 3 premiers métatarsiens.
b. Le métatarse : Il est formé de 5 métatarsiens:
• numérotés de dedans en dehors,
• articulaires avec les 3 cunéiformes et le cuboïde (articulation tarso métatarsienne de LISFRANC).
c. Les phalanges : Ils forment le squelette des orteils:
• au nombre de 2 pour le premier orteil,
• et de 3 pour les autres et ils sont numérotés d’arrière en avant.
Les mouvements du pied en général
Les articulations du pied sont nombreuses et complexes, ont un double rôle : d’une part elles orientent le pied, en complément de l’articulation tibio-tarsienne, d’autre part elles modifient la courbure de la voûte plantaire, l’adaptant aux irrégularités du sol, fonctionnent en synergie et additionnent leurs amplitudes, certaines sont prédominantes:
– l’articulation sous-astragalienne ou astragalo-calcanéenne,
– l’ariculation médio-tarsienne de CHOPART,
– l’articulation tarso-métatarsienne de LISFRANC;
D’autres ont un rôle plus limité:
– les articulations inter-cunéennes, scapho-cuboïdiennes,
– les articulations métatarso-phalangiennes et interphalangiennes,
Les mouvements d’adduction-abduction, s’effectuent autour d’un axe transversal, la position de référence étant l’axe du pied dans le plan frontal. L’adduction porte la pointe du pied en dedans, l’abduction en dehors. Leur amplitude est de 30 à 45° pour chacun des deux mouvements, mais les autres articulations du membre inférieur (rotation axiale du genou lors de sa flexion, hanche) amplifient ces possibilités. Les mouvements de rotation axiale du pied, s’effectuent autour de l’axe longitudinal du pied, la position de référence étant le pied dans le plan horizontal. Le mouvement de supination porte la plante du pied en dedans et son amplitude est de 50°, le mouvement de pronation la porte en dehors et son amplitude est de 30°. Les mouvements d’éversion-inversion du pied qui combinent les deux types précédents sont les seuls qui existent en pratique:
– l’inversion associe adduction et supination, s’accompagne en général d’une flexion plantaire. Elle a pour muscles moteurs: les jambiers antérieur et postérieur, le triceps, les fléchisseurs des orteils,
– l’éversion associe abduction et pronation, s’accompagne en général d’une légère flexion interne de la cheville. Elle a pour muscles moteurs: l’extenseur commun des orteils, le péronier antérieur, les péroniers latéraux.
La physiologie de l’articulation du tarse postérieur
Les articulations sous-astragalienne et médio-tarsienne agissent en synergie pour adapter l’orientation du pied et la voûte plantaire par le jeu des différents os. Dans l’inversion, le couple scaphoïde- cuboïde est attiré en dedans, orientant ainsi l’avant pied en avant et en dedans, simultanément le scaphoïde s’élève et le cuboïde s’abaisse pour placer le pied en supination. Dans l’éversion le mouvement inverse se produit.
L’imagerie
a. L’échographie anténatale (38, 39, 40) : L’étude du pied in-utéro est facile, à partir de 16 semaines car le liquide amniotique est abondant et que le pied est suffisamment petit pour être vu dans son ensemble. L’échographie anténatale constitue l’élément essentiel pour le diagnostic précoce. L’âge moyen de diagnostic est de 23,6 semaines selon KATZ, mais une très grande prudence doit être observé car le pied normal semble être spontanément en varus. Une fois le diagnostic de PBVE confirmé, l’échographiste doit s’efforcer à chercher d’autres anomalies.
b. La radiographie(11, 41, 42, 43, 44) : A la naissance une très grande partie du pied est radiotransparente, et la radiographie est très discutée : c’est le « No man’s land » de DIMEGLIO. Pour certains, il faudra se contenter de mesures indirectes pour cerner la subluxation astragalo-scaphoidienne. Et pour d’autres, la radiographie bien faite permet d’étudier l’évolution en cours de traitement et peut déceler d’autres malformations. Deux incidences sont fondamentales (voir annexe) :
• la radiographie de profil en flexion dorsale maximale :
○ pour le pied normal:
– l’angle tibio-astragalien est de l’ordre de 90°,
– la divergence astragalo-calcanéenne est de 40 à 50°.
○ dans le pied bot varus équin :
– les axes du calcanéum et de l’astragale sont parallèles,
– la flexion dorsale est impossible, l’angle tibio-astragalien est ouvert à 105° même plus.
• la radiographie de face dorso-plantaire prétibiale:
○ pour le pied normal:
– la divergence astragalo-calcanéenne est de 40° ,
– l’angle astragalo -1ère métatarsien est ouvert de 10 à 15° et l’axe de l’astragale passe en dedans de celui du 1èr métatarsien
– l’axe du calcanéum se coïncide avec celui du 5ème métatarsien.
○ dans le PBVE :
– les 2 axes, celui de l’astragale et celui du calcanéum se superposent,
– l’axe de l’astragale se trouve très en dehors de celui du 1èr métatarsien.
c- Scanner- Imagerie par Résonance Magnétique (IRM) (45, 46) : Cette étude tomodensitométrique de l’arrière pied confirme le déplacement de la grosse tubérosité du calcanéum à proximité de la malléole externe. L’IRM apporte des informations précises sur les connaissances anatomopathologiques. En plus, elle permet de calculer le volume et l’axe de l’inertie de l’os naviculaire et des structures cartilagineuse. Ce volume est de 20% dans le pied bot, c’est-à-dire plus petit que celui du pied normal.
Les Moyens Thérapeutiques
Pour nos 209 PBVEC, seulement 95 pieds ont pu avoir un traitement orthopédique, soit 45,45 %, tandis que les 114, soit 54,55 % ont été traités directement par la chirurgie. Et parmi les 95 pieds qui ont subi un traitement orthopédique, 58 ont été opérés après échec, c’est-à-dire, 61,05 %, contre 38,96 % de réussite du traitement orthopédique. Dans les travaux de RASOARIMANANA C. (34), seulement 34 % des pieds ont subi une intervention chirurgicale. Pour P. FREDIANI et collaborateurs (81), sur 96 cas, 63,54 % ont du être opérés. L’équipe de A. A. S. YOUSSEF (75), a étudié 269 cas de PBVEC, et l’orthopédie a été efficace dans 46,47 %. J. BAHUAUD (82), dans une étude faite en milieu tropical, a trouvé sur 61 PBVEC : 44,26 % de réussite en orthopédie. Ainsi, nous pourrions dire que nos résultats ne montrent pas une grande différence par rapport à ces auteurs.
Le type de déformation
D’après notre travail, le type II est le plus nombreux avec 38,28 % des cas, puis le Type IV, avec 29,18 %. Nos résultats expliquent la difficulté de prise en charge quand les déformations secondaires apparaissent parce que les pieds bots de type I et II répondent mieux au traitement par rapport à ceux plus sévères. Pour RASOARIMANANA C. (34), elle a adopté 2 classes : le PBVEC réductible (71,42 %) et le PBVEC irréductible (28,57 %). A. DAL. MONTE (48) et collaborateurs ont adopté la classification suivante :
. Groupe I: corrigible manuellement ;
. Groupe II: partiellement corrigible manuellement ;
. Groupe III : pas corrigible manuellement.
Et ils ont 10 % du groupe I, 36 % pour le groupe II et 54 % pour le groupe III. De même pour P. FREDIANI et collaborateurs (81), ils ont 50,82 % du groupe II et 49,18 % du groupe III. RANDRIAMBELONTSOA J. F. (77) a adopté la même classification que la notre, et a trouvé les résultats suivants: 23,53 % type II, 29,41 % type III, et 47,06 % type IV qui ne concordent pas avec nos résultats. On peut en conclure que cette variation pourrait être due aux différents critères de recrutement, à l’âge du patient et au nombre de cas étudiés.
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Table des matières
INTRODUCTION
PREMIERE PARTIE : RAPPEL ET REVUE DE LA LITTERATURE
I. QUELQUES RAPPELS
I. A. Rappel Embryologique
I. B. Rappel Anatomique
I. B. 1. Le cou de pied
I. B. 2. Le squelette du pied normal
I. B. 3. Les articulations du pied normal
I. B. 4. Les muscles et les ligaments du pied normal
I. B. 5. La vascularisation et l’innervation
II. LA BIOMECANIQUE DU PIED NORMAL
II. A. La physiologie de l’articulation de la cheville
II. B. La physiologie des articulations du pied
II. B. 1. Les mouvements du pied en général
II. B. 2. La physiologie de l’articulation du tarse postérieur
II. B. 3. La physiologie de l’articulation de LISFRANC
II. B. 4. La physiologie de l’articulation métatarso-phalangienne et interphalangienne des orteils
II. C. La statique du Pied
II. D. La dynamique du Pied
II. D. 1. La voûte plantaire dans la station debout
II. D. 2. La voûte plantaire dans la marche
III. LA CROISSANCE DU PIED
IV. GENERALITES SUR LE PIED BOT VARUS EQUIN CONGENITAL
(PBVEC)
IV. A. Quelques définitions
IV. B. Etiopathogénie du PBVEC
IV. B. 1. Théorie embryogénique
IV. B. 2. Théorie Mécanique
IV. B. 3. Théorie neuromusculaire
IV. B. 4. Théorie Myopathique
IV. B. 5. Autres facteurs
IV. C. Anatomophysiopathologie du PBVEC
IV. C. 1. Déformations ostéo-articulaires
IV. C. 2. Rétraction des parties molles
IV. C. 3. Anomalies vasculo-nerveuses
IV. D. Diagnostic du PBVEC
IV. D. 1. Etude clinique du PBVEC
IV. D. 2. L’imagerie
IV. D. 3. Diagnostic différentiel
IV. E. L’évolution du PBVEC
IV. F. Le traitement du PBVEC
IV. F. 1. Le but
IV. F. 2. Les moyens thérapeutiques
IV. G. Complications thérapeutiques
IV. G. 1. Les complications orthopédiques
IV. G. 2. Les complications chirurgicales
DEUXIEME PARTIE : NOS OBSERVATIONS
I. MATERIELS ET METHODES
I. A. Objectif
I. B. Cadre d’étude
I. C. Méthodes et Patients
I. C. 1. Critères d’inclusion
I. C. 2. Critère d’exclusion
I. C. 3. Les traitements appliqués
I. C. 4. Les paramètres à évaluer
I. C. 5. Patients
I. C. 6. Tableau et graphiques représentant nos patients
II. NOS OBSERVATIONS
III. LES RESULTATS
III. A. Les critères d’évaluation
III. B. Les résultats proprement dits
III. B. 1. Résultat selon le type de déformation
III. B. 2. Le résultat selon l’âge
III. B. 3. Le résultat selon la technique appliquée
III. B. 4. Résultat selon la technique chirurgicale appliquée
III. B. 5. Le résultat de la technique chirurgicale selon que le pied a subi une préparation orthopédique préalable ou non (1ère intervention)
III. B. 6. Le résultat de la technique chirurgicale selon que le pied a été déjà opéré ou non
III. B. 7. Résultat selon la régularité au traitement
III. B. 8. Résultat de la technique chirurgicale selon l’âge de décision
opératoire
III. B. 9. Résultat selon l’âge de dépistage
III. B. 10. Résultat dans l’ensemble
TROISIEME PARTIE COMMENTAIRES, DISCUSSIONS ET SUGGESTIONS
I. COMMENTAIRES ET DISCUSSIONS
I. A. Le sexe
I. B. L’âge
I. C. Le siège de l’atteinte
I. D. Le type de déformation
I. E. Les moyens thérapeutiques
I. E. 1. Les types de moyen thérapeutique en orthopédie
I. E. 2. A propos des techniques chirurgicales
I. F. Sur la notion de PBVEC dans la famille
I. G. Sur la malformation associée
I. H. Sur la durée de séjour à l’hôpital
I. I. Sur la régularité au traitement
I. J. Selon le recul
I. K. Sur le résultat final
II. SUGGESTIONS
CONCLUSION
ANNEXES
BIBLIOGRAPHIES
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