HISTORIQUE ET EVOLUTION DES IDEES
Le mot éclampsie vient du grec « eklempein » qui signifie « explosion, apparaître soudainement ». Le terme aurait été employé par Hippocrate pour exprimer « l’exaltation des propriétés vitales, la scintillation du feu de la vie qui accompagne la puberté ». Mais Chesley, cité par Hayat, attribue l’origine du mot au français Francis de la Croix Sauvage (Pathologique Méthodique édition 1759), qui désignait sous ce terme les états convulsifs [23]. Puis on l’employa pour désigner l’épilepsie et par analogie on s’en servit pour qualifier les convulsions épileptiformes survenant chez les femmes enceintes. L’éclampsie est une pathologie décrite depuis l’antiquité. L’approche physiopathologique et thérapeutique a connu au cours des siècles une nette évolution avec les progrès significatifs de l’art obstétrical. Beaucoup d’auteurs comme Hippocrate et Galien (IVème siècle avant J.C.), se sont intéressés à l’éclampsie sans approfondir leurs recherches. En 1694, Mauriceau remarquait la fréquence de l’affection chez les primipares. En 1848, Levier évoquait, le premier, les rapports existant entre l’albumine et l’éclampsie chez la femme enceinte. En 1885, Ballantyre mentionnait que l’éclampsie s’accompagnait d’hypertension artérielle ; c’est en 1899 que Stoganoff rapportait les premiers résultats qu’il avait obtenus en appliquant un traitement médical de l’éclampsie [39]. Les auteurs européens ont donc progressivement cerné les différents aspects de l’éclampsie réduisant ainsi son incidence [39]. Dans les pays en développement, cette incidence reste toujours importante du fait d’un contexte sanitaire et socio-culturel différent, caractérisé par : l’absence d’une bonne couverture sanitaire, le bas niveau socio-économique, l’analphabétisme et l’ignorance favorisant certains rituels lors de la grossesse (interdits alimentaires, thérapeutiques traditionnelles). En réalité, l’éclampsie a une explication toute particulière dans la société traditionnelle sénégalaise, au même titre que la psychose puerpérale. Ainsi, Dao [23] montrait dans sa thèse comment ces pathologies sont attribuées à ce que l’on appelle le « MERET » ou sang des couches qui « monterait à la tête de l’accouchée », lorsque celle-ci n’a pas respecté les rituels de la grossesse. Actuellement, les études sur l’éclampsie s’orientent davantage vers les aspects immunologiques de cette affection, dès lors que les données épidémiologiques, cliniques et thérapeutiques ont été assez bien cernées [47].
La phase d’invasion
Elle est caractérisée par l’apparition de contractions fibrillaires localisées à la face et au cou. La face est animée de grimaces, de trémulations des paupières, de mouvements saccadés de la langue projetée au-dehors. Les globes oculaires roulent dans l’orbite et finissent par s’immobiliser latéralement. Les contractions s’étendent comme une onde aux membres supérieurs et atteignent les mains. Le pouce se met en flexion et en adduction, les autres doigts se ferment sur lui, la main se met en pronation. Les membres inférieurs ne sont pas atteints. Cette phase dure une minute environ
Hématome rétroplacentaire (HRP)
Il est décrit comme un décollement prématuré d’un placenta normalement inséré, dû à un hématome de taille variable, situé sur la plaque basale du placenta. Cet hématome interrompt une partie ou la totalité de la circulation utéro-placentaire. Son apparition est brutale et imprévisible. Selon la taille du décollement, on peut observer une souffrance fœtale aigue ou alors une mort fœtale in utero. Il met également en jeu le pronostic vital maternel par ses complications hémorragiques. Les signes cliniques évocateurs d’un hématome rétroplacentaire sont une douleur brutale intense en coup de poignard avec irradiation lombaire et dorsale, continue et permanente, associée ou non à des métrorragies noirâtres modérées. L’utérus est hypertonique en « ventre de bois », douloureux et augmenté de volume à la palpation avec une hyperesthésie cutanée ; les mouvements fœtaux sont absents ou diminués dans les formes incomplètes. Ce tableau peut survenir dans un contexte d’HTA chronique ou gravidique ou alors en dehors de tout contexte de syndrome vasculo-rénal. Le diagnostic est avant tout clinique. C’est une urgence extrême dont la sanction thérapeutique est l’extraction fœtale [2, 52, 58].
Insuffisance rénale aigue (IRA)
Elle complique 0,8 à 7,7% des prééclampsies et éclampsie et 8% des HELLP syndromes [13,22]. L’insuffisance rénale est liée à la réduction de la filtration glomérulaire et du flux plasmatique rénal qui est très marquée dans la prééclampsie sévère. Elle peut être due au volume plasmatique effondré, à la vasoconstriction artérielle et aux lésions endothéliales. Elle se voit essentiellement en cas d’éclampsie, d’HRP, de HELLP syndrome mais également en dehors de ces complications. Le diagnostic de l’IRA est retenu devant des critères tels qu’une oligo-anurie à la clinique et une diminution de la clairance de la créatinine à la biologie. Cette complication est associée à une mortalité périnatale dans 15 à 38 % des cas [58].
Hématomes intra-cérébraux
Moins fréquents, ils ne représentent que 10% des lésions macroscopiques, leurs caractères péjoratifs semblent être bien démontrés. En effet, 60 à 80% des décès survenant moins de 48h après le début des crises convulsives sont associés à des lésions hémorragiques macroscopiques. Au scanner cérébral, ils apparaissent sous forme d’hyperdensités avant et après injection du produit de contraste. Elles peuvent être soit sous forme de pétéchies diffuses au niveau de la substance blanche, soit sous la forme d’hémorragie ventriculaire [17, 71].
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Table des matières
INTRODUCTION
PREMIERE PARTIE : REVUE DE LA LITTERATURE
I. HISTORIQUE ET EVOLUTION DES IDEES
II. PHYSIOPATHOLOGIE
1. ANOMALIE DE LA PLACENTATION ET ISCHEMIE PLACENTAIRE
2. DYSFONCTIONNEMENT ENDOTHELIAL
3. DE LA PREECLAMPSIE A L’ECLAMPSIE
III. EPIDEMIOLOGIE
1. FREQUENCE
2. FACTEURS DE RISQUE
IV- DIAGNOSTIC
1. DIAGNOSTIC POSITIF
1.1. Signes cliniques
1.2. Signes paracliniques
1.2.1. Eléments d’évaluation du retentissement maternel
1.2.2. Eléments d’évaluation du retentissement fœtal
1.3. Formes cliniques
1.3.1. Selon la symptomatologie
1.3.2. Selon la période de survenue
Eclampsie antépartum
Eclampsie per-partum
Eclampsie du post-partum
2. DIAGNOSTIC DIFFERENTIEL
2.1. Le paludisme grave
2.2. La maladie épileptique
2.3. La méningite et la méningo-encéphalite
2.4. La thrombophlébite cérébrale
2.5. Le processus expansif intra crânien
2.6. L’hypertension artérielle maligne
2.7. L’intoxication à l’eau
2.8. L’embolie amniotique
2.9. La crise d’hystérie
2.10. La spasmophilie
3. EVOLUTION – COMPLICATIONS
3.1. Complications maternelles
3.1.1. Hématome rétroplacentaire (HRP)
3.1.2. HELLP syndrome
3.1.3. Insuffisance rénale aigue (IRA)
3.1.4. Coagulation intra-vasculaire disséminée (CIVD)
3.1.5. Complications pulmonaires
3.1.6. Hémorragie du post-partum immédiat
3.1.7. Complications cérébrales
3.2. Complications fœtales
3.2.1. Mort fœtale in utero
3.2.2. Prématurité
3.2.3. Décès néonatal précoce
3.2.4. Séquelles cérébrales
V. PRONOSTIC
1. PRONOSTIC MATERNEL
1.1. Pronostic immédiat
1.2. Pronostic à long terme
2. PRONOSTIC PERINATAL
VI. PRISE EN CHARGE THERAPEUTIQUE
1. PRINCIPES THERAPEUTIQUES
1.1. Organisation de la prise en charge
1.2. Prise en charge inter-hospitalière
2. PRISE EN CHARGE CURATIVE
2.1. Gestes d’urgence
2.2. Traitement et prévention des crises
2. 3. Traitement antihypertenseur
2.4. Prise en charge obstétricale
2.5. Voie d’accouchement
3. LE TRAITEMENT PREVENTIF
3.1. Prévention primaire
3.2. Prévention secondaire
DEUXIEME PARTIE : NOTRE TRAVAIL
I. METHODOLOGIE
1. CADRE D’ETUDE
1.1. Situation géographique et cadre général
1.2. Description du service de gynécologie obstétrique
1.3. Description du service de réanimation
2. Type d’étude
3. POPULATION D’ETUDE
4. INCLUSION
4.1. Critères d’inclusion
4.2. Critères de non inclusion
5. STRATEGIE DE COLLECTE DES DONNEES
6. VARIABLES ETUDIEES
7. ANALYSE
II. RESULTATS
1. RESULTATS DESCRIPTIFS
1.1. Fréquence
1.2. Caractéristiques sociodémographiques
1.2.1. Age maternel
1.2.2. Parité
1.2.3. Profession
1.2.4. Statut matrimonial
1.2.5. Zone de résidence
1.3. Caractéristiques cliniques
1.3.1. Suivi de la grossesse
1.3.2. Mode d’admission
1.3.3. Antécédents médicaux
1.3.4. Terme de la grossesse
1.3.5. Hypertension artérielle
1.3.6. Œdèmes
1.3.7. Protéinurie
1.3.8. Période de survenue des crises
1.3.9. Nombre de crises
1.4. Données paracliniques
1.4.1. Bilan biologique
1.4. 2. Imagerie
1.5. Aspects thérapeutiques
1.5.1. Traitement antihypertenseur
1.5.2. Traitement anti convulsivant
1.5.3. Prise en charge obstétricale
1.5.4. Prise en charge en réanimation
1.6. Aspects pronostiques
1.6.1. Issue maternelle
1.6.2. Issue fœtale
2. RESULTATS ANALYTIQUES
2.1. Facteurs pronostiques maternels
2.1.1. Rôle de l’âge
2.1.2. Rôle de la parité
2.1.3. Rôle de l’âge gestationnel
2.1.4. Rôle du suivi prénatal
2.1.5. Rôle du nombre de crises
2.1.6. Lien avec le bilan biologique
2.2. Facteurs pronostiques périnatals
2.2.1. Age gestationnel et mortalité périnatale
2.2.2. Pression artérielle diastolique à l’entrée et mortalité périnatale
2.2.3. Complications maternelles et mortalité périnatale
2.2.4. Relation entre l’Apgar de la naissance et une PAD sévère
2.2.4. Relation entre l’existence d’une anémie pendant la grossesse et la mortalité périnatale
III. COMMENTAIRES
1. PROFIL EPIDEMIOLOGIQUE
1.1. Prévalence
1.2. L’âge
1.3. La parité
1.4. Facteurs socio-économiques
2. PROFIL CLINIQUE
2.1. Suivi de la grossesse
2.2. Mode d’admission
2.3. Terme de la grossesse
2.4. Tension artérielle
2.5. Œdèmes
2.6. Période de survenue des crises
2.7. Protéinurie à la bandelette
3. PROFIL PARACLINIQUE
4. ASPECTS PRONOSTIQUES
4.1. Pronostic maternel
4.2. Pronostic fœtal
5. PRISE EN CHARGE THERAPEUTIQUE
5.1 Traitement médical
5.2. Prise en charge obstétricale
5.3. Prise en charge en réanimation
6. PREVENTION
CONCLUSION ET RECOMMANDATIONS
REFERENCES
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