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Analyse de l’étude
Difficultés de l’étude
Dans un premier temps, il a fallu acquérir les connaissances nécessaires à l’élaboration du sujet : la physiopathologie, les traitements, les paramètres vitaux principaux à surveiller, les examens nécessaires (VEMS, CVF, ECBC…) La principale difficulté a été de réunir les textes nécessaires à cette étude du fait de la diversité des manifestations cliniques de la maladie : certains articles ont été retrouvés dans la rubrique obstétrique, d’autres dans celle de la fertilité, de la pneumologie, de la gastro-entérologie, mais aussi de l’endocrinologie.
De plus, l’amélioration récente de la qualité de soin et de vie des patientes atteintes fait que les projets de grossesses sont en récente expansion : parfois, les articles ne font donc état que d’un faible échantillon, ne pouvant pas rendre les résultats significatifs.
Limites de l’étude
Peu de limites ont été fixés pour cette étude, du fait de la nécessité d’avoir une vue d’ensemble de la relation entre le type d’atteinte de mucoviscidose et l’impact sur l’initiation et la prise en charge de la grossesse : pas de limite de sévérité d’atteinte, de type d’initiation de la grossesse, de présence de greffe pulmonaire. Ceci a permis de réunir plus de textes pour étoffer l’étude.
Biais de sélection
La sélection des articles, basée sur la lecture du titre et du résumé, représente un premier biais pouvant en évincer certains utiles dont le titre n’était pas représentatif de l’article traité.
De plus, seuls les articles rédigés en français, en anglais et dont la version intégrale était disponible ont été retenus, écartant ainsi d’autres textes pouvant être utiles au sujet. De plus, les rubriques disponibles pour trouver des articles appropriés étant nombreuses, il est fort probable que certaines n’est pas été explorées.
Biais linguistique
La majorité des textes étant en anglais, il est légitime de se demander si des erreurs de traduction et de compréhension ont été faites.
Discussion
Programmation de la grossesse
La mucoviscidose cause une baisse de la fertilité du fait de la présence de cycles anovulatoires (IMC insuffisant), et de l’épaississement de la glaire cervicale. Cependant, le taux de grossesse spontanée étant quand même supérieur à 50%, la nécessité d’une contraception orale pour éviter la survenue d’une grossesse à un moment défavorable est indiscutable (Johannesson, 2001).
Pour les couples consultant pour infertilité sur une période supérieure à 2 ans, un test de Hühner sera réalisé (Barrant, 2012). Celui-ci consiste à étudier l’interaction entre les spermatozoïdes et la glaire cervicale au microscope, à J12-13 du cycle (48h avant la période d’ovulation), 8h après un rapport sexuel (sans préservatif ni lubrifiant) faisant suite à une abstinence sur une période de 3-5 jours, sans toilette vaginale.
Un score d’Insler sur 12 points est réalisé pour qualifier la glaire cervicale, en se basant sur les critères suivants :
– Ouverture du col : entrouvert = 1, ouvert = 2, béant = 3
– Abondance de la glaire : faible = 1, moyenne = 2, importante = 3
– Filance de la glaire : 1-2cms = 1, 2-4 cms = 2, du col à la vulve = 3
– Limpidité de la glaire : trouble = 1, opalescente = 2, eau de roche = 3
Un score compris entre 0 et 3 est considéré comme nul, entre 4 et 7 comme insuffisant, entre 8 et 10 comme bon et entre 11 et 12 comme excellent. Ceci est confronté au nombre de spermatozoïdes présents par champ, dont le pourcentage de spermatozoïdes mobiles, mobiles progressifs, immobiles ainsi que le pH de la glaire.
Le test est qualifié de positif (glaire « non hostile » aux spermatozoïdes) si le score de Insler est supérieur à 8, le pH est compris entre 6,5 et 8,5, et qu’au moins 20 spermatozoïdes mobiles sont retrouvés par champ. Le test est qualifié de négatif dans les cas contraires.
Prise en charge de la grossesse Fonction pulmonaire
La fonction pulmonaire est physiologiquement altérée lors d’une grossesse : la majorité des parturientes présentent une dyspnée. Chez les patientes atteintes de mucoviscidose, cette altération est majorée du fait que l’élargissement de la cage thoracique est réduit (musculature tendue), de la baisse du volume résiduel (élévation du diaphragme suite à l’augmentation du volume utérin), et de la relaxation des muscles de l’arbre trachéo-bronchique (suite à l’imprégnation hormonale en progestérone) (Johannesson, 2002). Une kinésithérapie respiratoire est indispensable pour un drainage bronchique, pouvant être pluri-quotidienne si besoin. Une ventilation non invasive peut être mise en place si besoin.
En cas de sur-infection bronchique, ne pas hésiter à les traiter de façon agressive : hospitalisation, cures antibiotiques IV, et continuer l’aérosolthérapie (Durieu, 1999).
La consultation avec l’anesthésiste se fera plus précocement, à 12-16 SA du fait d’une probabilité d’accouchement prématuré plus importante, et sera renouvelée à 26 SA évaluer la fonction respiratoire et l’augmentation des risques (saturation basse, insuffisance respiratoire…) (Edenborough et al, 2008)
Fonction digestive
Au niveau pancréatique, le dépistage du diabète gestationnel doit se faire entre 12 et 18 SA. Si les premiers résultats reviennent négatifs, un nouveau contrôle est fortement conseillé entre 24 et 30 SA (Michel et Muller, 2012). De plus, il ne faudra pas hésiter à augmenter les doses d’insuline en cas d’antibiothérapie et de corticothérapie causant un déséquilibre glycémique (Rogers, 2013).
Les enzymes pancréatiques pour les insuffisants pancréatiques exocrines seront à poursuite à chaque collation (Durieu, 2003).
Certains textes préconisent l’arrêt de l’acide ursodésoxycholique durant la grossesse du fait de son effet tératogène (Durieu, 2003), mais le recul actuel n’a pas confirmé cet effet : le traitement sera donc poursuivi sur le pronostic hépatique est en jeu.
Des dosages sériques permettront de dépister des carences et mettre en place une supplémentation vitaminique (notamment en vitamine K, important pour le risque hémorragique à l’approche de l’accouchement).
La prise de poids sera à surveiller : ne pas hésiter à ajouter des compléments caloriques si celle-ci est insuffisante.
Des conseils diététiques pourront se révéler nécessaires pour une prise de poids correcte (Michel et Mueller, 2012).
Transplantation et grossesse
Les traitements immunosuppresseurs, essentiels après une greffe, n’auraient pas d’effet tératogène sur le foetus et seraient donc possible durant la grossesse (Johannesson, 2010). Cependant, les doses nécessitaient parfois d’être augmentées, du fait d’épisodes de rejets aigus.
Il faudra aussi tenir compte des complications associées telles que les infections pulmonaires (notamment à Burkholderia cepacia, germe développant de nombreuses résistances aux antibiotiques), et celles propres à la mucoviscidose comme la bronchiolite oblitérante, l’hypertension artérielle pulmonaire, la bronchiectasie.
Les femmes devront donc être informées des risques de démarrer une grossesse après transplantation, tels que le rejet, la dégradation de la fonction respiratoire, l’éventuelle nécessité d’une nouvelle greffe après grossesse, du décès possible en post-partum.
Conclusion
Les deux sous-objectifs initiaux de ce mémoire étaient de définir les paramètres vitaux à satisfaire pour démarrer une grossesse et la façon de l’initier, ainsi qu’identifier les paramètres à surveiller sur le plan clinique concernant la mucoviscidose et obstétrical pour mener à terme une grossesse. La mucoviscidose entraîne une baisse de la fertilité mais les grossesses spontanées restent très fréquentes. Les textes de la littérature s’accordent pour conseiller une programmation de la grossesse, afin d’évaluer la sévérité de l’atteinte, la mesure des paramètres respiratoires, identifier les pathologies associées (telle que le diabète insulino-dépendant ou non par exemple), et permettre la correction des carences.
Une consultation pré-conceptionnelle doit être revue afin de dépister les mutations les plus fréquentes chez le conjoint, et ainsi décider de la façon d’initier la grossesse :
– Aucune mutation n’est retrouvée : si aucun problème de fertilité n’est constaté, la grossesse se fera de façon spontanée, et aucun diagnostic prénatal n’est recommandé. Cependant, il faudra expliquer au couple que le risque nul existe pas mais est celui de la population générale, car seules les mutations les plus fréquentes sont recherchées, et d’autres mutations restent certainement à découvrir
– Si une mutation est retrouvée : alors le couple peut accéder au diagnostic prénatal par ponction de villosité choriale en cas de grossesse spontanée, en les informant des risques associés (notamment de fausse-couche), ou bien au diagnostic pré-implantation en cas de procédure de fécondation in vitro (FIV)
Cette consultation permettra de discuter les thérapeutiques actuellement en cours, notamment sur leur tératogénicité, et l’augmentation des posologies si nécessaire.
Enfin, une grossesse devra se concevoir sur une période de stabilité clinique sur les plans respiratoires, infectieux et nutritionnels, et sera différée dans les cas contraires, si l’état est jugé améliorable par le clinicien.
Des contre-indications communes à l’initiation de la grossesse ont été retrouvées dans certains textes, telles que :
– VEMS < 50%
– Colonisation pulmonaire à certains germes résistants (Burkholderia capecia)
– Hypertension artérielle pulmonaire
– IMC < 18 kg/m2
Pour le suivi de grossesse, une prise en charge pluridisciplinaire est essentielle, avec une communication et collaboration étroite entre l’équipe obstétricale et clinique de la mucoviscidose.
Pour la mucoviscidose, une surveillance clinique mensuelle est recommandée sur les deux premiers trimestres et bimensuelle sur le dernier trimestre. Lors de ces visites seront réalisés :
– L’évaluation des paramètres respiratoires (VEMS, CVF)
– Un ECBC
– Traitement IV en cas d’infection
– Auscultation coeur / poumons
– Mesure de la tension artérielle, poids
– Dosages sériques (paramètres infectieux, glucose, vitamines, fer)
– Programmation des rendez-vous ultérieurs (kinésithérapeute, diététicien, obstétricien, clinicien, psychologue si besoin)
Pour la grossesse, la surveillance obstétricale reste classique, mais une échographie mensuelle est conseillée pour évaluer le retentissement de la maladie sur le foetus et donc la croissance foetale.
Les carences devront être corrigées et les thérapeutiques continuées, les hospitalisations ne devront pas être hésitées si nécessaires.
Il n’est pas retrouvé de consensus sur le lieu d’accouchement, mais un niveau III serait préférable vue la surveillance rapprochée à effectuer et les possibles complications pouvant survenir (RCIU, MAP, accouchement prématuré, décompensation sur le plan respiratoire…)
Aucune voie d’accouchement n’est à privilégier, mais en cas de voie basse, il est préférable de raccourcir la 2nd phase du travail, et les césariennes se feront donc pour des raisons obstétricales. Cependant, un accouchement peut être programmé en cas de mauvaise tolérance clinique en fin de grossesse.
La grossesse post greffe est possible en cas de bonne tolérance : un intervalle de temps de 2 ans est recommandé entre transplantation et grossesse.
Les objectifs de ce mémoire ont donc été atteints, et montrent que la grossesse dans ce type de maladie doit être discutée et prise en charge au cas par cas en fonction de la sévérité de l’atteinte et des pathologies associées.
Il sera intéressant de comparer ces séries de cas retrouvées à celles qui se réaliseront d’ici quelques années quand la population née avec l’intégration au test de Guthrie du dépistage systématique de la mucoviscidose sous accord parental depuis 2002, permettant une prise en charge précoce et avant toute apparition de signes cliniques, sera arrivée à l’âge adulte, afin de voir si une différence sur la prise en charge et le pronostic de la mucoviscidose et la grossesse est à noter.
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Table des matières
Matériel et Méthode
Résultats
I. Programmation de la grossesse
II. Prise en charge de la grossesse
III. Transplantation et grossesse
IV. Prise en charge de l’accouchement
V. Pronostic à long terme
Analyse et Discussion
I. Analyse de l’étude
A. Difficultés de l’étude
B. Limites de l’étude
C. Biais de sélection.
D. Biais linguistiques.
II. Discussion
A. Programmation de la grossesse
B. Prise en charge de la grossesse
Fonction pulmonaire
Fonction digestive
C. Transplantation et grossesse
Conclusion
Bibliographie
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