Prise en charge ambulatoire des chirurgies de l’avant-pied chez l’enfant

La chirurgie ambulatoire 

Les chirurgies ambulatoires sont définies par la Haute Autorité Sanitaire (HAS) comme « des actes chirurgicaux programmés et réalisés dans les conditions techniques nécessitant impérativement la sécurité d’un bloc opératoire, sous une anesthésie de mode variable et suivie d’une surveillance postopératoire permettant, sans risque majoré, la sortie du patient le jour même de son intervention » .

Soumise à l’autorisation de l’Agence Régionale de Santé (ARS), l’activité de chirurgie ambulatoire doit répondre à des conditions de fonctionnement légalement définies par le Code de la Santé Publique (CSP) (2) : les prestations équivalent par leur nature, leur complexité et leur surveillance à celles dispensées en hospitalisation à temps complet. Le temps d’ouverture de la structure est limité à douze heures par jour. Source d’efficacité en termes de qualité et de sécurité des soins, de modernisation des établissements de santé et de réduction des risques d’infection nosocomiale, la prise en charge ambulatoire présente également des atouts économiques.

En 2013, une étude espagnole (3) a prouvé l’efficience de la prise en charge ambulatoire en termes de réduction des dépenses dans le domaine de la santé. Cette étude rétrospective réalisée en Espagne a étudié 753 patients opérés d’une cure d’hallux valgus entre 2002 et 2012. Malgré une comparabilité des 2 groupes : ambulatoire (292 patients) / hospitalisation (461 patients), les dépenses liées aux soins du groupe ambulatoire étaient significativement inférieures à celles du groupe hospitalisation. De plus, un des critères secondaires de l’étude évaluait la satisfaction globale des patients pris en charge en ambulatoire, permettant de démontrer un degré de satisfaction très élevé : 84,6%. Dans la cour des comptes de la Sécurité Sociale publiée en 2013 (4), l’Agence Nationale d’Appui à la Performance des établissements de santé et médico-sociaux (ANAP) a estimé une économie annuelle de 5 millions d’euros en cas d’essor de la chirurgie ambulatoire.

Le développement de cette prise en charge est donc devenu un enjeu majeur de santé publique. Cependant, l’introduction de la chirurgie ambulatoire en France a été plus tardive que dans d’autres pays : sa reconnaissance légale date de 1991 alors qu’elle a été décrite pour la première fois en 1909 en Ecosse et que les Etats-Unis l’ont largement exploitée dès les années 1960. De ce retard résulte un écart important dans sa pratique à travers les pays développés. En France, son taux reste inférieur à celui de nombreux pays européens. Une enquête internationale (5), menée par l’International Association Ambulatory Surgery (IAAS) en 2009, a montré que, sur trente-sept gestes sélectionnés, le taux de chirurgie ambulatoire atteignait 36 % en France alors qu’il était de plus de 65 % dans les pays de l’Europe du Nord.

Plus tard, en 2012, une autre enquête de l’HAS et de l’ANAP (6) a confirmé ce retard français en révélant que la pratique de la chirurgie ambulatoire dans notre pays restait insuffisamment développée (40 % de chirurgies réalisées en ambulatoire en France, vs 83% aux Etats-Unis et 79% en Grande Bretagne).

Progressivement, le service hospitalier a donc développé son activité ambulatoire et de plus en plus d’actes bénéficient aujourd’hui de cette prise en charge. De ce fait, la France est un des pays au plus fort taux de progression de la chirurgie ambulatoire ces dernières années.

En novembre 2011, pour la première fois, les pouvoirs publics français ont statué sur les objectifs de développement de la chirurgie ambulatoire : plus de 50% d’actes chirurgicaux en 2016.

Chirurgie ambulatoire et anesthésie

Dès 2009, la Société Française d’Anesthésie et de Réanimation (SFAR) a publié des Recommandations Formalisées d’Experts (RFE) (7) concernant les prises en charges ambulatoires.

Certaines particularités s’appliquent à la pédiatrie :
– un score ASA I, II ou III stable
– un âge supérieur à 3 mois pour un nouveau-né à terme
– un âge supérieur à 60 semaines d’âge corrigé pour un nouveau-né prématurément
– avant l’âge de 10 ans, un second accompagnateur, non conducteur, est nécessaire pour le retour à domicile.

La prise en charge ambulatoire au CHU de Rouen a célébré ses 10 ans d’existence en 2016 et son activité y est bien développée : en 2014, celle-ci représentait déjà 52% de l’activité chirurgicale infantile. Dans une dynamique de développement et d’amélioration de la prise en charge globale, l’activité ambulatoire est en cours de progression dans le domaine de la chirurgie orthopédique. Alors que les chirurgies des orteils sont déjà réalisées dans ce secteur depuis plusieurs années, plusieurs actes courts au niveau du pied sont éligibles à une prise en charge en hôpital de jour (HDJ) : ostéotomies métatarsiennes, telles que les cures d’hallux valgus, et exérèses d’os surnuméraire. En raison des suites chirurgicales potentiellement douloureuses, l’analgésie à domicile reste un des maillons faibles qui peut limiter l’accès à leur prise en charge ambulatoire.

Afin d’optimiser au mieux l’analgésie post opératoire, l’anesthésie locorégionale (ALR) joue un rôle primordial. Dès 1980, Dr Shandling (8) démontrait que l’ALR associée à l’anesthésie générale (AG) chez l’enfant permettait de réduire les besoins per et post opératoires en antalgiques et permettait une récupération plus rapide de l’activité normale de l’enfant dans le cadre de chirurgies inguinales. En 2016, Christensen et al. (9) ont confirmé cette épargne morphinique dans les 24h post opératoires en faveur des patients bénéficiant d’une ALR comparativement aux patients sous anesthésie générale seule. En 2010, la SFAR a édité des RFE relatives à l’ALR en pédiatrie afin d’encadrer au mieux leur réalisation (10). Les blocs périphériques sont à privilégier par rapport aux blocs centraux et l’association ALR – AG est préconisée chez le jeune enfant alors que l’ALR seule est envisageable chez l’adolescent. Dans le cadre des chirurgies de la cheville et du pied, le bloc sciatique tronculaire représente le gold standard.

Anatomie du nerf sciatique

Le nerf sciatique est un nerf mixte (sensitif et moteur) constituant la branche terminale du plexus sacré : il est constitué par la réunion des fibres nerveuses du tronc lombo-sacré (L4, L5) et des branches terminales des racines S1, S2 et S3. C’est le nerf périphérique le plus volumineux et le plus long de l’organisme.

Anatomiquement, il naît donc dans le bassin et en émerge par le canal sous pyramidal puis passe entre les muscles piriforme et obturateur interne. Il chemine par un trajet en forme d’arc dans la région glutéale pour descendre verticalement dans la région fémorale postérieure et se termine dans la fosse poplitée. A ce niveau, il se divise en ses 2 branches nerveuses terminales qui assurent l’innervation de la jambe et du pied :
– le nerf tibial postérieur qui reste dans l’axe du nerf sciatique et descend verticalement dans la loge postérieure de la jambe. Il passe sous l’arcade du muscle soléaire et innerve tous les muscles de la loge postérieure du pied. Il passe derrière la malléole interne pour donner les nerfs plantaires.
– le nerf fibulaire commun se dirige vers l’extrémité supérieure de la fibula qu’il contourne. Il se divise alors en deux rameaux : le nerf fibulaire superficiel (ou nerf musculo cutané) et le nerf fibulaire profond (ou nerf tibial antérieur) ; après leurs innervations respectives au niveau de la jambe, les 2 rameaux vont s’anastomoser sur le dos du pied et en assurer l’innervation du dos du pied et des 4 premiers orteils.

Anesthésie loco régionale du nerf sciatique

Pour une analgésie optimale du pied, le bloc du nerf sciatique est préférablement réalisé au niveau du creux poplité, avant la bifurcation nerveuse. A ce niveau, le nerf est facilement visualisable et accessible. En 2015, une étude (11) a comparé l’efficacité du bloc sciatique selon le niveau de ponction : une injection 2 centimètres au dessus de la bifurcation nerveuse ou deux injections plus distales ciblant spécifiquement le nerf tibial postérieur et le nerf fibulaire commun. Aucune différence significative en terme de réussite du bloc, durée d’action, de satisfaction des patients n’a été démontrée. Seule le délai d’installation était plus long dans le groupe ponction unique au-dessus de la bifurcation. L’utilisation de l’échographie pour le repérage des différentes structures anatomiques lors de la réalisation de l’ALR est largement recommandée (RFE SFAR). Une méta analyse parue en 2016 (12) et regroupant 20 études sur le sujet a permis de démontrer l’intérêt de l’échographie pour diminuer le taux d’échecs et prolonger la durée des blocs. L’échographie offre un contrôle précis de l’injection et a permis une réduction importante des volumes d’anesthésiques locaux utilisés et donc du risque d’intoxication systémique. Van Geffen et al.(13) ont montré une réduction de plus de 50% des doses par rapport à celles utilisées avec la neurostimulation. Très récemment, une étude de Lloyd CH et al. (14) a démontré le bénéfice du guidage échographique en terme de consommation d’antalgiques (plus faibles doses, et administration retardée) et de score EVA (plus faible dans le groupe ALR vs AG). Le choix de la technique (out-of-plane ou in-plane) et l’utilisation, ou non, du neurostimulateur dépendent uniquement des habitudes du praticien. Le recours aux cathéters péri nerveux pour l’analgésie post opératoire des chirurgies orthopédiques a longtemps été considéré comme la technique la plus efficace. En 2014, le journal Anesthesia and Analgesia (15) en ventait les mérites lors d’une série de 1285 enfants et adolescents sur une période de 8 ans. Cependant, les risques liés à cette technique (16,17) (obstruction de cathéter et non efficacité, migration du dispositif, retrait accidentel, écoulement d’anesthésique local au point de ponction, infection locale et, plus gravement, systémique) ont encouragé la recherche de techniques alternatives. Une méta analyse parue en 2012 (18) et regroupant plus de 14 000 ALR réalisées entre 2007 et 2010, a mis en évidence un taux plus élevé de complications dans le groupe « cathéter péri nerveux » que lors de bolus seuls. Particulièrement en chirurgie ambulatoire, l’enjeu majeur est d’obtenir une analgésie efficace au delà de la 24ème heure postopératoire. Longtemps, l’adjonction de clonidine ou d’adrénaline ne permettait pas d’atteindre le niveau d’efficacité de l’injection continue péri nerveuse via les cathéters péri nerveux. Cependant, la dexaméthasone utilisée comme adjuvant augmente considérablement la durée des blocs tant chez l’animal qu’en pratique clinique (19 21). L’analgésie postopératoire dépasse maintenant les 24h escomptées et le recours aux blocs périphériques seuls est repensé, en particulier en ambulatoire. L’augmentation de la durée d’action de la solution anesthésique est retrouvée quelque soit l’anesthésique local utilisé et le type de bloc réalisé. En 2006, c’est lors de la réalisation de blocs supra claviculaires que Parrington (22) a démontré l’augmentation de la durée de l’analgésie après adjonction de dexaméthasone. En 2010, Movafegh, pour le bloc axillaire (23), et Vieira, pour le bloc inter scalénique (24), ont mis en évidence le même constat : l’adjonction de dexaméthasone, respectivement, à la lidocaine et à la bupivacaine a permis de prolonger l’analgésie. Ainsi les chirurgies du pied ne nécessitent plus la pose d’un cathéter péri nerveux et l’analgésie postopératoire peut être couverte durant plus de 24h par une injection unique d’AL associée à un bolus intra veineux de dexaméthasone. Ces progrès ont permis de rendre ces chirurgies éligibles à la prise en charge ambulatoire.

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Table des matières

Introduction
I. La chirurgie ambulatoire
II. Chirurgie ambulatoire et anesthésie
III. Anatomie du nerf sciatique
IV. Anesthésie loco régionale du nerf sciatique
V. Enjeux de la chirurgie ambulatoire infantile
VI. Chirurgies éligibles à notre protocole
VII. Objectif de l’étude
Matériel et méthodes
I. Type et lieu de l’étude
II. Liste des interventions sélectionnées
III. Critères d’inclusion et d’exclusion
IV. Prise en charge des patients dans le groupe ambulatoire
V. Paramètres recueillis
VI. Critères de jugement
VII. Analyses statistiques
Résultats
I. Groupe « hospitalisation »
II. Groupe « ambulatoire »
III. Caractéristiques démographiques
IV. Critère de jugement principal
V. Critères de jugement secondaires
Discussion
I. Résultats principaux
II. Forces et faiblesses de notre travail
III. Analyse du protocole de prise en charge ambulatoire
IV. Interprétation des résultats
V. Impacts sur la pratique courante en chirurgie pédiatrique
Références
Annexes
1. Annexe 1
2. Annexe 2
3. Annexe 3
Abstract

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