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Le contexte calédonien et l’environnement scientifique
Motivations locales
Le développement que connaît la Nouvelle-Calédonie engendre une augmentation des apports particulaires au lagon depuis plusieurs décennies (Fernandez et al., 2002).
Le premier vecteur apportant davantage de particules dans le lagon est le ruissellement.
L’activité minière est la source principale d’accroissement des apports particulaires au lagon. Les paysages de Nouvelle-Calédonie présentent les stigmates de l’activité minière. De vastes pans de montagne sont de couleur rouge (latérites) suite à leur mise à nu lors de l’exploration et de l’exploitation minière. Celle-ci se fait à ciel ouvert. Les concentrations de nickel dans le minerai étant faible, de l’ordre de 2 à 3 %, les superficies des exploitations sont très importantes. Le couvert végétal de ces surfaces est rasé, les sols sont remaniés, ce qui rend les terrains miniers extrêmement vulnérables à l’érosion. Sur les sites des plus anciennes exploitations sur lesquelles aucune précaution n’était prise, les particules érodées sont transportées par ruissellement jusque dans le lagon. Les sites d’exploration ont une emprise spatiale individuelle plus restreinte. En revanche, les sites d’exploration sont beaucoup plus nombreux et sont également responsable d’importants ravinements dans le paysage calédonien. L’eau entraîne avec elle d’importants volumes de sols. Lors d’évènements pluvieux, une partie importante de ces particules terrigènes est exportée jusqu’au lagon.
L’activité minière est la première source de revenu du Territoire Calédonien. En 1995, la production du Territoire avoisinait les 120 000 tonnes, pour un montant d’environ 46,5 milliards de francs pacifique, soit 381 millions d’euros. En 1997, avec près de 30% des ressources mondiales de nickel, la Nouvelle-Calédonie se situait au second rang des producteurs mondiaux (http://nouvellecaledonie.rfo.fr/article12.html). Le secteur minier est donc un pilier du développement économique de la Calédonie. Au premier trimestre 2005, le secteur minier générait 3421 emplois directs (http://www.info.lnc.nc/nickel /20050705.LNC0153.html?0350). Ce secteur est en pleine expansion. En 2001, le Territoire a reçu plusieurs propositions de développement liées au nickel, dont celui de Koniambo (anciennement Falconbridge-SMSP) en Province Nord et celui de Goro (Inco-Goro Nickel) en Province Sud. Le projet Koniambo prévoit la construction d’une usine pyrométallurgique, la création d’une centrale électrique, d’un barrage et d’un port en eau profonde. Selon les estimations de l’époque, ce projet devait permettre l’extraction annuelle de 60 000 tonnes de nickel sous forme de ferronickel (http://archive.xstrata.com/falconbridge/ www.falconbridge.com/french/growth/growth_initiatives/nickel/koniambo.htm) et de 5 400 tonnes de cobalt. La mise en service de ce complexe industriel minier, initialement prévue en décembre 2005, a été retardée. Le projet Goro concerne la réalisation d’une usine hydrométallurgique. Selon les estimations de l’époque, cette usine doit permettre l’extraction de 54 000 tonnes de nickel et de 5 400 tonnes de cobalt par an. Elle induit la création de 3 500 emplois directs et de 4 000 emplois indirects bénéficiant aux populations de l’archipel (http://www.goronickel.nc /pages/impacts/emplois.htm).
Si en Nouvelle-Calédonie l’activité minière est responsable d’une part importante de l’augmentation des flux de particules terrigènes vers le lagon, cette augmentation a néanmoins d’autres origines liées au développement.
L’accroissement de la population néo-calédonienne impose depuis plusieurs années l’extension de zones de construction. Les surfaces aménagées favorisent le ruissellement des eaux de pluie au détriment de leur infiltration dans le sol. Le ruissellement charrie davantage de particules vers le lagon. Le volume des eaux rejetées, qu’elles soient d’origines urbaines ou industrielles augmente également. Ces rejets n’étant que partiellement traités, ils constituent une autre source de particules injectées directement dans le lagon. Enfin, les feux de brousse causent chaque année des ravages sur la couverture végétale et rendent les sols plus vulnérables à l’érosion.
En contrepoids des menaces que fait peser le développement sur l’environnement, le Gouvernement de la Nouvelle-Calédonie, les trois provinces du Territoire, associées au Ministère de l’écologie et du développement durable et au Ministère de l’Outre mer ont constitué un dossier de présentation des lagons de Nouvelle-Calédonie en vue de leur inscription sur la liste du Patrimoine Mondial de l’UNESCO au titre d’un bien naturel. Le dossier a été déposé par l’ambassadeur de France auprès de l’UNESCO le 31 janvier 2007.
Cette démarche s’inscrit dans un projet de préservation de l’environnement calédonien. Le développement économique de la Nouvelle-Calédonie doit donc tenir compte de la volontéaffichée de préserver le patrimoine naturel que représentent les lagons de Nouvelle-Calédonie.
Contexte scientifique et logistique
L’empreinte du contexte dans lequel s’est effectué cette thèse est perceptible tant au niveau de la logistique du projet qu’au niveau de ses orientations scientifiques.
Ce travail de Doctorat a bénéficié d’un financement du programme ZoNéCo. Le programme ZoNéCo (ZONe ECOnomique exclusive de Nouvelle-Calédonie http://www.zoneco.nc/) est née de l’association de l’Etat Français, la Nouvelle-Calédonie et ses trois provinces, l’IRD (Institut de Recherche pour le Développement http://www.ird.fr/), l’UNC (Université de Nouvelle Calédonie), l’Ifremer (Institut Français de REcherche sur la MER), Météo-France, le SHOM (Service Hydrographique et Océanographique de la Marine nationale). Ce programme sert d’interface entre les décideurs et les instituts de recherches en incitant le transfert des connaissances. Il a pour objectif principal de rassembler et de rendre accessibles les informations nécessaires à l’identification, l’inventaire et la gestion des ressources minérales et vivantes de la Zone Economique Exclusive de la Nouvelle-Calédonie.
Au niveau scientifique, cette étude a été effectuée au sein de l’Unité de Recherche 103, « Caractérisation et Modélisation des Échanges dans des Lagons soumis aux Influences terrigènes et Anthropiques » (CAMELIA http://www.ird.fr/sais/cgi/Ar?unite=R103). L’UR 103 est une unité de recherche propre de l’IRD. L’UR Camélia cherche à déterminer l’influence des 3 grands types d’apports (particules, nutriments, métaux) sur certains écosystèmes caractéristiques des environnements côtiers tropicaux.
La compréhension des processus naturels qui régissent les équilibres au sein des écosystèmes passe par le découpage des phénomènes globaux en questions scientifiques propres à chaque discipline. L’océanologie fait appel à de nombreuses disciplines. L’analyse des phénomènes globaux ne peut se passer d’une certaine transdisciplinarité. Dans cette logique, l’UR Camélia regroupe des chercheurs d’horizons disciplinaires différents. Cette pluridisciplinarité a été un des facteurs qui a participé aux orientations scientifiques d’une partie de ce travail de Doctorat.
Au sein de l’UR Camélia, les moyens mis en œuvre pour décrire l’hydrodynamique et le transport particulaire sont de trois types. Les mesures de terrain produisent les données de référence. La variabilité spatiale et temporelle des phénomènes que l’on cherche à décrire requiert l’emploi d’autres méthodes permettant une description plus large qu’à travers les seules mesures de terrain. La télédétection spatiale est un de ces moyens. Après traitement pardes algorithmes spécifiques, et calibration par confrontation à des mesures de terrain, les données satellites peuvent fournir une vision synoptique de grandeurs physiques à la surface du plan d’eau. Le troisième moyen mis en œuvre est celui sur lequel une grande partie de ce travail est focalisé : la modélisation numérique. La modélisation numérique du transport particulaire repose sur une architecture de modules interconnectés (Figure I- 2). La démarche de modélisation numérique sera exposée plus en détail par la suite (section II.2.1).
Données de vent
Des mesures de vent sont effectuées en continu à partir de la balise latérale bâbord située à l’extrémité Sud du platier de l’îlot Maître. La mesure du vent en direction (°N) et en intensité (m.s-1) se fait à 10m au-dessus de l’eau. Cette station météo enregistre également la température de l’air. Les valeurs enregistrées correspondent à des moyennes sur 10 min. Cette station météo a été mise en place en 1998.
CTD Seabird Seacat 19
La sonde CTD Seacat 19 (http://www.seabird.com/products/profilers.htm) mesure la pression, la température, la conductivité, la turbidité, elle est également équipée d’un fluorimètre permettant la détermination in situ de la concentration en chlorophylle, et d’un capteur de PAR (Photosynthetically Active Radiation) afin de déterminer l’atténuation lumineuse en fonction de la profondeur. La principale mesure exploitée dans cette thèse est la mesure de turbidité effectuée par un turbidimètre Seapoint. Cette mesure quantifie la rétrodiffusion d’un rayon émis dans le proche infrarouge (870 nm) dans un faible volume, proche de la sonde. L’intensité du signal rétrodiffusé dépend de la quantité de particules en suspension.
Pour l’essentiel, les mesures CTD sont des profils de la surface au fond, dans la limite de 60 m de profondeur (longueur du cordage). La fréquence d’échantillonnage des appareils est de 2 mesures par seconde, la sonde CTD (Figure II- 2) est descendue manuellement à vitesse régulière inférieure à 1 m.s-1. Le post-traitement des données (obtention de la salinité etc. …) est effectué via les programmes fournis par Seabird (Seaterm et SBE data processing).
Les données sont ensuite vérifiées puis intégrées dans une base de données.
Concentration massique des matières en suspension
La mesure de la concentration massique de particules en suspension nécessite beaucoup de temps, une faible quantité de données est réalisable par ce moyen. Des échantillons d’eau de mer sont prélevés avec des bouteilles Niskin à différentes profondeurs. Ces échantillons sont ensuite filtrés (Figure II- 3) sur des filtres en polycarbonate perforés à 0.4 µm, préalablement séchés dans une étuve et pesés à vide. En fin de filtration, un rinçage à l’eau distillée est réalisé pour dissoudre d’éventuels cristaux de sel.
Après une nouvelle étape de dessiccation par passage des filtres à l’étuve (température de 60°C, durée de 24h), les filtres chargés en particules sont pesés une seconde fois. Les faibles concentrations rencontrées sur le SLNC nécessitent de filtrer d’importants volumes d’eau afin que la charge particulaire des filtres soit significative. Malgré cette précaution, la charge particulaire des filtres étant faible, il est indispensable d’utiliser une balance de très haute précision. La balance utilisée pour les deux pesées est la Perkin-Elmer AD-4 Autobalance
LISST 100X
Principe de fonctionnement
Le LISST 100X (Laser In Situ Scattering and Transmissometry) est un granulomètre laser in situ développé et commercialisé par Sequoia Scientific Inc. Il fournit une estimation de la concentration volumique (µL/L) des particules en suspension en fonction de leur diamètre (Agrawal et Pottsmith, 2000). La version du LISST utilisé dans cette thèse quantifie les concentrations de particules dont le diamètre est compris entre 1.25 et 250 µm. Ce type d’instrument est novateur. Seuls le LISST et un instrument équivalent, le CILAS (Gentien et al., 1995), développé par l’IFREMER, permettent une mesure in situ de la distribution des tailles des particules en suspension.
L’estimation de la concentration volumique donnée par le LISST repose sur la théorie de diffusion de Mie (Van de Hulst, 1957). Lorsqu’un signal lumineux traverse une suspension de particules sphériques le signal lumineux est diffusé. Suivant le rapport du diamètre des particules sur la longueur d’onde du signal lumineux (d/λ), on distingue deux régimes de diffusion. Lorsque le diamètre des particules est significativement plus petit que la longueur d’onde du signal lumineux (d/λ<<0.1), on considère que le régime de diffusion obéit à la théorie de diffusion de Rayleigh. La théorie de diffusion de Mie s’applique lorsque le diamètre des particules est équivalent ou supérieur à la longueur d’onde du signal lumineux.
A de faibles angles de déviation par rapport à la direction du faisceau lumineux initial, l’intensité lumineuse diffusée est fonction de la taille des particules présentes dans la solution. La nature des particules (indice de réfraction) n’a pas d’effet sur la diffusion à ces faibles angles de déviation. Avec une longueur d’onde de 670 nm et un diamètre de particule supérieur ou égale à 1.25 µm, les conditions nécessaires à l’application de la théorie de Mie pour l’inversion mathématique du signal optique sont réunies. La seule différence entre la théorie et l’application provient de la forme des particules. Les particules en suspension dans l’eau de mer ne sont pas nécessairement sphériques. Les résultats de l’inversion de la mesure optique concernent des particules sphériques de diamètre équivalent. Dans la fourchette des faibles déviations, plus la section caractéristique des particules est faible, plus l’angle de diffraction est important. Le LISST émet un signal lumineux et détecte l’intensité lumineuse répartie selon ces faibles angles de déviation.
Le capteur permettant de détecter l’intensité lumineuse à différents angles de diffusion est une succession concentrique de photodiodes dont le rayon augmente de manière logarithmique (Figure II- 5).
L’intensité du signal lumineux d captée par chacune des photodiodes est donc fonction de la quantité et de la section optique des particules présentes dans le volume d’échantillonnage. d est corrigée de l’atténuation τ (intensité lumineuse transmise/intensité lumineuse émise) et du signal obtenu pour un échantillon d’eau pure ( zscat ) (Eq.II- 1). [ τ ]-= zscatds Eq.II- 1 où s est l’intensité du signal lumineux normalisée et corrigée, pour chacune des photodiodes. La distribution des tailles de particules (sINV ) est ensuite obtenue par inversion mathématique (Hirleman, 1987). Si en théorie l’indice de réfraction influence peu la diffusion, une erreur peut survenir lors de l’inversion, lorsque l’indice de réfraction des particules est très différent de celui choisi pour l’inversion (Agrawal et Pottsmith, 2000). Une fois la distribution surfacique de taille de particules transformée en distribution volumique de taille ( ) sINV vol , la concentration volumique dans chacune des classes de taille est obtenue par application d’une constante de conversion cstev . cstev est obtenue expérimentalement en comparant l’intégrale de la distribution de concentration volumique sur l’ensemble des classes de taille à la concentration volumique connue mesurée par le LISST en laboratoire. Ce facteur de conversion est donc un facteur global. Via cet instrument et le post-traitement exposé, le LISST 100X donne une estimation de la concentration volumique des particules dont le diamètre équivalent est compris entre 1.25 et 250 µm. La concentration volumique des particules en suspension est distribuée sur 32 classes de tailles régulièrement espacées suivant une progression logarithmique.
Dans le cadre de cette étude, le LISST a été utilisé en profileur, de la surface au fond. La fréquence d’échantillonnage a été f ixée à 1 mesure par seconde. Chaquemesure est la moyenne de 30 mesures effectuées par le LISST en une seconde. Le LISST 100X (Figure II- 6) est descendu manuellement à vitesse régulière d’environ 50 cm.s-1. La transformation des données issues du LISST en données ascii est effectuée par le programme livré avec l’instrument LISST-SOP version 4.65. Des programmes de traitement et organisation des données ont été élaborés sous Matlab.
Dispositif de laboratoire
Le LISST est livré avec des accessoires permettant d’effectuer des mesures en laboratoire. Une chambre de mesure équipée d’un agitateur magnétique peut ainsi être fixée sur le parcours du faisceau laser. Un montage reliant un réservoir à la chambre de mesure a été élaboré (Figure II- 7). Selon les besoins, le réservoir peut être un bécher ou une cuve de sonification. La cuve de sonification (Brandson sonifier 250) est employée pour remettre en
suspension et désagréger les particules préalablement récoltées sur des filtres en polycarbonate.
WTR9
La sonde Aanderaa WTR9 (Wave and Tide Recorder 9)(Figure II- 8) est un houlomètre. Elle est équipée d’un capteur de pression et d’un capteur de température. L’enregistrement de la pression se fait à une fréquence de 2 Hz sur des périodes de 512 secondes toutes les 30 minutes. Le traitement des données est réalisé à l’aide de programmes Aanderaa livrés avec la sonde. La température est utilisée dans la conversion de la pression en profondeur et le traitement du signal par décomposition en séries de Fourier est effectué en interne à l’appareil. Le WTR9 fournit des paramètres intégrés de la houle : sa hauteur significative et sa période.
Modélisation numérique
Introduction
Malgré les progrès faits en instrumentation et en télédétection, il n’est pas réaliste de vouloir obtenir des mesures simultanées sur toute la zone marine de la surface au fond. Il est donc très difficile de s’affranchir de la variabilité temporelle pour mesurer la variabilité spatiale du transport particulaire et vice versa. La modélisation est l’outil d’investigation privilégié permettant d’analyser des données sétalants dans l’espace et le temps.
L’observation et la mesure sont des préalables à toute modélisation que l’on souhaite réaliste. Les mesures permettent d’identifier les processus et d’améliorer leur représentation.
Elles permettent de déterminer les processus prépondérants à intégrer dans le modèle.
Les modèles sont des outils de compréhension. Lorsqu’ils sont validés, ils peuvent être employés pour extrapoler les mesures ou analyser la sensibilité du système à différents forçages. Un modèle numérique de transport représente une synthèse de représentations des processus qui y participent. Cet outil peut être utilisé comme support théorique pour la compréhension des processus.
L’utilisation des modèles numériques est en plein essor. Dans le cas d’un modèle validé, il est attrayant de penser qu’il est possible d’effectuer des simulations sur un simple ordinateur portable pour simuler la distribution des particules en suspension. Néanmoins, une telle utilisation des modèles numériques requiert une importante phase de validation et de confrontation à des mesures de terrain.
L’implantation d’un modèle numérique de transport particulaire préexistant dans un contexte différent de celui dans lequel il a été développé, peut requérir d’adopter et/ou de développer de nouveaux modules. Les efforts de recherche concernant la modélisation du transport particulaire portent sur les processus encore mal connus dont l’influence est significative dans un contexte donné (e.g. floculation). L’importance relative des processus participants au transport particulaire peut varier d’un contexte à l’autre.
Principes de fonctionnement d’un modèle numérique hydrodynamique, l’exemple MARS3D.
Le modèle numérique qui a servi de base à ce travail de thèse est le code MARS3D. MARS3D (3D hydrodynamical Model for Applications at Regional Scale) est un modèle numérique hydrodynamique développé par l’IFREMER inspiré par le modèle proposé par Blumberg et Mellor (1987). MARS3D a été le support de nombreuses études (Lazure et Salomon, 1991a,b; Douillet et al., 2001; Plus et al., 2003; Ouillon et al., 2004 ; Huret et al., 2005 ; Andre et al., 2005) qui ont participé à sa validation. Ce modèle a été adapté sur le SLNC (Clavier et Douillet, 1996 ; Douillet, 1998). Dans cette adaptation, le modèle calcule l’élévation de la surface du plan d’eau et les courants générés par l’action combinée de la marée et du vent. Il calcule également le transport et la diffusion de matières dissoutes (Douillet et al., 2001) ainsi que les trajectoires de particules individuelles (Jouon et al., 2006 cf. section 0). La simulation numérique des courants requiert plusieurs types d’informations:
• Les lois qui gouvernent le comportement dynamique du fluide (les équations mathématiques du modèle).
• Les lois qui gouvernent le comportement de l’eau aux limites du domaine (les conditions aux limites du modèle).
• La forme du domaine dans lequel évolue l’eau (la bathymétrie).
• Une discrétisation du volume contenu dans le domaine (le maillage).
• Une résolution numérique de l’ensemble des équations en chaque point du maillage.
Un modèle numérique hydrodynamique est un outil mathématique permettant de résoudre les lois physiques de l’hydrodynamique à l’intérieur d’un domaine en fonction des conditions aux limites.
Les données bathymétriques
La première caractéristique du domaine à prendre en compte lorsque l’on veut modéliser l’hydrodynamique d’une zone est sa forme. En océanographie côtière, celle-ci est contrainte par la géomorphologie du fond de la zone sur laquelle est implanté le modèle. Pour l’implantation de MARS3D sur le SLNC, la forme de la topographie sous-marine a été obtenue par krigeage des minutes de bathymétrie relevées par le SHOM (Service Hydrographique et Océanographique de la Marine), préalablement numérisées. Les minutes de bathymétrie du SHOM sont référencées en altitude par rapport au niveau des plus basses mers (zéro hydrographique).
Dans le modèle, la hauteur d’eau ( D ) est définie comme la somme de la profondeur ( H ) et de l’élévation de surface (ζ ). ζ H + = D Eq.II- 30
L’élévation de surface est la somme du niveau moyen et des variations dues à la marée et au vent. Le niveau moyen que l’on introduit dans le modèle correspond la hauteur d’eau au repos, elle est prise égale au niveau moyen de la mer. A moins d’une décote exceptionnelle liée aux mouvements de l’eau, les hauteurs d’eau dans le modèle et dans la réalité sont toujours légèrement supérieures aux données bathymétriques du SHOM (Figure II- 11). L’élévation de surface (limite haute du volume de contrôle) étant dynamique, l’intersection des surfaces décrivant les limites hautes et basses du volume de contrôle est également dynamique. Cette intersection représente les limites latérales fermées du modèle. Par opposition, les limites latérales ouvertes du modèle sont dictées par les limites d’extension géographiques du modèle.
Le modèle de vagues : WaveWatch III (NOAA)
La version 1.18 de WAVEWATCH III (WWATCH)(Tolman, 1999) que nous avons utilisée est un modèle de vagues de troisième génération développé à la NOAA/NCEP (US National Centers for Environmental Prediction) par Hendrik Tolman. On distingue les générations de modèles suivant le mode de calcul du terme qui décrit les interactions non linéaires entre différentes vagues de fréquences liées. Dans la première génération, on négligeait ou on paramétrait simplement ce terme source. Dans la deuxième, on utilisait une « panoplie » de spectres prédéfinis qui dépendaient de la longueur du fetch. Dans la troisième, on effectue le calcul explicite des interactions non linéaires.
Les équations régissant la génération et la propagation des vagues de vent sont présentées en détail dans Tolman (1989, 1991a, b). Les termes source et puits sont décrits avec précision dans Tolman et Chalikov (1996). Les vagues de vent sont caractérisées par leur énergie F (proportionnelle au carré de la hauteur des vagues) qui dépend de paramètres intrinsèques : le nombre d’onde k, la fréquence (ou pulsation) relative σ observée dans un référentiel qui se déplace à la vitesse moyenne U des courants, la fréquence absolue ω observée dans un référentiel fixe et la direction de propagation θ du train de houle. Dans la théorie linéaire des ondes de gravité de surface, pour des variations faibles des courants et de la profondeur (Leblond et Mysak 1978), la relation de dispersion permet de lier les différentes fréquences au nombre d’onde : σ = tanh( ) ω -= rUkkdgk r Eq.II- 53.
TEMPS CARACTERISTIQUES DE L’HYDRODYNAMIQUE
La quantité des données produites par un modèle hydrodynamique est souvent colossale et difficilement exploitable en l’état. Dans la version utilisé pour cette étude, chaque paramètre tridimensionnel est retourné par le modèle sous forme d’un tableau de 110*340*10 et ce, à chaque pas de temps sauvegardé. Il est donc nécessaire de synthétiser l’information. La manipulation des sorties de modèles numériques donne naissance à de nouveaux paramètres.
L’indice de stratification, inspiré du traitement de données in situ, permet ainsi d’étudier le lien qui existe entre stratification et production primaire (Hidalgo-Gonzalez et AlvarezBorrego, 2001). Inspiré des méthodes de traitement d’images satellites (Cayula et Cornillon, 1992), la détection des fronts hydrologiques peut être effectuée de manière automatique.
L’utilisation des algorithmes biomimétiques à colonies de fourmis permet de détecter automatiquement sur des champs de vecteurs de courants issus d’un modèle hydrodynamique les cellules de rétention des masses d’eau (Segond et al., 2004).
Devant le caractère central du modèle hydrodynamique et afin d’en acquérir une bonne maîtrise, le première travail de thèse fut orienté vers le développement d’outils numériques permettant le calcul d’indices synthétiques. Un des objectifs de ce travail a été de synthétiser l’information hydrodynamique produite par MARS3D dans un format qui soit le plus pratique possible pour la compréhension de l’influence de l’hydrodynamique sur les processus biologiques. Cette partie porte donc l’empreinte de la pluridisciplinarité de l’UR Camélia.
Dans une masse d’eau donnée, hormis la dépendance à l’éclairement solaire, l’eutrophisation est régulée par les apports en nutriments et la capacité de ces nutriments à s’accumuler dans ce volume d’eau. Le mélange des masses d’eau qui bénéficient d’apport en nutriments avec des eaux plus oligotrophes est donc un processus limitant de l’eutrophisation.
L’eutrophisation est une caractéristique liée à une masse d’eau. Le suivi de l’eutrophisation nécessiterait donc en théorie de suivre l’évolution de la masse d’eau indépendamment de sa localisation. L’évolution du caractère eutrophe de la masse d’eau (processus biologiques mis à part) n’est dictée que par les apports en nutriments et son mélange avec d’autres volumes d’eau aux caractères eutrophes différents. En pratique, il est très difficile de différencier les masses d’eaux les unes des autres, ce type de suivi n’est pas réalisable à travers des mesures. Étant donné que dans de nombreuses configurations, les sources de nutriments sont fixes dans l’espace, la notion d’eutrophisation est généralement associée à une zone. L’évolution du caractère eutrophe d’une zone est donc soumise d’une part à la fluctuation des apports en nutriments, d’autre part à l’advection et au mélange des masses d’eau aux frontières de la zone : le renouvellement. Le niveau d’eutrophisation des masses d’eau est très hétérogène sur le SLNC. Les masses d’eaux les plus eutrophes sont localisées dans les baies. Le lagon est semi-ouvert, les masses d’eau provenant de l’extérieur du lagon sont oligotrophes. L’efficacité avec laquelle les eaux du large pénètrent dans le lagon et se mélangent aux masses d’eaux eutrophisées est donc un facteur limitant de l’eutrophisation dans les différentes zones du SLNC.
Cette partie consiste à caractériser et quantifier l’efficacité de renouvellement des eaux du lagon. De nombreuses études ont proposé de quantifier le renouvellement par des indices ayant la dimension d’un temps (Abdelrhman, 2005; Andréfouët et al., 2001 ; Bolin et Rodhe, 1973 ; Bujan, 2000 ; Crump et al., 2004 ; Delesalle et Sournia, 1992 ; Delhez et al., 2004ab ; Dettmann, 2001 ; Geyer, 1997 ; Monsen, 2002, Rasmussen et Josefson, 2002 ; Shen et Haas, 2004 ; Tartinville et al., 1997 ; Takeoka, 1984 ; Wang et al, 2004 ; Wolanski et King, 1990, Zimmerman, 1976). Certains des termes employés pour désignés ces temps caractéristiques de l’hydrodynamique (TH) n’ont pas la même signification d’une étude à l’autre. La signification des termes temps de transit, temps de résidence et âge de la masse d’eau adopté dans cette thèse sont explicités par la Figure III- 1.
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Table des matières
REMERCIEMENTS
TABLE DES MATIERES
PREAMBULE
CHAPITRE I INTRODUCTION
I.1 POURQUOI S’INTERESSE-T’ON A L’HYDRODYNAMIQUE ET AU TRANSPORT DE PARTICULES EN SUSPENSION ?
I.2 QUELS PARAMETRES FAUT-IL CONSIDERER ?
I.2.1 Quelles particules ?
I.2.2 D’où viennent-elles ?
I.2.3 Comment se déplacent-elles ?
I.3 LE CONTEXTE CALEDONIEN ET L’ENVIRONNEMENT SCIENTIFIQUE
I.3.1 Motivations locales
I.3.2 Contexte scientifique et logistique
I.3.3 Présentation de la zone d’étude
I.4 OBJECTIFS ET ORGANISATION DU MANUSCRIT
CHAPITRE II MATERIEL ET METHODES
II.1 MESURES
II.1.1 Introduction
II.1.2 Données de vent
II.1.3 CTD Seabird Seacat 19
II.1.4 Concentration massique des matières en suspension
II.1.5 LISST 100X
II.1.5.1 Principe de fonctionnement
II.1.5.2 Dispositif de laboratoire
II.1.6 WTR9
II.1.7 ADV
II.2 MODELISATION NUMERIQUE
II.2.1 Introduction
II.2.2 Principes de fonctionnement d’un modèle numérique hydrodynamique, l’exemple MARS3D.
II.2.2.1 Les équations de l’hydrodynamique
Les équations primitives
Fermeture turbulente
Modèle de Pacanowski et Philander
Fermeture turbulente à deux équations : q²-q²l
II.2.2.2 Les conditions aux limites
II.2.2.3 Les données bathymétriques
II.2.2.4 Le maillage
II.2.2.5 La résolution numérique
II.2.3 Modèles de transport
II.2.3.1 Transport de scalaires
II.2.3.2 Particules lagrangiennes de flottabilité nulle
II.2.3.3 Particules en suspension
Équation du transport
Érosion et Dépôt de sédiments fins
II.2.4 Le modèle de vagues : WaveWatch III (NOAA)
CHAPITRE III TEMPS CARACTERISTIQUES DE L’HYDRODYNAMIQUE
III.1 INTRODUCTION
III.2 PUBLICATION:
JOUON, A., DOUILLET, P., OUILLON, S., FRAUNIE, P. (2006) CALCULATIONS OF HYDRODYNAMIC TIME
PARAMETERS IN A SEMI-OPENED COASTAL ZONE USING A 3D HYDRODYNAMIC MODEL. CONTINENTAL SHELF RESEARCH 26, 1395-1415
Calculations of hydrodynamic time parameters in a semi-opened coastal zone using a 3D hydrodynamic model
1. Introduction
2. The study site
3. The 3D hydrodynamic model
4. Hydrodynamic time parameters: definitions and computation methods
4.1 Water exchange time
4.2 Water export time
4.3 e-flushing time
4.4 Toward a new local hydrodynamic time: flushing lag, local e-flushing time
5. Results
5.1 Water exchange time
5.2 Water export time
5.3 e-flushing time
5.4 Flushing lag and local e-flushing time
5.4.1 Flushing lag
5.4.2 Local e-flushing time
6. Discussion
6.1 Water exchange time
6.2 Water export time
6.3 e-flushing time
6.4 Local e-flushing time
6.5 Comparing the general HTs
6.6 Comparing local HTs
7. Conclusion
III.3 CONCLUSION
IV.1 INTRODUCTION
IV.2 PUBLICATION:
Wind wave modelling and measurements in a fetch-limited semi-enclosed lagoon
1. Introduction
2. The study site
3. Material and Methods
3.1 Field Measurements
3.2 Sampling strategy
3.3 WTR9 Wave parameters estimation
3.4 ADV Wave parameters estimation
3.4.1 Non-directional parameters
3.4.2 Directional density power spectrum
3.5 Numerical modelling
3.5.1 WaveWatch III model
3.5.2 Wave model implementation in the southwest lagoon of New Caledonia
3.6 Selecting the shared frequency band
3.7 Cut-off frequency
3.8 Lowest frequency
3.9 Swell contribution to SLNC wave field
3.10 Assessing the ability of WWATCH to simulate wind waves
4. Results
4.1 Meteorological conditions during experiments
4.2 Comparison of field measurements
4.3 Hs and T02 measurements and simulations
4.4 Swell contribution to wave field on the SLNC
4.5 Ability of WWATCH to simulate wind waves
5. Discussion
6. Conclusion
IV.3 CONCLUSION
CHAPITRE V CARACTERISATION DES PARTICULES EN SUSPENSION DANS LE LAGON SW DE NOUVELLE CALEDONIE
V.1 INTRODUCTION
V.2 PUBLICATION:
Importance of biological aggregation revealed by Suspended Particulate Matter concentration, grain size distribution and their variability in a coral reef lagoon
1. Introduction
2. Study area
3.1 Material
3.1.1 LISST-100X
3.1.2 Optical backscattering sensor (OBS) measurements
3.1.3 Gravimetrically determined mass concentration
3.1.4 Disaggregating process and individual particles
3.2 Sampling strategy
3.3 Data analysis
3.3.1 Suspended Particulate Matter Volume Concentration (SPMVC)
3.3.2 Particle Volume Concentration Distribution (PVCD)
3.3.3 Median diameter D50
3.3.4 Number of particles per size range
3.3.5 Coefficient of variation
4. Results
4.1 Correlation of measurements of SPM
4.1.1 Optical measurements and mass concentration
4.1.2 Measurements per LISST size class versus other parameters
4.2 Distribution and variability of SPM volume concentration
4.2.1 Averaged distribution of SPMVC
4.2.2 Variation of SPMVC against depth
4.2.3 Space and time SPMVC variability
4.3 In situ particle size distribution
4.3.1 Example of volume concentration distribution
4.3.2 PVCD depth dependency
4.3.3 PVCD space and time variability
4.3.4 PVCD spatial display
4.4 Grain volume concentration distribution (disaggregated samples)
4.4.1 Identification of aggregates
4.4.2 Aggregates’ contribution to SPMVC
5. Discussion
5.1 SPMVC
5.1.1 Average distribution of SPMVC
5.1.2 SPMVC variability
5.2 The importance and variability of aggregation processes
5.3 Quantifying SPM from optical measurements
5.4 An insight into Aggregation Process regulation
6. Conclusion
V.3 AUTRES RESULTATS : TESTS DE SENSIBILITE DU GRANULOMETRE A L’AIDE DE BILLES CALIBREES
V.4 CONCLUSION
CHAPITRE VI CONCLUSION GENERALE
REFERENCES BIBLIOGRAPHIQUES
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