Principe d’interaction gaz/capteur
Principes physiques
Lorsqu’une surface est mise en présence d’un milieu gazeux, celle-ci va interagir avec le milieu. Les molécules de gaz vont entrer en collision avec la surface du matériau hôte de par l’agitation thermique :
• Le phénomène de « scattering », la molécule gazeuse percute la surface sous un choc élastique, perd très peu d’énergie et rebondit sur la surface.
• Le phénomène de « trapping », la molécule gazeuse perd de l’énergie lors de la collision mais en conserve suffisamment pour être mobile en surface.
• Le phénomène de « sticking », la molécule gazeuse dissipe beaucoup d’énergie et reste immobile en surface après la collision. C’est le phénomène sur lequel s’établit l’interaction gaz-capteur où se basera notre travail.
Adsorption
Le mécanisme de fixation d’une molécule gazeuse sur la surface d’un solide est appelé adsorption. La molécule gazeuse (appelée adsorbat) est adsorbée sur la surface du solide (appelé adsorbant) par des sites d’adsorption : atomes de métal ou d’oxygène, ou des lacunes. Selon la force de l’interaction entre les deux objets considérés, on distingue deux types d’adsorption : la physisorption et la chimisorption. La dénomination de physisorption signifie une faible interaction entre la molécule gazeuse et la surface du solide (le matériau hôte en l’occurrence). Des forces de type Van der Waals ou électrostatiques sont mises en jeu, avec des chaleurs d’adsorption de 1 à 20 kJ/mol, mais aucun échange électronique n’a lieu entre la molécule et la surface du matériau. Cette interaction ne nous permet pas de caractériser aisément la mise en présence d’un gaz. Si l’interaction entre la molécule gazeuse et la surface fait intervenir des forces d’énergies plus élevées, avec des chaleurs d’adsorption de l’ordre de 40 à 200 kJ/mol, avec des échanges électroniques ayant lieu en même temps, il s’agit alors d’une adsorption de type chimique ou « chimisorption ». Ce type d’interaction est l’un des pivots dans le processus de détection de gaz puisque l’échange d’électrons entre les deux espèces va modifier les propriétés électroniques en surface du matériau hôte. La chimisorption peut être moléculaire ou dissociative si la molécule se décompose en surface de l’adsorbant pour former des ions (aussi appelée ionosorption).
Si l’on prend l’exemple d’une molécule d’oxygène (O2), la chimisorption moléculaire s’effectue sous la forme O2⁻ , alors que la chimisorption dissociative va conduire à la formation d’ions O⁻ à la surface de la couche sensible.
Désorption
La molécule ou ion adsorbé en surface peut quitter celle-ci sous certaines conditions, c’est le phénomène de désorption. Selon l’interaction envisagée, l’énergie nécessaire au départ de l’adsorbat sera plus ou moins importante. Ainsi, la physisorption est aisément réversible alors que la chimisorption nécessitera un apport d’énergie plus important (chauffer et/ou pomper) et sera dans certains cas irréversible, on parle alors d’empoisonnement du matériau hôte pour un capteur. Des recombinaisons entre les espèces adsorbées sur la surface et celles dans la phase gazeuse peuvent également conduire à la désorption. Les espèces adsorbées en surface (atomes, ions ou molécules) sont en équilibre thermique et peuvent se recombiner entre elles lors de leurs diffusions, et finalement elles se désorbent avec un apport d’énergie d’activation suffisante. Ce mécanisme est nommé recombinaison de Langmuir-Hinshelwood .
Le second type de recombinaison observée correspond à un mécanisme de catalyse hétérogène nommé recombinaison de Eley-Rideal (Figure I-9). Dans ce mécanisme, une espèce en phase gazeuse va réagir avec une espèce adsorbée en surface du matériau hôte, de par l’équilibre des échanges entre ces deux milieux. La molécule (ou ion) dans la phase gazeuse va rentrer en collision avec une adsorbée sur la surface du matériau hôte conduisant à une réaction rapide entre les deux et une désorption du produit.
Mécanismes réactionnels
Nous venons de voir les principes relatifs à l’adsorption d’un gaz sur la surface du matériau hôte ainsi que sa désorption et les mécanismes de recombinaison qui l’accompagnent. Nous allons maintenant présenter les mécanismes qui se déroulent lors de la réaction d’adsorption. Dans une première partie, nous rappellerons les principes fondamentaux du mécanisme d’adsorption ; puis en seconde partie, nous l’illustrerons dans le cas des deux grandes familles de gaz oxydants et réducteurs.
Principe général
Nous avons vu précédemment que le phénomène d’adsorption regroupe deux types d’interactions selon les énergies mises en jeu. L’adsorption chimique ou chimisorption fait intervenir un échange de charges entre l’adsorbat et l’adsorbant, cet échange peut donc être suivi au cours de la réaction. L’étude de la réaction d’adsorption d’un gaz sur une surface solide montre l’établissement d’un équilibre dans l’échange entre les molécules adsorbées en surface et celles de la phase gazeuse, on parle alors d’isotherme d’adsorption. Plusieurs modèles d’isotherme d’adsorption existent, nous présenterons ici les deux modèles les plus souvent rencontrés.
Modèle de Langmuir
Etabli par Irving Langmuir en 1916 [55], ce modèle considère un taux de recouvrement uniforme de la surface du solide par une monocouche de molécules de gaz. Ce modèle est basé sur les hypothèses suivantes :
➤ L’adsorption s’effectue sur des sites déterminés (sites d’adsorption) et identiques avec une enthalpie d’adsorption fixe. Une seule molécule peut être adsorbée par site.
➤ Aucune interaction ne survient entre les molécules adsorbées, l’énergie de liaison entre la molécule adsorbée et son site d’adsorption ne dépend pas de la présence (ou de l’absence) d’autres molécules.
➤ Le nombre de sites d’adsorption est une donnée fixe caractéristique de la surface et ne dépend pas de la température ou du taux de recouvrement.
Modèle de Wolkenstein
Dans le modèle décrit par Wolkenstein [56], l’énergie d’activation de l’adsorption et la chaleur d’adsorption ne sont pas considérées uniformes et dépendent du taux de recouvrement de la surface de l’adsorbant. Ce modèle fait la distinction entre deux types de chimisorption :
➤ La chimisorption « faible » dans laquelle la molécule adsorbée interagit avec son site d’adsorption sans transfert de charge.
➤ La chimisorption « forte » où un défaut du matériau, électron ou trou, intervient dans la liaison conduisant à un transfert de charge. Plusieurs types de liaisons peuvent être identifiés selon leur caractère ionique ou homopolaire.
La molécule initialement dans la phase gazeuse va s’adsorbée en surface du matériau selon les mécanismes précédemment décrits. Dans le cas de la molécule chimisorbée (chimisorption forte), celle-ci va conduire à la formation des niveaux localisés en surface, de type accepteur (accepteurs d’électrons) qui vont être peuplés d’électrons ou de type donneur (donneurs d’électrons) qui vont être peuplés par des trous. Les espèces chimisorbées peuvent être alors considérées comme des impuretés dopantes qui introduisent des états de surface. Ces états en surface vont être chargés créant ainsi une charge de surface.
|
Table des matières
Introduction générale
Chapitre I. Introduction et état de l’art
I-1. Les capteurs de gaz
I-1-1. Généralités sur les capteurs de gaz
I-1-2. Capteurs à base d’oxydes métalliques
I-1-2-1. Oxydes métalliques
I-1-2-2. Principaux paramètres d’un capteur de gaz
I-1-2-3. Morphologie et dimensions caractéristiques d’un capteur
I-1-3. Conception d’un capteur
I-2. Principe d’interaction gaz/capteur
I-2-1. Principes physiques
I-2-1-1. Adsorption
I-2-1-2. Désorption
I-2-2. Mécanismes réactionnels
I-2-2-1. Principe général
I-2-2-2. Gaz réducteur/oxydant (cas de EtOH, NH3, CH3-CO-CH3)
I-2-2-3. Influence de l’humidité et de la température
I-2-2-4. Influence du dopage
I-2-3. Interaction gaz/capteur nanostructuré 1D
Conclusions du Chapitre I
Bibliographie
Chapitre II. Elaboration et caractérisation d’un réseau de nanofils d’oxyde de zinc ZnO
II-1. Généralités et applications de ZnO (Etat de l’Art)
II-1-1. Généralités sur ZnO
II-1-2. Nanostructures de ZnO
II-1-3. Applications des nanostructures de ZnO
II-2. Synthèse de nanofils de ZnO
II-2-1. Méthodes de synthèse de nanofils de ZnO
II-2-2. Synthèse de nanofils de ZnO par voie hydrothermale
II-2-2-1. Réactifs et substrats
II-2-2-2. Dépôt d’une couche tampon
II-2-2-3. Croissance de nanofils par voie hydrothermale
II-3. Etude de l’influence des paramètres de croissance sur les propriétés des nanofils de ZnO
II-3-1. Influence de la méthode d’élaboration
II-3-1-1. Influence du réacteur
II-3-1-2. Influence de la température initiale
II-3-2. Effet du pH de la solution de croissance
II-3-3. Effet de la température de croissance
II-3-4. Effet du temps de croissance
II-3-5. Effet du recuit sur les propriétés optiques des nanofils de ZnO
Conclusions du chapitre II
Bibliographie
Chapitre III. Propriétés de détection des gaz d’un réseau de nanofils ZnO
III-1. Capteurs à base de nanofils de ZnO (état de l’art)
III-1-1. Méthodes de mesures
III-1-1-1. Mesures électriques
III-1-1-2. Mesures optiques
III-1-2. Etude bibliographique des protocoles de mesures
III-1-2-1. Température de travail
III-1-2-2. Prétraitement de l’échantillon
III-1-2-3. Mode de mesures et conditionnement du gaz cible
III-1-3. Différentes conception d’un capteur
III-2. Dispositif de mesure
III-2-1. Elaboration du capteur à base de nanofils de ZnO
III-2-1-1. Choix du substrat
III-2-1-2. Réalisation des électrodes
III-2-2. Conception d’une chambre de mesure
III-2-2-1. Installation et enceinte de mesure
III-2-2-2. Méthodes de mesure
III-2-2-3. Mode opératoire
III-3. Propriétés de détection des gaz
III-3-1. Propriétés électriques des nanofils de ZnO
III-3-2. Caractérisation de détection des gaz par spectroscopique UV
III-3-3. Caractérisation électrique de détection des gaz
III-4. Perspectives
Conclusions du Chapitre III
Bibliographie
Conclusion générale et perspectives
Annexes