PRINCIPE DE PHARMACOCINETIQUE DE POPULATION ET ANALYSE BAYESIENNE

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Expression générale du modèle

Soit une population de N individus « i », avec pour chacun « j » concentrations. Ainsi Cij est la jème concentration de l’ième individu et est la variable dépendante du modèle. L’expression générale du modèle s’écrit de la façon suivante : Cij = f(θ, xij, zi, ηi, εij)

θ : le vecteur de p effets fixes du modèle (valeur de population des paramètres PK, facteur d’influence des covariables…) : θ = θ1, θ2,…, θp
xij : ensemble de variables indépendantes ou explicatives : en pharmacocinétique, il s’agit de la dose administrée (Di) et le temps correspondant à la jème concentration (tij) ;
zi : le vecteur des covariables (poids, âge, sexe, créatinine…) pour l’individu « i » ;
ηi : les effets aléatoires interindividuels qui suivent une distribution normale de moyenne nulle et de matrice de variance-covariance Ω constante ;
εij : l’erreur résiduelle ou l’effet aléatoire intra-individuel qui affecte la concentration « j » de l’individu « i ». Cet effet aléatoire suit une distribution normale de moyenne nulle et de matrice de variance-covariance Σ constante.
Une fois que le modèle général est défini, l’étape qui suit consiste à estimer les paramètres du modèle (i.e., θ, Ω et Σ). Le principe de l’estimation présente une certaine analogie avec celui de la régression linéaire dans laquelle les paramètres (la pente et l’ordonnée à l’origine) sont estimés à partir des données en se basant sur une méthode à moindres carrés (« least squares » en anglais). La différence entre chaque paire de concentration observée (Cobs) et prédite (Ĉ) donne la résiduelle (Cobs – Ĉ). Les meilleurs paramètres correspondent à ceux qui sont associés à une valeur la plus faible de la somme des carrés des résiduelles dont l’expression peut être considérée comme une « fonction objective » (ou « objective function » en anglais). Chaque paire de paramètres est associé à une valeur de cette fonction objective (OFV) et la plus faible valeur correspond au meilleur ajustement des données (« best of fit »).
Cependant, pour les données PK, c’est la méthode de maximum de vraisemblance (« maximum likelihood estimation » en anglais) qui est utilisée. Dans cette méthode, la fonction objective à minimiser est égale à : OFV = -2 x Log(likelihoods of the data)
En raison de la complexité des modèles PK, la recherche de la valeur minimale de l’OFV ne peut pas être effectuée par moyen algébrique et l’approximation numérique est plutôt utilisée. Cela consiste à chercher de façon itérative les valeurs des paramètres minimisant cette fonction. Pourtant, la valeur absolue de la fonction objective n’est pas utile. C’est sa valeur relative entre 2 ou plusieurs modèles qui permettent de les classifier en termes de meilleur ajustement des données. En outre, l’OFV suit une distribution de khi-2 (χ2) qui permet le recours à ce test statistique pour faire une comparaison entre différents modèles.

Estimation bayésienne des paramètres individuels

Les analyses de PK-pop permettent d’obtenir les paramètres de population. Un estimateur bayésien utilise ensuite ces valeurs de population des paramètres (ainsi que leurs variances) et les données individuelles (i.e., les concentrations observées) pour générer des valeurs individuelles des paramètres en minimisant une fonction objective spécifique. Dans NONMEM, cette étape d’estimation est appelée l’étape de post hoc, d’ « empirical Bayes » ou « conditional estimation ». Pour un sujet donné, la fonction objective à minimiser peut être, de manière simplifiée, illustrée de façon suivante :
où n est le nombre de concentrations observées ; m est le nombre de paramètres PK ; σ est l’écart-type des concentrations observées et ω K,pop, l’écart-type du Kème paramètre PK.
Les paramètres PK individuels (θk) sont estimés en minimisant cette fonction à l’aide d’un algorithme mathématique. Autrement dit, on cherche à obtenir l’équilibre entre la déviation des concentrations prédites individuelles (Ĉ) par rapport aux concentrations observées (Cobs) et la déviation de la valeur individuelle des paramètres à estimer (θk) par rapport à sa valeur de population (θk,pop).
Pour les individus ayant des données trop éparses ou peu informatives pour le paramètre en question (e.g., les prélèvements sanguins après la phase d’absorption ne renseignent pas sur les paramètres de l’absorption), le second terme l’emporte sur le premier et doit être minimisé. Par conséquent, les valeurs individuelles des paramètres se rapprochent de la valeur de population. On parle donc de l’« η-shrinkage » (un terme anglais pour rétrécissement de l’η). L’étendue du « shrinkage » a des conséquences sur la fiabilité des valeurs individuelles des paramètres. Quand le shrinkage est important (e.g, supérieur à 20-30%), la représentation graphique des paramètres individuels ou « η » versus une covariable peut masquer une vraie corrélation, montrer une allure déformée ou indiquer une relation qui n’existe pas. Egalement, l’exposition (AUC) calculée à partir de la formule « Dose/CL » devient erronée, ce qui réduit, par exemple, le pouvoir de détecter une relation exposition-réponse. L’η-shrinkage peut être déterminé par l’équation suivante : η-Shrinkage (%) = [ ] x 100%
Où ω est la variabilité interindividuelle du paramètre et SD est l’écart-type des valeurs individuelles de η estimées par l’approche bayésienne et appelées « empirical Bayesian estimates » de l’η (EBEη). Le shrinkage de 0% correspond à la situation où le modèle est correctement choisi, les données individuelles sont suffisamment abondantes et les valeurs estimées des paramètres se confondent avec les valeurs réelles. Le shrinkage de 100% est observé quand les données ne contiennent pas d’informations en rapport avec les paramètres en question et les paramètres individuels prennent la valeur typique de population.
L’η-Shrinkage est souvent corrélé avec un autre type de shrinkage qui est l’ε-Shrinkage. Il correspond à la situation où les IPRED se rétrécissent vers les concentrations observées ou IWRES (les résiduelles individuelles pondérées ou « Individual Weighted Residuals » en anglais) tendent vers 0 entrainant un sur-ajustment des données (« over-fitting »). Ce type de shrinkage se calcule de manière suivante : ε-Shrinkage (%) = 1 – SD(IWRES) où IWRES =0
Quand l’ε-Shrinkage dépasse 20-30%, le pouvoir de détecter l’inadéquation du choix du modèle (« model misspecification » en anglais) basé sur les IWRES est diminué. L’ε-Shrinkage devient important quand le nombre d’observations (ou données de concentrations) est égal ou inférieur au nombre d’effets aléatoires.
En règle générale, plus la variabilité résiduelle est faible, plus les données sont informatives et moins l’η-Shrinkage sera élevé. Un nombre élevé d’effets aléatoires interindividuels et une forte variabilité de ceux-ci correspondent à un ε-Shrinkage élevé.37,39

Evaluation d’un modèle

Plusieurs approches sont utilisées pour évaluer un modèle PK de population. L’OFV est généralement utilisée pour sélectionner ou éliminer des modèles pendant la phase précoce du développement du modèle. Différentes représentations graphiques peuvent également permettre de visualiser l’adéquation du modèle. Par ailleurs, la précision des paramètres peut aussi être un indicateur d’un modèle approprié. Ensuite, pour discriminer entre différents modèles « candidats » pour un modèle final, des méthodes basées sur la simulation telle que le « Visual Predictive Check » ou VPC peuvent être utiles. En outre, pour des modèles complexes, le « boostrap » peut être considéré.

Evaluation graphique

Différents graphiques sont utilisés40 :
– concentrations observées versus concentrations prédites individuelles (IPRED) ou de population (PRED)
– WRES (résiduelles pondérées ou « Weighted Residuals ») ou IWRES versus temps ou PRED
– corrélation entre « Empirical Bayesian Estimates » (EBEs)
– EBE(s) versus covariables
– IPRED et PRED versus temps pour chaque individu

Précision des paramètres

NONMEM donne une précision associée à chaque paramètre estimé. Elle peut être exprimée en SE « Standard Error » (l’erreur standard) ou en intervalle de confiance (IC) : IC = Valeur du paramètre ± SE
Un modèle avec une mauvaise précision des paramètres est souvent sur-paramétré (« overparameterized model» en anglais). Le niveau de précision qui est acceptable dépend de la taille des données. Il est souvent de l’ordre de < 30% SE pour les effets fixes et < 50% SE pour les effets aléatoires (SE pour les effets aléatoires sont en général plus grand que celui pour les effets fixes). L’évaluation de la précision est importante pour les paramètres décrivant l’effet des covariables. L’IC pour le facteur d’influence d’une covariable contenant la valeur 0 pourrait indiquer que l’estimation de l’effet de la covariable n’est pas fiable.37

« Bootstrap »

Le bootstrap est une méthode alternative à l’estimation de la précision des paramètres par une technique de ré-échantillonnage (« resampling »). Il consiste à créer « x » bases de données dont chacune contient le même nombre de sujets que la base de données initiale. Les sujets qui composent chaque base de données sont tirés au sort, un par un et avec remise, de la base initiale (i.e., le tirage permet de retrouver plusieurs fois le même sujet dans la base de données). Ensuite, chaque base de données est analysée avec le modèle final et les « x » valeurs de chaque paramètre sont récupérées. Si les paramètres sont prédits avec une bonne précision, leur valeur est contenue dans l’intervalle choisi (souvent entre le 2,5ème et le 97,5ème centiles) et ne comprend pas la valeur 0.

« Visual Predictive check »

Le modèle final est utilisé pour simuler de nouveaux datasets avec le même schéma de posologie. Ensuite, les concentrations observées, les centiles (e.g. 5%, 50% et 95%) des concentrations observées, les mêmes centiles des concentrations simulées ainsi que leur intervalle de confiance (90%) sont représentés dans un graphique (Figure 6). Si le modèle est correct, les centiles des concentrations observées doivent se trouver à l’intérieur des intervalles de confiance correspondants.40

GENERALITES SUR LE CARBOPLATINE

Présentation

Le carboplatine est un médicament cytotoxique du groupe des alkylants appartenant structurellement à la famille des dérivés de platine dont le chef de file est le cisplatine. Depuis son introduction en clinique en 1981, plusieurs études ont permis de confirmer son utilisation comme une alternative au cisplatine dans le traitement de plusieurs tumeurs solides. En effet, en tant qu’analogue de deuxième génération du cisplatine, le carboplatine partage plusieurs propriétés structurales et pharmacologiques avec celui-ci. Pourtant, il est dépourvu de la neurotoxicité et néphrotoxicité dose-limitante que possède son précurseur. Ses caractéristiques lui permettent d’être un candidat idéal pour la chimiothérapie d’intensification de dose.

Structure chimique et activité pharmacologique

Les dérivés du platine sont des complexes de coordination du platine tétravalent (platine II). En règle générale, ils contiennent tous, en configuration « cis », deux groupements amines et deux ligands anioniques appelés « groupement partant ». Cependant, les deux amines et les deux ligands anioniques peuvent être également remplacés respectivement par une diamine chélatante ou dicarboxylate chélatant.
La structure la plus simple parmi tous les dérivés est celle du cisplatine comportant deux groupements amines et deux atomes de chlore (Figure 7). Le carboplatine a une structure plus complexe constituée de deux groupements amines et d’un groupement cyclobutane dicarboxylé. Après l’administration, les dérivés du platine subissent une hydrolyse spontanée (non enzymatique) qui va se dérouler successivement sur les deux ligands anioniques. Cette réaction aboutit à la formation d’un composé parfaitement identique pour tous les dérivés, le « diaquaplatine » qui constitue le métabolite actif. Il possède une activité cytotoxique et est responsable à la fois de l’activité anti-tumorale et des effets indésirables. C’est la stabilité du carboplatine vis-à-vis de cette hydrolyse qui détermine les différences en termes de propriétés pharmacocinétiques et de profil de toxicité entre celui-ci et le cisplatine.

Mécanisme d’action cytotoxique

Les dérivés diaquaplatines sont des éléments extrêmement électrophiles qui, à proximité de l’ADN, vont former des liaisons covalentes avec différentes bases, tout particulièrement avec l’azote 7 de la guanine (Figure 8). Cette réaction est responsable de la formation de ponts intra- et inter-brins, ce qui va entraîner une distorsion de la double hélice d’ADN. Ces adduits vont perturber les phénomènes de la réplication et de la transcription de l’ADN. En plus de son action directe sur l’ADN, l’implication d’autres éléments cellulaires dans la cytotoxicité du carboplatine (et cisplatine) a été aussi décrite : protection des adduits vis-à-vis des phénomènes de réparation par les protéines de la famille high mobility group (HMG, en particulier HMGB1) et déclenchement de l’apoptose par le système mismatch repair (MMR) suite à la reconnaissance des adduits.
Les dérivés du platine ont une activité cytotoxique cycle-dépendante: ils perturbent les différentes phases constituant le cycle de division cellulaire. L’intensité de l’effet cytotoxique correspond donc au produit concentration x temps (C × t). Cette caractéristique s’oppose à celle des anti-métabolites qui possèdent une activité phase-dépendante et nécessitent une durée d’exposition suffisante pour maximiser la probabilité d’exposer les cellules tumorales en « phases sensibles » aux médicaments. Par conséquent, en termes de relation pharmacocinétique-pharmacodynamie (PK-PD), l’AUC est le paramètre PK le plus pertinent pour le carboplatine. De plus, cela justifie les schémas d’administration (i.e., perfusion intraveineuse (IV) courte) adoptés pour les dérivés de platine.44–46

Propriétés pharmacocinétiques

Le carboplatine n’est pratiquement pas absorbé par voie orale. En clinique, il est donc administré en perfusion IV ou, dans certains protocoles, intrapéritonéale (IP)47,48. Après l’administration, le platine se trouve dans le plasma sous trois formes: le platine lié (tout particulièrement aux protéines plasmatiques), la molécule du carboplatine libre et les produits de dégradation contenant le platine décarboxylé49. Les deux derniers composés constituent « le platine libre ou ultrafiltrable (UF) ». Le carboplatine se fixe de manière irréversible aux protéines plasmatiques. Par conséquent, la fraction liée [i.e, le rapport (concentration liée aux protéines / la concentration totale)] augmente au cours du temps car la forme liée est éliminée beaucoup plus lentement que la forme libre. Cette fraction liée est d’environ 24% pendant les quatre premières heures après l’administration IV et atteint 87% à 24 heures50. Le profil d’élimination du platine plasmatique total (libre + lié) est presque superposable à celui du platine UF pendant les 6 premières heure après l’administration51.
L’excrétion se fait quasi-exclusivement par les reins. Environ 65%-70% de la dose totale est éliminée sous forme inchangée dans les urines pendant les 12-16 heures suivant l’administration, et les 30%-35% restants, constitués de platine lié aux protéines plasmatiques et ainsi inactif, sont éliminés lentement au cours des 5 jours suivants51–53.
La pharmacocinétique du carboplatine peut être décrite par un modèle bicompartimental dans lequel l’élimination se fait à partir du compartiment central. La clairance est proportionnelle à la filtration glomérulaire et le volume de distribution du compartiment central est corrélé avec le volume du liquide extracellulaire49. La clairance du platine ultrafiltrable (CLUF) est en moyenne de 107 mL/min avec une clairance rénale de 81 mL/min et une clairance non-rénale de 26 mL/min54.

Méthodes analytiques appliquées en pharmacocinétique

La concentration du carboplatine peut être déterminée par 3 types de méthodes :
– La spectrophotométrie d’absorption atomique (SAA)55,56 qui permet de déterminer les concentrations de platine dans la matrice biologique. Il s’agit d’une méthode antérieurement développée pour le cisplatine, qui peut s’appliquer au carboplatine, afin de déterminer les concentrations UF, plasmatiques, mais également urinaires ou encore tissulaires (après digestion des tissus). Les échantillons en solution sont portés à une température progressivement croissante dans un four en graphite, permettant d’abord l’évaporation de l’eau, puis l’atomisation des impuretés et enfin, à la température optimale de 2400°C, l’atomisation du platine. Une longueur d’onde spécifique au platine est ensuite dirigée vers ces vapeurs atomiques, et la quantité de la radiation absorbée est proportionnelle à la concentration du platine.
– La spectrophotométrie de masse couplée à un plasma inductif (ICP-MS) 57,58 qui, comme la SAA, permet de déterminer les concentrations de platine dans la matrice biologique. Le platine contenu dans les échantillons est d’abord atomisé et ionisé dans une torche à plasma à très haute température (7500-10000°K59) et puis, séparé, détecté et dosé par le spectrophotomètre de masse.
– La chromatographie liquide de haute performance (HPLC) qui, moins utilisée que les 2 méthodes précédentes, permet de déterminer spécifiquement les concentrations de la molécule de carboplatine. L’HPLC peut être en phase normale ou en phase inverse et il existe différents types de détection : détection UV60,61, dérivatisation post-colonne suivie d’une détection UV62,63, détection par liaison à un groupement phosphorescent64, détection électrochimique65 ou détection à barrettes de diode66. Depuis, la fin des années 1990, des techniques d’HPLC couplées à de la spectrométrie de masse (LC-MS)67,68, couplées à une torche à plasma (LC-ICP-MS)69,70, ou couplées à la spectrométrie de masse en tandem (LC-MS-MS)71,72 ont été développées permettant de baisser le seuil de détection.
Dans les études PK, ce sont les paramètres PK de la forme libre ou ultrafiltrable (non lié aux protéines plasmatiques) du carboplatine qui sont étudiés. Pour doser le platine ultrafiltrable, toutes les méthodes analytiques sont précédées d’une phase de prétraitement de l’échantillon permettant d’obtenir l’ultrafiltrat (Figure 9). Cependant, il est possible de doser le carboplatine dans le plasma (carboplatine plasmatique total) ou dans d’autres matrices.

Individualisation de doses

Le carboplatine est le seul médicament cytotoxique pour lequel le calcul de dose est basé sur une valeur cible de l’AUC des concentrations plasmatiques ultrafiltrables (et non en mg/m2). La dose est déterminée par la relation : Dose= AUC cible x CLUF. Cette méthode est adoptée pour le carboplatine en raison à la fois de sa fixation irréversible aux protéines plasmatiques et de son élimination quasi-exclusivement par filtration glomérulaire. De plus, la corrélation entre l’AUC du carboplatine et la pharmacodynamique a été bien documentée73–75. Pour un protocole de chimiothérapie donné, il est donc nécessaire de définir une AUC cible et de se donner le moyen de prédire la clairance.
En général, une AUC cible est empiriquement choisie en fonction des chimiothérapies concomitantes et de traitements antérieurs73,76,77. Une AUC cible de 7 mg.min/mL est indiquée dans les protocoles de carboplatine en monothérapie chez les patients non prétraités et 6 mg.min/mL en cas de prétraitement. Chez les patients lourdement prétraités ou en cas d’association avec d’autres molécules myélosuppressives (etoposide, cyclophosphamide ou vinorelbine), une AUC cible entre 3-5 mg.min/mL doit être considérée52,78,79. En cas d’association avec le paclitaxel, l’AUC cible est de 6 mg.min/mL en raison d’une interaction pharmacodynamique entre le paclitaxel et le carboplatine (réduction de l’incidence de thrombopénie induite par le carboplatine)80–82.
En raison de son élimination principalement rénale et de l’hétérogénéité de la fonction rénale, le carboplatine présente une variabilité interindividuelle importante d’ordre pharmacocinétique 83. Différentes formules de prédiction de la clairance ont été développées dans l’optique de réduire cette variabilité en tenant compte des caractéristiques pertinentes des patients. Ces formules permettent donc l’individualisation a priori de doses du carboplatine.
 Formule de Calvert 78
Dose de carboplatine (mg) = AUCcible (mg.min/mL) . (GFR + 25)
Où GFR (mL/min) : débit de filtration glomérulaire (« Glomerular Filtration Rate » en anglais). Cette formule est basée sur l’observation d’une forte corrélation entre le GFR et la clairance rénale du carboplatine. Le terme « GFR + 25 » correspond à la clairance du carboplatine qui est proportionnelle au GFR ajoutée de 25 (sa clairance non-rénale). Initialement, le GFR était déterminé par la méthode isotopique qui consistait à injecter par voie intraveineuse l’acide éthylènediaminetétraacétique marqué au chrome 51 (51Cr-EDTA), une molécule chimiquement stable éliminée uniquement par filtration glomérulaire. Cependant, l’utilisation de cette technique en pratique de routine est limitée par différentes raisons telles que la nécessité de pouvoir disposer d’un centre de médicine nucléaire, le coût de cette technique et la durée d’hospitalisation supplémentaire pour le patient.
Puisque la créatinine, une molécule endogène, est essentiellement éliminée par la filtration glomérulaire, le GFR peut donc être estimé en calculant la clairance de cette molécule, ce qui permet de prédire ensuite la clairance du carboplatine en routine. Il existe de différentes formules de calcul de la clairance de la créatinine (CrCL), mais les plus utilisées sont:
 Cockcroft-Gault84 :
CrCL (mL/min) = ( – ) x 0,85 (si femme) [ âge (années), poids (kg), créatininémie (mg/dL) ]
 Jelliffe85 :
CrCL (mL/min) = [ ] x 0,9 (si femme) [ âge (années), créatininémie (mg/dL) ]
 Formule de Chatelut 86
CLcarbo (mL/min) = [ âge (années), poids (kg), créatininémie (µM), sexe =0 si homme et =1 si femme ]
Cette formule permet de prédire directement la clairance du carboplatine à partir des caractéristiques du patient sans avoir recours à l’estimation du GFR. Elle a été complétée pour tenir compte des patients obèses pour lesquels le poids réel est remplacé par la moyenne arithmétique du poids réel et du poids idéal87. Une correction liée au biais dû à la différence dans la méthode de mesure de la créatininémie a aussi été proposée88.
 Formule de Thomas 89
CLcarbo (mL/min) = 110.( ) .( ) .( ) .( ) . [ âge (années), poids en (kg), créatininémie (µM), cystatine C (mg/L), sexe = 0 si homme et =1 si femme ]
Cette formule contient, en plus des caractéristiques présentes dans les autres formules précédentes, le taux sérique de cystatine C, petite protéine éliminée par filtration glomérulaire. Elle a été considérée comme un nouveau marqueur de la filtration glomérulaire meilleur que la créatinine90,91. En effet, le taux de la créatinine dans le plasma dépend non seulement de la filtration glomérulaire mais aussi de la masse musculaire du patient, ce qui résulte en une surestimation de la clairance chez les patients obèses et dénutris. De plus, elle est excrétée en petite quantité par sécrétion tubulaire qui augmente quand il y a une augmentation de la créatininémie, entrainant ainsi une surestimation du GFR chez les patients présentant une diminution modérée à sévère du GFR (< 50 mL/min)92. Contrairement à la créatinine, la cystatine C est éliminée uniquement par filtration glomérulaire, réabsorbée mais totalement catabolisée par les cellules tubulaires proximales93. En outre, elle est produite par l’ensemble des cellules de l’organisme, ce qui avait permis d’espérer d’en faire un marqueur idéal de la fonction rénale93–95 : son seul taux plasmatique ne nécessitant aucune autre correction telle que poids, âge, … . Cependant, les travaux dans le domaine de la néphrologie96 ont montré qu’il fallait associer à ce taux de cystatine C sérique d’autres covariables (poids, âge, sexe, albuminémie …). En outre, dans l’étude où la formule a été développée89, l’auteur a démontré que la cystatine C seule associée au poids, à l’âge et au sexe n’a pas permis une meilleure prédiction de la clairance du carboplatine que l’association de la créatinine à ces 3 covariables. En revanche, la combinaison des deux marqueurs (cystatine C et créatinine) avec les autres 3 covariables a entrainé une amélioration significative de la prédiction par rapport aux équations basées seulement sur 4 covariables (i.e., poids, sexe, âge associés à la cystatine C ou la créatinine). Cela montre que la cystatine C ne peut pas complètement remplacer la créatinine. Cette étude a été réalisée sur un nombre relativement limité de patients (n=45) et a fait l’objet d’une validation sur une population plus importante97.

Mécanisme d’action cytotoxique

L’étoposide est un cytotoxique phase-dépendant qui a une activité inhibitrice sur une enzyme nucléaire, la topo-isomérase.
En raison de la structure en double hélice de l’ADN, l’ouverture des deux brins lors des processus de transcription, de réplication et de réparation peut entrainer des contraintes topologiques. Les topo-isomérases permettent de résoudre ce problème en ouvrant et refermant la liaison phosphodiester de l’ADN permettant ainsi des transformations topologiques. Selon leur structure et mécanisme d’action, ces enzymes sont subdivisées en type I (Topo I) et type II (Topo II). Topo I agit sur un seul brin de l’ADN et Topo II, sur des deux brins.
L’étoposide agit en inhibant l’activité de la topo II. Cette inhibition entraîne la stabilisation des sites de rupture des deux brins d’ADN catalysés par l’enzyme. Par conséquent, le passage de la cellule à travers la phase S du cycle cellulaire est retardé et le cycle s’arrête totalement à la phase G2101,102. Cette nature « phase-spécifique » de la cytotoxicité de l’étoposide a été bien documentée103.
L’interaction entre l’étoposide et la topo II est réversible et la dissociation du complexe ADN-topo II-étoposide permettrait la réparation de l’ADN et de limiter la cytotoxicité du médicament 100. Cette hypothèse pourrait expliquer l’effet de la durée d’exposition sur le degré de mort cellulaire in vitro104–106 et l’influence du schéma thérapeutique (administration continue) sur l’efficacité du traitement dans certains essais cliniques107–110.

Propriétés pharmacocinétiques

L’étoposide est très peu soluble dans l’eau98. Quand il est administré par voie orale, sa demi-vie d’absorption est de 0,2 – 0,4 heures111 et la concentration maximale (Cmax) est atteinte à 0,5 – 4,0 heures111–113. La biodisponibilité se situe entre 40% et 90% avec une forte variabilité PK inter- et intra-individuelle100.
Le volume de distribution à l’état d’équilibre varie entre 3 et 21 L/m2.110,112,114 Les données précliniques chez les souris ont montré une distribution importante dans les tissus de l’intestin, du foie et des reins comparés à d’autres tissus115. La pénétration de l’étoposide dans le liquide cérébrospinal après l’administration intraveineuse est très variable, allant de «non-détectable» à 2,5 µM à 1 – 4 heures après la fin de la perfusion de 100 – 800 mg/m2 d’étoposide116–118.
Dans le plasma, l’étoposide se fixe principalement à l’albumine et, de façon moindre, à l’acide alpha-1 glycoprotéine acide. La fraction liée est de 93-98% et dépend des taux d’albuminémie et de bilirubinémie. Elle diminue en cas d’hypo-albuminémie et/ou augmentation de la bilirubinémie119–121.
L’étoposide est métabolisé par le CYP3A4 et CYP3A5 dont l’expression est régulée par NR1I2 (ou « pregnane X receptor » ou PXR) (Figure 11). En outre, la conversion de l’étoposide en métabolites O-déméthylés (catéchol and quinone) peut aussi être catalysée par la prostaglandine synthase (PTGS) ou la myélopéroxidase (MPO). Ces métabolites sont des inhibiteurs de la topo-isomérase II aussi puissants que la molécule mère et peuvent générer davantage de stress oxydant. Enfin, l’étoposide et ses métabolites peuvent être biotransfomés par la glutathion-S-transférase (GSTT1/GSTP1) et l’UDP-glucuronosyltransférase (UGT1A1) en métabolites inactifs122.
Après l’administration intraveineuse, la décroissance des concentrations de l’étoposide peut être décrite comme un processus biphasique avec une demi-vie de distribution d’environ 1,5 heures et une demi-vie d’élimination terminale de 3 à 12 heures. L’élimination de l’étoposide se fait par excrétion rénale et par métabolisme hépatique. La clairance plasmatique totale varie entre 33 et 48 mL/min [ou 16 à 36 (mL/min)/m2] dont 30% à 67% est représenté par la clairance rénale. Les paramètres d’élimination (la clairance et la demi-vie) sont indépendants de la dose dans un intervalle de 100 à 600 mg/m2. 114,123,124

Méthodes analytiques appliquées en pharmacocinétique

Les concentrations plasmatiques de l’étoposide sont déterminées par différentes méthodes analytiques telles que l’HPLC, chromatographie en phase liquide à ultra-haute performance couplée à la spectrométrie de masse (UPLC-MS) ou la chromatographie en phase liquide couplée à la spectrométrie de masse (LC-MS). Un détecteur électrochimique, à fluorescence, à ultraviolet ou visible a été utilisé pour ces méthodes de chromatographie liquide. En général, il s’agit de chromatographie en phase inverse avec une phase mobile contenant un tampon ou un mélange de solvants organiques et d’eau. L’étalon interne le plus couramment utilisé est le téniposide mais d’autres composés ont pu être également utilisés (podophyllotoxine, phénacetine, diphenylhydantoïne et lamotrigine). L’étoposide est habituellement extrait par extraction liquide-liquide, mais l’extraction en phase solide a également été décrite. En général, 100 à 500 µL de plasma ou sérum sont nécessaires pour le dosage. Récemment, la détermination des concentrations de l’étoposide à partir d’une goutte de sang séchée (20 µL) a été également développée. Il s’agit de concentrations sanguines totales qui doivent être corrigées par l’hématocrite pour obtenir les concentrations plasmatiques.125

Relation pharmacocinétique-pharmacodynamique

Plusieurs études réalisées dans les années 1990s ont mis en évidence la relation entre la PK de l’étoposide et la toxicité hématologique. Certaines d’entre elles ont démontré une corrélation entre la concentration plasmatique à l’état d’équilibre (CSS) d’une perfusion IV de 72 heures ou de 14 jours et la neutropénie126,127.
Dans d’autres études, une corrélation significative entre la concentration minimale à 24 heures (Cmin,24h) et la neutropénie ou la thrombopénie a été observée. Dans l’étude menée par Grungberg et al.,128 l’étoposide a été administré par voie orale à une dose 50 mg 2 fois par jour pendant 14 jours toutes les 4 semaines. L’auteur a trouvé que la valeur de Cmin,24h ≥1,49 mg/L était associée au nadir des granulocytes inférieur à 500/µL et Cmin,24h ≥ 1,98 mg/L, au nadir des plaquettes inférieur à 100 000/µL. Dans deux autres études129,130 évaluant une dose orale de 100 mg par jour d’étoposide administré pendant 21 jours tous les 4 semaines, une corrélation significative a été observée entre la neutropénie et la moyenne de Cmin,24h aux jours 8, 15 et 22. La Cmin,24h > 0,3 mg/L était associée à une myélosuppression plus sévère. Miller et al.131–133 ont montré également qu’une valeur de Cmin,24h supérieure à ce seuil était associée à une neutropénie de grade 3 ou 4 chez les patients recevant 50 mg/m2/jour de l’étoposide par voie orale pendant 21 jours toutes les 4 semaines. Cependant, d’autres études n’ont trouvé aucune corrélation entre les concentrations de l’étoposide et la toxicité hématologique134–136.
Enfin, une corrélation entre l’AUC de l’étoposide et la neutropénie a également été démontrée 137–139. Dans l’une de ces études137, un modèle Emax (effet maximal)-sigmoïde a été utilisé pour décrire la relation entre l’AUC de l’étoposide du jour 1 et la neutropénie (en pourcentage de diminution du nombre absolu de neutrophiles) dans un schéma d’administration de 100 mg/jour par voie orale pendant 15 jours. L’auteur a défini une valeur seuil de l’AUC de 2 mg.min/mL au-dessus de laquelle une neutropénie de grade 3 ou 4 a été observée. Certains travaux ont par ailleurs observé une meilleure corrélation entre les paramètres PK (AUC, Cmin,24h) de l’étoposide libre (non lié aux protéines plasmatiques) et la toxicité hématologique que ceux de l’étoposide plasmatique totale140,141.
En ce qui concerne l’efficacité du traitement, un nombre limité d’études ont montré une relation entre la PK et la réponse tumorale ou la survie. Slevin et al.107 ont comparé l’efficacité de deux schémas d’administration (perfusion IV de 24 heures de dose unique versus schéma habituel : perfusion IV de 2 heures pendant 5 jours consécutifs) chez les patients atteints de cancer du poumon à petites cellules. Ils ont observé que la durée d’exposition à une concentration d’étoposide > 1 mg/L était associée à l’activité anti-tumorale. Dans une autre étude où 100 mg d’étoposide a été administré per os pendant 21 jours toutes les 4 semaines, une différence statistiquement significative (p=0,017) a été observée entre Cmin,24h moyenne des répondeurs et des non-répondeurs (0,37 mg/L versus 0,21 mg/L)130.
En 2008, You et al.142 ont démontré une corrélation significative entre la clairance et l’AUC de l’étoposide et la survie globale des patients atteints du cancer des poumons à petites cellules. L’étoposide a été administré à une dose de 120 mg/m2 par perfusion IV de 30 min pendant 3 jours en association avec doxorubicine-ifosfamide ou des dérivés de platine. L’auteur a observé, par des analyses multi-variées, que la clairance de l’étoposide ≤ 2,22 L/h et l’AUC > 254,8 mg.h/L étaient significativement et indépendamment corrélées avec une survie globale plus longue.

Individualisation de doses

Plusieurs études ont été publiées à propos de l’individualisation de dose de l’étoposide basée sur les caractéristiques des patients. En cas d’insuffisance rénale sévère (clairance de la créatinine ≤ 30 mL/min), une diminution de dose d’environ 30% pourrait permettre de corriger l’augmentation de l’AUC et d’obtenir un niveau d’exposition similaire aux patients avec une fonction rénale normale143.
En cas d’insuffisance hépatique, il est important de tenir compte de l’impact de l’albuminémie et de la bilirubinémie sur la pharmacocinétique de l’étoposide. En effet, l’étoposide se fixe principalement à l’albumine et il a été montré que la bilirubine sérique influence cette fixation, probablement, par déplacement de la liaison. Une augmentation des concentrations libres de l’étoposide a été observée chez les patients insuffisants hépatiques en raison d’une diminution des sites de liaison due à l’hypoalbuminémie. En cas d’hyperbilirubinémie chez ces patients, l’exposition à l’étoposide libre est également augmenté en raison de l’augmentation de la fraction libre et la diminution concomitante de la clairance de l’étoposide libre144–146. Une réduction de dose d’au moins 30% chez ces patients est essentielle pour prévenir une augmentation de toxicité123.
En dehors de ces recommandations, une analyse PK-pop147 a été réalisée pour évaluer l’effet de différentes covariables sur les paramètres PK de l’étoposide total et libre. Une formule a été établie associant la clairance plasmatique totale de l’étoposide au taux d’albuminémie, au taux de protéine totale, à la créatininémie, au poids et à la présence ou non de métastases hépatiques. La clairance de l’étoposide libre était négativement corrélée à la créatininémie mais, par contre, ne dépendait pas du taux de protéinémie ou d’albuminémie. Ce modèle de PK-pop indique que la fonction rénale est le seul facteur à prendre en compte pour le choix de dose, au moins chez une population de fonction hépatique normale147.
Le TDM a été beaucoup évalué pour l’administration orale répétée de l’étoposide en raison de la forte variabilité de l’exposition due à sa faible biodisponibilité100. Cependant, son schéma d’administration en perfusion continue sur plusieurs jours facilite aussi la mise en place de cette pratique. Ratain et al.126 ont été le premier à évaluer l’intérêt de l’adaptation de dose de l’étoposide (administré en perfusion continue de 72 h) basée sur la Css à 24 h après le début de la perfusion. La dose a été augmentée de 375 à 459 mg/m2/jour sans augmenter la toxicité, ce qui pourrait se traduire en une augmentation de l’effet antitumoral. Joel et al.148 ont évalué le TDM chez 2 cohortes de patients atteints du cancer du poumon à petites cellules recevant l’étoposide en monothérapie en perfusion continue sur 5 jours, toutes les 3 semaines. La première cohorte (15 patients) a débuté le traitement par l’étoposide à 2 µg/mL, avec une escalade de dose à 3 µg/mL pour les cycles 3 et 4 et à 4 µg/mL pour les cycles 5 et 6 (si la toxicité est tolérable). La seconde (34 patients) a commencé à 3 µg/mL, avec une escalade de dose à 4 et 5 µg/mL aux cycles 3 et 5 respectivement. Les concentrations de l’étoposide ont été monitorées à 18 heures et 66 heures après le début de la perfusion pour permettre l’adaptation de dose. Les auteurs ont observé que la variabilité interindividuelle était significativement réduite et que dans la seconde cohorte, la distribution des grades de neutropénie du premier cycle était beaucoup plus proche de la distribution Normale par rapport aux autres études de l’étoposide en monothérapie de leur établissement.
En 1993, Strömgren et al.149 ont développé une stratégie de prélèvements limités pour estimer l’AUC de l’étoposide par une régression linéaire multiple. L’étoposide a été administré à la dose de 100 mg/m2 en perfusion IV de 90 min en association avec le carboplatine. L’AUC était corrélée avec les concentrations à 5 min, 4 h et 21 h après la fin de la perfusion. Ensuite, la méthode a été prospectivement évaluée et la précision de l’estimation était de 13,4%, 10,8%, et 9,0% pour le modèle à un, deux, et trois temps de prélèvement respectivement. En 1999, Tranchand et al.150 ont évalué et validé l’estimation des paramètres PK de l’étoposide par l’approche bayésienne à partir de 3 prélèvements (à la fin de la perfusion, 5 h et 24 h après le début de la perfusion). L’estimation de la clairance a été associée à un faible biais (-1,72%) et une bonne précision (environ 16%).
Ciccolini et al.151 ont évalué un TDM basé sur une analyse bayésienne pour l’étoposide administré en perfusion continue pendant 5 jours chez 25 patients (47 cycles). L’analyse bayésienne a été réalisée au jour 2 à partir de 3 concentrations (1h, 12h et 24 h après le début de la perfusion) et des valeurs de population des paramètres obtenus d’une population de référence (14 patients sans aucune adaptation de dose). La dose a été adaptée aux jours 4 et 5 selon les valeurs individuelles de paramètres pour atteindre une Css cible. Ils ont montré que la Css était dans l’intervalle de ±15% de la Css cible dans 77% des cycles par rapport à seulement 36% chez la population de référence. La comparaison des résultats cliniques entre les 2 groupes de patients pourrait permettre d’évaluer l’intérêt du TDM. Malheureusement, elle n’a pas été effectuée dans cette étude.

Indications

Les indications les plus courantes seront présentées dans cette partie selon le thésaurus Oncomip (version 2009, 2013, 2014 et 2016) et le thésaurus des chimiothérapies de l’Institut Claudius-Regaud (Version 2017).
 Uro-génital
 Cancer testiculaire :
o En association avec la bléomycine et le cisplatine (protocole BEP), perfusion IV de 100 mg/m2/jour pendant 5 jours tous les 21 jours pendant 3 cycles pour les patients de bon pronostic et 4 cycles pour ceux de pronostic intermédiaire. Ce protocole peut être précédé par l’administration du taxol et suivi de celle de l’oxaliplatine au jour 10 (protocole T-BEP-Oxali) pour les patients qui ne répondent pas suffisamment au 1er cycle de BEP.
o En association avec l’ifosfamide et le cisplatine, perfusion IV de 75 mg/m2/jour pendant 5 jours (traitement de 2ème ligne) tous les 21 jours, protocole VIP.
o En association avec le carboplatine (AUC=6 mg.min/mL), en perfusion IV de 100 mg/m2/jour pendant 5 jours tous les 21 jours.
 Tumeur germinales métastatiques réfractaires ou en rechute :
o Intensification Motzer (protocole TICE) : en association avec le carboplatine, perfusion IV (d’une heure) 3 jours de suite pendant 3 cycles précédés par 2 cycles de paclitaxel et ifosfamide.
 Pneumologie
 Cancer du poumon à petites cellules :
o En association avec le carboplatine (AUC=5 ou 4 mg.min/mL), perfusion IV de 2 heures de 100 à 120 mg/m2/jour pendant 3 jours tous les 21 jours pendant 3 à 6 cycles.
 Hématologie
 Lymphome de Hodgkin :
o En association avec le cyclophosphamide, la doxorubicine, la vincristine, la bléomycine et la procarbazine, perfusion IV de 200 mg/m2/jour pendant 3 jours tous les 21 jours ; protocole BEACOPP.
 Lymphomes non-Hodgkinien (lymphomes T, lymphomes digestifs, complication neurologique ou sujets > 75 ans) :
o En association avec le rituximab, le cyclophosphamide, la doxorubicine et en remplacement de la vincristine, perfusion IV de 100 mg/m2 au jour 1 tous les 21 jours ; protocole (R)-CHVP.
 Lymphomes cérébraux :
o En association avec le rituximab, la vincristine, le méthotrexate et la procarbazine, perfusion IV de 100 mg/m2/jour au jour 1 (+/- jour 3) tous les 28 jours ; protocole R-MPVA +/- VP16.
 Lymphomes agressifs en rechute
o En association avec le rituximab, le carboplatine (AUC=5 mg.min/mL), l’ifosfamide, en perfusion IV de 100mg/m2/jour pendant 3 jours tous les 21 jours ; protocole (R)-ICE.
 Lymphome de Burkitte :
o En association avec la cytarabine, perfusion IV de 2 heures de 200mg/m2/jour du jour 2 au jour 5 du cycle ; protocole CYVE.
 Maladie de Castelman :
o En association avec le rituximab, en perfusion IV de 120 mg/m² au jour 1 (+/- jour 2 dans les formes sévères) puis 100 mg/m2 per os aux jours 11, 18 et 25 ; protocole R-VP16.
 Syndrome d’activation macrophagique :
o En monothérapie, perfusion de 150 mg/m2 pendant 2 jours.
 Sarcomes
 Sarcome d’Ewing :
o En association avec la vincristine, l’ifosfamide, la doxorubicine, perfusion IV de 2 heures de 150 m/m2/jour pendant 3 jours consécutifs tous les 21 jours ; protocole VIDE.

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Table des matières

Revue bibliographique
I. INDIVIDUALISATION DE DOSES DES MEDICAMENTS CYTOTOXIQUES
I.A. Rationnel
I.B. Méthode conventionnelle
I.C. Adaptation a priori de dose basée sur les caractéristiques des patients
I.D. Méthode de dose-test
I.E. Suivi thérapeutique pharmacologique (TDM)
I.E.1. Contraintes à la réalisation du TDM des cytotoxiques
a). Difficulté d’établir l’intervalle thérapeutique cible
b). Difficulté analytique
c). Schéma d’administration particulier
I.E.2. Stratégie de prélèvements limités pour l’estimation de l’AUC
a). Régression linéaire multiple
b). Pharmacocinétique de population et analyse bayésienne
II. PRINCIPE DE PHARMACOCINETIQUE DE POPULATION ET ANALYSE BAYESIENNE
II.A. Approches en deux étapes
II.B. Modélisation non linéaire à effets mixtes
II.B.1. Modèle de structure
II.B.2. Modèles statistiques
a). Variabilité interindividuelle
b). Variabilité résiduelle
c). Variabilité inter-occasion (IOV)
II.B.3. Modèle de covariables
II.B.4. Expression générale du modèle
II.C. Estimation bayésienne des paramètres individuels
II.D. Evaluation d’un modèle
II.D.1. Evaluation graphique
II.D.2. Précision des paramètres
II.D.3. « Bootstrap »
II.D.4. « Visual Predictive check »
III. GENERALITES SUR LE CARBOPLATINE
III.A. Présentation
III.B. Structure chimique et activité pharmacologique
III.C. Mécanisme d’action cytotoxique
III.D. Propriétés pharmacocinétiques
III.E. Méthodes analytiques appliquées en pharmacocinétique
III.F. Individualisation de doses
III.G. Indications
IV. GENERALITES SUR L’ETOPOSIDE
IV.A. Présentation
IV.B. Structure
IV.C. Mécanisme d’action cytotoxique
IV.D. Propriétés pharmacocinétiques
IV.E. Méthodes analytiques appliquées en pharmacocinétique
IV.F. Relation pharmacocinétique-pharmacodynamique
IV.G. Individualisation de doses
IV.H. Indications
Travaux personnels
Objectifs
I. ANALYSES PHARMACOCINETIQUES DU CARBOPLATINE
I.A. Apport du TDM dans la maîtrise de l’AUC du carboplatine
I.A.1. Article n°1
I.B. Estimation de la clairance ultrafiltrable à partir des concentrations plasmatiques totales
I.B.1. Article n°2
I.C. Résultats complémentaires
I.C.1. Evaluation prospective de l’équation de régression linéaire aux cycles 2 et 3
I.C.2. Comparaison entre différentes méthodes d’adaptation de doses
I.C.3. Bénéfice du TDM sur la réponse et la toxicité du protocole TICE
I.D. Discussion
II. ANALYSE PHARMACOGENETIQUE DE L’OTOTOXICITE DU CARBOPLATINE
II.A. Introduction
II.B. Matériels et méthodes
II.B.1. Détermination du génotype des patients
II.B.2. Evaluation auditive et définition des paramètres auditifs
II.B.3. Analyses statistiques
II.C. Résultats
II.C.1. Description de l’évaluation auditive
II.C.2. Analyses statistiques
II.D. Discussion
III. ANALYSES PHARMACOCINETIQUES ET PHARMACOGENETIQUES DE L’ETOPOSIDE 
III.A. Article n° 3
III.B. Discussion
Conclusion générale et perspectives
Références bibliographiques

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