Principe de la mesure in vivo : intérêt d’un diagnostic rapide et non invasif

Principe de la mesure in vivo : intérêt d’un diagnostic rapide et non invasif

Un dépistage, rapide et non invasif des neuropathies périphériques à un stade précoce où l’atteinte est réversible permettrait de freiner la progression et d’empêcher la survenue de complications de ces maladies. La technologie brevetée SudoscanTM [8] permet l’analyse des fonctions sudomotrices [3] par l’intermédiaire de la mesure de la conductance électrochimique de la peau (Electrochemical skin conductance, ESC). Celle-ci caractérise la fonction sudorale pilotée par des petites fibres nerveuses. Par rapport aux autres méthodes utilisées pour la détection des neuropathies, SudoscanTM est non invasif (simple contact d’électrode sur la peau), rapide (temps de mesure < 2 min), quantitatif [9] et reproductible [10], [11]. Il existe d’autres techniques de dépistage plus ou moins courantes, couteuses et  efficaces :
– les signes cliniques (picotements, sensations d’engourdissement, sècheresse de la peau) ;
– l’électrophysiologie c’est-à-dire l’enregistrement électromyographique, enregistrement de courants qui permettent d’étudier, entre autre, le système nerveux périphérique. Cependant cette technique est réservée aux formes douteuses en cas de diagnostic différentiel et n’est en aucun cas un outil de dépistage à lui seul.
– le neurofilament de type SEMMES-WEINSTEN 10 g : explore la sensibilité superficielle et donc un seul type de fibre. Cet outil est peu couteux et son analyse peu complexe, mais un examen normal ne veut pas dire que le patient ne présente pas de neuropathie ;
– la mesure du sens vibratoire (qualitatif), détermine la sensibilité ou non aux vibrations. Si la vibration n’est pas sentie alors la patient est atteint de neuropathies ;
– la neuroesthésiométrie (quantitatif) : ce test permet de quantifier le seuil de perception vibratoire par une valeur chiffrée (en microvolts) contrairement au test précédent, et de suivre les valeurs seuils;
– et la discrimination thermique (longue et complexe à mettre en place) : ici on mesure la sensibilité à la douleur [12].

Chacune de ses techniques a ses limites, et pour être valide il faut qu’elles soient réalisées en suivant un protocole rigoureux. La mesure de SudoscanTM est fondée sur la réponse électrochimique d’électrodes placées sur la peau constituant le dispositif capteur pour l’analyse des ions extraits à travers la peau. En pratique, il s’agit donc de mesures de courant via l’imposition de tensions de faibles amplitudes entre quatre électrodes appliquées sur des régions du corps où la densité des glandes sudoripares est élevée, à savoir paumes des mains et plantes des pieds (Figure 2). Les électrodes jouent alternativement le rôle d’anode et de cathode et quatre combinaisons de 15 tensions différentes (entre 1 V et 0,4 V) sont imposées avant de mesurer la densité de courant résultante.

Plus précisément, la mesure électrochimique est réalisée de la manière suivante : la première étape consiste en l’imposition d’un potentiel (E-V) (1) qui induit un flux d’ions chlorure à l’électrode (2). Une réaction électrochimique est alors mise en jeu entre les ions chlorure et la surface de l’électrode (3), ce qui implique la production d’une densité de courant (J-mA/cm²) (4). Ceci permet ensuite la détermination de ESC via un algorithme spécifique développé par Impeto Medical (5).

Paramètres à l’origine de la détection

Des études réalisées précédemment par H. Ayoub durant sa thèse [3] montrent que la technologie est sensible à la variation de la composition ionique de la sueur. Son travail a essentiellement porté sur la compréhension des mécanismes mis en jeu sur des électrodes en nickel. Celles-ci très sensibles à la variation de concentration des ions chlorure, ont pu être étudiés in vitro dans des solutions mimant la composition de la sueur. Des solutions synthétiques contenant les principaux composants (urée, lactate, NaCl) de la sueur dans des tampons carbonates ou phosphates (pH autour de 7) ont été étudiées [14]. Ces travaux ont conduits aux conclusions suivantes :
– Aux potentiels anodiques peu élevés (0,2 V/ECS), les réactions électrochimiques correspondent principalement à l’oxydation du nickel menant à la formation d’un film passif, composé probablement par une couche interne de NiO et une couche externe de Ni(OH)2 ;
– A des potentiels plus élevés, les courants anodiques sont dus principalement à la destruction du film passif suite à l’attaque des ions chlorure ;
– Les processus cathodiques sont principalement reliés à la réduction du film passif.

Ces travaux montrent aussi que les courants anodiques liés à la rupture du film passif sont contrôlés par la variation de la concentration en ions chlorure (Figure 5) et moins significativement par le pH. Par ailleurs, la variation des quantités en urée et en lactate ne semble pas être notoire. Il a ainsi été démontré que le paramètre clef pour la prédiction des altérations des fonctions sudomotrices est la concentration en ions chlorure. Si dans un premier temps le pH était fixé par les solutions tampon phosphate (PBS) au voisinage du pH 7 de la sueur, il s’est avéré que ces ions s’adsorbaient à la surface de l’électrode de nickel, jusqu’à en limiter sa sensibilité. Dès lors, le tampon carbonate, tampon physiologique dans la sueur a été utilisé pour fixer le pH. Nous verrons par la suite comment fixer proprement le pH avec le couple CO2/HCO3- .

Un modèle théorique du comportement électrochimique de la peau a pu être présenté, impliquant les espèces les plus abondantes dans la sueur (Cl- , Na+ et H+) [11]. Les courants électriques non-linéaires, obtenus durant les tests cliniques, sont assurés par le contact des électrodes avec les pores dus aux conduits sudoripares traversant la peau, tandis que la couche cornée forme une excellente barrière qui empêche la diffusion des ions. Ces résultats confirment également la similarité entre les courants électriques non-linéaires obtenus durant les tests cliniques et ceux obtenus sur le nickel dans des solutions reproduisant la sueur. Ayoub et coll. ont aussi mené une étude qui a permis de corréler les résultats in vitro avec ceux obtenus durant les tests cliniques afin de mieux comprendre l’origine des courants et leur évolution en fonction de la concentration des ions chlorure [15]. Pour ce faire, les mesures électrochimiques ont été menées à l’aide d’un montage particulier à 3 électrodes (Figure 6), même matériau d’électrode (pseudo-référence : fil de nickel, contre électrode : fil de nickel et électrode de travail : disque de nickel) afin d’être au plus proche des conditions in vivo.

Cette étude a montré que l’allure des courbes obtenues est proche de celles relatives aux mesures cliniques et donc que les réactions électrochimiques sont à l’origine des courants obtenus durant les tests cliniques. Néanmoins, les valeurs de densité de courant présentent des différences significatives avec celles obtenues in vivo. Par la suite, le vieillissement des électrodes de nickel a été étudié [16]. En effet, les mesures cliniques montraient une évolution du comportement du nickel et une perte de reproductibilité au cours des utilisations. Afin de comprendre ce phénomène et d’assurer la bonne performance des électrodes au cours de multiples réutilisations, des analyses de surface ont été réalisées, par spectroscopie de photoélectrons, X Ray Photoelectron Spectroscopy (XPS), et spectrométrie de Masse à Ionisation Secondaire (SIMS), sur des électrodes de nickel artificiellement vieillies par des voltampérométries cycliques répétitives avec différentes gammes de potentiels (dans des conditions de pH = 6,4 et en absence ou présence de 120 mmol.L-1 NaCl). Ceci a permis de montrer que dans des gammes restreintes de potentiels anodiques, un film passif solide composé d’une couche inerte de NiO et une couche externe de Ni(OH)2, se forme à la surface des électrodes. Son épaisseur (≈ 1 nm) augmente légèrement après vieillissement. Ce film rigide conduit à une diminution de la sensibilité électrochimique des électrodes aux différents composants de la sueur. De plus, en balayant dans des gammes de potentiel étendues vers la partie cathodique, les électrodes de Ni conservent, pendant un grand nombre de cycles successifs, un comportement anodique quasisimilaire. Ceci a permis de définir une procédure de rafraichissement des électrodes par rupture de la couche passive. Néanmoins, en augmentant le nombre de cycles, les résultats XPS ont montré une augmentation progressive de l’épaisseur du film passif (≈ 4 nm après 12 cycles), notamment de sa couche inerte NiO. Enfin, il est important de signaler que l’alternance de la polarité des électrodes est un paramètre clef pour assurer la sensibilité et reproductibilité de mesures pendant un grand nombre de tests cliniques.

Une analyse cinétique a montré l’influence de la variation de la concentration des ions chlorure, d’après les courbes de polarisation, notamment, par une évolution du potentiel de piqûration (Epiq) [17], liée à la destruction de la couche d’oxyde menant à une dissolution localisée du nickel. Ceci a conduit à l’étude de la cinétique des différentes réactions électrochimiques se produisant à la surface des électrodes de nickel, notamment les réactions électrochimiques liées à la dissolution localisée du nickel dans des solutions tampon carbonate (CBS) à différents pH physiologiques et en présence de différentes concentrations de chlorure, en respectant la gamme de concentration d’ions chlorure trouvée dans la sueur. Cette étude a permis de proposer deux mécanismes distincts pour la dissolution localisée du nickel à différentes valeurs de pH. Il est à noter ici que les manipulations ont été effectuées sur nickel dans des conditions éloignées des conditions pour une étude de corrosion, la vitesse de balayage étant élevée (100 mV/s).

Cette étude a également permis à la société Impeto Medical de compléter un modèle théorique des signaux électriques obtenus lors des mesures cliniques. Ce nouveau modèle théorique semble mieux corréler les signaux électriques obtenus durant les tests cliniques. Les résultats obtenus montrent que lorsque le pH est compris entre 5 et 7, l’étape limitante est vraisemblablement la première réaction de transfert de charge. En milieu neutre, deux ions chlorure sont probablement impliqués, tandis que dans des solutions de faible acidité (entre 5 et 6) un seul ion chlorure est impliqué. Les électrodes de nickel sont probablement plus sensibles aux ions chlorure à pH 7.

Toutes ces études ont eu pour but d’analyser le comportement du nickel, car il était le premier matériau d’électrode pour la technologie SudoscanTM. Mais le nickel ayant des propriétés allergènes au contact avec la peau, il a était nécessaire de le remplacer par un matériau moins nocif. L’acier inoxydable 304L, non-allergène et utilisé dans les instruments chirurgicaux a donc été choisi. Une étude préliminaire a été réalisée sur cet acier inoxydable comme matériau de substitution [18]. Le comportement électrochimique de l’acier inoxydable 304L a été étudié dans des solutions tampon carbonate (CBS) mimant la composition de la sueur, plus particulièrement sa sensibilité à la variation des composants principaux de la sueur, notamment la concentration de chlorure .

Les aciers inoxydables biocompatibles

Nous avons vu qu’il est primordial de remplacer les électrodes de nickel par des matériaux moins allergènes pour répondre aux normes mondiales. Par conséquent, nous allons nous intéresser à des matériaux répondant au mieux à ce critère et notamment aux aciers inoxydables biocompatibles. Analysons tout d’abord les propriétés des aciers inoxydables puis la notion de biocompatibilité.

Les aciers inoxydables

Les aciers inoxydables sont des alliages à base de fer contenant au moins 10,5% de chrome et au maximum 1,2% de carbone [19]. Il existe quatre familles d’acier inoxydable [20] : les aciers ferritiques, austénitiques, martensitiques, et les duplex, comme illustré sur le diagramme de Schaffer (Figure 8).
– Les aciers ferritiques : leur structure métallique est la même que celle du fer à température ambiante. Ils possèdent une teneur en carbone très faible (de l’ordre de 0,07% de carbone) et peu ou pas de nickel. Ces aciers sont souvent utilisés en lieu et place des aciers austénitiques pour la réalisation d’ustensiles de cuisine. Certains aciers ferritiques, intégrant du titane dans leur composition, développent une résistance à la corrosion semblable aux aciers austénitiques ;
– Les aciers austénitiques au chrome-nickel sont très résistants à la corrosion. (12-28% Cr et 10-22 % de Ni) ;
– Les aciers martensitiques : les plus courants ont une teneur en chrome allant jusqu’à 13% et des teneurs en carbone supérieures à 0,08% (ex. utilisation : lame de couteaux de cuisine) ;
– Les aciers duplex sont des aciers à structure mixte austénitique/ferritique : ferchrome-nickel. Dans le digramme, cette famille est situé entre les deux familles ferrite et austénite .

La propriété la plus importante d’un acier inoxydable est sa résistance à la corrosion, assurée par la présence d’un film passif à la surface de l’acier. De plus, chaque élément chimique apporte une propriété supplémentaire à l’acier inoxydable. Les propriétés énoncées ici sont celles étant les plus intéressantes pour notre système :
– Le chrome (Cr) augmente la résistance à la corrosion. Un minimum de 10,5% est nécessaire pour former une couche protectrice d’oxyde de chrome[21] (le Cr VI est une forme très toxique du chrome, mais cette forme n’est présente qu’à haute température. Elle est donc absente dans notre cas) ;
– Le molybdène (Mo) augmente la résistance à la corrosion par piqûre et, associé au chrome, il stabilise le film passif en présence de NaCl [19] ;
– Le nickel (Ni) augmente la corrosion par piqûre [22] ;
– Un faible taux de carbone (C) augmente la résistance à la corrosion par piqûre [22];
– Le soufre (S) diminue la résistance à la corrosion [20].

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Table des matières

Introduction générale
Chapitre 1 : Bibliographie
I. Contexte de l’étude
II. Principe de la mesure in vivo : intérêt d’un diagnostic rapide et non invasif
III. Paramètres à l’origine de la détection
IV. Les aciers inoxydables biocompatibles
1) Les aciers inoxydables
2) Les différents aciers biocompatibles
V. Propriétés électrochimiques des aciers inoxydables et comportement à la corrosion
1) Présence d’un film passif
2) Aciers inoxydables et corrosion
VI. Etat de l’art sur les membranes d’électrodialyse
VII. Conclusions
Chapitre 2 : Matériels et Méthodes
I. Matériaux et solutions
1) Electrodes
2) Membranes
3) Solutions
II. Montages spécifiques
1) Montages classiques
2) Montage 5 : spécifique pour les solutions visqueuses
III. Techniques expérimentales
1) Electrochimiques
2) Viscosimètre
3) Densimètre
Chapitre 3. Comportement électrochimique d’aciers inoxydables biocompatibles en milieu physiologique
Partie 1 : Sensibilité aux ions chlorure de différents aciers inoxydables
I. Résultats et discussions
II. Conclusions
Partie 2 : Etude du comportement des aciers inoxydables par spectroscopie d’impédance électrochimique (SIE)
I. Principe de la spectroscopie d’impédance électrochimique
II. Résultats et discussions
1) Préambule
2) Exploitation des différents diagrammes de spectroscopie d’impédance
3) Discussion
Conclusions
Chapitre 4 : Optimisation des mesures in vitro : corrélation avec les études cliniques
I. Modification de la surface de l’électrode par voie chimique et électrochimique
II. Interposition de membranes d’électrodialyse
III. Différence de la viscosité de la solution
1) Etude sur électrode de nickel
2) Electrode en aciers inoxydables
IV. Conclusions
Conclusions générales

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