Principales méthodes d’euthanasie
Les recommandations européennes
Dans l’annexe A révisée de la convention STE 123 (18), il est écrit : -« Toute méthode de sacrifice des animaux exige des connaissances qui ne peuvent être acquises que par une formation appropriée. Les animaux devraient être sacrifiés en utilisant des méthodes respectant les principes préconisés dans les recommandations de la commission européenne de la DGXI de 1996 et 1997 sur l’euthanasie des animaux de laboratoire (partie 1 et 2) ». Ces recommandations seront détaillées ultérieurement. -« Tout animal profondément inconscient peut être saigné, mais des médicaments qui paralysent les muscles avant la perte de conscience, ceux ayant les effets du curare, et l’électrocution sans passage de courant à travers le cerveau ne devraient pas être utilisés sans anesthésie préalable. Il ne devrait pas être procédé à l’élimination du corps de l’animal avant que la mort ait été confirmée. » D’autres lignes directrices concernant l’euthanasie des animaux de laboratoire existent (cf. tableau 1). Ces différentes lignes directrices sont en général fortement influencées par celles de l’American Veterinary Medical Association (AVMA) (2, 3, 4, 5) et se recoupent le plus souvent mais il arrive que ces recommandations diffèrent pour certaines techniques, notamment l’euthanasie au CO2.
De sûreté La méthode ne doit pas mettre en danger la santé du personnel. Le personnel doit être formé et entraîné. La méthode ne doit également pas entraîner de danger pour l’environnement : pollution, explosion, incendie… Elle doit entrer dans un cadre légal : législation sur les stupéfiants, code du travail (49)… Au vu de ces critères il paraît important de définir ce que l’on entend par douleur. De plus, par la suite, il sera fait référence aux notions de détresse ou encore de souffrance et de nociception chez l’animal ces termes seront donc également définis. La douleur a été définie pour l’homme en 1979 par l’Association Internationale pour l’Etude la Douleur (IASP) comme étant : « une expérience sensorielle ou émotionnelle désagréable, associée à une lésion tissulaire, réelle ou potentielle ou décrite en des termes évoquant une telle lésion. » Il est important de noter qu’il est fait référence au langage par le terme « décrite » : cette définition est donc difficilement applicable à l’animal.
Une définition complétée a été donnée pour l’animal en 1997 par Molony et Kent : « expérience sensorielle et émotionnelle aversive, représentée par la « conscience » que l’animal a de la rupture ou de la menace de rupture de l’intégrité de ses tissus ». La douleur de l’animal est donc une expérience aversive qui déclenche des réactions motrices de protection et entraîne des réactions d’évitement apprises qui modifient les caractéristiques du comportement, en particulier les interactions sociales. Il convient de bien différencier le terme de douleur de celui de nociception : la nociception est « une modalité sensorielle mise en jeu par tout stimulus capable de produire une lésion tissulaire» ; La nociception est l’expérience sensorielle élémentaire, la notion de douleur ajoute l’expérience émotionnelle. La douleur est donc plus difficile à évaluer car elle inclut la notion de conscience et suppose donc la participation de centres intégrateurs sensorimoteurs et de populations neuronales compétentes dans le traitement des informations à caractère émotionnel. La souffrance est définie pour l’homme comme étant un état émotionnel de « détresse » associé aux événements qui menacent l’intégrité biologique ou psychologique de l’individu (IASP). La souffrance est très souvent accompagnée de douleur mais ce n’est pas forcément toujours le cas, une souffrance peut n’être que psychologique.
La douleur et la souffrance sont phénoménologiquement distinctes. Enfin en expérimentation animale on s’intéresse souvent à la détresse éprouvée par l’animal. Ce terme est souvent employé pour désigner un stress psychologique ou encore une tension psychique, pression, contrainte ou agression. La détresse implique une causalité externe souvent temporaire et de grande intensité physique ou psychique. (51)
de carbone A une concentration d’environ 60% le CO2 agit comme un agent anesthésique et cause une perte de conscience rapide. Cette technique est efficace et humaine pour l’euthanasie des petits animaux à une concentration d’environ 70%. Le CO2 stimule les centres respiratoires, il peut causer une anxiété et un stress chez l’animal. De l’acide carbonique peut se former au niveau de la muqueuse nasale, ce qui peut causer une irritation chez certaines espèces même à de basses concentrations. Pour la plupart des animaux il est recommandé de les placer dans une concentration d’au moins 70% de CO2 ce qui provoque une perte de conscience rapide. A la concentration de 100% une dyspnée sévère et une détresse chez l’animal conscient peuvent se manifester. Le CO2 peut être utilisé chez les oiseaux en association avec de l’Argon ou à de faibles concentrations avec un gaz inerte. Il ne peut être utilisé chez les poissons, les gros animaux, les animaux à sang froid, les animaux creusant des terriers et les jeunes animaux d’âge inférieur à 2 semaines.
La possibilité d’un ajout d’oxygène est évoquée mais il peut être difficile de mixer ces deux gaz en routine. Il est précisé que le CO2 étant plus lourd que l’air il faut faire attention à ce que les animaux ne puissent pas grimper pour échapper au gaz. C’est pourquoi il est conseillé de pré remplir la chambre jusqu’à 70%. Cependant certaines publications conseillent un remplissage progressif. La chambre doit être conçue de manière à éviter les blessures et les animaux ne doivent pas y être trop nombreux. La concentration en CO2 doit être contrôlée. Les extincteurs et le CO2 solide ne sont pas autorisés comme source de CO2 à cause de leur basse température et du bruit produit par les extincteurs. Cette technique sera détaillée par la suite et des recommandations plus récentes émanant du rapport de l’AVMA de 2007 seront présentées (5).
Complément d’information pour l’euthanasie des foetus de rongeur ou des nouveau-nés L’euthanasie des foetus et des nouveau-nés est peu abordée dans le rapport de la commission européenne mais aux USA les IACUC ont publié des lignes directrices à ce sujet (33). Les foetus en dessous de 14 jours de gestation ne ressentent pas la douleur compte tenu de leur développement neuronal minimal. L’euthanasie de la mère ou l’isolement du foetus provoque une mort rapide de celui-ci. A partir de 15 jours de gestation, les foetus ressentent la douleur. De 15 jours de gestation à la naissance, les foetus ne sont pas sensibles aux agents gazeux. Leur euthanasie peut être réalisée par décapitation, dislocation cervicale, immersion dans de l’azote liquide. Si une fixation in situ est nécessaire le foetus doit être préalablement anesthésié. Une anesthésie peut être obtenue par hypothermie, injection d’un anesthésique ou réalisation d’une anesthésie profonde de la mère (le pentobarbital traverse le placenta).
Quand les foetus ne sont pas nécessaires à l’étude, les mères doivent être euthanasiées par une méthode assurant le décès rapide des foetus. De la naissance à 16 jours, la décapitation, la dislocation cervicale, l’injection d’une surdose d’anesthésique sont recommandées. L’absence d’anesthésie préalablement à la décapitation ou la dislocation cervicale doit être justifiée scientifiquement. L’immersion dans de l’azote liquide peut être réalisée sans anesthésie jusqu’à 1 jour d’âge ; après l’anesthésie devient nécessaire. L’anesthésie gazeuse peut être utilisée. Le froid peut être utilisé pour induire l’euthanasie sur des animaux jusqu’à 6 jours. L’euthanasie au CO2 ne peut être utilisée que sur des rats et souris de plus de 16 jours. Après avoir présenté les différentes techniques préconisées par les recommandations européennes (23, 24), les principales techniques soumises à controverse vont être évoquées. La décapitation et la dislocation cervicale sur animal vigile surtout sujettes à polémique dans les années 1980-1990, puis l’euthanasie par inhalation de CO2 actuellement au coeur d’une controverse notamment dans le cadre de la révision de la directive 86/609/CEE (18).
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Table des matières
SOMMAIRE
PREMIERE PARTIE: L’EUTHANASIE DES ANIMAUX DE LABORATOIRE : DES TECHNIQUES CONTROVERSEES
I.Généralités concernant l’euthanasie des animaux de laboratoire
I.1. Le contexte réglementaire
I.2. Les recommandations européennes
I.3. Les justifications de l’euthanasie
I.4. Les critères d’acceptabilité
I.5. Les critères de choix d’une technique d’euthanasie
II.Principales méthodes d’euthanasie
II.1. Principales méthodes acceptables d’après les recommandations européennes ( 23)
II.1.1. Les méthodes physiques
II.1.1.1. Les méthodes physiques sur des animaux conscients
II.1.1.1.1. Pistolet à cheville percutante
II.1.1.1.2. Commotion
II.1.1.1.3. Electrocution
II.1.1.1.4. Dislocation cervicale
II.1.1.1.5. Décapitation
II.1.1.1.6. Micro-ondes
II.1.1.2. Les méthodes physiques sur des animaux inconscients
II.1.1.2.1. Congélation
II.1.1.2.2. Exsanguination
II.1.1.2.3. Décérébration
II.1.2. Les méthodes chimiques
II.1.2.1. Méthodes chimiques par inhalation
II.1.2.1.1. Les méthodes chimiques par inhalation sur des animaux conscients
II.1.2.1.1.1. Dioxyde de carbone
II.1.2.1.1.2. Monoxyde de carbone
II.1.2.1.1.3. Surdosage d’anesthésique volatil
II.1.2.1.2. Les méthodes chimiques par inhalation sur des animaux inconscients
II.1.2.2. Les méthodes chimiques par injection
II.1.2.2.1. Les méthodes chimiques par injection sur des animaux conscients
II.1.2.2.2. Les méthodes chimiques par injection sur des animaux inconscients
II.1.2.2.2.1. T61
II.1.2.2.2.2. KCl
II.1.2.2.2.3. Hydrate de chloral
II.1.2.3. Méthodes pour les animaux aquatiques
II.1.2.3.1. Benzocaïne
II.1.2.3.2. MS-222 (Tricaïne méthane sulfonate
II.1.2.3.3. Etomidate et métomidate
II.1.2.3.4. Quinaldine
II.2. Complément d’information pour l’euthanasie des foetus de rongeur ou des nouveau-nés
III. Etude bibliographique des principales techniques d’euthanasie controversées
III.1. Euthanasie par décapitation
III.1.1. Le Débat
III.1.2.Les différentes recommandations
III.1.2.1. Les recommandations des Etats-Unis
III.1.2.2. Les recommandations canadiennes
III.1.2.3. Les recommandations européennes
III.1.3. Impact biologique de la décapitation comme technique d’euthanasie
III.1.4. Influence d’une anesthésie préalable à la décapitation
III.2. Euthanasie par dislocation cervicale
III.3. Euthanasie au dioxyde de carbone
III.3.1. Généralités sur l’euthanasie par inhalation de gaz
III.3.2. Mécanisme d’action du CO2
III.3.3. Controverse autour de l’utilisation du CO2
III.3.3.1. Les causes de la controverse
III.3.3.1.1. Formation d’acide carbonique au niveau des membranes oculaires, nasales, buccales et du tractus respiratoire
III.3.3.1.2. Activation de nocicepteurs chez le rat anesthésié
III.3.3.1.3. Observations comportementales de signes de douleur
III.3.3.1.4. Lésions histologiques
III.3.3.1.5. Aversion vis à vis du CO2
III.3.3.1.6. Evaluation du temps nécessaire à la perte de conscience
III.3.3.1.7. Etudes réalisées chez l’Homme
III.3.3.2. Les tentatives d’amélioration de la technique
III.3.3.2.1. Chambre pré remplie versus remplissage progressif
III.3.3.2.2. Mélange Oxygène et Dioxyde de Carbone
III.3.3.2.3. Réalisation préalable d’une anesthésie ou d’une sédation
III.3.3.2.4. Autres facteurs
III.3.3.3. Les solutions de remplacement
III.3.3.4. Le meeting de Newcastle sur l’euthanasie par l’anhydride carbonique des animaux de laboratoire du 27 au 28 février 2006 ( 29
III.3.3.4.1. Objectifs
III.3.3.4.2. Conclusions
III.3.3.4.2.1. Les problèmes
III.3.3.4.2.2. Les bonnes pratiques d’utilisation
III.3.3.4.2.3. Les méthodes alternatives utilisant des agents gazeux
III.3.3.4.2.4. Recherches futures
III.3.3.5. Les avantages, inconvénients de la technique au CO2 et recommandations du rapport de l’AVMA de juillet 2007 ( 5
III.3.3.5.1. Les avantages
III.3.3.5.2. Les inconvénients
III.3.3.5.3. Les recommandations
DEUXIEME PARTIE OPTIMISATION DE LA TECHNIQUE D’EUTHANASIE PAR INHALATION DE CO2 DANS UN CENTRE DE RECHERCHE PHARMACOLOGIQUE
I.Pratique de l’euthanasie par inhalation de CO2 à l’IdRS
I.1. Etat des lieux
I.1.1. Guéridon mobile MC2003 V03 Minerve
I.1.2. Appareils « maison »
I.2. Etude de nouveaux appareils
I.2.1. Guéridon mobile MC2003 (nouvelle version) Minerve®
I.2.2. Appareil TEM
I.3. Conclusion
II.Partie expérimentale
II.1. Objectif
II.2. Tests préliminaires
II.2.1. Objectifs
II.2.2.Méthodes
II.3. Matériel et méthode
II.3.1. Matériel
II.3.2. Animaux
II.3.2.1. Expérience n°1
II.3.2.2. Expérience n°2
II.3.2.3. Expérience n°3
II.3.3. Méthode
II.3.3.1. Procédure
II.3.3.2. Paramètres d’intérêt
II.3.4. Statistiques
II.4. Résultats
II.4.1. Expérience n°1
II.4.2. Expérience n°2
II.4.3. Expérience n°2 versus expérience n°1
II.4.4. Expérience n°3
II.4.5. Expérience n°3 versus expérience n°1
II.4.6. Observations supplémentaires
II.5. Interprétation
II.6. Conclusion
II.7. Etude préliminaire rat
II.7.1. Objectif
II.7.2. Matériel et méthode
II.7.2.1. Matériel
II.7.2.2. Animaux
II.7.2.3. Méthode
II.7.2.4. Statistiques
II.7.3. Résultats
II.7.4. Interprétation et conclusion
CONCLUSION
BIBLIOGRAPHIE
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