Définition de l’Accident Vasculaire Cérébral
En 2013, L’American Heart Association et l’American Stroke Association proposent une définition de l’accident vasculaire cérébral (AVC). Ils définissent dans un premier temps « l’infarctus du système nerveux central comme lié à la mort cellulaire cérébrale attribuable à l’ischémie basée sur : la preuve objective d’une lésion ischémique focale par anatomopathologie ou à l’imagerie et/ou la preuve clinique de l’ischémie focale cérébrale persistant plus de 24 heures ou jusqu’à la mort, les autres étiologies étant exclues ». L’AVC ischémique est défini comme un épisode de dysfonction neurologique causée par une ischémie locale cérébrale. Ils comptent pour près de 80% des AVC tout type confondu. Les AVC hémorragiques qui représentent 10 à 20% des AVC, sont définis comme une collection locale de sang, intraparenchymateuse ou intraventriculaire, non causée par un traumatisme. (1) L’accident ischémique transitoire (AIT) est quant à lui définit comme « un épisode bref de dysfonction neurologique dû à une ischémie focale cérébrale ou rétinienne, dont les symptômes cliniques durent typiquement moins d’une heure, sans preuve d’infarctus aigu à l’imagerie » (2).
Epidémiologie
Dans le monde
Dans un rapport de l’Organisation Mondiale de la Santé (OMS) de 2011 (3), les maladies cardiovasculaires représentent la première cause de mortalité dans le monde, soit près de 17 millions de décès par an dont 80% dans les pays à revenus moyens ou faibles. Dans cette catégorie de pathologies cardio-vasculaires, l’AVC représente la 2ème cause de mortalité (6,2 millions de décès par an), après les maladies coronariennes (cf. figure 1). On estime qu’une personne est touchée par un AVC toutes les 5 secondes dans le monde.
Il existe des disparités géographiques importantes en termes de mortalité liée à l’AVC. En effet le taux de mortalité à 1 mois de l’AVC varie entre 10 et 30% selon les régions du globe, et ces chiffres varient également en fonction du type d’AVC considéré (il est plus élevé en cas d’AVC hémorragique et d’hémorragie méningée, et plus faible pour les AVC ischémiques). Il existe aussi une variation du taux de mortalité selon le mécanisme étiologique de l’AVC ischémique : la survie est inférieure dans les AVC d’origine cardio-embolique par rapport aux AVC lacunaires (3). A travers le monde, 16 millions de nouveaux cas sont observés chaque année. Des disparités géographiques d’incidence annuelle ont été mises en évidence, variant de 113 à 410 cas / 100 000 personnes/an. Il existe également un gradient décroissant Nord-Sud et Est-ouest, qui implique probablement des facteurs génétiques et environnementaux non clairement identifiés à l’heure actuelle. Des incidences élevées ont également été relevées dans les pays nordiques (Danemark, Norvège).
L’OMS estime que le nombre annuel d’AVC incidents passera de 16 millions en 2005 à 23 millions en 2030, du fait du vieillissement de la population mondiale. En 2005, le nombre de patients survivant à un AVC était estimé à 65 millions, il atteindra 77 millions dans 20 ans.
En France
En France, l’AVC est la première cause de mortalité chez les femmes (avec 18 343 décès en 2013) et la troisième cause de mortalité chez les hommes (avec 13 003 décès). L’AVC est également la première cause de handicap acquis chez l’adulte et la deuxième cause de démence en France (6). En 2014, 141 652 personnes ont fait l’objet d’une hospitalisation pour un AVC ou un AIT en France. Les moins de 65 ans représentaient un quart des patients présentant un AVC (27 829 personnes) et 30% des patients hospitalisés pour AIT. Les taux standardisés de patients hospitalisés étaient de 112,8/100 000 habitants pour les AVC ischémiques, 39,9/100 000 habitants pour les AVC hémorragiques. Pour chaque type d’AVC, le taux augmentait avec l’âge. Les AVC ischémiques représentaient 71% des patients hospitalisés pour un AVC contre 25% pour les accidents hémorragiques. La Guyane et la Réunion affichaient les taux standardisés les plus élevés, supérieurs de plus de 28% à la moyenne nationale. En Métropole, les taux de patients hospitalisés pour un AVC ischémique les plus élevés étaient observés en Bretagne (137,9/100 000) et dans les Hauts de France (133,1/100 000), et les plus bas en Corse (83,7/100 000), Provence-Alpes-Côte-D’azur (92,7/100 000) et Auvergne-Rhône-Alpes (99,3/100000).
Evolutions temporelles
Entre 2008 et 2014, le nombre de patients hospitalisés pour AVC a augmenté de 13,7%. L’augmentation la plus importante concernait les AVC ischémiques (+32,8%). L’âge moyen des patients hospitalisés pour un AVC ischémique est resté stable, autour de 74 ans. La proportion de patients hospitalisés en UNV a plus que doublé (20,3% en 2008 contre 51,5% en 2014) .
En 2014, la mortalité standardisée sur l’âge était 3,2 fois plus élevée pour les AVC hémorragiques (28,9%) que pour les AVC ischémiques (9,1%). Entre 2008 et 2014, une baisse significative de la létalité hospitalière standardisée a été observée pour l’ensemble des AVC (-11,1%) grâce à une meilleure organisation de la filière AVC, que ce soit en pré-hospitaliser, ou en hospitalier. Cette baisse était plus marquée pour les AVC ischémiques (-12,5%) que pour les AVC hémorragiques (- 5,4%).
En région PACA
Selon le rapport épidémiologique de l’Agence Régionale de Santé de juillet 2010 (7) concernant les pathologies cérébrovasculaires en région PACA, en 2008, 7641 patients ont été hospitalisé pour un AVC (3 833 hommes et 3 808 femmes) dont 4 255 pour un AVC ischémique (55,3%). Entre 2005 et 2007, 2 811 personnes sont décédées de maladie cérébrovasculaire (1 177 hommes et 1 634 femmes), ce qui fait de l’AVC la 3ème cause de mortalité par maladie de l’appareil circulatoire en PACA. En 2008, 23 282 personne déclaraient souffrir d’au moins une déficience suite à un AVC. Ce rapport montre également une forte diminution du taux de mortalité par maladie cérébrovasculaire en région PACA en 2003-2005, par rapport aux années 1980-1982.
Coût financier de l’AVC en France
Le rapport ministériel français de juin 2009 (8) estime les dépenses annuelles relatives à la prise en charge des patients victimes d’un AVC en France à 8,3 milliards d’euros / an (5,9 milliards pour le secteur de soins et 2,4 milliards d’euros pour le secteur médico-social). Les AVC sont également responsables de coûts indirects importants, notamment pour les sujets jeunes, toujours en activité professionnelle. Chez les sujets de moins de 45 ans, 30 à 50% ne pourraient pas reprendre une activité professionnelle, et 10% resteraient dépendants pour au moins une activité de la vie quotidienne .
Facteurs de risque des AVC ischémiques
Facteurs de risque non modifiables
-L’âge : il s’agit du facteur de risque d’AVC non modifiable le plus puissant. En effet, on estime que le risque d’AVC double chaque décennie après 55 ans.
-Le sexe : le taux d’infarctus cérébral (IC) est un peu plus élevé chez l’homme dans les tranches d’âges inférieures à 75 ans. La tendance semble s’inverser par la suite, mais les données sont divergentes. Cependant du fait de l’espérance de vie accrue de la femme, le nombre absolu d’AVC est plus important chez les femmes que chez les hommes.
-Des différences ethniques ont également été notées avec un risque accru d’AVC chez les sujets de race noire et les hispano-américains, même s’il est parfois difficile de séparer le rôle des facteurs raciaux de celui des facteurs socio-économiques et culturels.
-Un antécédent familial ou paternel multiplie par 2 le risque d’AVC. En dehors des rares maladies monogéniques, il pourrait exister des interactions complexes avec le sexe, non expliquées par une transmission génétique classique. Il a été montré que les femmes ayant un IC ou un AIT avaient plus souvent un antécédent maternel que paternel d’AVC, alors que chez les hommes, les antécédents maternels ou paternels avaient la même prévalence.
Facteurs de risque modifiables
-L’hypertension artérielle : il s’agit du facteur de risque le plus retrouvé chez les sujets victimes d’un IC. Cette relation existe dès 115/75 mmHg, et est logilinéaire : chaque augmentation de la pression artérielle systolique de 20 mmHg ou de la diastolique de 10 mmHg est associée à un doublement du risque d’AVC, quel que soit l’âge.
De plus la variabilité de la pression artérielle notamment nocturne, pourrait constituer un facteur de risque indépendant d’AVC. Le bénéfice d’abaisser la PA sur le risque d’IC a été très largement démontré, aussi bien en prévention primaire que secondaire.
-Le diabète : le diabète de type 2 est un facteur de risque bien établi d’infarctus cérébral, multipliant le risque par un facteur allant de 1,8 à 6 selon les études. La relation entre diabète et IC semble plus forte chez la femme que chez l’homme. Il existe aussi une relation logilinéaire entre le niveau d’hémoglobine glycquée et le risque d’IC. Un contrôle glycémique chez les sujets diabétiques a montré un bénéfice sur la réduction du risque d’IC, particulièrement chez les sujets diabétiques de type 1(15).
-Le tabac : les fumeurs ont un risque d’IC multiplié par 2 environ. Il existe en outre une relation dose-effet entre tabac et risque d’IC, même s’il semble que le risque vasculaire augmente très vite pour de petites expositions. Une interaction entre tabac et contraception hormonale (oestroprogestative) est observée (Odd Ratio = 7,2). Après arrêt du tabac, le risque d’IC semble vite diminuer, pour rejoindre celui des non-fumeurs après 5 ans.
-Le cholestérol : contrairement à ce qui est observé dans les maladies coronariennes, le rôle du cholestérol en tant que facteur de risque d’IC reste controversé et mal compris. Néanmoins, les statines ont montré leur efficacité dans la prévention du risque vasculaire cérébral. Une diminution de 1 mmol/L de LDL-cholestérol est associée à une diminution relative du risque de 19%. Il existe une relation inverse entre le taux d’HDL-cholestérol et le risque d’IC, qui pourrait être plus forte dans les accidents liés à l’athérosclérose. Le rôle des triglycérides est incertain et les études contradictoires. L’hypertriglycéridémie s’intègre souvent dans un syndrome métabolique pouvant augmenter le risque d’IC.
-L’alcool : une consommation régulière d’alcool de plus de 60 g/jour est associée à un risque accru d’IC (Risque Relatif = 1,7). Il existe une relation dose-effet pour des consommations élevées. Comme pour la maladie coronaire, une consommation régulière modérée d’alcool (12-24g/jour) est associée à une diminution du risque d’IC.
-L’obésité : dans l’ensemble, les études montrent une association entre obésité et IC chez l’homme et la femme. Ce risque augmente de façon linéaire avec l’IMC.
-La ménopause et traitement hormonal substitutif : l’incidence des maladies vasculaires est plus faible chez les femmes non ménopausées par rapport aux hommes, mais elle augmente rapidement après l’âge de la ménopause. Les grands essais randomisés ont montré que le traitement hormonal substitutif augmentait de 29% le risque d’IC.
-La contraception orale : est associée à un risque accru d’IC (Risque Relatif entre 2 et 4 selon les études), cette relation existe quelle que soit la génération de pilule et le dosage en estrogènes, même avec les pilules microdosée.
-Le syndrome métabolique : il associe des anomalies morphologiques (obésité abdominale), physiologiques (HTA, insulino-résistance) et biochimiques (dyslipidémie) qui évoluent en fonction du temps et prédisposent le sujet atteint à l’athérosclérose et à ses complications cardio-vasculaires, notamment l’IC.
-Alimentation, activité physique : de nombreuses études observationnelles montrent qu’une consommation importante de fruits et légumes est associée à une diminution du risque d’IC. De même, plusieurs études de cohorte ont montré une relation entre risque d’AVC et consommation élevée de sodium, ou faible de potassium. Une méta-analyse de 31 études observationnelles a montré qu’une activité physique régulière était associée à une réduction du risque d’IC (RR= 0,78 ; IC95% : 0,71-0,85).
-Hyperhomocystéinémie, inflammation chronique : les études ont montré une relation entre le risque d’IC et le taux d’homocystéinémie plasmatique (OR =1,42 ; IC95% : 1,21-1,66). L’homocystéine entraine une dysfonction endothéliale, une prolifération des cellules musculaires lisses, une augmentation du stress oxydatif et un effet pro thrombotique. Il existe également de nombreux arguments biologiques et épidémiologiques montrant que les processus inflammatoires chroniques jouent un rôle majeur dans le développement de l’athérosclérose et dans la survenue de ses manifestations cliniques.
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Table des matières
I. INTRODUCTION
A. Définition de l’Accident Vasculaire Cérébral
B. Epidémiologie
1. Dans le monde
2. En France
3. Evolutions temporelles
4. En région PACA
5. Coût financier de l’AVC en France
C. Facteurs de risque des AVC ischémiques
1. Facteurs de risque non modifiables
2. Facteurs de risque modifiables
D. Physiopathologie de l’AVC ischémique
1. Vascularisation artérielle de l’encéphale
2. Principales causes de l’ischémie cérébrale
3. Aspects hémodynamiques, concept de pénombre ischémique
4. Effets de l’ischémie cérébrale au niveau cellulaire
5. Œdème cérébral et ses effets
6. Inflammation cérébrale et immunodépression systémique
E. Techniques d’imagerie dans l’AVC ischémique en phase aiguë
1. Tomodensitométrie cérébrale
2. Imagerie par résonnance magnétique
3. L’imagerie de perfusion
F. Prise en charge des AVC ischémiques en phase aiguë
1. L’hospitalisation en unité de soins intensifs neurovasculaires
2. La thrombolyse intra-veineuse
3. La thrombectomie des artères intracrâniennes par voie endovasculaire
II. OBJECTIF de L’ETUDE
III. METHODE
A. Conception de l’étude et patients
B. Procédures et groupes comparés
C. Données cliniques et imagerie
D. Critères de jugements
E. Analyse statistique
IV. RESULTATS de la cohorte marseillaise
A. Patients et caractéristiques initiaux
B. Critères de jugement principaux
C. Données sur la sécurité
D. Analyse en sous-groupe
V. DISCUSSION
VI. CONCLUSION et PERSPECTIVES
VII. ANNEXES