Présentation générale du Mécanisme de Surveillance Unique

Présentation générale du Mécanisme de Surveillance Unique

Au terme des négociations autour de la supervision prudentielle, il fut décidé de centraliser la supervision des établissements de crédit relevant du droit des États membres de la zone euro en confiant la surveillance à une autorité mixte. Celle-ci est composée de la BCE et des Autorités Nationales Compétentes pour la supervision (ACN) des États membres participant au MSU.

Dans les normes créant une institution de contrôle bancaire, il est essentiel de présenter clairement les objectifs de l’autorité de supervision (à savoir la finalité de sa mission), de déterminer l’objet de sa mission (c’est-à-dire les fonctions et tâches dont l’autorité est responsable pour atteindre ses objectifs), et enfin les pouvoirs et instruments qu’elle possède pour y parvenir.

Selon le considérant (30) du règlement, l’objectif principal du MSU est tout d’abord de « garantir la sécurité et la solidité des établissements de crédit, la stabilité du système financier de l’Union et de chacun des États membres participants ». Il garantit en plus l’intégrité du marché intérieur et la protection des déposants.

Ensuite, la BCE est exclusivement compétente pour accomplir la mission de contrôle relative à cet objectif pour tous les établissements de crédit agréés dans les États membres participants.

L’article 4 du règlement énumère en outre une série de tâches incombant à la BCE et s’inscrivant dans cette mission de contrôle. Il faut cependant lire cet article en parallèle avec l’article 6(4) du règlement car l’exercice des compétences est réparti entre la BCE et les ACN selon l’importance des établissements surveillés32. Pour l’essentiel, le mécanisme prévoit que la BCE est directement compétente pour la supervision des établissements considérés comme importants et indirectement pour les établissements moins importants, l’exercice de la supervision directe restant de la compétence des ACN. En outre, la BCE est responsable de l’application cohérente et efficace du MSU et garde un certain contrôle sur l’exercice des compétences des ACN prévues dans le règlement MSU car elle peut leur donner des instructions et même leur reprendre la supervision directe .

Légitimité du Conseil de surveillance

En principe, une délégation requiert deux actes : l’habilitation à déléguer et l’acte de délégation. En l’occurrence, la Traité a octroyé la compétence de surveillance prudentielle directement à la BCE mais ne prévoit pas d’habilitation à déléguer à un autre organe. De plus, selon le service juridique du Conseil qui s’est exprimé dans un avis légal non publié mais dont nous trouvons des traces dans la doctrine, le Traité permet à la BCE de décentraliser l’exercice de certaines tâches mais sans que cela puisse « sensiblement modifier l’exercice des pouvoirs concernés ». Il en découle que le pouvoir de décision final doit rester dans les mains du Conseil des gouverneurs. Dès lors, l’organisation interne et la procédure suivie par la décision avant d’être finalement adoptée par le Conseil des gouverneurs relève entièrement de la discrétion de la BCE. Elle est donc libre de prévoir la participation d’organismes internes, créés ad hoc et responsables de la préparation des décisions, tels que le Conseil de surveillance en l’espèce. Il ne s’agit pas d’un organe interne ayant reçu une délégation de compétences, il n’a donc pas de personnalité juridique propre. En effet, la création d’une institution séparée aurait demandé une révision du Traité ou, en tout cas, aurait été contraire à l’article 127 du TFUE .

Cependant, ce principe est mis à mal dans la pratique. Compte tenu de l’étendue des pouvoirs qui sont conférés au Conseil de surveillance, certains prétendent que le MSU consiste en l’attribution de compétences à un « superviseur adossé à la BCE » plutôt qu’à la BCE elle-même, ce qui viole le Traité. Il faut tout de même nuancer ces propos notamment car il y a de facto des équipes de supervision qui sont pilotées par des membres du personnel de la BCE et donc la majorité des services qui œuvrent pratiquement à la surveillance prudentielle dépendent effectivement de celle-ci.

Les représentants des ACN membres du Conseil de surveillance : théoriquement indépendants

Le Conseil de surveillance, élément central et noyau décisionnel du MSU, est majoritairement composé de représentants des ACN des États membres participants . Cependant, nonobstant leur nom, ces membres du Conseil ne font pas de la simple représentation car ils font partie du MSU à part entière.

L’article 19(1) du règlement MSU dispose clairement que « les membres du conseil de surveillance (…) agissent en toute indépendance et objectivité dans l’intérêt de l’ensemble de l’Union et ne sollicitent ni ne suivent aucune instruction », notamment de leurs autorités nationales, ni de leurs gouvernements respectifs. Dans un avis, la BCE a d’ailleurs déclaré contraire à cet article un projet de loi finlandais qui obligeait son représentant au Conseil de surveillance à soumettre l’objet du vote futur au Conseil devant l’ACN, qui devait alors prendre position à la place du représentant et lui imposer la décision. L’avis déclare en outre que, a contrario, le représentant de l’ACN et membre du conseil de surveillance peut demander des avis afin de se préparer au mieux avant la réunion au Conseil, sans que ces avis puissent lui être imposés . On retrouve également ces principes dans le Code de conduite applicable aux membres du conseil de surveillance.

Mais outre de ces considérations théoriques, la vraie question est celle de la signification et l’application pratique.

Principe du partage des compétences

La répartition même a fait l’objet de discussions quant à la question de savoir s’il fallait effectivement offrir l’ensemble des compétences prudentielles à la BCE ou simplement lui accorder la supervision des établissements importants. Le principal opposant à l’attribution d’une compétence exclusive absolue était le gouvernement allemand dont le paysage bancaire est parsemé de petites banques coopératives et mutualistes dont il voulait conserver la supervision.

La décision (hautement politique) de distinguer les banques selon des critères d’importance a pour conséquence que la France est l’un des pays les plus concernés par le MSU, au contraire de l’Allemagne qui voit ses banques proportionnellement très peu surveillées directement par la BCE. On peut d’ores et déjà s’étonner d’une telle asymétrie entre deux des plus grandes puissances au regard du MSU et craindre des problèmes de concurrence. En effet, puisque le secteur bancaire français relève de la supervision directe de la BCE, il en résulte logiquement une application uniformisée de la compétence prudentielle, au contraire des banques allemandes qui resteront sous la surveillance de leur ACN. Cette concession politique en faveur de l’Allemagne est critique car outre une crainte de distorsion de la concurrence résultant d’une application différenciée de la règlementation prudentielle, il est clair depuis les crises qu’une petite institution financière peut avoir un effet (parfois néfaste) sur le système financier dans son ensemble.

Compétences partagées selon la taille des établissements de crédit

Suivant les conditions rappelées ci-dessus, les établissements de crédit sont classés en deux catégories : les établissements les plus importants et les établissements moins importants.

Pour les premiers, la BCE exerce directement les tâches de supervision listées à l’article 4 du règlement MSU. En réalité, une équipe de surveillance prudentielle conjointe, composée de représentants de la BCE et des ACN, est créée pour chaque établissement ou groupe bancaire important afin de faciliter l’exercice de la supervision. Cette organisation appelle peu de commentaires, sauf purement descriptifs . Ici, la BCE est l’élément central et les ACN ne participent que pour l’assister dans sa mission et n’ont aucun pouvoir autonome, elles n’agissent que dans les limites établies par la BCE et pour son compte.

Pour les seconds, le centre opérationnel demeure au niveau national mais la BCE encadre les ACN. A cet égard, par exemple, la BCE possède des compétences d’injonction (via règlements, orientations ou instructions), les ACN doivent notifier à la BCE les informations et les décisions essentielles, la BCE peut demander des rapports, la BCE peut aller jusqu’à reprendre elle-même la supervision directe,… A nouveau, on constate que non seulement la BCE profite d’un très large pouvoir d’appréciation, mais surtout que cette situation fragilise les compétences des ACN en les plaçant sous une forme de tutelle européenne. Selon certains, l’expérience aurait montré que cette manière d’opérer conduit à des frictions là où normalement de la coopération devrait prévaloir. Ces frictions se marquent surtout entre le noyau central européen et les entités nationales décentralisées et affecte l’effectivité du mécanisme. On regrette dès lors que le système fonctionne de manière hiérarchique alors qu’« il est important que l’architecture de supervision fournisse non seulement des bâtons mais également des carottes ». Il conviendrait d’inciter et motiver les ACN plutôt que d’essayer de les contrôler et les utiliser comme des simples outils servant la BCE. Cela passe par la création d’une culture européenne de la supervision impliquant chaque intervenant du MSU et prenant racine dans chaque membre du personnel et membre des organes des autorités concernées.

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Table des matières

INTRODUCTION
i. Origines du MSU
ii. Supervision et régulation
iii. Présentation générale du Mécanisme de Surveillance Unique
iv. Objet et plan du mémoire
PARTIE 1 : DROIT INSTITUTIONNEL
1.1. La Banque Centrale Européenne, superviseur au centre du Mécanisme de Surveillance Unique : pourquoi et comment ?
1.1.1. La base légale
i. Le choix de l’article 127, paragraphe 6 du TFUE
ii. Développements critiques
iii. Conclusion
1.1.2. Le choix de la BCE
i. Justifications en faveur de la BCE
ii. Limites et risques
iii. Conclusion
1.2. Gouvernance de la BCE en tant que superviseur prudentiel : analyse ciblée du Conseil de surveillance
1.2.1. Le fonctionnement de la BCE articulé autour du Conseil de surveillance
i. Présentation
ii. Légitimité du Conseil de surveillance
1.2.2. Indépendance vis-à-vis de l’extérieur
i. Les représentants des ACN membres du Conseil de surveillance : théoriquement indépendants
ii. Analyse approfondie et critique de cette indépendance
iii. Remarques générales sur l’indépendance et perspectives globales
PARTIE 2 : DROIT MATERIEL
2.1. Partage des compétences
2.1.1. Exclusivité de compétence dans le chef de la BCE
i. Principe du partage des compétences
ii. Exclusivité de compétence de la BCE et dérives
2.1.2. Les compétences en pratique
i. Compétences générales exclusives de la BCE
ii. Compétences partagées selon la taille des établissements de crédit
iii. Compétences en cas de scénario transfrontalier
2.2. Moyens d’exercice des compétences prudentielles par la BCE
2.2.1. Pouvoirs et instruments de supervision
i. Pouvoirs d’enquête et collecte d’informations
ii. Instruments légaux de la BCE
iii. Cas particulier des sanctions administratives
2.2.2. Dédoublement des normes et application du droit national par la BCE
i. Application du droit national directement par la BCE
ii. Usage des pouvoirs nationaux des ACN sur demande de la BCE
CONCLUSION
BIBLIOGRAPHIE

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