Présentation générale des Andes

Présentation générale des Andes

La cordillère des Andes est la plus longue chaîne de montagne du monde (8 000 km). Elle sʹétend sur 66° en latitude le long de la façade occidentale de lʹAmérique du Sud. Elle borde sept pays dans sa longueur, avec respectivement, du Nord vers le Sud : le Venezuela, la Colombie, l’Équateur, le Pérou, la Bolivie, le Chili et l’Argentine. C’est une chaîne de subduction liée au passage en subduction des plaques Nazca, Cocos et Antarctique sous la plaque Amérique du Sud. Elle est constituée d’une zone avant‐arc (le long de la côte pacifique), la chaîne proprement dite et d’une zone arrière‐arc (bassins amazonien et argentin). La Cordillère des Andes est traditionnellement divisée en trois grands domaines :
1) les Andes septentrionales (12°N‐4°S) qui se développent au‐dessus de la subduction des plaques Cocos et Nazca et impliquent le domaine Caraïbes et l’isthme de Panama,
2) les Andes centrales (4‐35°S), au‐dessus de la subduction de la plaque Nazca, et
3) les Andes australes ou méridionales (35‐55°S), liées au passage en subduction de la dorsale du Chili et de la plaque Antarctique (Figure 1). Si la largeur de la Cordillère ne dépasse guère une centaine de kilomètres dans sa partie sud, elle avoisine les 800 km dans sa partie centrale, en Bolivie, où le taux de raccourcissement est le plus important (e.g. Roeder, 1988 ; Sheffels, 1990 ; Baby et al., 1990). Sur ce tronçon de la chaîne, la croûte continentale est fortement épaissie et atteint localement 80 km (Wigger et al., 1994 ; Zandt et al., 1994, 1996 ; Beck et al., 1996). Cet épaississement est compensé par une anomalie topographique positive majeure, le haut plateau de l’Altiplano‐Puna (~ 4000m). En tenant compte de la fosse océanique du Pérou‐Chili (profonde de 8 025 m au large du Chili septentrional) qui correspond à lʹinterface entre les deux plaques, les Andes constituent le plus important relief au monde situé au‐ dessus d’une zone de subduction. La structuration et la configuration morphologique actuelle des Andes sont, d’une part, liées à différents processus tectoniques associés à la subduction de la plaque océanique Nazca (Farallon), qui plonge sous la plaque continentale Amérique du Sud depuis l’Albien (Jaillard et Soler, 1996), et, d’autre part, aux variations climatiques spatiales et temporelles le long de la chaîne et donc aux interactions entre climat et érosion (Lamb et Davis, 2003 ; Montgomery et al., 2001). De même, l’acquisition du relief à travers les Andes ne s’est probablement pas faite de manière symétrique et les processus qui ont accommodé le soulèvement, sur le flanc Ouest, ou sa cinématique, restent mal connus et discutés (e.g. Isacks, 1988 ; Vietor et Oncken, 2005 ; Farias et al., 2005), notamment dans le nord de l’Orocline bolivien, pour la partie péruvienne. Pour certains auteurs, les taux de soulèvement ont énormément ralenti depuis 5 Ma (Victor et al., 2004) et pourtant, les principales terrasses marines observées le long de la marge ouest andine sont d’âge Pléistocène.

Structuration des Andes centrales (4‐35°S) au Néogène

Segmentation de la plaque Nazca

Segmentation de la subduction
La zone de subduction du Pérou‐Chili se caractérise par : 1) un taux de convergence relative entre les plaques Nazca et Amérique du Sud relativement élevé (Minster et Jordan, 1978 ; Chase, 1978 ; Pardo‐Casas et Molnar, 1987 ; De Mets et al., 1990 ; Gripp et Gordon , 1990), avec une vitesse moyenne de la plaque Amérique du Sud en direction de la fosse de ~48 mm/an (Ziegler et al., 1981 ; Beck, 1987 ; Isacks, 1988 ; Beck et al., 1994 ; Gripp et Gordon , 1990 ; Silver et al., 1998 ; Gripp et Gordon, 2002 ; Sella et al., 2002), 2) la subduction d’une lithosphère océanique légère, car relativement jeune (Eocène à Actuel) (Ziegler et al., 1981), 3) la subduction d’anomalies topographiques : rides asismiques de Carnegie, Nazca, Iquique et Juan Fernandez (Gutscher et al., 2000a ; Yañez et al., 2001 ; Hampel, 2002 ; Figure 2). Les variations latérales du pendage du plan de subduction permettent de définir quatre segments principaux sous les Andes centrales : deux segments de subduction dite normale, car inclinée d’environ 30° vers l’Est, (15‐27°S et au Sud de 33°S) sont séparés par deux segments de subduction dite horizontale (~4‐15°S et 27‐33°S) (e.g. Isacks et Molnar, 1971 ; Barazangi et Isacks, 1976, 1979; Araujo et Suarez, 1994 ; Norabuena et al., 1994 ; Comte et al., 1994 ; Comte et Suárez, 1995 ; Gutscher et al., 2000a ; Gutscher, 2002 ; Figure 2). La présence de segments de subduction horizontale est généralement expliquée par trois phénomènes différents : 1) le passage en subduction d’anomalies bathymétriques (aspérité, ride asismique, plateau océanique), comme la ride de Nazca et celle de Juan Fernandez (Gutscher et al., 2000a), 2) la convergence rapide et la jeunesse relative de la plaque Nazca (Barazangi et Isacks, 1979 ; Cross et Pilger, 1982 ; Cahill et Isacks, 1992) et 3) le mouvement absolu de l’Amérique du Sud au‐dessus de la plaque plongeante (Scholz et Campos, 1994 ; Silver et al., 1998). Cependant, la présence de rides asismiques semble être le facteur prépondérant de ces variations de pendage (Espurt et al., 2008).

Actuellement, plusieurs rides asismiques ou plateaux océaniques sont en subduction sous la plaque sud‐américaine. Il s’agit, du Nord vers le Sud, au niveau des Andes Centrales, de la ride de Nazca au Pérou (~15°S), la ride d’Iquique au Nord Chili (~22°S) et enfin, la ride de Juan Fernandez au Chili central (33°S ; Figure 2). La subduction des rides de Nazca et de Juan Fernandez a débuté au Miocène (Yañez et al., 2001; Hampel, 2002) alors que les rides de Carnegie et d’Iquique sont en subduction seulement depuis 1‐2 Ma (Lonsdale et Klitgord, 1978 ; Espurt et al., 2008a). Les segments de subduction horizontale péruvien (~5‐15°S) et chilien (~27  33°S) coïncident avec le passage en subduction des rides de Nazca et de Juan Fernandez, ce qui suggère une relation de causalité entre subduction de rides et subduction horizontale (Nur et Ben‐Avraham, 1981 ; Gutscher et al., 2000a ; Gutscher, 2002 ; Yañez et al., 2001, 2002 ; Hampel, 2002) mais aussi entre longueur de ride subduite et subduction horizontale de la plaque océanique (Espurt, 2007). En effet, la subduction horizontale résulte de la plus grande flottabilité de la plaque plongeante, au niveau de la ride, qui passe plus difficilement en subduction. A partir de la distribution de la sismicité et des images tomographiques, la géométrie du plan de Wadati‐Benioff de la plaque de Nazca sous le continent sud‐américain, au niveau de ces deux rides, a pu être décrite. On observe que la lithosphère océanique plonge avec un angle d’environ 30° depuis la fosse jusqu’à une profondeur de 100‐120 km, puis se dispose horizontalement sous la plaque chevauchante, avant de replonger dans le manteau supérieur à ~650 km de la fosse, sous les bassins d’arrière‐arcs péruvien et argentin (Espurt, 2007 ; Figure 2). De même, si on observe le passage en subduction de la ride d’Iquique, elle est probablement trop récente pour induire un changement de pendage.

Segmentation du volcanisme

La présence ou l’absence de volcanisme actif le long des Andes est étroitement liée à la géométrie de la subduction de la plaque Nazca (Nur et Ben‐Avraham, 1981; McGeary et al. 1985). En effet, les zones de subduction horizontale ne présentent pas de traces de volcanisme actif (Figure 2) (Gutscher et al., 2000b). Dans ces zones, la plaque en subduction, en se disposant horizontalement sous la plaque chevauchante, repousse le biseau asthénosphérique (« asthenospheric wedge » ; Gutscher et al., 2000b ; Barazangi et Isacks, 1979 ; Kay et al., 1987, 1988, 1991 ; Kay et Abruzzi, 1996). Ainsi, l’évolution et l’âge des segments de subduction horizontale peuvent être connus à partir des données du volcanisme. Au Pérou et au Chili central, la subduction des rides de Nazca et de Juan Fernandez a débuté il y a ~12‐11 Ma (Hampel, 2002; Yañez et al., 2001). Les données de volcanisme de lʹavant‐arc péruvien (Soler et Bonhomme, 1990) montrent que lʹhorizontalisation de la plaque plongeante est apparut il y a ~4 Ma sous le Pérou. Le même délai (~7‐8 Ma) est observé au Chili, suite à la subduction du segment Nord‐Sud de la ride de Juan Fernandez et lʹarrêt du volcanisme il y a 4,7 Ma. Ainsi, le processus dʹhorizontalisation de la plaque plongeante est un phénomène long, nécessitant plusieurs millions d’années pour compenser la densité de la lithosphère océanique et la subduction de plusieurs centaines de kilomètres de plateau océanique (Espurt et al., 2008). En Equateur, le processus d’horizontalisation lié à la subduction de la ride de Carnégie est en cours mais pas encore achevé, comme le montre, par exemple, le fait que le volcanisme soit encore actif (Bourdon et al., 2003), en raison de la subduction récente de la ride de Carnegie (Lonsdale et Klitgord, 1978). Il en est de même pour la ride d’Iquique dans le Nord du Chili (Rosenbaum et al., 2005). Par ailleurs, James et Sacks (1999) pensent, à partir de leur étude du magmatisme, qu’il y a eu, entre 35 et 25 Ma, un segment horizontal sous le Sud du Pérou et le Nord du Chili. Yañez et al (2001) proposent que cette subduction horizontale serait liée au segment orienté N‐S de la ride de Juan Fernandez. Ce segment aurait migré vers le Sud, en relation avec le déplacement vers le Sud de la ride de Juan Fernandez.

Segmentation et morphologie générale de la chaîne

On constate que la répartition des unités morphostructurales est associée à la géométrie du plan de subduction. Les unités morphostructurales actuelles sont organisées parallèlement à la zone de subduction. Ceci suggère que la plaque plongeante exerce un contrôle sur la morphologie de la plaque sus‐jacente. En effet, au niveau de la subduction horizontale au centre du Chili (32‐34°S), la Précordillère et la Dépression Centrale disparaissent, ne restant alors que la Cordillère de la Côte et la Cordillère Principale. Le passage en subduction des rides entraîne le soulèvement de plusieurs centaines de mètres de la zone d’avant‐arc (e.g. Macharé et Ortlieb, 1992 ; von Huene et al., 1996 ; Gutscher et al., 1999a ; Le Roux et al., 2000 ; Hampel, 2002 ; Clift et al., 2003 ; cette étude) et l’arrêt du volcanisme (Nur et Ben‐Avraham, 1981; McGeary et al., 1985), puis la subsidence de la zone d’avant arc après son passage (Macharé et Ortlieb, 1992). L’impact de la subduction de rides sur la dynamique des bassins rétroarcs a de même été décrit (Jordan et Allmendinger, 1986 ; Giambiagi et Ramos, 2002 ; Charrier et al., 2002, pour la ride de Juan Fernandez sur les Sierras Pampeanas ; Espurt, 2007 ; Espurt et al., 2007, pour la ride de Nazca sur le bassin amazonien). L’entrée en subduction de ces rides asismiques a d’importantes conséquences sur la déformation (Cloos, 1993 ; Scholz et Small, 1997 ; Dominguez et al., 1998 ; Gutscher et al., 2000a ; Ramos et al., 2002; Hampel, 2004), l’érosion (Wipf, 2006) et les environnements sédimentaires (von Huene et al., 1996 ; Hampel, 2002) de la plaque continentale chevauchante. Toutefois, la discrimination entre variations de la compression horizontale, réactivation tectonique, effet thermique et topographie dynamique dans les bassins d’arrière‐ arc fait encore l’objet d’un débat (e.g. Ramos et al., 2002).

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Table des matières

1. Introduction
1.1. Présentation générale des Andes
1.1.1. Structuration des Andes centrales (4‐35°S) au Néogène
1.1.1.1. Segmentation de la plaque Nazca
1.1.1.1.1. Segmentation de la subduction
1.1.1.1.2. Segmentation du volcanisme
1.1.1.1.3. Segmentation et morphologie générale de la chaîne
1.1.1.2. Vitesses de convergence entre les plaques Nazca et Amérique du Sud
1.1.1.3. Historique des séismes de subduction et lacune sismique
1.1.1.4. Description morphostructurale des Andes Centrales
1.1.2. Les mécanismes de soulèvement de l’avant‐arc andin
1.2. Les terrasses marines : des marqueurs géomorphologiques de la dynamique du soulèvement côtier
1.3. Les terrasses marines comme marqueurs spatio‐temporels de la déformation des marges et de sa quantification
1.4. Zones d’étude
1.5. Objectifs et démarche
2. Les mécanismes de formation et de préservation des terrasses marines
2.1. Les agents de l’érosion littorale
2.1.1. Les vagues et la houle
2.1.2. Dynamique de la houle au‐dessus du platier et érosion
2.1.3. Les courants littoraux
2.1.4. Le vent, l’altération chimique et l’activité biologique
2.2. Les formes du rivage : les zones d’érosion et les zones d’accumulation
2.3. La formation des terrasses marines
2.3.1. Eustatisme et stades isotopiques : la chronologie des variations du niveau marin de la mer au Pléistocène
2.3.2. Les processus de formation des terrasses marines
2.4. La préservation des terrasses marines
3. Méthodologies de datation et de mesure des taux de soulèvement utilisées
3.1. Méthodologie de datation absolue
3.1.1. Méthode de l’isotope cosmogénique Béryllium 10 (10Be)
3.1.1.1. Intérêt de la méthode
3.1.1.2. Principe
3.1.1.3. Stratégies d’échantillonnage en surface / selon un profil en profondeur
3.1.1.3.1. La stratégie d’échantillonnage en surface
3.1.1.3.2. La stratégie d’échantillonnage le long d’un profil en profondeur
3.1.1.4. Analyse en laboratoire et principe de la méthode de calcul des âges de surfaces et le long d’un profil en profondeur
3.1.1.4.1. Protocole en laboratoire
3.1.1.4.2. Principe de la méthode de calcul des âges de surface et selon un profil en profondeur
3.1.2. Méthodes U‐Th de datation de coquilles fossiles
3.1.2.1. Principe et méthode d’échantillonnage
3.1.2.2. Protocole et application de la technique aux coquilles des cordons littoraux de la région de Tongoy
3.2. Détermination des taux de surrection de la côte
4. Conclusion

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