Présentation du concept de harcèlement psychologique au travail

Présentation du concept de harcèlement psychologique au travail..

Méthodes d’évaluation et prévalence

Jusqu’à présent, les études empiriques portant sur le harcèlement psychologique au travail ont mesuré ce concept en utilisant de multiples méthodes d’évaluation (instruments de mesures variés, seuils différents délimitant la présence ou non de harcèlement; Nielsen, Notelaers, & Einarsen, 2010). Les taux rapportés de harcèlement peuvent ainsi varier de quelques pourcents à plus de 50 % (Agervold, 2007). Cependant, malgré l’existence de différentes méthodes d’évaluation pour mesurer le harcèlement, ces mesures peuvent se regrouper en deux catégories: 1) la perception de victimisation; 2) l’exposition à des comportements de harcèlement psychologique (Nielsen et al., 2009; Nielsen, Matthiesen, & Einarsen, 2010; Nielsen, Notelaers, & Einarsen, 2010). La première méthode (la perception de victimisation) consiste à demander aux employés (parfois en se basant sur une définition formelle du harcèlement psychologique) s’ils ont été victimes de harcèlement au travail durant les six derniers mois. Bien que cette méthode soit couramment utilisée en recherche car elle est simple à utiliser, elle comprend certaines limites qui restreignent sa validité, surtout lorsqu’elle est employée comme unique méthode d’estimation (Nielsen, Matthiesen, & Einarsen, 2010). Cette méthode se révèle, en effet, fort subjective, en particulier dans le cas où aucune défmition de harcèlement psychologique n’ est fournie aux participants.

De plus, elle offre peu d’information quant à la nature des comportements de harcèlement vécus et génère souvent une sous-estimation de l’ampleur du harcèlement en milieu de travail (Einarsen & Skogstad, 1996; Nielsen, Matthiesen, & Einarsen, 2010; Nielsen, Notelaers, & Einarsen, 2010). Les études utilisant cette méthode en offrant aux participants une défmition formelle du harcèlement révèlent qu’entre 5 et Il % des employés rapportent être victimes de harcèlement psychologique (Nielsen et al., 2009; Nielsen, Matthiesen, & Einarsen, 2010). Cet écart peut en partie s’ expliquer par le fait que différentes définitions sont utilisées pour évaluer le harcèlement (Agervold, 2007). Lorsqu’aucune définition du harcèlement n’est offerte aux participants, les études montrent que plus de 18% des employés seraient victimes de harcèlement au travail (Nielsen, Matthiesen, & Einarsen, 2010).

La deuxième méthode mesurant le harcèlement psychologique évalue, à l’aide d’un inventaire de comportements négatifs précis, l’exposition à des comportements de harcèlement au travail. Bien que différents inventaires aient été conçus pour évaluer l’exposition à des comportements de harcèlement psychologique au travail, tels le Leymann Inventory of Psy chological Terror (Leymann, 1990) et le Work Harassment Scale (Bjorkqvist et al., 1994), le Negative Acts Questionnaire (Einarsen & Raknes, 1997; Einarsen et al., 2009) se veut le plus couramment utilisé (Nielsen, Notelaers, & Einarsen, 2010).

Cet inventaire mesure la fréquence (allant de « jamais » à « tous les jours ») à laquelle les employés ont été exposés à différents comportements négatifs (reliés à la tâche, à l’ individu et à l’ intimidation physique) lors des six derniers mois. Aucune référence à la notion de harcèlement psychologique n’est faite. Pour être considérée comment étant du harcèlement psychologique, l’exposition à ces comportements doit être fréquente (c.-à-d. de manière quotidienne ou hebdomadaire) et persistante (c.-à-d. pendant au moins six mois; Nielsen, Matthiesen, & Einarsen, 2010; Nielsen, Notelaers, & Einarsen, 2010). Puisqu’ elle n’oblige pas les participants à prendre position quant au fait de vivre ou non du harcèlement psychologique au travail, cette méthode est considérée plus objective que la méthode « perception de victimisation » (Nielsen, Notelaers, & Einarsen, 2010). De plus, elle a l’avantage de prendre en considération la nature, la fréquence et la durée des comportements de harcèlement.

Cependant, cette méthode comprend également certaines limites. D’une part, il est impossible d’évaluer si le participant considère les comportements négatifs comme étant du harcèlement ou comme faisant partie de la réalité de travail. Par exemple, une situation dans laquelle un employé se voit déléguer délibérément une surcharge de travail excessive est très différente de celle dans laquelle un employé, lors d’une période de l’ année particulièrement occupée, est confronté à une surcharge de travail comme l’ensemble des employés. D’ autre part, cette méthode peut engendrer une estimation biaisée de l’occurrence du harcèlement psychologique en milieu de travail (Agervold, 2007).

Certains auteurs suggèrent, en effet, qu’une exposition fréquente (quotidiennement ou hebdomadairement) et prolongée (pendant au moins six mois) à un seul comportement négatif peut être considérée comme du harcèlement (Leymann, 1996). Or, ce critère (c.-à-d. un seul comportement négatif) risque de surestimer la prévalence du harcèlement psychologique au travail (Agervold, 2007). À cet effet, d’ autres auteurs (Mikkelsen & Einarsen, 2001; Nielsen et al., 2009) préconisent un minimum de deux comportements négatifs comme critère afm d’obtenir une estimation plus réaliste de l’ampleur de la situation de harcèlement psychologique (Mikkelsen & Einarsen, 2001 ; Nielsen et al., 2009). En utilisant le critère d’un comportement négatif, les études estiment qu’environ 15 % des employés sont exposés à des comportements de harcèlement, alors qu’en utilisant le critère plus restrictif de deux comportements, le taux diminue aux alentours de 6 % (Nielsen et al., 2009).

Considérant que les deux méthodes d’évaluation (perception de victimisation et exposition à des comportements de harcèlement psychologique) fournissent des renseignements complémentaires sur le harcèlement psychologique au travail, leur utilisation conjointe permet une compréhension plus nuancée du phénomène (Nielsen et al., 2009; Nielsen, Matthiesen, & Einarsen, 2010). En effet, la première méthode (la perception de victimisation) offre un aperçu quant à l’impression subjective d’être victime de harcèlement au travail, alors que la deuxième méthode (l’exposition à des comportements de harcèlement) fournit de l’information quant à la nature, la fréquence et l’intensité de ces comportements.

Discussion

Le harcèlement psychologique s’ avère une problématique de premier ordre en milieu infIrmier (Hubert & van Veldhoven, 2001; Zapf et al., 2010) et mène à d’ importantes conséquences sur le plan du fonctionnement psychologique (p. ex., détresse, épuisement professionnel; Einarsen et al., 1998; Kivimaki et al., 2003; Niedhammer et al., 2006) et professionnel (p. ex., intention de quitter l’emploi; Quine, 2001; Out, 2005) des infrrmier(ère)s. Il va sans dire que ces conséquences peuvent engendrer des coûts non négligeables pour les établissements de soins de santé (p. ex., absentéisme, roulement de personnel; Hoel et al., 2010; Ortega et al., 2011), et ce, tout en nuisant à la qualité des soins que dispensent les infrrmier(ère)s (Farrell et al., 2006). Malgré ces enjeux, les connaissances sur l’état actuel du harcèlement psychologique au Canada, et en particulier au · Québec, sont restreintes.

De plus, malgré l’ intérêt grandissant en ce qui concerne le harcèlement psychologique au travail, la recherche est fragmentaire, adoptant principalement une approche descriptive. En effet, bien que plusieurs études aient décelé une relation positive entre le harcèlement et des problèmes liés au fonctionnement des employés qui en sont victimes, peu d’études ont évalué les mécanismes psychologiques qui y sont liés (Bowling & Beehr, 2006; Keashly, 1998; Nielsen & Einarsen, 2012). En d’autres termes, pourquoi et comment le harcèlement affecte-il le fonctionnement psychologique et professionnel des victimes. L’utilisation de cadre théorique se veut nécessaire afm de mieux orienter l’étude du harcèlement psychologique et de faciliter la compréhension de ces mécanismes. Pourtant, la recherche actuelle sur le harcèlement ne repose généralement pas sur des cadres théoriques éprouvés (Nielsen & Einarsen, 2012; Zapf & Einarsen, 2001 , 2005).

Enfin, la majorité des études portant sur le harcèlement ont utilisé un devis de recherche transversal, ce qui limite grandement notre compréhension de la relation temporelle existant entre le harcèlement et le fonctionnement des employés. Afin de pallier ces lacunes, la thèse avait comme objectif principal d’évaluer la présence du harcèlement psychologique auprès d’un vaste échantillon d’ infrrmier(ère)s québécois(es) et de proposer un modèle théorique du harcèlement afin de mieux comprendre les mécanismes psychologiques susceptibles d’expliquer ses effets sur le fonctionnement des infrrmier(ère )s. Pour répondre à cet objectif, trois articles scientifiques ont été réalisés. Le premier article visait à brosser un portrait du harcèlement perçu et vécu par un large échantillon d’ infirmier(ère)s québécois(es).

Le deuxième article avait pour but de proposer et d’éprouver un modèle du harcèlement psychologique. S’appuyant sur la théorie de l’autodétermination (TAD; Deci & Ryan, 1985, 2000, 2008), ce modèle avance que le harcèlement psychologique agit sur le fonctionnement psychologique (épuisement et engagement professionnel) des infirmier(ère)s en nuisant à la satisfaction des besoins fondamentaux d’autonomie, de compétence et d’appartenance sociale. Le troisième article visait à valider le modèle proposé et à accroître sa portée dans une perspective temporelle en examinant, sur une période d’un an, la nature des liens qui s’opèrent entre le harcèlement psychologique, la satisfaction des besoins fondamentaux et le fonctionnement psychologique (épuisement et engagement professionnel) et professionnel (intention de quitter l’emploi) des infrrmier(ère)s.

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Table des matières

Introduction
Contexte théorique
Présentation du concept de harcèlement psychologique au travail
Définition du harcèlement psychologique au travail et distinction avec des concepts limitrophes
Éléments fondamentaux liés au concept de harcèlement psychologique
Comportements néfastes et non désirés
Fréquence et persistance des comportements négatifs
Inégalité de pouvoir/ressources
Intentionnalité
Conséquences rattachées au harcèlement psychologique au travail
Conséquences individuelles
Conséquences organisationnelles
Méthodes d’évaluation et prévalence
Harcèlement psychologique chez le personnel infirmier
Lacunes actuelles des études sur le harcèlement psychologique au travail et objectifs de la thèse
Harcèlement psychologique chez le personnel infirmier québécois
Mécanismes psychologiques impliqués
Théorie de l’autodétermination
Perspective longitudinale
Chapitre 1. Workplace bullying in Canadian nurses : A descriptive study
Abstract
Method
Results
Discussion
References
Footnote
Chapitre 2. Workplace bullying and psychological functioning at work: The mediating role of satisfaction of needs for autonomy, competence, and relatedness
Abstract
Method
Results
Discussion
References
Chapitre 3. A longitudinal investigation ofworkplace bullying, basic need satisfaction, and employee functioning
Abstract
Method
Results
Discussion
References
Discussion
Synthèse des principaux résultats obtenus
Article 1
Article 2
Article 3
Implications de la thèse
Implications méthodologiques
Implications théoriques
Implications pratiques
Limites des études réalisées
Conclusion
Références
Appendice. Échelles utilisées dans la thèse

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