Présentation des différents systèmes dédiés aux langues signées

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Racine de l’iconicité

La pantomime est une pratique artistique qui consiste à reproduire des situations réelles ou imaginées d’interactions avec des personnes ou des objets. Ces personnes ou objets sont absents, mais semblent perceptibles grâce à la gestuelle de l’artiste. Pour cela, le corps du mime est mis intégralement au service de la représentation : une montée d’escalier fictive présente des caractéristiques physiques que l’art du mime rend manifestes de la tête jusqu’aux pieds. Exprimer les effets que le monde physique a sur le corps nécessite une appropriation de l’espace dans une étendue temporelle suffisamment longue pour que le spectateur accumule les indices visuels lui permettant de reconstruire pleinement l’invisible.
Pour les LS, le fonctionnement est tout autre. Le signeur n’utilise pas l’intégralité de son corps pour communiquer. Seule la partie haute du corps – comprenant les membres supérieurs, le torse et la tête – est sollicitée. De plus, l’intercompréhension doit être et est immédiate, la fluidité de la communication est donc primordiale. L’espace dans lequel les signes émergent et se déploient est restreint et conditionné par la zone physique atteignable par les mains. Néanmoins, si la confusion entre le discours signé et la création gestuelle pantomimique reste forte, cela est dû au fait que les LS utilisent des formes renvoyant de manière iconique aux référents représentés par ces signes (Cuxac 2000, Cuxac & Sallandre 2007, Fusellier-Souza 2006).
Au sein des langues vocales (LV), prenons ici le français, il n’y a pas de rapport direct entre une réalisation acoustique telle que [vwatyʁ] et le signifié auquel il renvoie. Mais pour la langue des signes française (LSF), le signifiant [VOITURE] (fig. 1.1.) recourt à la manière dont on se représente un conducteur qui manipule le volant d’une voiture. Il y a un lien motivé entre signifiant et signifié.
Cela est dû à la capacité du corps à imiter l’environnement, ou en tout cas les parties jugées pertinentes de cet environnement. Dans notre exemple, il n’y a aucune reproduction de la forme de la carrosserie ou de l’intérieur de la voiture. Par un procédé de synecdoque – figure rhétorique par laquelle le tout est exprimé par une de ses parties – le volant suffit à représenter l’ensemble de la voiture. Pour exprimer une action comme [monter dans le métro], un type de structure spécifique est utilisé, les proformes. Un proforme est un « signe linguistique dont le signifiant est une configuration manuelle conventionnelle (et donc arbitraire, au sens de Saussure (1967), même si elle est généralement motivée et iconique), représentant une entité déjà mentionnée ou non dans le discours. Le proforme ne prend donc pleinement son sens qu’en contexte et s’apparente de ce point de vue aux pronoms des langues vocales. » (Collomb et al. 2018 : 2). Donnons un exemple. La fig. 1.2 présente un signeur dont l’index et le majeur de la main droite sont crochetés tandis que la main gauche oppose le pouce aux autres doigts. Un mouvement permet de qualifier l’interaction entre ces deux éléments : l’index et le majeur de la main droite se posent sur le pouce de la main gauche.
Les chronophotographies et vidéos des signes de LSF au sein de ce manuscrit sont tirées de notre corpus de thèse (présenté chapitre 5).
Ce signe est considéré comme un transfert de situation (Cuxac 2000), c’est-à-dire une réalisation qui donne à voir une action de déplacement d’un agent, soit l’animé qui exécute l’action, par rapport à un locatif, soit le lieu impliqué par le procès. La main droite indique qu’il s’agit d’une personne dont les jambes sont courbées ; la main gauche décrit un espace rectangulaire ; le mouvement relie ces deux entités en spécifiant l’action « entrer dans ». Cependant, selon la définition de proforme donnée ci-dessus, pour obtenir des précisions sur l’identité de l’actant et sur le lieu où il se trouve, il faut remonter le fil du discours. Parmi les signes précédant celui reproduit à la fig. 1.2, nous trouvons un déictique indiquant [JE] (signe 229) et le signe standard de [MÉTRO] (signe 244). Ces indications sémantiques sont ici présupposées à travers les proformes, équivalents au syntagme verbal signifiant « je m’assois dans le métro ». Nul besoin de mimer l’entrée dans la rame ou l’installation sur le siège : un seul et unique mouvement suffit à représenter l’ensemble de ces actions. Cela rappelle que les LS se sont développées en suivant un principe de « démembrement symbolique » (Boutet et al. 2010 : 64) du corps qui s’oppose au « maintien d’une globalité » corporelle caractérisant la pantomime (ibid. : 67).
Des règles rigoureuses et partagées unissent le corps du signeur et son espace. Ce lien fort affecte jusqu’à la syntaxe de ces langues. En LS, elle relève principalement d’un agencement des signes « Sujet Objet Verbe » comme c’est le cas pour le turc ou le latin. Le fait que l’action trouve sa place à la fin de la proposition et que les données spatio-temporelles se retrouvent au début marque l’importance de l’aspect visuel des LS (Le Corre 2007), mais pas seulement. Il semble en effet que si un signeur précise d’abord le contexte et les acteurs de l’action avant de la décrire, c’est parce que les LS se structurent dans l’espace. La spatialité propre aux LS doit être comprise dans la logique relationnelle qui est la leur. Cette logique n’admet pas de liens entre deux entités si ces deux entités ne sont pas, au préalable, identifiées et situées. En d’autres mots, il n’est pas possible en LS de placer un objet sans avoir défini le support sur lequel il repose. On sait que tout système informatique fonctionne de cette manière-là : ce n’est qu’une fois que la machine sait que A = 2 et B = 4 qu’elle a la capacité de résoudre le calcul A + B. Ce serait le schéma rationnel logique que suivent les LS, combiné avec une modalité de productions langagières gestuo-visuelles.

Espace de signation

L’utilisation de la partie supérieure de son corps par le signeur scinde l’espace en deux : une partie de cet espace se trouve à la portée des mains sans que le signeur n’ait à se déplacer ou à exercer un quelconque allongement forcé de ses membres.
La portion d’espace accessible au signeur constitue « l’espace de signation ». Pour Millet (2019), cet espace permet de construire un discours linguistiquement pertinent au travers de zones « pré-sémantisées » (ibid. : 95) (fig. 1.3). Selon la zone dans laquelle se déploie le signe, ce dernier génère d’emblée des informations sur ses fonctions sémantiques.
L’espace neutre (N) est le seul à ne pas être sémantiquement chargé. Cet espace a plusieurs usages, comme la réalisation des signes sous leurs formes de citation (forme hors contexte des verbes). L’espace frontal en contact ou proche du corps (1) est lié à la 1ère personne [JE], agent ou bénéficiaire de l’action. Les espaces latéraux (3(a) et 3(b)) sont liés à la 3e personne [IL] ou [ELLE], agent ou bénéficiaire de l’action. L’espace lié à la 2e personne [TU] n’apparaît pas dans ce schéma, car il dépend de la localisation de l’interlocuteur dans l’espace réel du signeur. Ces trois zones servent à la flexion des verbes directionnels. Un verbe comme [DONNER] a, dans sa forme de citation, un mouvement qui part de l’espace neutre. Pour signifier le syntagme [JE TE DONNE], si le bénéficiaire est présent, le mouvement – doublé d’un investissement du regard – part de l’espace (1) pour rejoindre la position de ce bénéficiaire. Si le bénéficiaire n’est pas présent ou s’il s’agit du syntagme [JE LUI DONNE], le mouvement part de l’espace 1 pour atteindre l’espace 3(a) ou 3(b). C’est le cas de la fig. 1.4 qui met en jeu un agent actant et deux bénéficiaires absents. Le premier bénéficiaire est situé dans l’espace 3(b) et le second dans l’espace 3(a).

Base d’un système phonologique

Outre son intérêt proprement scientifique, le travail de décomposition des signes de l’ASL par Stokoe en 1960 relevait d’une motivation particulière : susciter la reconnaissance des langues des signes par la communauté des linguistes comme de celle du grand public.
Au début des années 1960, la linguistique américaine est encore sous l’influence du distributionnalisme, théorie qui s’attache à décrire les LV dans une optique strictement comportementale. Stokoe s’attèle alors à montrer qu’une décomposition de type phonologique est également pertinente lorsqu’il s’agit de décrire l’ASL. Trois composantes nécessaires à la formation de signes sont alors isolées. Stokoe les nomme « aspects ».
Le premier aspect, appelé « dezignator », concerne la forme de la main. L’auteur recense dix-neuf configurations (annexe A.1). Afin de concevoir cet inventaire, Stokoe a recourt aux configurations de la main utilisées pour la dactylologie (représentations gestuelles des lettres de l’alphabet) de l’ASL. Son approche est holistique dans la mesure où l’auteur considère que des formes de main qui présentent peu de différences relèvent d’une même configuration. C’est le cas pour les lettres A, S et T qui sont considérées comme formées de configurations semblables, la position du pouce n’étant pas jugée pertinente (fig. 1.6). Sa classification implique donc qu’en ASL les configurations de main [A] [S] ou [T] ont une même représentation phonologique /A/.
Le deuxième aspect, appelé « tabula », se concentre sur l’emplacement de la main par rapport au corps du locuteur. Ces emplacements sont au nombre de douze (annexe A.2). Il peut s’agir du cou, du torse ou encore de l’espace « neutre » devant le signeur.
Le troisième aspect, « signation », spécifie le mouvement de la main. Cet aspect est le plus finement décrit selon vingt-quatre types de mouvements (annexe A.3), rassemblés en groupes d’actions. Des indications sur l’orientation de la main seront ensuite ajoutées (Stokoe 1965). L’auteur ne considère pas l’orientation comme un paramètre à part entière, mais comme un sous-ensemble de la signation.
L’ensemble des unités constituant ces aspects sont pour Stokoe des équivalents aux phonèmes. En LV, l’identification des phonèmes s’est faite en construisant des paires minimales, c’est-à-dire des paires de mots dont le sens ne se différencie que par un seul son. Ce n’est qu’une fois qu’une paire minimale ayant ce son comme base commune est avérée que celui-ci prend le statut de phonème. Des études traitant des LS ont été menées suivant ce même processus de recensement des paires minimales4. Concernant la LSF, citons à titre d’exemple les signes [INTELLIGENT] et [SENTIR] qui se distinguent par l’emplacement de la main (sur le front pour le premier, sur le nez pour le second) ; les signes [PARDON] et [COURRIEL] qui présentent une différence de configuration (main plate pour le premier et main en poing avec le pouce écarté pour le second) ; les signes [PUNIR] et [TRAVAILLER] se distinguent par leur mouvement, unique pour l’un et répété pour l’autre (Millet 2004).
Le travail mené à partir de 1960 s’applique à mettre au jour les similitudes structurelles existantes entre les signes et les mots, afin de justifier l’appartenance des LS à la famille des langues : tout comme la combinaison de phonèmes engendre des morphèmes en LV, la combinaison de chérèmes permet la formation de kinèmes.
Cela étant dit, bien que la reconnaissance des LS n’ait plus jamais été remise en question, les aspects de Stokoe ont engendré et engendrent encore des débats à plusieurs niveaux. Citons sans les creuser davantage les discussions autour du terme « paramètre » utilisé à partir de 1979 (Klima & Bellugi 1979) en lieu et place d’aspect, ou celles entourant le terme prime en lieu et place de chérème5.
Signalons également que de nombreux inventaires différents ont été proposés rassemblant de quarante à plus de soixante-quinze configurations de la main (Friedman 1977, Battison 1978, Klima & Bellugi 1979, Boutora 2008). Une des propositions les plus récentes, celle de Millet (2019 : 46), recense quarante-et-une configurations.
Klima & Bellugi (1979) enrichissent le découpage paramétrique des signes en ajoutant des paramètres qualifiés de « mineurs » – comme le contact de la main sur une autre partie du corps ou sur l’autre main, ou encore la disposition des mains entre elles – par opposition aux paramètres « majeurs » qui correspondent aux trois aspects dégagés par Stokoe, auquel on ajoute celui de l’orientation, considérée depuis Battison (1973) comme un paramètre à part entière. Le changement de statut de ce dernier suscite encore aujourd’hui bien des discussions. Battison fonde son point de vue sur l’existence de paires minimales basées strictement sur l’orientation de la paume dans l’espace ; pour la LSF, nous pouvons citer les signes [MAISON] et [DEMANDER] qui se distinguent seulement par l’orientation des paumes, dirigées vers le sol pour l’un et vers le signeur pour l’autre. Brentari (1998) stipule toutefois qu’il existe trop peu de paires minimales basées sur l’orientation pour que cette dernière soit considérée comme pleinement autonome. Millet (2019) considère l’orientation comme un paramètre véritable tout en rappelant qu’il demeure complexe à isoler, car conditionné aux autres paramètres.
Les expressions faciales pouvant modaliser, compléter ou spécifier un signe, sont aussi analysées, leur statut oscillant entre celui d’un paramètre véritable pour Moody (1983) ou d’une donnée lexicale non pertinente pour Millet (2019), car soumise au contexte discursif.
Parmi les quatre paramètres manuels – que sont la configuration, l’orientation, l’emplacement et le mouvement – trois sont inhérents à la présence même de la main. Supposons que le membre supérieur soit ballant, le long du buste. Même dans cette position de repos, la main présente une configuration (composée de doigts légèrement courbés), un emplacement (le côté de la cuisse) et une orientation (paume vers la cuisse). Seul le mouvement, ou toute tension musculaire, n’est pas présent de fait. Il relève d’une volonté et d’un effort particulier. Or, tout signe comporte un mouvement, qui est nécessaire pour créer du sens (Wilbur 1993, Millet 2019). Sa présence systématique et sa saillance perceptive le placent d’ailleurs au cœur de l’étude de la prosodie des LS et de l’existence potentielle d’une démarcation entre le geste et le signe.
Caractéristiques linguistiques principales
Pour Miller (2000 : 102), le mouvement a trois caractéristiques saillantes :
. La géométrie
. La temporalité
. La séquentialité
La première caractéristique concerne la forme de la trajectoire dessinée dans l’espace par la main.
ce propos, Millet (2019) recense trois types de mouvement : le mouvement manuel interne, le mouvement strictement articulateur et le mouvement articulateur iconique (tab. 1.1).
Le mouvement strictement articulateur (première colonne) se subdivise en mouvement ponctuel, correspondant à un mouvement du poignet, et en mouvement tracé, correspondant à une action motrice du bras ou de l’avant-bras. Seule cette dernière sous-catégorie engendre un déplacement de la main, transportée d’un point de départ à un point d’arrivée, et donc une trajectoire. Ce type de mouvement, que l’on peut observer au sein d’un signe tel que [SAVOIR] (fig. 1.7), « permet d’articuler le geste et le sens, puisque […] sans mouvement, il n’y a pas de signe » (ibid. : 82).
Systèmes de transcription
Tôt au XIXe siècle, l’importance de dissocier LV et LS a été pressentie par Bébian, pionnier de l’apprentissage des jeunes sourds.
Or,  l’on  tenterait  vainement  de  décrire  des  signes  mimiques  avec  des  mots.
Cependant, si l’on veut rapprocher, comparer, combiner ces signes, et surtout, si l’on veut conserver et transmettre les résultats d’un travail si précieux, il faut un moyen de peindre ces signes, de les fixer sur le papier. » (Bébian 1825 : 7).
Entre 1817 et 1825, Bébian met au point une méthode de transcription à partir d’un système phonologique embryonnaire composé de 187 caractères regroupés selon différents paramètres. Parmi ces caractères, 68 concernent le mouvement. Concentrons-nous sur ces derniers.
Pour représenter la direction et la trajectoire du mouvement, Bébian utilise le symbole de la roue. La position de la roue donne la direction du mouvement (fig. 2.8 colonne A) et son taux de déformation indique le niveau de courbure du mouvement (fig. 2.8 colonnes B, C et D).
Enfin, d’autres symboles permettent de spécifier ce que Bébian appelle l’« accens modificatif» (fig. 2.10), c’est-à-dire la dynamique du mouvement lent ou vif, bref ou prolongé, successif ou réitéré, en tenant compte lorsque nécessaire de la synchronie entre les deux mains.
La transcription d’un signe se compose linéairement de gauche à droite en commençant par le segment qui est en mouvement, suivi des différentes caractéristiques de ce mouvement. De manière facultative, l’expression du visage peut être ajoutée. L’ensemble de ce travail est resté
l’état de théorie, à peine mise en pratique.
C’est bien plus tard, en 1960, grâce à Stokoe, qu’un véritable système phonologique (ou cherologic) de l’ASL est créé. La Stokoe Notation tient compte des trois aspects caractérisant l’ASL : l’emplacement, la configuration et le mouvement. À chacune des unités constituant l’un de ces aspects sont associés des symboles, qui sont au nombre de 5524. La transcription d’un signe suit une syntaxe linéaire exprimant, dans l’ordre, l’emplacement et la configuration, le mouvement et l’orientation. Pour ces deux derniers, les symboles sont respectivement placés en exposant et en indice de celui indiquant la configuration (fig. 2.11).
Les symboles sont iconiques en ce qui concerne le paramètre de l’emplacement : on peut y déceler la forme arquée du haut (∩) et du bas (∪) du visage, l’aspect rectangulaire du tronc ([ ]) ou longiligne des bras (√) (annexe A.2). En ce qui concerne les formes de main, les symboles sont majoritairement des caractères latins faisant référence à la dactylologie de l’ASL (annexe A.1).
Le mouvement est le paramètre le plus détaillé (annexe A.3) et est essentiellement décrit selon quatre catégories :
. les directions pour les mouvements à trajectoire ;
. les mouvements des poignets et ceux qui produisent un changement de configuration ;
. les interactions entre la main et la partie du corps avec laquelle elle est en contact, ou les interactions entre les deux mains ;
. la dynamique temporelle du mouvement comme la vitesse ou la répétition.
Le point de vue du producteur est ici employé. Les points de référence sont le corps du signeur (i.e. « s’approchant du signeur », « s’éloignant du signeur »), la main dominante (i.e. « ouverture », « fermeture »), ou la main dominée (i.e. « se sépare », « s’approche »).
Si ce système a permis aux LS d’être introduites dans le domaine de la linguistique (§1.1.1.3), quelques critiques ont néanmoins été émises à son encontre. Cette notation ne permet de coder que ce qui se rapporte aux mains, empêchant ainsi la représentation des paramètres non manuels comme l’expression faciale, le regard ou encore la posture. Autre réserve, le système a été conçu à partir d’éléments provenant d’une LS spécifique, l’ASL, freinant son adoption par un large spectre des LS.
C’est ce manque d’exhaustivité et d’universalité qui a motivé la création d’un autre système de représentation linéaire mis en place en 1989. Il s’agit de la HamNoSys, acronyme pour Hambourg Notation System (Prillwitz et al. 1989). Ce système formé par 214 symboles a été spécifiquement conçu pour faciliter la transcription de corpus vidéo, orientée vers l’étude linguistique des LS. Les paramètres sont transcrits en suivant une syntaxe précise : symétrie (i.e. si les deux mains sont nécessaires à la formation du signe), paramètres non manuels, configuration, position des mains, emplacement et mouvement (fig. 2.12).
Le traitement du mouvement reste inchangé. Il est possible de distinguer les mouvements à trajectoire (droit  , en arc  , sinusoïdal  , circulaire   ) des mouvements locaux (changement de configuration ou d’orientation  , mouvements au niveau de l’avant-bras   ) et d’en indiquer l’amplitude par un cercle placé sous la flèche. Ce cercle peut être vide, indiquant que le signe est de petite amplitude  , ou plein indiquant qu’il est de grande amplitude
 . Les aspects dynamiques, toujours identiques, sont à noter après la flèche. Le mouvement peut alors être noté comme rapide ( ) ou lent ( ).
La visée de HamNoSys est internationale. Aucune référence à une LS ou à une LV particulière n’est faite. De plus, le système n’est pas figé, il reste possible d’ajouter des glyphes concernant notamment les expressions faciales. Notons cependant que la recherche de précision d’HamNoSys a engendré un morcellement important des signes, si bien que les transcriptions de longs discours s’avèrent lourdes à réaliser comme à déchiffrer, le système perdant de ce fait en lisibilité et en employabilité (Boyes-Braem 2012).
Cette présentation de systèmes graphiques des LS montre une certaine similitude et récurrence dans le traitement graphique mais aussi théorique du mouvement. Il existe pourtant diverses possibilités de représentations du corps dynamique dans l’espace, comme le montre par exemple les systèmes graphiques de la danse. D’ailleurs, bien que cette dernière utilise le corps dans sa globalité afin de mêler performance et esthétisme, la danse présente des similitudes avec la production de signes : il s’agit dans les deux cas d’objets sémiotiques qui transmettent de l’information par la rythmique des mouvements corporels.
Le corps est l’outil de la danse, qu’elle soit individuelle ou collective, réalisée à des fins de rituel ou de divertissement. Universelle, la danse connaît des formes variées d’expression selon le contexte culturel dans lequel elle prend place. Il existe un certain nombre d’archives concernant celles pratiquées en Occident, provenant dans un premier temps de notations réalisées par des maîtres de danse et de ballets. L’expression corporelle y est retranscrite d’un point de vue interne au corps, se différenciant de la perspective externe choisie au sein des systèmes des LS.
Pas après pas
Le premier ouvrage décrivant des mouvements dansés est l’Orchésographie d’Arbeau (1589). L’auteur énumère et regroupe sur une page, à la verticale à la manière d’une partition de musique, les pas à réaliser (fig. 2.13 (a)). Ce procédé de notation à la fois typologique et symbolique permet au danseur de connaître le tempo précis avec lequel il doit réaliser une succession de pas. Nulle précision n’est cependant donnée quant à la direction à prendre dans l’espace. De plus, malgré la présence de quelques illustrations (fig. 2.13 (b)), les pas à réaliser, bien que nommés, ne sont pas décrits rendant nécessaire de connaître au préalable le vocabulaire spécifique à la danse dont il est question.

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Table des matières

INTRODUCTION
CHAPITRE 1. PHONOLOGIES DU MOUVEMENT
1.1. Spécificités de la linguistique des langues signées
1.1.1. Le corps
1.1.1.1. Racine de l’iconicité
1.1.1.2. Espace de signation
1.1.1.3. Base d’un système phonologique
1.1.2. Le mouvement
1.1.2.1. Caractéristiques linguistiques principales
1.1.2.2. Rôle prosodique
1.1.2.3. Observations et réflexions actuelles
1.1.3. Réflexions phonologiques
1.1.3.1. Séquentialité et bornage
1.1.3.2. Autonomie des postures
1.1.3.3. À la recherche du mouvement disparu
1.2. L’approche kinésiologique
1.2.1. Description des articulations du membre supérieur
1.2.1.1. Structure de l’analyse descriptive
1.2.1.2. Articulation du bras
1.2.1.3. Articulation de l’avant-bras
1.2.1.4. Articulation de la main
1.2.2. Changement de géométrie
1.2.2.1. Contraintes d’amplitude
1.2.2.2. Mouvement conjoint involontaire
1.2.2.3. Géométrie non euclidienne sphérique
1.2.3. Restructuration des paramètres « manuels »
1.3. Il court, il court, le mouvement
1.3.1. Distinguer les différents types de mouvement
1.3.1.1. Transferts de mouvement
1.3.1.2. Déplacement ou transfert total ?
1.3.2. Flux du mouvement
1.3.2.1. Types de flux
1.3.2.2. Règles de transfert de mouvement
1.3.2.3. Catégorisation sémantique
CHAPITRE 2. SCRIPTURALITÉS ET MOUVEMENT
2.1. Représenter graphiquement le corps en mouvement
2.1.1. Nécessités linguistiques
2.1.2. Présentation des différents systèmes dédiés aux langues signées
2.1.2.1. Représentations picturales
2.1.2.2. Système d’écriture
2.1.2.3. Systèmes de transcription
2.1.3. Une autre perspective : le mouvement dansé
2.1.3.1. Pas après pas
2.1.3.2. Individuer le geste dansé
2.1.3.3. Modèle géométrique
2.1.4. Synthèse
2.2. Proposition de renouvellement, le projet Typannot
2.2.1. Du point de vue au cadre de référence
2.2.1.1. Types de cadres de référence
2.2.1.2. Pour un cadre de référence intrinsèque et multiple
2.2.2. Typannot : principes et méthodes de construction
2.2.2.1. Glyphes génériques et composés
2.2.2.2. Perspectives du projet Typannot : le clavier virtuel
2.2.3. Caractéristiques compositionnelles du mouvement
2.2.3.1. Flux, emprise et portée
2.2.3.2. Impulsion et amplitude
2.2.3.3. Figures perspectives et dynamique
CHAPITRE 3. TECHNOLOGIE EN MOUVEMENT
3.1. Évolution des outils de capture du mouvement
3.1.1. À la conquête du mouvement
3.1.1.1. Objectivité de l’appareil photographique
3.1.1.2. Rendre perceptible l’invisible
3.1.1.3. Individualiser le mouvement
3.1.2. Bases théoriques de la cinématique articulaire
3.2. Descriptif des systèmes de capture du mouvement
3.2.1. Capture de mouvement sans marqueur
3.2.1.1. Leap Motion Controller
3.2.1.2. Kinect
3.2.2. Capture de mouvement optoélectronique
3.2.2.1. Marqueurs actifs et marqueurs passifs
3.2.2.2. Vicon et Optitrack
3.2.3. Capture de mouvement embarquée
3.2.3.1. Capteur magnétique et exosquelette
3.2.3.2. Unité de mesure inertielle
3.2.4. Synthèse
3.3. Apports de la technologie
3.3.1. Évolutions paradigmatiques
3.3.1.1. Vidéo et outils computationnels
3.3.1.2. Accès aux données tridimensionnelles
3.3.2. Revue des corpus de Langue des Signes Française
3.3.2.1. Corpus vidéo
3.3.2.2. Corpus couplés avec de la capture de mouvement
3.3.2.3. Problématiques liées au traitement des corpus
3.3.3. Analyses basées sur le mouvement : bornage des réalisations signées et gestuelles
3.3.3.1. Cinématique et (a)télicité
3.3.3.2. Kinésiologie et imperfectivité
CHAPITRE 4. THÉORIES DYNAMIQUES DU CONTRÔLE MOTEUR
4.1. Production du mouvement corporel
4.1.1. Approche cognitiviste
4.1.1.1. Dualisme corps/esprit
4.1.1.2. Système en boucle fermée
4.1.1.3. Théorie du schéma
4.1.2. Approche dynamique
4.1.2.1. Individu et environnement
4.1.2.2. Systèmes complexes : auto-organisation et émergence
4.1.2.3. Contraintes régulatrices du comportement moteur
4.2. Optimisation du mouvement corporel
4.2.1. Récurrence et stabilité motrices
4.2.1.1. Mouvements morphocinétiques
4.2.1.2. Mouvements topocinétiques
4.2.2. Acte moteur : un travail d’équipe
4.2.2.1. Forces physiques
4.2.2.2. Synergies préférentielles
4.2.3. Optimisation du mouvement en langue des signes française
4.2.3.1. Économie linguistique
4.2.3.2. Localisation initiale (LOCini) et mouvement (MOUV)
4.2.3.3. Pour une simplification motrice de la forme des signes
CHAPITRE 5. MISE EN PLACE ET EXPLOITATION D’UN CORPUS DE LANGUE DES SIGNES FRANÇAISE
5.1. Structure et organisation
5.1.1. Matériel utilisé
5.1.1.1. Description du système de capture mouvement
5.1.1.2. Critères de sélection
5.1.2. Protocole d’enregistrement
5.1.2.1. Contenu et métadonnées du corpus
5.1.2.2. Déroulé de l’enregistrement
5.2. Corpus vidéo CLM-MOCAP
5.2.1. Exploitation sur ELAN
5.2.1.1. Contenu du template
5.2.1.2. Mise en pratique
5.2.1.3. Durée du travail de transcription
5.2.2. Traitement par script Python
5.2.2.1. Format des bases de données de référence
5.2.2.2. Traitement de la LOCini
5.2.2.3. Traitement du MOUV
5.2.2.4. Traitement conjoint de la LOCini et du MOUV
5.3. Exploitation du corpus de capture de mouvement CLM-MOCAP
5.3.1. Export et synchronisation des données
5.3.1.1. Fichier de sortie : BVH Biovision
5.3.1.2. Synchronisation des enregistreurs
5.3.2. Pré-traitement des données 3D
CHAPITRE 6. DU CORPS AU SIGNE
6.1. Relations entre LOCini et MOUV : le dénouement
6.1.1. Retours sur le travail effectué
6.1.1.1. Objets de l’analyse
6.1.1.2. Méthodologie de recherche
6.1.2. Résultats tirés du traitement sous Python
6.1.2.1. Hétérogénéité des placements initiaux (LOCini)
6.1.2.2. Quantité et temporalité des degrés de liberté actifs (MOUV)
6.1.2.3. Relation entre les degrés de liberté actifs (LOCini et MOUV)
6.1.3. Caractérisation d’une économie structurelle
6.1.3.1. Tout est une question d’organisation
6.1.3.2. Entre simplicité et économie
6.2. Vers une reconnaissance automatique des DDLs
6.2.1. Traitement des données
6.2.1.1. Exposition de la méthodologie utilisée
6.2.1.2. Système de référence
6.2.1.3. Applications théoriques aux DDLs
6.2.2. Exploitation des scripts et exportation des résultats
6.2.2.1. Utilisation des scripts MATLAB
6.2.2.2. Résultats DDLs du bras
6.2.2.3. Résultats DDLs de l’avant-bras
6.2.3. Limites et ouvertures
6.2.3.1. Retour sur le système de MoCap employé
6.2.3.2. Retour sur la méthode employée
6.3. Pour une kinésio-linguistique
6.3.1.1. Inconstance phonologique
6.3.1.2. Synergie et sémantique
CONCLUSION
BIBLIOGRAPHIE

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