Le Pulsar
Un pulsar est une étoile à neutrons en rotation rapide observé à 1.4 ms de période (Hessels et al. 2006) pour le plus rapide à 23 secondes pour le plus lent (Tan et al. 2018). C’est le résidu de l’explosion en supernova d’une étoile de 8-20 masses solaires. Sa masse est d’en moyenne 1.4 masses solaires. L’étoile reste dans un état stable grâce à l’équilibre entre la force gravitationnelle, la pression de dégénérescence des neutrons et l’interaction forte. La rotation de ce corps est due à la conservation du moment angulaire de la matière durant l’effondrement de l’étoile mère. Si la masse initiale de l’étoile mère est inférieure à 8 masses solaires la densité n’est alors pas suffisante pour favoriser la transformation du couple proton électron en neutron et permettre et former l’étoile à neutron. Inversement si l’étoile mère est plus massive que 20 masses solaires la gravitation l’emporte sur la dégénérescence des neutrons et un trou noir se forme lors de la supernova.
La première détection
Le premier pulsar connu a été découvert en 1967 par Jocelyn Bell durant sa thèse à l’université de Cambridge sous la direction d’Antony Hewish (Hewish et al. 1968). C’est au cours d’une recherche de signal scintillant avec le radiotélescope IPS array (« Interplanetary Scintillation Array » ) que Jocelyn Bell identifia une source d’impulsions intermittentes. Doté d’une périodicité de 1.33 seconde et fixe sur la voûte céleste, l’objet fut appelé LGM1 (Little Green Man 1). Il fut renommé par la suite en PULSAR (PULSating stAR) 1919+21 par ses découvreurs en référence à sa position dans le système de coordonnées équatoriales. C’est en 1968 que Thomas Gold identifia les pulsars comme des étoiles à neutrons en rotation, mais le nom de pulsar resta (Gold 1968). À noter que le réseau IPS observait le ciel à une fréquence de 81.5 MHz, ce qui est juste en dessous de la bande radio FM (« Frequency Modulation »).
Rapidement après la découverte des pulsars leurs observations à basse fréquence ont été délaissées au profit de la bande plus haute autour de 1.4 GHz permettant d’utiliser les radiotélescopes déjà existants (précédemment construits pour les observations de l’émission de l’hydrogène neutre à 21 cm de longueur d’onde). Cela permettait par la même occasion de diminuer l’impact des effets de propagation dans le milieu interstellaire sur le signal et alors de sonder le milieu interstellaire plus en profondeur.
Périodicité apparente
Le signal d’un pulsar est vu comme une série de pulsations périodiques. En revanche, la période observée par un radiotélescope est modulée par de nombreux effets provenant : du système solaire, du milieu interstellaire ainsi que de l’environnement local du pulsar.
Les effets provenant du système solaire et affectant la période sont :
— Le délai Römer, dû au mouvement de la terre autour du barycentre (centre de masse) du système solaire et du mouvement du radiotélescope par rapport au barycentre de la terre.
— Le délai Shapiro, dû au retard gravitationnel de la lumière au passage près des corps les plus massifs du système solaire (le soleil et Jupiter principalement), (voir Shapiro 1964).
— Le délai Einstein, dû au « redshift » gravitationnel. L’onde radio est « accélérée » en pénétrant dans le champ gravitationnel du soleil modulé en fonction du mouvement orbital de la terre et donc sa fréquence diminue. (voir Lorimer & Kramer 2004).
Les effets provenant du système du pulsar et affectant la période sont :
— Le ralentissement de la rotation dû à la perte d’énergie par le processus d’émission électromagnétique.
— Le délai Römer venant du mouvement orbital du pulsar dans le cas d’un système multiple.
— L’effet Shapiro, dû aux modulations du champ gravitationnel par le mouvement orbital des deux sources.
— Le délai Einstein, dû au « redshift » gravitationnel du au champ gravitationnel des sources.
— Le délai de l’effet Shklovskii, dû au mouvement propre du pulsar par rapport à l’observateur.
— Le délai du à l’accélération par un potentiel gravitationnel (amas globulaire et Voie lactée principalement).
À ces deux catégories d’effets s’ajoute le délai dispersif du signal provoqué par la traversée du milieu interstellaire . Pour étudier les variations intrinsèques au système du pulsar, il faut impérativement corriger les délais cumulés dans ∆T erre (équation (1.1)) entre la Terre et le système du pulsar (voir dans Lorimer & Kramer 2004). Ces effets sont regroupés dans l’équation (1.1) composée de ∆T erre le délai total observé par le radiotélescope, ∆R le délai Römer du système solaire, ∆E le délai Einstein, ∆S le délai Shapiro, ∆A effet Shklovskii et délai dû à l’accélération par un potentiel gravitationnel et ∆DM le délai dispersif principalement dû au milieu interstellaire .
∆T erre = ∆R + ∆E + ∆S + ∆A + ∆DM (1.1)
Afin de dé-entrelacer ces délais il est impératif d’enregistrer les temps d’arrivée des pulsations sur une grande plage de temps (plusieurs années) afin de mesurer précisément la période de rotation, le ralentissement et séparer les effets associés ayant une variation annuelle (position, mouvement propre). Observer les pulsars sur une grande période de temps permet aussi de mesurer les variations de la densité électronique intégrées le long de la ligne de visée à travers le milieu interstellaire.
Le profil d’un pulsar
Le profil d’un pulsar est en quelque sorte son empreinte digitale.
Tout d’abord nous parlerons ici uniquement du profil moyen, car le profil instantané peut varier d’une pulsation à une autre suivant les variations de contenu de la magnétosphère ainsi que du milieu interstellaire traversé. En revanche, le profil moyen restera inchangé entre deux observations (sauf pulsars à changement de modes ).
La forme du profil d’une l’étoile à neutrons observée depuis la Terre dépend de nombreuses variables : de la répartition du contenu électronique dans la magnétosphère du pulsar, de l’angle entre l’axe de rotation et l’axe magnétique du pulsar, du parcours de la ligne de visée dans le milieu interstellaire et de l’angle entre la ligne de visée et l’axe de rotation. Depuis la Terre nous ne sommes sensibles qu’à la partie du faisceau qui est traversée par la ligne de visée . Le faisceau est alors réduit à un profil en une dimension. Ce même profil peut être alors utilisé afin de retrouver le modèle du faisceau expliquant au mieux les variations observées dans le profil moyen .
Les pulsars millisecondes recyclés
Les pulsars millisecondes (MSP) recyclés sont une catégorie à part dans la population de pulsars, car ils tournent sur leur axe de rotation jusqu’à 1000 fois plus rapidement que les pulsars normaux qui ont des périodes de l’ordre de la seconde. Les pulsars recyclés sont dans un système binaire ou en sont issus. En effet, s’ils sont si rapides c’est grâce au moment angulaire qu’ils ont acquis en accrétant la matière de leur compagnon (voir dans Lorimer & Kramer 2004). Les pulsars recyclés sont alors tous issus de pulsars classiques. Ils sont couramment appelés pulsar « recyclés », car accélérés par le recyclage de leur compagnon.
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Table des matières
I Introduction
1 Le Pulsar
1.1 La première détection
1.2 Périodicité apparente
1.2.1 Le profil d’un pulsar
1.2.2 Les pulsars millisecondes recyclés
2 Le milieu interstellaire
2.1 La dispersion
2.2 L’élargissement des profils dû à la multi-propagation
2.2.1 Principe de la multi-propagation
2.2.2 Multi-propagation et ligne de visée
2.3 Dispersion et multi-propagation dans la Voie lactée
2.4 La scintillation
2.4.1 Scintillation réfractive du milieu interstellaire
2.4.2 Scintillation diffractive du milieu interstellaire
2.4.3 Estimation des durées caractéristiques de la scintillation
2.5 La rotation Faraday
3 Le mécanisme d’émission
3.1 Le rayonnement de courbure
3.2 Le spectre d’émission
3.2.1 Les pulsars
3.2.2 Le bruit de la Voie lactée
4 Les variations dans le profil
4.1 La cartographie-rayon-fréquence « radius-frequency-mapping »
4.2 Le modèle vectoriel rotatif « Rotating Vector Model »
4.3 La faune des pulsars
4.3.1 Les sous-impulsions dérivantes « drifting subpulses »
4.3.2 Les impulsions anormales et les pulses géants
4.3.3 Les pulsars à changement de modes « mode-changing »
4.4 L’enchevêtrement de la dispersion, de la multi-propagation et des variations du profil
5 Les observations des pulsars
5.1 L’intégration en temps et en phase rotationnelle
5.2 Dédispersion incohérente
5.3 Les archives pulsar
II Instrumentation
6 Les radiotélescopes
6.1 Les grands radiotélescopes à antenne unique
6.2 Les grands réseaux phasés
6.2.1 Le fonctionnement d’un réseaux phasé
6.3 MeerKAT
6.4 LOFAR
6.4.1 Le cœur de LOFAR
6.4.2 FR606 et les stations internationales
7 NenuFAR
7.1 L’architecture du radiotélescope
7.2 La polarisation de NenuFAR
7.3 La chaîne d’acquisition de NenuFAR
7.4 Les avantages de NenuFAR
7.5 L’instrumentation pulsar de NenuFAR
7.5.1 Les différences entre NUPPI et LUPPI
7.5.2 Dédispersion cohérente
7.5.3 Defaraday incohérent
7.5.4 Defaraday cohérent
7.5.5 Correction de l’aliasing
7.5.6 Trois modes d’observation
7.6 Le post-traitement des observations pulsars
7.6.1 Le nettoyage des observations basse fréquence
7.6.2 Le quicklook
III Les Campagnes d’observations avec LOFAR
8 L’observation des pulsars avec le cœur de LOFAR et la station FR606
8.1 L’observation des pulsars avec LOFAR
8.2 Contexte des observations pulsars en dessous de 100 MHz
8.3 Excision des interférences radio
8.4 Recherche de pulsars connus
8.5 Pipeline de calibration en flux
9 Le relevé LBA de la station FR606
9.1 Introduction
9.2 Le choix de l’échantillon
9.3 Limites supérieures pour les non-détections
9.4 Résultats
9.5 Discussion
9.5.1 Dispersion à basse fréquence
9.5.2 Dispersion, scattering et ratio de détection
9.5.3 Comparaisons des densités de flux moyennes
9.5.4 Pulsars millisecondes
9.5.5 Non detection
9.6 Conclusion du relevé de la station FR606
10 Le relevé LBA du cœur de LOFAR
IV Conclusion