Pratique de l’excision et morbi-mortalité maternelle et périnatale

La santé de la reproduction constitue un état de bien-être complet, physique, mental et social, en ce qui concerne la fonction et le fonctionnement de l’appareil génital [49]. Cette définition requiert pour l’individu qu’il puisse :
❖mener une vie sexuelle satisfaisante c’est-à-dire saine, agréable et en toute sécurité ;
❖s’informer et accéder à des services de santé de qualité ;
❖être capable d’utiliser la méthode de régulation des naissances de son choix ;
❖décider librement du moment et de la fréquence de sa procréation ;
❖avoir un enfant vivant, sans souffrance fœtale, et morphologiquement normal ;
❖recevoir un soutien et des soins adéquats avant, pendant et après accouchement.

Selon la dernière Enquête Démographique et Santé (EDS V), le taux de décès maternel au Sénégal est estimé à 392 sur 100.000 naissances vivantes [4]. A l’image des régions périphériques du Sénégal, Matam fait partie des zones les plus touchées par cette morbi-mortalité maternelle, pour des raisons multiples. Il s’agit, entre autres, de l’insuffisance de soins obstétricaux d’urgence de base et complets dans les structures de santé, de l’inaccessibilité géographique et/ou financière des populations aux structures de santé, de la sous-utilisation des services de soins de santé maternelle pendant la grossesse et après l’accouchement ; et enfin de la persistance des pratiques traditionnelles néfastes à la santé de la reproduction et à la santé sexuelle des femmes, y compris les mutilations génitales féminines (MGF). Les conséquences des mutilations génitales féminines, objet de notre étude, représentent un réel problème de santé sexuelle et de santé de la reproduction.

Elles peuvent être responsables de morbi-mortalité, tant en période gynécologique qu’en période gravido-puerpérale. Apparues dans la région du Haut Nil à l’époque des pharaons, les mutilations génitales féminines (MGF) se sont répandues en Afrique et au Moyen-Orient. Elles sont actuellement pratiquées principalement dans 28 pays d’Afrique sub-saharienne [52]. Les mutilations génitales féminines (MGF) sont une pratique traditionnelle profondément enracinée dans certaines sociétés [47]. Elles désignent l’ablation totale ou partielle des organes génitaux externes féminins pour des raisons culturelles ou pour d’autres raisons d’ordre non thérapeutique. Elles ont des conséquences graves sur la santé de la reproduction et la santé sexuelle des femmes [43]. Elles sont pratiquées sur des fillettes entre 1 et 5 ans qui n’ont aucun pouvoir de refus et subissent des douleurs atroces et souvent perdent la vie suite à certaines conséquences de cette pratique. C’est en ce sens que les mutilations génitales féminines constituent, selon l’Organisation Mondiale de la Santé (OMS), la pratique traditionnelle la plus dangereuse en matière de santé publique [48]. A travers le monde, les mutilations génitales féminines concernent encore aujourd’hui entre 100 à 140 millions de femmes. On estime à trois millions chaque année le nombre d’enfants à risque de mutilations génitales [52]. Au Sénégal, la pratique de l’excision est assez répandue puisqu’elle concerne 26% des femmes de 15-49 ans. Elle est essentiellement déterminée par l’appartenance ethnique [4].

Dans la région de Matam, la pratique de l’excision dont l’origine est principalement attribuée à la tradition, est ancrée dans les croyances culturelles des populations. La prévalence était estimée à 93% selon l’EDS 2005 [41] et est à 87% selon l’EDS 2011 [4] dans la région de Matam. Le Ferlo de Ranérou, vaste étendue géographique de la région de Matam, est une localité où les populations pratiquent la transhumance. Ainsi, la recherche de pâturage et de points d’eau sont les principales motivations des déplacements cycliques des éleveurs avec leurs épouses et leurs enfants. Dans cette zone, les femmes victimes d’excision, en état de grossesse pratiquent aussi la transhumance, limitant ainsi leur accès aux structures de santé .

RAPPELS

RAPPEL EMBRYOLOGIQUE

Le clitoris est souvent considéré chez la femme comme étant le reliquat féminin du pénis. Cependant malgré un développement précoce similaire, le clitoris aura sa propre morphogenèse et n’est en aucun cas un pénis initial. Initialement, tous les embryons présentent, autour de la membrane cloacale, à la suite de la réintégration du mésenchyme extra-embryonnaire, les mêmes formations mésenchymateuses et épithéliales. Au cours du développement du pôle caudal (et non sa régression), le bourgeon génital (ou tubercule), les bourrelets génitaux, et les replis génitaux encadrent et limitent un infundibulum génital qui se situe juste au dessous du sinus uro-génital. L’évolution de ces structures se fait en parallèle avec le cloisonnement du cloaque. C’est ce que l’on appelle « le stade indifférencié » .

Dans tous les cas, le tissu spongieux est situé sous les replis génitaux, et non en dedans. C’est entre la huitième et la douzième semaine que l’appareil copulatoire effectue sa différentiation masculine ou féminine (Figure 2) [36]. Dans le sexe masculin, les cellules de Leydig du testicule secrètent des androgènes (qui maintiennent les canaux de Wolff et assurent la croissance du bourgeon génital), et les cellules de Sertoli de l’hormone antimüllérienne ou AMH (qui induit la transformation mésenchymateuse des canaux de Müller et leur classique «disparition»). Les bourrelets génitaux fusionnent et donneront le scrotum, les replis génitaux fourniront le fourreau préputial. Les corps spongieux fusionnent en suivant la migration de l’urètre qui se fait depuis la vessie, ce qui rend compte de leur aspect divergent dans les hypospadias et les états ambigus [36]. Dans le sexe féminin, l’infundibulum reste ouvert et la croissance du pôle caudal de l’embryon permet sa connexion au sinus uro-génital en laissant une trace hyménéale. La croissance des replis se fait vers l’extérieur et donnera les nymphes (ou « petites lèvres ») et le capuchon du clitoris. En l’absence de testostérone, la croissance du bourgeon est faible et il semble se couder en direction de l’infundibulum vulvaire.

En résumé, chez le fœtus, le pénis et le clitoris se forment à partir du même bourrelet génital. Au départ, il s’agit exactement des mêmes tissus de sorte que ce qui devient le pénis chez le garçon devient le clitoris chez la fille. La structure de base est donc très semblable ; tant qu’il développe sa double potentialité le fœtus pourrait être de sexe masculin ou féminin. Au début, le fœtus possède tous les traits des 2 sexes. Ainsi, à un certain point de son développement, des hormones et différents facteurs amènent pratiquement l’un des 2 sexes à disparaitre. On se retrouve alors avec des organes génitaux externes (OGE) de type masculin ou féminin [24].

RAPPEL ANATOMIQUE

LES STRUCTURES ANATOMIQUES

L’ensemble des organes génitaux externes de la femme définissent la vulve qui est constituée de plusieurs structures anatomiques (Figure 3) [13] :
– Le mont du pubis (ou mont de Vénus) est une éminence arrondie située au devant de la symphyse pubienne [13].
– Les grandes lèvres sont les replis adipeux de peau placés à la partie externe de la vulve. Elles mesurent en moyenne 8 cm de long et 1,5 cm de large. Les petites lèvres sont les replis muqueux de peau situés en dedans des grandes lèvres. Le rôle des grandes et petites lèvres est de protéger l’orifice vulvaire et les organes génitaux internes [13].
– Le clitoris, dont le terme vient du nom grec «kleitoris» signifiant petite surélévation, est un organe érectile et médian présentant une structure anatomique similaire au pénis. Sa partie visible (de 0,5 à 1 cm de diamètre) se situe au sommet des petites lèvres. Il se compose de deux corps caverneux dont la taille varie de 5 à 8 cm qui se réunissent en un corps cylindrique de 3 cm en moyenne. L’incurvation des corps caverneux forme le genou clitoridien dont seule l’extrémité, le gland clitoridien, est visible. Ce dernier est recouvert partiellement d’un capuchon ou prépuce clitoridien
– Le vestibule est une dépression délimitée par les faces internes des petites lèvres. Il contient l’orifice du vagin et celui de l’urètre [13].
– L’hymen est la membrane qui sépare la vulve du vagin et qui se rompt lors des premiers rapports sexuels. L’hymen est normalement perforé au centre pour permettre le passage du sang menstruel. Mais il est parfois de forme différente : réduit à une collerette, fendu ou criblé de petits orifices [29]. C’est une membrane très souple qui se distend aisément. C’est pourquoi sa valeur comme signe de virginité est relative.
– La vulve est annexée par des glandes vestibulaires qui contribuent à sa lubrification. Les glandes vestibulaires majeures ou glandes de Bartholin sont situées à l’intérieur des grandes lèvres au niveau de la jonction du tiers moyen et inférieur. Les glandes para urétrales ou de Skène se situent de part et d’autre de l’urètre et les glandes vestibulaires mineures à la surface des formations labiales [13].
– Les autres organes génitaux féminins sont internes et composés du vagin, de l’utérus, des trompes de Fallope et des ovaires [13].

LES STRUCTURES ERECTILES

Le clitoris se divise en 3 parties : le corps caverneux, le corps du clitoris et le gland. Le clitoris représente avec les bulbes vestibulaires ou corps spongieux, les corps érectiles des organes génitaux externes [36]. Les corps érectiles sont constitués des éléments suivants :
– Le ligament suspenseur du clitoris est annexé à la face centrale du clitoris. Les éléments fibro-élastiques qui le constituent descendent de la ligne blanche (linea alba) et de la symphyse pubienne, et se terminent sur le fascia clitoridien.
– Les muscles périnéaux antérieurs sont des muscles striés puissants. On en distingue trois :

● Le muscle ischio-caverneux
● Le muscle bulbo-spongieux et
● le muscle transverse superficiel

➤ Le muscle ischio-caverneux s’insère sur l’ischion, se dirige en avant et médialement, pour se mélanger aux fibres supérieures du muscle bulbospongieux homolatéral. Il recouvre le pilier du clitoris. Lors de sa contraction, il comprime le corps caverneux.
➤ Le muscle bulbo-spongieux est un muscle bifide. Il s’insère sur le centre tendineux du périnée, chemine au-dessus des bulbes et se termine par deux faisceaux (supérieur et inférieur) à hauteur du clitoris. Il favorise l’érection du clitoris en comprimant la veine dorsale profonde du clitoris et le bulbe vestibulaire. Il abaisse le clitoris, comprime la glande vestibulaire majeure et rétrécit l’introït vaginal.
➤ Le muscle transverse superficiel est inconstant.

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Table des matières

INTRODUCTION
Première partie : Revue de la littérature
1. RAPPELS
1.1. RAPPEL EMBRYOLOGIQUE
1.2. RAPPEL ANATOMIQUE
1.2.1. Les structures anatomiques
1.2.2. Les structures érectiles
1.2.3. La vascularisation et l’innervation
1.2.3.1. La vascularisation
1.2.3.2. L’innervation
1.3. RAPPEL PHYSIOLOGIQUE
2. MUTILATIONS GENITALES FEMININES
2.1. DEFINITION – CLASSIFICATION
2.2. HISTORIQUE DE L’EXCISION
2.2.1. Terminologie
2.2.2. Concepts de la circoncision féminine et masculine
2.2.3. Origine et pratique de l’excision
2.2.3.1. Origine de l’excision
2.2.3.2. Age de l’excisée
2.2.3.3. Déroulement de l’intervention
2.2.3.3.1. Préparation à l’intervention
2.2.3.3.2. Instruments utilisés
2.2.3.3.3. Les exécutants
2.2.3.3.4. Lieu de la pratique
2.2.3.3.5. Technique proprement dite
2.2.4. Raisons de la pratique des mutilations génitales feminines
2.2.4.1. Les raisons psycho-sexuelles
2.2.4.2. Les raisons socio-culturelles
2.2.4.3. Les raisons sanitaires et esthetiques
2.2.4.4. Les raisons religieuses
2.3. EPIDEMIOLOGIE DE L’EXCISION
2.3.1. Répartition géographique
2.3.2. Prévalence
2.3.3. Cas du sénégal
3. COMPLICATIONS DES MUTILATIONS GENITALES FEMININES SUR LA SANTE MATERNELLE ET PERINATALE
3.1. AU PLAN PSYCHOLOGIQUE
3.2. AU PLAN PHYSIQUE
3.2.1. Complications à court terme
3.2.2. Complications à moyen et long terme
3.2.2.1. Les problèmes cicatriciels
3.2.2.2. Les complications hémorragiques
3.2.2.3. Les complications urologiques
3.2.2.4. Les complications gynécologiques
3.2.2.5. Les complications obstétricales
3.2.2.5.1. Pendant la grossesse
3.2.2.5.2. Pendant le travail
3.2.2.5.3. Au cours de la parturition
3.2.2.5.4. Pendant le post-partum
3.2.2.5.4.1. Chez la mère
3.2.2.5.4.2. Chez le nouveau-né
4. CHIRURGIE REPARATRICE
4.1. Chirurgie plastique reconstructrice du clitoris
4.2. La désinfibulation
4.3. Chirurgie réparatrice d’une tumeur clitoridienne post excison
Deuxième partie : Notre travail
1. CADRE DE L’ETUDE
1.1. LA REGION DE MATAM
1.2. LE DEPARTEMENT DE RANEROU
1.2.1. La population
1.2.2. Les infrastructures sanitaires
1.2.3. Le personnel
2.OBJECTIFS DE L’ETUDE
2.1. OBJECTIF GENERAL
2.2. OBJECTIFS SPECIFIQUES
3. METHODOLOGIE
3.1. TYPE D’ETUDE
3.2. POPULATION D’ETUDE
3.3. ECHANTILLONNAGE
3.3.1. Unité statistique
3.3.2. Critères d’inclusion
3.3.3. Critères de non inclusion
3.3.4. Taille de l’échantillonnage
3.4. OUTILS ET METHODES DE COLLECTE DE DONNEES
3.4.1. Outils de collecte de données
3.4.2. Méthodes de collecte des données
3.4.3. Paramètres étudiés
3.5. SAISIE ET ANALYSE DES DONNEES
4. RESULTATS
4.1. RESULTATS QUANTITATIFS
4.1.1. Etude descriptive
4.1.1.1. Caractéristiques générales des parturientes
4.1.1.1.1. Caractéristiques sociodémographiques et épidémiologiques
4.1.1.1.2. Caractéristiques cliniques
4.1.1.2. Evolution de la grossesse
4.1.1.2.1. Suivi de la grossesse
4.1.1.2.2. Issue de la grossesse
4.1.1.3. Déroulement de l’accouchement
4.1.1.4. Complications du post-partum
4.1.1.5. Devenir du nouveau né
4.1.2. Etude analytique
4.1.2.1. Relation entre la durée du travail et l’existence d’excision
4.1.2.2. Relation entre la durée du séjour hospitalier et l’existence d’excision
4.1.2.3. Relation entre la présence d’une dystocie et l’existence d’excision
4.1.2.4. Relation entre la présence de déchirure périnéale et l’existence d’excision
4.1.2.5. Déchirure périnéale chez les femmes excisées de type I et de type II
4.1.2.6. Relation entre la pratique de l’épisiotomie et la présence d’une MGF
4.1.2.7. Complications infectieuses chez les femmes excisées et les femmes non excisées
4.1.2.8. Relation entre les complications hémorragiques et la présence d’une MGF
4.1.2.9. Douleur pelvienne chez les femmes excisées et les femmes non excisées
4.1.2.10. Douleur pelvienne chez les femmes excisées de type I et de type II
4.1.2.11. Décès néonatals chez les femmes excisées et les femmes non excisées
4.1.2.12. Souffrance fœtale aigue pendant le travail et la présence d’une MGF
4.1.2.13. Complications globales rencontrées dans l’étude chez les femmes excisées et les femmes non excisées
4.2. RESULTATS QUALITATIFS
4.2.1. Avantages attribués a l’excision
4.2.2. Conséquences négatives de l’excision
4.2.3. Risques encourus durant l’excision
4.2.4. Pouvoir de décision de l’homme
4.2.5. Synthèse
5. DISCUSSIONS
5.1. LES LIMITES DE L’ETUDE
5.2. CARACTERISTIQUES GENERALES DE LA POPULATION
5.2.1. Aspects sociodémographiques
5.2.2. Aspects épidémiologiques et cliniques
5.3. EVOLUTION DE LA GROSSESSE
5.3.1. Suivi de la grossesse
5.3.2. Issue de la grossesse
5.4. COMPLICATIONS A L’ACCOUCHEMENT ET AU POST PARTUM
5.4.1. A l’accouchement
5.4.2. Au post-partum
5.5. DEVENIR DU NOUVEAU-NE
Conclusion
Références
Annexes
ANNEXE I : Typologie des mutilations génitales féminines
ANNEXE II : fiche d’enquête
ANNEXE III : guide d’entretien individuel

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