Potterhead un nom clivant loin de faire l’unanimité chez les fans de Harry Potter

Les fans de Harry Potter sont communément appelés Potterheads, soit littéralement « têtes de Potter », en référence au nom de famille du personnage principal. Si cette appellation peut donner l’impression que tous les fans sont rassemblés de manière unifiée et égale en une sorte de communauté, il s’avère que ces derniers ne s’y identifient pas de manière unanime et que chacun en a sa propre idée, plus ou moins valorisante. Nous allons démontrer en quoi le nom Potterheads peut être clivant dans le fandom de Harry Potter, composé de plusieurs niveaux de fans et de formes d’investissement.

Un terme flou qui ne facilite pas l’identification des fans

Des acceptations différentes de ce que signifie être Potterhead 

Il convient tout d’abord de se demander ce qu’est véritablement un Potterhead, une question à laquelle notre corpus ne nous a pas permis de répondre unanimement du fait du manque de précision et de la variété d’interprétations possibles liés à ce terme. En recherchant « Potterhead » sur Google, la première image qui apparaît porte ainsi le titre « C’est quoi un Potterhead ? », qui se retrouve également sur deux des vidéos YouTube sélectionnées par Google, soulignant que les recherches effectuées sur ce nom visent régulièrement à savoir ce qu’il signifie, sans quoi ces résultats n’apparaîtraient pas dans les premiers de la liste. En ce qui concerne la définition proposée par le moteur de recherche, il s’agit d’une traduction automatique de la page Wikipédia « Harry Potter fandom » : « la communauté des fans de livres et de films Harry Potter qui participent à des activités de divertissement qui tournent autour de la série ». Cette définition correspond en fait au texte d’introduction de cette page Wikipédia et ne réfère pas aux Potterheads en tant que tels, qui ne sont finalement mentionnés qu’une fois sur la page en question dans la phrase « Diehard fans of the series are called « Potterheads » ». Google semble donc présenter par défaut le nom « Potterhead » comme synonyme de « fan de Harry Potter », une association dont nous allons dans cette première partie présenter le caractère ambigu et, dans une certaine mesure, erroné.

Le résultat de notre recherche Google témoigne de l’absence de définition précise de ce qui fait qu’un fan de Harry Potter puisse se proclamer Potterhead de manière légitime et officielle. Nous avons nous-même posé la question de ce que signifie le nom Potterhead aux fans avec lesquels nous nous sommes entretenue dans le cadre de ce travail de recherche. Cyrielle est la seule à avoir accepté le nom de Potterhead sans faire de distinction au sein du fandom et nous a ainsi déclaré « On appelle comme ça les fans de Harry Potter, je suis fan de Harry Potter, donc appelezmoi comme ça si vous voulez » sur un ton de relative indifférence, donnant presque l’impression d’accepter par défaut le nom donné aux fans dont elle considère faire partie. Anna n’a pas non plus semblé éprouver de grande difficulté à se définir comme Potterhead et est même la seule de nos interviewés à avoir employé spontanément le terme pour se présenter au début de notre entretien (« Je dirais quand même que je suis une sacrée Potterhead. Rien que le fait de connaître ce nom en dit beaucoup. »). Cependant, contrairement aux propos tenus par Cyrielle, le fait d’aimer la saga n’est pour Anna pas suffisant pour prétendre au statut de fan (« quand tu es fan tu es Potterhead, mais tu peux aussi aimer sans être fan quoi »). Pour autant, même si elle s’est d’elle-même présentée comme Potterhead, Anna n’y accorde pas plus d’importance que cela et n’y prête pas de signification particulière (« c’est pas le premier truc qui me vient à l’idée quand [je parle de Harry Potter] ») là où pour Mailys, être Potterhead relève presque d’un mode de vie à part entière puisque pour elle, il s’agit de « quelqu’un qui comme [elle] va vivre Harry Potter un peu dans toutes les phases de sa vie ». Les critères requis pour qu’un fan puisse se déclarer Potterhead ou être considéré comme tel, loin d’être figés, sont en fait fluctuants et varient d’une personne à l’autre. Ils peuvent ainsi aller du simple fait d’apprécier la saga à celui de lui consacrer énormément de son temps, de lui dédier une véritable part de sa vie.

La stigmatisation sous-jacente du nom du fandom 

S’identifier comme Potterhead ne nous donc a pas semblé réellement problématique pour ces trois participantes, qui ont également pour point commun leurs pratiques en lien avec Harry Potter puisque leurs principales activités en tant que fans, autres que lire les livres et regarder les films, passent par la collection de produits dérivés de l’univers (objets, vêtements, livres, …). Sans vouloir tirer de conclusion hâtive, nous avons ainsi remarqué que l’identification au nom de Potterhead pouvait être parfois moins évidente et acceptée chez les fans qui ont été ou sont encore aujourd’hui investis de manière plus professionnelle dans le fandom, par exemple par la participation active à la gestion de sites Harry Potter ou à l’organisation d’évènements divers autour de la saga. Nous pouvons imaginer que cela relève du fait qu’ils aient, par leurs activités, une plus nette vision d’ensemble des rouages du fandom et des perceptions externes dont il fait l’objet. Guillaume, membre du site de fans La Gazette du Sorcier, nous a ainsi confié que « « Potterhead » ça englobe tellement, c’est tellemen vague que c’est difficile de s’y identifier. ». Il reconnaît ainsi que parler de Potterheads pour décrire les fans de Harry Potter ne va pas toujours de soi, s’agissant d’un terme hétéroclite et confus, et qu’il trouve compliqué de pouvoir se revendiquer en tant que tel. Laura, ancienne rédactrice pour un blog d’actualités dédié à Harry Potter, semble partager la vision désordonnée de Guillaume et va même plus loin en rejetant le nom du fandom. Elle voit dans le mot «Potterhead » une dimension stigmatisante et réductrice, loin de représenter ce que signifie réellement être fan de Harry Potter. Ainsi nous a-telle déclaré que « [les grands médias] présentent toujours le cliché du Potterhead ultra geek, le binoclard qui vit que pour ça, qui est un peu associable, qui fait des blagues un peu bizarres ». Cette image stéréotypée et quelque peu péjorative est l’une des raisons pour lesquelles Laura exprime des réserves quant au nom « Potterheads » et ne s’y identifie pas aisément.

Le besoin de faire preuve de prudence lors de l’utilisation du nom au sein du fandom 

Nous avons montré en introduction que le terme Potterhead était employé officiellement par Warner Bros sur son site Wizarding World dédié à la franchise Harry Potter, quand bien même nos recherches auprès des fans nous ont permis de constater qu’ils ne s’y identifient pas clairement. Face à ces multiples réactions suscitées par le nom du fandom, nous nous sommes demandée dans quelle mesure il était reconnu par la collectivité et les sites de fans les plus renommés comme La Gazette du Sorcier. Il s’avère que le site, pourtant devenu une référence pour grand nombre de fans francophones et ayant été amené à travailler avec les acteurs des industries culturelles de la franchise à l’étranger, emploie le moins possible le nom Potterhead et s’adresse plutôt aux fans en termes de « mages et sorcières », comme cela est le cas dans l’éditorial présent sur leur page d’accueil. Nous pouvons voir dans cette ligne éditoriale un parti pris pour éviter d’exclure de leur lectorat les fans qui, comme Laura, ne se retrouveraient pas dans le nom assez flou du fandom.

Cette appellation n’est pas pour autant totalement absente du site ; en tapant le mot dans la barre de recherche sur la page d’accueil de La Gazette du Sorcier, il ressort dans 10 articles, datés de février 2012 à janvier 2016, un nombre très minime si l’on prend en compte la longévité du site et son rythme accru de publications. Le septième épisode de son podcast « ASPIC », intitulé « Le fandom Harry Potter », est également introduit en ces termes : « le sujet c’est VOUS, NOUS, bref : la communauté des fans de Harry Potter, les Potterheads . ». Nous souhaitons conserver une relative prudence quant à l’interprétation de cet apparent choix de ne pas abusivement parler de Potterheads sur La Gazette du Sorcier. Celui-ci peut en effet aussi s’expliquer par le fait qu’au moment de sa création et pendant un temps, le site avait pour ligne éditoriale de traiter « tous ses articles d’un point de vue sorcier». Or, donner un nom au fandom, c’est aussi reconnaître qu’il n’en est qu’un et ainsi rappeler que l’univers Harry Potter est une fiction, malgré l’identification et la projection qu’il peut susciter chez ses fans.

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Table des matières

Introduction
I. « Potterhead » : un nom clivant loin de faire l’unanimité chez les fans de Harry Potter
A) Un terme flou qui ne facilite pas l’identification des fans
A) 1. Des acceptations différentes de ce que signifie être Potterhead
A) 2. La stigmatisation sous-jacente du nom du fandom
A) 3. Le besoin de faire preuve de prudence lors de l’utilisation du nom au sein du fandom
B) Les Potterheads et les « autres » : un rejet ambigu du nom donné au fandom
B) 1. Les Potterheads : l’élite du fandom ?
B) 2. Un comportement électif parfois adopté par les mêmes fans qui le reprochent aux Potterheads
C) Un sentiment de communauté partagé mais intrinsèquement marqué par les différents niveaux d’implication des fans
C) 1. Être fan de Harry Potter : faire partie d’une communauté avant tout
C) 2. Des fans unis mais distingués par leur type de rapport à la saga
C) 3. Hiérarchisation et discrimination au sein du fandom
Conclusion de la première partie
II. La structuration du fandom régie par les collectifs de fans de Harry Potter, figures d’autorité ancrées dans les pratiques communautaires
A) L’omniprésence et la longévité des sites de fans « historiques », sources de leur apparente légitimité : le cas de La Gazette du Sorcier
A) 1. La Gazette du Sorcier, un site « historique » pour le fandom francophone
A) 2. Une interface désuète
A) 3. … qui ne ternit pas pour autant la notoriété du site auprès des fans, La Gazette parvenant à les toucher à travers une activité foisonnante
B) L’encadrement et le cloisonnement parfois arbitraire des activités des fans par ces collectifs, de manière plus ou moins affichée
B) 1. Les groupes de fans sur Facebook : le diktat des sites dédiés à l’univers Harry Potter
B) 2. L’inaccessibilité relative de certains collectifs de fans de Harry Potter au sein du fandom…
B) 3. …et à l’extérieur du fandom
C) Des sites de fans malgré tout sous le joug des acteurs des industries culturelles en lien avec Harry Potter
C) 1. L’influence modérée mais bien présente des acteurs des industries culturelles sur le contenu d’un site comme La Gazette du Sorcier
C) 2. L’intrusion des acteurs des industries culturelles, tolérée par crainte
C) 3. « La Nuit des Livres Harry Potter », un évènement de fans arbitré par les maisons d’édition de la saga de JK Rowling
Conclusion de la deuxième partie
III. L’implication fluctuante des acteurs des industries culturelles liés à la franchise Harry Potter dans les activités des fans : entre rapport inexistant, abus de pouvoir et interdépendance
A) La perception ambivalente de ces entités par les fans : de l’indifférence à la méfiance
A) 1. Un détachement relatif face aux acteurs des industries culturelles
A). 2. La conscience plus ou moins dérangeante des enjeux financiers qui transparaissent dans les actions des entreprises culturelles de la saga
A) 3. Une méfiance parfois virulente
B) L’invisibilisation des acteurs culturels au sein du fandom : donner aux fans l’illusion qu’ils participent à la vie de la saga pour mieux instrumentaliser leurs pratiques
B) 1. L’invisibilisation des acteurs des industries culturelles au sein du fandom, source d’une impression de liberté pour les fans
B) 2. Le recours à la culture participative pour contrôler et s’emparer des pratiques communautaires des fans pour parvenir à leurs fins
C) La légitimité des fans de Harry Potter face à ces entités médiatiques : le besoin de l’autre pour subsister
C) 1. Le nouvel écosystème médiatique du fandom : les fans comme « prosumers »
C) 2. Le fandom de Harry Potter façonné par une culture du don/contre-don
Conclusion de la troisième partie
Conclusion

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