POSTURE EPISTEMOLOGIQUE POUR ABORDER LE SENS DES COMMUNICATIONS
MUCCHIELLI s’efforce de construire une discipline des SIC avec des théories multiples. Puisque ce qui fait une science c’est son approche, les SIC vont être considérées comme une discipline de référence pour comprendre en détail « comment » le sens de la communication émerge.
La posture de recherche en SIC relève de la compréhension consistant à envisager la personne humaine en tant qu’acteur et à centrer l’analyse sur les sens des phénomènes humains. C’est ainsi que l’épistémologie compréhensive-systémique sera adoptée. Elle favorise, en tant qu’outil, un certain référentiel théorique qui implique une méthode adaptée. Ce positionnement postule, tout d’abord, l’hétérogénéité entre les faits humains et sociaux puisque ces faits sont porteurs de significations véhiculées par des acteurs, et qu’ils sont partie prenante d’une situation interhumaine. Ensuite, tout homme a la possibilité de pénétrer le vécu et le ressenti d’un autre homme.
Les postulats du positionnement compréhensif ont été systématisés par MORIN dans son « paradigme de la complexité » que MUCCHIELLI a cité dans son ouvrage :
1. Il n’existe pas de réalité objective donnée : la réalité humaine est une réalité de sens et elle est construite par les acteurs. Cette réalité est une construction collective qui n’a pas la matérialité d’un objet physique.
2. Il n’existe pas une réalité objective donnée mais plusieurs réalités construites par les différents acteurs. La coexistence de plusieurs réalités est possible.
3. Un phénomène (réalité secondaire) existe nécessairement en relation avec d’autres phénomènes. Ils forment un système et sont liés entre eux par une relation de « causalité ».
4. Si une réalité de sens émerge, elle est due à un ensemble de causalités circulaires dans lesquelles la réalité émerge.
5. Concernant l’homme et les acteurs sociaux, il faut compter la causalité finale ou téléologique. La cause n’est plus seulement une cause antérieure, c’est aussi une visée, une orientation des efforts vers l’atteinte d’un but situé dans l’avenir.
Si la notion de « sens » reste le point central de la recherche en SIC, MUCCHIELLI faisait part d’un choix possible d’approche, à savoir :
– L’approche « positiviste » s’intéressant aux faits physiques ;
– L’approche « compréhensive » considérant en empathie les faits humains et sociaux.
Dans cette recherche, pour aborder le sens de la communication dans le corpus choisi, ces types d’approche peuvent être conjugués, en se centrant un peu plus l’analyse compréhensive combinée avec l’approche systémique pour comprendre le système de communication ; l’approche constructiviste pour prendre en compte les interprétations de la communication. Quant à la Théorie sémio-contextuelle, elle considère la situation dans laquelle se déroule la communication.
La particularité de la recherche en SIC est d’envisager le processus communicationnel dans sa globalité sans dissocier sa base technique, sa dimension de langage et son caractère social. C’est ainsi qu’elle entretient des relations interdisciplinaires importantes, entre autres avec les disciplines littéraires et esthétiques, l’histoire, la socio-anthropologie, les sciences du langage,… Elles croisent et font converger des analyses centrées sur des acteurs, des usages, des textes, des documents et des discours, des images, des situations et des contextes, l’ensemble prenant place dans un cadre socio-politique et historique.
L’APPROCHE SYSTEMIQUE DU SENS
Cette approche se base sur la « Théorie systémique de la communication », née dans les années 1960/1970 à Palo Alto en Californie, dans le voisinage de la célèbre Université de Stanford. Elle doit beaucoup aux travaux de l’anthropologue Gregory BATESON. Celui-ci fut le chef de file d’une sorte de collège informel de chercheurs en Sciences Humaines, issus des disciplines les plus diverses mais fédérés par l’adhésion commune à l’approche systémique, nouveau paradigme en voie de formation au sein de la communauté scientifique.
Définition et origines de l’Approche
Définition
MUCCHIELLI rappelle que la notion de « système » est issue de l’Ecologie, une Science qui étudie les « rapports entre les organismes et le milieu où ils vivent ». L’Ecologie pose que « l’organisme et son milieu constituent un binôme fondamental dans la mesure où il y a « interaction entre l’organisme et les facteurs constitutifs de son milieu » .
L’approche systémique parfois nommée analyse systémique est un champ interdisciplinaire relatif à l’étude d’objets dans leur complexité. C’est une démarche qui vise, entre autres l’identification de la finalité du système, des niveaux d’organisation, des échanges entre les parties, etc.
Le systémisme est une orientation de pensée qui considère que les phénomènes ne peuvent exister isolément en dehors des relations entretenues avec d’autres phénomènes de même nature. En ce sens, le systémisme est une banalité. D’ailleurs, KANT l’a signalée quand il a évoqué que : « on ne peut concevoir les choses que dans un ensemble de relations », de même aussi Sartre : « un « Noir » n’existe que par rapport à des « Blancs ».
Les origines de l’Approche
Une multitude de sciences contemporaines sont apparues au cours du XXème siècle et analysent leurs objets d’études selon différentes approches. Néanmoins, on peut isoler des éléments fondateurs en distinguant leur façon d’aborder ce qui est analysé. Par exemple :
– Les principes internes qui constituent et délimitent le système. C’est le domaine du structuralisme mise en lumière par Ferdinand de SAUSSURE dans la Linguistique (entre 1906 et 1911) .
– L’information véhiculée dans les échanges, ce à quoi s’attache exclusivement la Cybernétique et est présentée par Norbert WIENER en 1948. Ses écrits mettent en relief l’idée de système d’interaction .
– Les rapports entre tous les niveaux d’organisation où apparaît une logique de système global unique. C’est BERTANLAFFY qui le représente à travers la Biologie en 1968 .
Le terme « systémisme » a, donc, différentes significations scientifiques, mais leur principe général commun est le fait de considérer les choses comme étant organisées en système. Au niveau des SIC, le concept a suivi une certaine évolution.
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Table des matières
INTRODUCTION
PREMIER PARTIE BRICOLAGE EPISTEMOLOGIQUE ET METHODOLOGIQUE
CHAPITRE PREMIER – POSTURE EPISTEMOLOGIQUE POUR ABORDER LE SENS DES COMMUNICATIONS
I- L’Approche Systémique du sens
A- Définition et origines de l’Approche
B- Le double héritage de la théorie systémique
C- Les fondements de la théorie systémique
D- Les principes de la théorie systémique des communications
E- L’Approche systémique du sens
F- Méthodologie de l’analyse
II- L’Approche Constructiviste
A- Présentation
B- Le cadre de référence
C- Les principes du constructivisme
D- L’aspect méthodologique
E- La construction du sens
III-L’Approche Sémio-Contextuelle du sens
A- Présentation
B- Les contextes
C- Méthodes de l’Approche
D- Les apports de l’Approche / Spécificités
CHAPITRE II – POUR UNE ADEQUATION METHODOLOGIQUE DANS L’ETUDE DU SENS
I- Apports des Sciences du Langage
A- La Linguistique
B- La pragmatique linguistique
C- La Sociolinguistique
D- L’Ethnographie de la Communication
E- L’Ecole de Palo Alto
II- Apports des SIC
A- Naissance de la discipline
B- Description des SIC
C- Apports bénéfiques
III-Apports des Méthodes Qualitatives
A- Définition de la Méthode Qualitative
B- Description de la recherche qualitative
C- Pragmatique de la Méthode
D- Démarches d’analyse données
E- Les apports
CHAPITRE III – L’OPINION COMME CONCEPT CENTRAL
I- A travers une perspective historique
A- La construction sociale et historique de l’opinion
B- Opinion publique contemporaine
II- De la sphère privée à l’espace public médiatique
A- La sphère privée
B- La sphère publique
C- L’espace public médiatique
III- L’émergence de l’opinion publique
A- XVIIIème siècle
B- XIXème siècle
C- XXème siècle
DEUXIEME PARTIE VISAGES DE L’OPINION EN CONTEXTE MALGACHE A TRAVERS LA METHODOLOGIE DE LA THEORISATION ENRACINEE
CHAPITRE IV – LES OPERATIONS DE CATEGORISATION
I- Première catégorisation : la radio dans son environnement
A-Evolution du modèle de la communication radiophonique
B- Caractéristiques de la radio
C- Environnement de la radio malgache
II- Deuxième catégorisation : contextualisation de DM
A- Caractéristiques communicationnelles de « Demokrasia Mivantana »
B- DM et les différents contextes
III- Troisième catégorisation : caractéristiques discursives de DM
A- Quelques traits saillants du DP
B- Les processus dialogiques dans DM
C- DM, Emaillé par quelques déterminants du modèle propagandiste
D- DM, une émanation du Modèle Marketing
IV- Quatrième catégorisation : Radioscopie d’une émission DM
A- L’opinion dans la fonction d’agenda de DM
B- Processus de construction de l’opinion dans une édition de DM
V- Cinquième catégorisation: Radioscopie de participation
A- Le renouvellement du concept « Communication »
B- Mise à l’épreuve de la TSC auprès des auditeurs-participants
VI- Sixième catégorisation : enjeux de la participation
A- Processus de sémiotisation du monde
B- La situation de communication
C- La mise en scène
D- L’influence
E- Enjeux de crédibilité et de captation
VII- Dernière catégorisation : le corpus
A- Nature de l’émission et ses caractéristiques
B- Les objectifs de l’émission
C- Les étapes de la recherche
CHAPITRE V – LA COMMUNICATION RADIOPHONIQUE: SIEGE DE L’EMERGENCE DU SENS
I- Le rapport radio / lieu d’expression
A- La démocratisation de la radio
B- La modernisation du rapport entre l’Etat et ses citoyens
II- Le nouvel aspect de la communication radiophonique
A- Le message radiophonique
B- La radio, lieu de matérialisation du sens
CHAPITRE VI – LA METHODE QUALITATIVE EN CLOTURE DE L’ANALYSE
I- Rappel de la recherche qualitative
II- Quelle théorie pour l’opinion ?
A- Qu’est-ce que l’opinion ?
B- Quelles sont les bases de construction de l’opinion?
C- L’opinion dans le contexte malgache
CHAPITRE VII – EMERGENCE DE LA CULTURE MEDIATIQUE MALGACHE
I- La presse écrite malgache
A- La lutte pour la liberté d’expression
B- La pratique actuelle de la presse en matière de liberté d’expression
II- La Radio
A-Naissance des radios malgaches
B-Manifestations de la liberté d’expression
III- La Télévision
A- Naissance des chaînes de Télévision malgaches.
B- Manifestations de la liberté d’expression
IV- L’Internet
A- L’internet dans la Grande Ile
B- Manifestations de la liberté d’expression
CHAPITRE VIII– REMARQUES CONCLUSIVES
I- L’opinion publique
II- L’auteur
III- L’espace public médiatique
CONCLUSION GENERALE