Portrait de la valorisation des matières organiques résiduelles au sein de la CMQ

En se basant sur le principe d’écologie territoriale, ainsi que sur les problématiques actuelles liées au réchauffement climatique et à l’épuisement des ressources, les matières résiduelles apparaissent non plus comme un rebus, dont il faut se débarrasser, mais bien comme une ressource également. Ce gisement peu exploité comporte divers enjeux écologiques. Premièrement, deux actions simultanées, comme limiter la production de matières résiduelles d’une part et réutiliser celles produites d’autre part, permettent à la fois de diminuer et de préserver la consommation de matières premières. Ensuite, valoriser les ordures dispose d’un double avantage. Cela permet d’un côté de répondre aux besoins des villes, tant aux niveaux alimentaire, qu’énergétique et de la construction, mais aussi de diminuer l’impact environnemental, par dégradation des sols, en évitant l’enfouissement de matières valorisables.

A cet effet, la gestion des matières résiduelles, et particulièrement organiques, à Québec, est depuis plusieurs mois l’une des problématiques actuelles, compte tenu des enjeux politiques qui en découlent. La politique de la province québécoise de gestion des matières résiduelles vise cinq objectifs, au travers de son plan d’action 2011-2015 (Gouvernement du Québec, 2011), dont celui de recycler 60 % de la matière organique putrescible résiduelle. Afin d’atteindre ces buts, une dizaine de stratégies sont adoptées et séquencées en quarante actions. L’une d’entre elles prévoit de bannir des lieux d’élimination la matière organique via des programmes définissant l’interdiction d’éliminer des déchets spécifiques, comme le carton et les matières organiques putrescibles, qui se doivent d’être traitées soit par biométhanisation, soit par compostage. Dans la continuité de ce plan d’action, la politique québécoise prévoit d’interdire l’enfouissement et l’incinération de la matière organique à l’échéance de 2020. Dans cette optique, et suite à la consultation publique, la zone d’étude, soit la Communauté Métropolitaine de Québec (CMQ), a mis en place un projet de Plan Métropolitain de Gestion des Matières Résiduelles (PMGMR) 2016-2021 sur la rive nord de son territoire (CMQ, 2016). La CMQ y décrit les enjeux principaux, et fournit des données quantitatives sur la gestion des déchets. Trop de matières générées, environ 46%, sont éliminés par enfouissement ou incinération. De plus, la capacité de traitement par cette voie est limitée. Ainsi, réduire les quantités éliminées permettrait d’optimiser la durée de vie utile des installations d’élimination. En outre, économiquement parlant, il serait moins coûteux de réutiliser plutôt que d’éliminer. Ensuite sur un plan social, il est plus acceptable de remettre en circuit des matières qui seraient autrement perdues. Enfin, d’un point de vue durable, l’utilisation des ressources se doit d’être rationalisée et préservée pour les générations futures. Les objectifs sont chiffrés et ambitionnent de dépasser ceux de la politique québécoise. Ils s’orientent autour des grands axes suivants : la réduction des quantités de matières résiduelles éliminées à travers la valorisation des matières organiques, et le recyclage. Ceci en fixant des obligations de résultats aux composantes de la CMQ tout en les soutenant, sans oublier de favoriser la participation de la population et des entreprises (notamment le secteur ICI1 ), par des services adaptés, et des tables de concertation.

Cadre théorique 

La valorisation des matières organiques résiduelles repose sur de multiples facteurs qui nécessitent de se baser sur un cadre conceptuel adéquat, afin d’en comprendre les dynamiques. Ainsi, cette étude s’inscrit dans un corpus présentant des notions liées à la gestion des déchets, et s’appuie principalement sur le concept d’écologie territorial, ainsi que sur les échelles de traitement préconisées.

L’écologie territoriale 

En effet, l’écologie territoriale est appliquée aux déchets « au travers de trois principes que sont le bouclage des flux de matières, la structuration du système d’acteurs à l’échelle des territoires, et la volonté de préserver la dimension sociale. » (Bahers, 2015). En définitive, elle prend la forme d’une description et d’une analyse du métabolisme du territoire, autrement dit d’une analyse des processus, à la fois sociaux, spatiaux, techniques, et organisant les flux de matières et d’énergie (Barles,  2014). Cette notion de métabolisme urbain, nommé en 1965 par l’ingénieur Abel Wolman, existe en réalité depuis le XIXème siècle. Elle est née suite à la prise de conscience dans le milieu scientifique et intellectuel européen, sur la forte probabilité de l’épuisement des sols provoquant ainsi des pénuries alimentaires. Elle apparaît alors sous la forme de chimie urbaine, qui a pour objectif de déterminer la circulation des matières organiques et des nutriments. En effet, les chercheurs se sont rendu compte que les villes constituent à la fois des foyers de consommation de ressources, et des gisements d’engrais par le rejet de déchets (résidus alimentaire, boues etc…). Toutefois, l’apparition de nouvelles méthodes de production de matières fertilisantes, comme le procédé HaberBosch, étouffe la chimie urbaine, qui disparaît au profit de la consommation de produits « neufs » plutôt que de la valorisation de rebus. Le retour du concept viendra avec le développement de l’écologie scientifique où il constitue l’un des piliers de la théorie des écosystèmes. Il s’inscrit parfaitement dans les problématiques actuelles liées à la capacité des territoires à subvenir aux besoins des populations sans cesse croissantes (Barles, 2010).

Ce concept d’écologie urbaine évolue et est réutilisé par le secteur industriel à des fins d’optimisation de production. L’étude du métabolisme du secteur industriel passe par une approche systémique, à la fois quantitative, comptable et technologique, afin d’analyser la circulation des matières et d’énergie nécessaires à leur subsistance et leur développement. Elle est applicable à différents niveaux (entreprise, filiale, zone industrielle etc…), sans pour autant être développé en dehors de ces zones, puisqu’elle ne s’attarde pas sur les autres partie du cycle des flux de matières (Barles, 2010). Ainsi nait l’écologie territoriale « qui est une écologie industrielle inscrite spatialement, qui prend en compte les acteurs des flux de matières, s’interroge sur les modalités de leur gestion et ne néglige pas les conséquences économiques et sociales de ces flux » (Barles, 2010). Cette analyse s’effectue dans trois domaines : le bilan de matière brute, le bilan énergétique et les flux de substances. La présente étude s’intéresse particulièrement à ce dernier, dont l’analyse permet de définir leurs provenances et leurs destinations. En effet, Barles, Professeur, ingénieur en génie civil et docteur en urbanisme, cite Cordell (2009), qui relate l’importance de « mettre en avant la nécessité d’une meilleure compréhension de la circulation urbaine des éléments biogènes et de l’optimisation de leur récupération.» (Barles, 2010). Autrement dit, afin de caractériser le métabolisme d’une matière spécifique, soit les résidus de table pour cette recherche, il faut définir les processus et la circulation de cette matière dans le système. Ainsi, l’étude se concentre en premier lieu sur le rejet de ces matières, jusqu’à leur récupération à des fins de valorisation, en analysant à la fois les techniques de traitement, les acteurs impliqués, et les échelles de traitement. Pour ce qui est des acteurs, ils sont considérés non seulement comme pilotes de la trajectoire de ces flux, mais aussi comme producteurs de ressources. A travers leurs diversités, Bahers, un ingénieur et docteur en aménagement du territoire, dénonce toutefois l’insuffisance de la responsabilité élargie des producteurs (Bahers, 2010). Cependant, il observe que la dimension sociale est préservée voir même développée à travers le traitement des déchets. En effet, certaines filières permettent l’insertion professionnelle des publics défavorisés, et d’autres encouragent le regroupement de riverains (Bahers, 2010), comme par exemple craque bitume dans la ville de Québec avec le compostage communautaire.

Les échelles de traitement 

Les résidus alimentaires constituent un flux de matière au sein du métabolisme urbain, par conséquent, ils sont traités sous forme de réseau urbain. Sachant que « le réseau désigne un ensemble d’équipements interconnectés, planifié et géré de manière centralisée à une échelle tantôt locale, tantôt plus large, et offrant un service plus ou moins homogène sur un territoire donné qu’il contribue ainsi à solidariser. » (Coutard, 2010). Selon Coutard, ingénieur civil des ponts et chaussées, docteur en économie et sciences sociales, et directeur du CNRS , les grands réseaux prédominent tant en Amérique du Nord qu’en Europe, au début du XIXème siècle. Cette propagation est due aux atouts majeurs qu’apporte ce concept, dans différents domaines, tel que technique, économique, et environnementale, mais aussi politique et sanitaire. Ces facteurs encouragent l’opinion savante que le réseau permet de fournir des services urbains de manière plus optimale que tout autre forme d’aménagement, popularisant l’idée que sa performance est fonction de sa taille (Coutard, 2010). En d’autres termes, plus le réseau a d’importance en terme d’utilisateurs et d’emprise spatiale, plus il sera performant, puisqu’il permet de minimiser les coûts de gestion par leur centralité, facilitant de surcroît l’investissement dans des technologies de pointes, pour ainsi devenir rentable sur le long terme. Récemment, ce concept a tendance à être contesté par les principes de développement urbain durable, opposant le métabolisme réticulaire au métabolisme dit « écocyclique » ou circulaire. En effet, l’écocycle urbain durable repose sur les cycles courts. Ce bouclage des flux de matières permet de limiter le gaspillage, et de rendre à la Terre ce qui a été pris, limitant ainsi l’appauvrissement des sols. D’autre part, ce concept repose sur l’autonomie, en opposition à la solidarisation des grands réseaux techniques centralisés, qui offre une logique de maîtrise de la demande permettant de valoriser la sobriété de consommation, plutôt qu’une logique de satisfaction de la demande qui encourage la croissance. Ces systèmes dispersés, et fonctionnant à très faible échelle, sont susceptibles d’être gérés de manière décentralisée, allouant ainsi de bonnes capacités d’adaptation et de réversibilités (Coutard, 2010).

Cette remise en question des grands réseaux centralisés, particulièrement claire en matière de gestion-valorisation des déchets, d’eau et d’énergie, conteste principalement le fait de répondre à une demande sans cesse croissante. Elle a été observée dans de multiples contextes à partir d’un ou plusieurs de ces éléments suivants. Premièrement, les techniques de communication et d’information qui autrefois préconisaient la gestion en réseau centralisé, s’oriente vers une gestion plus distribuée, pour un rendu plus optimal, comme les « Smart Grid ». Ensuite, les réformes de libéralisation économique ont permis l’ouverture de marchés liés aux secteurs des réseaux, permettant l’accès à des entrepreneurs de plus petites envergures, concurrençant de cette manière les grands réseaux. Enfin, certaines mutations urbaines sont passées de logiques de pré-équipement de réseaux à des logiques de diversification des réseaux, valorisant des réseaux d’approvisionnement à très petite échelle pour des constructions en zone peu construite ou type éco quartier, nécessitant ainsi une autonomie (Coutard, 2010). Cependant, cette remise en cause des réseaux à grande échelle n’annonce pas la fin de cette forme d’urbanisme, mais plutôt la complémentarité entre un grand réseau technique et des systèmes décentralisés, au profit d’un développement durable, et particulièrement en matière de déchets. En effet, premièrement on observe que ces deux systèmes, à petite et à grande échelle, cohabitent, que ce soit en zone dense ou non. Ensuite, au niveau normatif, les petits réseaux semblent plus difficilement envisageables à l’échelle d’une agglomération entière, et ce peu importe sa dimension. Enfin, les grands réseaux disposent d’une ample aptitude à assouvir les besoins des utilisateurs, de façon rapide, efficace et possiblement écologique. Ainsi, ils permettent aux usagers de se concentrer sur leurs activités respectives, plutôt que d’employer leur temps et leur énergie à des activités qui leurs sont secondaires. Sans parler des atouts technico-économiques, cités plus haut, qui conserve de puissants facteurs favorables à la conservation des grands systèmes (Coutard, 2010). Par ailleurs, au niveau du rôle des collectivités publiques, Bahers affirme qu’il n’y a pas d’échelle pertinente de mise en œuvre des principes d’écologie territoriale car « chaque problème à son périmètre » (Bahers, 2010). Dans cette optique, la présente étude analyse le traitement des résidus alimentaires selon différentes échelles : individuelle, communautaire, municipale et agglomération. En définitive, ces différents niveaux de traitement des matières organiques sembleraient être subsidiaires, les uns apportant ce qu’il manquerait à d’autres, et vice-versa. Afin de vérifier cette hypothèse, l’analyse du métabolisme du territoire au niveau de ces résidus organiques doit s’effectuer au travers des processus à la fois sociaux, spatiaux et techniques, de traitement de ces matières, qui sont censés boucler le flux de ces substances.

Stratégie de recherche et opérationnalisation 

Afin d’organiser le travail de recherche, la méthode employée repose sur une recherche permettant de définir les axes de recherches contextuels (enjeux territoriaux) et conceptuels (cadre théorique), ainsi que sur le recueil d’informations à travers des entrevues, semi-dirigée (questions semi-ouvertes) et des questionnaires fermés à choix multiple auprès d’acteurs.

Analyse documentaire 

Tout d’abords, il est nécessaire de définir le contexte dans lequel s’inscrit la valorisation des déchets urbains, en vue de déterminer les enjeux du territoire et les objectifs des volontés locales. Ainsi, les recherches contextuelles ont été effectuées en grande partie à partir de journaux locaux, et de littérature grise soit des documents clé du processus de gouvernance en matière de déchets. Concernant les périodiques, plusieurs articles du journal « Le Soleil », qui présente les actualités et les problématiques selon différents point de vue, ont été étudiés, remontant jusqu’au mois de Mai 2015. Au niveau des volontés politiques de la zone d’étude, les documents de gouvernance de base ont été analysés, dont trois particulièrement, à savoir, le Plan Métropolitain de Gestion des Matières Résiduelles (PMGMR) 2016 2021 de la CMQ (CMQ, 2016), la consultation publique qui visait à préparer le PMGMR (CMQ, 2016), et enfin la politique du gouvernement du Québec en matière de gestion des matières résiduelles à travers son plan d’action 2011-2015 (Gouvernement du Québec, 2011). Ensuite, pour répondre de manière durable aux enjeux et problématiques posés par le contexte, une étude littéraire a été effectuée à la recherche de concepts traitant de matières résiduelles. Dans cette optique, la question d’écologie territoriale est apparue naturellement à travers les récents articles de Sabine Barles (Barles, 2010 & 2014), ainsi que la pertinence de l’échelle de traitement des déchets avec Olivier Coutard (Coutard, 2010). Ces écrits permettent de se référer à un cadre adéquat pour comprendre et optimiser la gestion et la valorisation des matières résiduelles. De manière générale, pour chaque document étudié, une analyse a été rédigée synthétiquement afin de faciliter le regroupement et le traitement d’informations.

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Table des matières

INTRODUCTION
PRESENTATION
CADRE THEORIQUE
L’ECOLOGIE TERRITORIALE
LES ECHELLES DE TRAITEMENT
METHODOLOGIE
TERRAIN D’ETUDE
STRATEGIE DE RECHERCHE ET OPERATIONNALISATION
Analyse documentaire
Entrevue semi-dirigée
Questionnaire en ligne
ANALYSE DES PRATIQUES
LES PROCEDES DE TRAITEMENT DES MATIERES ORGANIQUES RESIDUELLES
Le compostage
La biométhanisation
LE COMPOSTAGE DOMESTIQUE
Profil des composteurs domestiques
Facteurs et conditions de réussite
Freins au développement
Recommandations citoyennes
LE COMPOSTAGE COMMUNAUTAIRE
Présentation d’un des modes de regroupement communautaire
Profil des composteurs
Facteurs et conditions de réussite
Freins au développement
Recommandations des composteurs communautaires
LE COMPOSTAGE EN SECTEUR ICI
LE COMPOSTAGE DE LA VILLE DE LEVIS
USINE DE BIOMETHANISATION DE L’AGGLOMERATION DE QUEBEC
SYNTHESE ET CONCLUSION
SYNTHESE SUR LES DIFFERENTES ECHELLES DE VALORISATION DES MATIERES ORGANIQUES
Le compostage individuel
Le compostage communautaire
Le compostage au sein de la ville de Lévis
La biométhanisation à l’échelle de l’agglomération de Québec
UN BILAN DU TRAITEMENT DES MATIERES ORGANIQUES RESIDUELLES
ANNEXES
QUESTIONNAIRE A CHOIX MULTIPLE : LES COMPOSTEURS DOMESTIQUES
Profil économique et social
Historique
Conditions temporelles
Le compost
Autres
QUESTIONNAIRE A CHOIX MULTIPLE : COMPOSTEURS COMMUNAUTAIRES
Profil économique et social
CONCLUSION

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