Avec l’essor de l’équitation, la place du cheval dans le monde ne cesse d’évoluer (Nicolas, 2016). Au Sénégal, on comptait en 2013 environ un million de pratiquants de l’élevage des chevaux (Brooke, 2018). L’attention portée à la santé des chevaux est de plus en plus importante, notamment dans la filière des chevaux de compétition ou de course où les animaux sont considérés comme des sportifs de très haut niveau méritant les meilleurs soins possibles (RESPE, 2012). De plus, l’émergence de résistances bactériennes aux antibiotiques, phénomène naturel développé par les bactéries en réponse à une pression de sélection antibiotiques, est un sujet d’actualité en médecine humaine et vétérinaire, notamment au vu du faible nombre de nouveaux antibiotiques mis sur le marché (Larrieu, 2016).
L’homme et l’animal partagent beaucoup de bactéries en commun et possèdent des entérobactéries commensales dans leur tube digestif (Herivaux, 2015). Dans les autres filières animales comme le porc ou la volaille, les entérobactéries sont connues et étudiées pour leur portage fréquent de facteurs de résistance. Contrairement à ces filières, la filière équine ne s’est intéressée que récemment à l’antibiorésistance et peu d’études y ont été menées sur le sujet. La résistance aux antibiotiques représente donc un domaine de recherche important au regard de nombreux cas rapportés de dissémination de bactéries multi-résistantes chez des chevaux (Maddox et al., 2015). L’utilisation des antibiotiques a pour conséquence de créer des environnements dans lesquels une pression de sélection va favoriser la survie des bactéries résistantes et la diffusion des gènes de résistance aux antibiotiques. L’appareil digestif animal constitue un véritable bioréacteur dans lequel va pouvoir s’opérer des échanges multiples de gènes conduisant quelque fois à l’apparition de nouveaux pathogènes multi-résistants (Tansarli et al., 2014). Quelques études menées aux Etats-Unis ou dans les pays européens ont démontré l’apparition de l’antibiorésistance dans la filière équine (Larrieu, 2016), mais aucune n’a été entreprise au Sénégal. De plus, contrairement aux autres filières (volaille, porcine,…) où les animaux sont cantonnés à une et même structure, les mouvements et les rassemblements des chevaux issus de différentes zones sont extrêmement fréquents que ce soit dans le cadre de manifestations sportives (concours, spectacles, CSO, etc.) ou simplement dans le cadre de leur exploitation (traction, transport, etc). Ce constat pose alors la question de l’existence de réseau de diffusion de la résistance bactérienne et du risque d’une potentielle contamination de l’homme.
Présentation du Sénégal
Situation géographique
Le Sénégal est un pays d’Afrique de l’Ouest situé entre 12°8 et 16°41 de latitude nord et 11°21et 17°32 de longitude ouest. Avec une superficie de 196 722 Km2, sa population a été estimée à 13 508 715 habitants en 2013 (ANSD, 2014). Sa pointe ouest est la plus occidentale de toute l’Afrique continentale. Il est limité au Nord et au Nord-Est par la Mauritanie, à l’Est et au Sud-Est par le Mali, au Sud par la Guinée et la Guinée Bissau et à l’Ouest par l’Océan Atlantique sur une façade de 700km. Sa capitale Dakar avec une superficie de 550km2 est une presqu’île située à l’extrême Ouest. Le pays possède un relief plat aux sols sablonneux ne dépassant pas 130m d’altitude sauf à la frontière Sud-Est vers la Guinée.Au Sénégal, le climat est de type soudano-sahélien caractérisé par l’alternance d’une saison sèche allant de novembre à mai et d’une saison des pluies allant de juin à octobre. La pluviométrie moyenne annuelle décroît du Sud au Nord du pays (ANSD, 2014). Elle passe de 1200mm au Sud à 300mm au Nord, avec des variations d’une année à l’autre. Trois principales zones de pluviométrie correspondant à trois zones climatiques sont ainsi déterminées : la zone forestière au Sud, la zone semi-désertique au Nord et celle de la savane arborée au centre (SÉNÉGAL, 2010).
Situation démographique du Sénégal
En Août 2014, la Direction de la Prévision et de la Statistique, devenue l’Agence Nationale de la Statistique et de la Démographie (ANSD) depuis 2006, a publié les chiffres de la population du Sénégal issus du dernier recensement datant de 2013. Dans le cadre de ce recensement, il ressort que la population sénégalaise est de 13 926 253 habitants dont 6 961 847 femmes et 6 941 357 hommes alors qu’en 2015 la banque mondiale après son enquête publie que la population sénégalaise est estimée à environ 15,3 millions d’habitants en 2016/2017. Cette population croît donc très rapidement, avec un taux de fécondité supérieur à 4 enfants par femme. Selon le dernier recensement de 2013, environ un quart (23 %) des habitants du payssont concentrés dans la Région de Dakar et 40 % vivent dans les zones urbaines. La densité de la population au niveau de l’ensemble du pays est de 65 habitants au km2 mais la population du Sénégal apparaît ainsi inégalement répartie dans l’espace.
Situation économique du Sénégal
Selon le Fonds monétaire international (FMI) en 2017, le Sénégal possède la quatrième économie de la sous-région ouest africaine après le Nigeria, la Côte d’Ivoire et le Ghana et la deuxième économie en Afrique de l’Ouest francophone derrière la Côte d’Ivoire. L’économie du Sénégal est tirée par l’exploitation minière, la construction, le tourisme, la pêche et l’agriculture, qui sont les principales sources d’emploi dans les zones rurales.
En 2016, l’activité économique a dû se maintenir dans une dynamique de renforcement au regard des perspectives mondiales davantage favorables, mais également des investissements structurants dans le cadre de la mise en œuvre du plan Sénégal Emergent (PSE). Par ailleurs, l’économie nationale avait tiré avantage des effets positifs de la maîtrise de l’épidémie à virus « Ebola » de 2014 à l’échelle de la sous-région. Le taux de croissance du PIB réel a ainsi atteint 6,0% en 2016 contre 5,4% en 2015 (SENEGAL, 2016). Le Sénégal a enregistré des résultats macroéconomiques solides et la croissance de son économie a atteint respectivement 6,5 et 6,6 % en 2015 et 2016. Alors qu’il avait enregistré une expansion de 18 % en 2015, le secteur primaire, dopé par la pêche et l’agriculture, a continué de tirer la croissance en 2016 avec une progression de 10%. Dans le secteur agricole, en particulier, cette croissance s’explique par les très bons résultats obtenus dans des secteurs faisant l’objet de programmes publics ciblés tel que la culture de l’arachide, du riz et de l’horticulture. Le secteur industriel a également progressé pour atteindre une croissance de 6,8 % grâce aux performances solides des industries extractives, agroalimentaires et chimiques. Avec une expansion de 5,6 % due principalement à l’essor des transports et des moyens de communications, le secteur des services, qui représente plus de la moitié du PIB sénégalais a continué de croître bien qu’à un rythme plus faible que les autres secteurs. L’élevage au Sénégal joue un rôle économique et social très important à travers les différentes espèces et races exploitées. Il est estimé qu’environ 60 % des ménages agricoles possèdent du bétail et le secteur de l’élevage contribue pour 3,4 % au PIB en 2013 (ANSD, 2014). Selon la Direction de la Prévision de la Statistique, sur le plan macro économique le soussecteur de l’élevage participe pour 7,5 % à la formation du PIB national et 35,5% à celle du Secteur Primaire. Ce sous-secteur a connu, depuis 1987, une progression régulière avec un taux de croissance annuel de 3 % en moyenne, avec un niveau exceptionnel de 6% en 2000. L’élevage équin s’appuie sur une population estimée à quelques 544 000 chevaux (CEP/MEPA, 2015). L’élevage des équidés de trait et leur utilisation font travailler d’autres acteurs tels que les conducteurs de charrettes ou de calèches, les fournisseurs d’intrants (fourrage, aliments concentrés, médicaments), de services (vétérinaires, réparateurs de charrettes, maréchaux ferrants, cordonniers, etc.).
La contribution des équidés de trait dans l’économie nationale serait relativement modeste en termes de contribution au PIB. Cependant, la valeur de la force de traction qu’ils produisent à travers leurs multiples rôles économiques (commerciaux et non commerciaux) et sociaux n’est pas suffisamment mise en exergue pour que les équidés soient mieux considérés dans les politiques et stratégies sectorielles de développement de l’élevage, de l’agriculture et des transports (Valette, 2015).
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Table des matières
INTRODUCTION
PREMIERE PARTIE : REVUE BIBLIOGRAPHIQUE
CHAPITRE I : ELEVAGE DU CHEVAL AU SENEGAL
I.1. Présentation du Sénégal
I.1.1. Situation géographique
I.1.2. Situation démographique du Sénégal
I.1.3. Situation économique du Sénégal
I.2. Importance des chevaux au Sénégal
I.2.1. Importance socio-culturelle
I.2.2. La traction hippomobile
I.2.3. Le cheval, animal de sport
I.3. Conduite d’élevage des chevaux au Sénégal
I.3.1. En zone rurale
I.3.2. En zone urbaine et péri-urbaine
I.4. Contraintes de l’élevage du cheval
I.4.1. Contraintes alimentaires
I.4.2. Contraintes sanitaires
CHAPITRE II : MICROBIOTE INTESTINAL CHEZ LES CHEVAUX ET RESISTANCE AUX ANTIBIOTIQUES
II.1. Rappels physiologiques de l’appareil digestif du cheval
II.2. Flore intestinale commensale
II.3. Flore pathogène
II.4. Facteurs influençant la flore intestinale du cheval
II.4.1. Alimentation
II.4.2. Utilisation des antibiotiques (ATB)
CHAPITRE III : EMERGENCE DES ENTEROBACTERIES MULTI RESISTANTES AUX ANTIBIOTIQUES ET CONSEQUENCES
III.1. Caractères généraux des entérobactéries
III.2. Résistance aux antibiotiques
III.2.1. Généralités
III.3. Résistance des Entérobactéries aux antibiotiques
III.4. Supports génétiques de la résistance
III.4.1. Les chromosomes
III.4.2. Les plasmides
III.4.3. Le transposon
III.4.4. Les intégrons
III.5. Modalités d’acquisition de la résistance aux antibiotiques
III.5.1. Transfert vertical des gènes de résistance
III.5.2. Transfert horizontal des gènes de résistance
III.6. Evolution et surveillance de l’antibiorésistance chez les entérobactéries
III.6.1. Evolution de l’antibiorésistance chez les entérobactéries
III.6.2. Surveillance de l’antibiorésistance chez les entérobactéries
III.7. Conséquences de l’antibiorésistance
III.7.1. Conséquences sur la santé animale
III.7.2. Conséquences sur la santé humaine
III.8. Méthodes de détection de l’antibiorésistance
III.8.1. Méthode de la diffusion en gélose
III.8.2. Méthode de dilution en bouillon
III.8.3. Méthodes de dilution en gélose
III.8.4. Méthode de détection de BLSE
III.8.4.1 Méthodes microbiologiques
III.8.4.1.1. Principe
III.8.4.1.2. Les différents tests
III.8.4.2. Méthodes moléculaires
DEUXIEME PARTIE : ETUDE EXPERIMENTALE
CHAPITRE I : MATERIEL ET METHODES
I.1. Cadre et Zone d’étude
I.2. Considérations éthiques
I.3. Matériel et Méthodes
I.3.1. Matériel
I.3.1.1. Matériel d’enquête
I.3.1.2. Matériel Biologique
I.3.1.3. Matériel de prélèvement
I.3.1.4. Matériel de laboratoire
I.3.2. Méthodologie de recherche
I.3.2.1. Déroulement de l’enquête
I.3.2.2. Echantillonnage
I.3.2.2.1. Taille d’échantillonnage
I.3.2.2.2 Méthodes d’échantillonnage
I.3.2.3. Réalisation des prélèvements
I.3.2.4. Analyse de laboratoire
I.3.2.4.1. Préparation des milieux de culture
I.3.2.4.2. Pré-enrichissement
I.3.2.4.3. Enrichissement et Isolement
I.3.2.4.4.Culture des bactéries isolées
I.3.2.4.5. Identification des entérobactéries présumées
I.3.2.4.6. Etude de la sensibilité des souches isolées aux antibiotiques
I.3.2.4.7. Recherche des bêta-lactamases à spectre étendu (BLSE)
I.3.2.5. Analyses statistiques
CHAPITRE II : RESULTATS ET DISCUSSION
II.1. Résultats de l’enquête
II.1.1. Caractéristiques des exploitations échantillonnées
II.1.2. Conduite d’élevage, conditions d’hygiène et Utilisation des antibiotiques
II.1.3. Antécédents pathologiques des chevaux et utilisation des ATB
II.2. Résultats des analyses de laboratoire
II.2.1. Identifications des souches d’entérobactéries ciblées
II.2.2. Prévalence d’isolats résistants aux antibiotiques
II.2.2.1. Antibiogramme classique
II.2.2.2. Détermination de la CMI de la colistine vis-à-vis des souches E. coli
II.2.3. Prévalence des souches productrices de BLSE
II.2.4. Facteurs de risque dans la présence des résistances bactériennes
II.3. Discussion des travaux et limites
II.3.1. Difficultés rencontrées sur le terrain
II.3.2. Limites de l’étude
II.3.3. Site de l’étude et échantillonnage
II.3.4. Méthodologie
II.3.5. Espèces bactériennes ciblées
II.3.6. Antibiotiques testés
II.3.7. Portage des isolats résistants
II.4. Recommandations et perspectives de recherche
II.4.1. Recommandations
II.4.2. Perspectives de recherche
CONCLUSION GENERALE
REFERENCES BIBLIOGRAPHIQUES
ANNEXES