Préservation de l’environnement
Les raisons de protéger l’environnement se justifient à divers titres. Établir des réserves ou des conservatoires relève de critères à la fois scientifiques et éthiques. Sur le plan scientifique, l’argument le plus fort en faveur de la protection est la nécessité de maintenir le potentiel génétique de la biosphère. Détruire aujourd’hui une espèce de plante, c’est priver l’humanité de demain d’une ressource alimentaire nouvelle ou d’un médicament précieux. Le biologiste français Jean Dorst proposait déjà, en 1965, un aménagement qui tienne compte des nécessaires mesures de protection des espèces et du potentiel génétique qu’elles représentent. Des progrès ont été accomplis dans cette direction, mais ils restent à l’heure actuelle, insuffisants. Après avoir été considérée comme un bien inépuisable pouvant être exploitée sans frein, la nature est désormais reconnue comme un bien précieux ; coûteuse à préserver et fragile, elle est aujourd’hui menacée de disparition. Le phénomène d’expansion de la population aussi bien que le développement des activités économiques ont créé une nécessité d’espace. Cependant – en dépit de diverses initiatives à partir de la fin de la Seconde Guerre mondiale (fondation de l’Union mondiale pour la nature en 1948) jusqu’à la fin des années 1960, la nécessité d’une protection de l’environnement ne fut pas vraiment prise au sérieux et ne l’est toujours pas aujourd’hui.
Notion de Développement Durable
Les analyses en termes de développement durable s’appuient sur une vision humaine du bienêtre et impliquent l’examen des capacités des personnes à réagir face aux situations. En effet, les ratios de bien-être (ou de pauvreté) mesurés à un moment donné sont le résultat d’un processus pouvant être analysé à travers le concept de capabilités tel qu’il est défini par Amartya Sen en 1992. L’analyse de Sen complète l’analyse utilitariste en explicitant le processus par lequel les agents atteignent un certain niveau de vie. Elle permet en outre d’intégrer dans une même analyse les multiples dimensions (économiques, sociales, culturelles et institutionnelles) du bien-être. L’approche des capabilités de Sen constitue notre cadre théorique de référence. En soulignant l’importance de la liberté d’être et d’agir au niveau personnel comme au niveau social dans la dynamique du bien-être, elle propose de réduire la pauvreté en améliorant les capabilités des individus à long terme. Ceci permet, au travers de l’accroissement des potentialités et des opportunités sociales, de réduire la vulnérabilité face aux difficultés de la vie et donc de mener une vie plus épanouissante. Le développement durable se définit comme « un développement qui répond aux besoins du présent sans compromettre la capacité des générations futures » (Rapport Brundtland, 1987). Cette notion repose sur le fait que le processus de changement par lequel l’exploitation des ressources, l’orientation des investissements, les changements techniques et institutionnels se trouvent en harmonie et renforçant les potentiels actuels et futurs des satisfactions des besoins humains. Dans le long terme, le processus de développement doit répondre à des objectifs sociaux, économiques et environnementaux complémentaires et interdépendants. Il y a un souci d’équité intergénérationnelle et une idée d’altruisme. Le développement durable exige de concilier les différents objectifs économiques, environnementaux, sociaux, politiques, culturels lorsque cela est possible et de procéder à des arbitrages dans les autres cas. Il s’agit alors d’un développement équilibré assurant le bien-être de la génération actuelle et celui des générations futures. Les systèmes de développement durable tiennent compte de toutes les différentes composantes du bien-être. Celui-ci assure une situation optimale au sens de PARETO, non seulement entre les membres d’une même génération mais aussi entre les générations présentes et les générations futures. Il s’agit alors de satisfaire équitablement les besoins relatifs au développement et à l’environnement des différentes générations. Bien entendu, ceci n’est pas facile à réaliser parce que les objectifs de croissance économique ne se convergent pas toujours avec les objectifs environnementaux. Par exemple la promotion de l’industrialisation fournit des emplois mais elles sont causes de nombreuses pollutions. Plusieurs conditions sont à rassembler pour assurer un développement durable. Le processus de développement durable consiste à assurer un progrès économique, équitable sur le plan social, tout en préservant la base de ressources et l’environnement des générations futures. L’environnement est donc parti intégrante du processus général du développement. La durabilité de ce dernier dépend en une partie du mode de gestion de cet environnement. Le développement durable propose un modèle de croissance et d’activité humaine qui inclut explicitement les considérations environnementales et le principe d’une allocation et d’une utilisation optimale, progressive et donc durable des ressources. Pour maintenir ou plutôt accroître le bien être en songeant à celui des générations futures, plusieurs conditions existent. Ceci consiste à une relance économique, une augmentation du niveau de vie des personnes, une amélioration de leur pouvoir d’achat. Il faut noter quand même que la croissance économique ne peut être profitable si elle épuise partiellement ou totalement le capital naturel de la société ou si elle impose à d’autres membres de cette société le coût de réparations du capital naturel qu’elle ait exploité au delà de ses capacités limites. Le durable, c’est ce qui est à la fois viable, équitable et vivable.
Démarche commune à la vérification des hypothèses
Revue documentaire Cette étape a été l’une des étapes la plus déterminante de la recherche. Elle a fait l’objet de la collecte et de la synthèse d’informations documentaires existant sur les différentes politiques de préservation de l’environnement à Madagascar et de ses états notamment depuis l’adoption de la charte de l’environnement malgache et des différents textes y afférents dont la stratégie nationale de gestion de la biodiversité. Et une littérature sur les documents concernant le parc national de Ranomafana. Elle a permis :
• de faire l’état des lieux de l’environnement à Madagascar en fonction de sa dynamique, sa structure naturelle et ses rapports socio-éco-systémiques locaux ;
• de déterminer les différentes politiques de préservation de l’environnement adoptées à Madagascar ;
• de recueillir les données primaires pour un bilan et une évaluation de l’efficacité de ces politiques, programmes sectoriels et connexes à la gestion de l’environnement ;
• d’identifier les conditions nécessaires pour la réussite d’une politique de préservation de l’environnement ;
• d’avoir un aperçu de l’état des lieux de la zone d’étude.
Entretiens auprès des personnes ressources Des interviews auprès des responsables de la préservation de l’environnement au niveau national, régional et de la zone d’étude dont le gérant du parc, les chefs fokontany, les directeurs d’écoles, le responsable de l’ANGAP dans les lieux, le directeur de TANDAVANALA. Ces interviews ont permis de faire l’état des lieux de la situation et d’avoir l’opinion de chacun sur les problèmes existants et sur l’application de la politique de préservation à Ranomafana.
Enquête Une enquête auprès de la population riveraine de la zone du parc sur 60 personnes a fourni les éléments pour une analyse des impacts de leurs activités sur l’écorégion de Ranomafana, leurs rôles et leur positionnement dans la préservation du parc. L’effectif total des enquêtés a été établis suivant le budget. La population qui a fait objet de l’enquête a été celle de la commune de Ranomafana, qui est composé de 8 fokotany avec un nombre total de 14 924 habitants. A cet effet, un questionnaire a été élaboré pour les différents acteurs objet de l’enquête dont la population habitant l’intérieur ou les alentours de la zone d’étude dont notamment par rapport aux ressources naturelles à risque. La population cible, celle riveraine du Parc National de Ranomafana qui a été classée en trois catégories selon leurs types d’activités : agriculteurs, commerçants, artisans, fonctionnaires. Les touristes ont été inclus dans l’échantillonnage vu l’importance de leur présence sur l’économie de la zone d’étude. Le type d’échantillonnage est un échantillonnage aléatoire simple stratifié suivant les trois catégories. Etant donné que la majorité de la population de cette zone sont des agriculteurs et des commerçants, la répartition de l’échantillon a été fait selon que pour les agriculteurs à hauteur de 50% soit 30 ménages, les commerçants et artisans et touristes à 30% soit 18 ménages, et les fonctionnaires à 20% soit 12 ménages.
Observation directe L’observation directe a permis de constater la réalité sur l’environnement et l’application des politiques de préservations de l’environnement. Cette étape est très importante car elle a permis de vérifier les données existantes. La descente sur terrain a été décisive pour la bonne démarche de l’étude.
La saisie et l’analyse statistique des données Les données recueillis ont été dépouillées et introduit dans un logiciel de traitement de données : « Microsoft Excel » et « Sphinx-V5 » et ont fait l’objet d’une analyse statistique suivie d’une interprétation des résultats et de modélisation institutionnelle des stratégies des acteurs locaux et nationaux. Cette phase est celle qui a fourni le plus d’éléments d’aide à la décision pour la formulation des recommandations pour cette étude. Elle consiste au classement et au dépouillement des données recueillies. Et ensuite de faire des analyses. Les données contenues dans les revues et les travaux déjà exécutés n’ont plus fait objet d’un retraitement.
Les politiques sectoriels de préservation de l’environnement
L’influence des bailleurs ne s’arrête pas à l’orientation de la politique publique. Elle s’inscrit aussi dans des actions de terrain spécifiques. La rapidité et l’intensité d’application des nouvelles modalités de politique nationale diffèrent grandement selon les zones d’intervention de ces bailleurs et les innovations sur le terrain précèdent leur mise en politique publique. Pour le cas de la zone d’étude, l’USAID et dans une moindre mesure les autres bailleurs ainsi que les ONG de conservation WWF et la Conservation Internationale (CI) plus particulièrement, ont été présentes tout au long de la planification environnementale, dès le début des années 1990 et sur la création du Parc national de Ranomafanana en 1991. Dans la région en question, l’intervention américaine reposait sur la démarche le Programme de Conservation et de Développement Intégré autour du corridor. Elle visait à associer aux actions de conservation des actions de développement économique reposant sur les communautés. L’objectif était de leur apporter des infrastructures (routes, points d’eau, bassins aquacoles), enfin de soutenir des alternatives à l’abattis-brûlis (pisciculture, apiculture, nouvelles techniques de culture de riz, etc.) Durant cette période, c’est la rhétorique « corridor » qui prédomine ; c’est à dire la conservation de la biodiversité et le fonctionnement écologique nécessitent une continuité des habitats (Carrière, 2011). Mais le discours sur les services rendus à l’homme n’est pas encore perceptible. Progressivement, cette dynamique institutionnelle autour du corridor fortement pilotée par l’USAID a mis en avant les services environnementaux. Pour que les riverains adhèrent à l’idée de conserver le corridor alors que les autorités de contrôle (les Eaux et Forêts) avaient perdu tout moyen d’action, et collaborent à une action de fermeture de leur accès à ses ressources. Cette collaboration à la fois technique et financière entre bailleurs et collectivités décentralisées était particulièrement propice à la diffusion de l’idée que la forêt fournit des « fonctions et services hydrologiques ». Et les acteurs du programme EcoRegional Initiative (un programme USAID) ont appuyé la mise en valeur de ces services hydrologiques : financements de barrages, hydroélectricité, points d’eau… Finalement, l’analyse historique de la politique environnementale malgache montre comment les différents acteurs, au premier rang desquels les bailleurs de fonds, ont progressivement orienté cette politique vers la promotion des Paiements pour Services Environnementaux (PSE). Cela s’est réalisé au niveau national mais également au niveau local grâce notamment à l’action transversale de ces mêmes bailleurs de fonds. Ainsi, au niveau national, la dépendance au sentier est largement favorable à la mise en œuvre des PSE à Madagascar. Le cadre politique, c’est à dire la planification environnementale, s’est inscrite dès 2001 dans la recherche de financement durable pour pérenniser les actions environnementales au-delà du plan. Leur application au champ strict des aires protégées est également symptomatique de cette trajectoire. En effet, la déclaration de Durban en 2003, engageant le pays vers une extension de son réseau d’aires protégées, a ainsi confirmé la trajectoire prise vers le financement durable des aires protégées.
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Table des matières
INTRODUCTION
I. MATERIELS et METHODES
1.1Concepts et état de l’art
1.1.1. Gouvernance de l’environnement
1.1.2. Préservation de l’environnement
1.1.3. Politique publique environnementale
1.1.4. Approche socio-économique
1.1.5. Notion de Développement Durable
1.1.6. L’analyse stratégique
1.2. MATERIELS
1.2.1. Choix du thème
1.2.2. Description de la zone d’étude
1.2.3. Justification du choix de la zone d’étude
1.3. METHODES
1.3.1. Démarche commune à la vérification des hypothèses
1.3.1.1. Revue documentaire
1.3.1.2. Entretiens auprès des personnes ressources
1.3.1.3. Enquête
1.3.1.4. Observation directe
1.3.1.5. La saisie et l’analyse statistique des données
1.3.2. Démarche spécifique de vérification de l’Hypothèse 1 : « L’étude socio-économique de la politique de préservation de l’environnement constitue un instrument de planification de développement social durable »
1.3.2.1. Démarche
1.3.2.2. Variables
1.3.2.3. Outils de traitement et Finalités
1.3.3. Démarche spécifique à la vérification de l’Hypothèse 2 : « Le défaut d’une intégration entre la politique publique de préservation de l’environnement avec les politiques sectorielles traduit le manque d’efficacité et d’efficience de leur mise en oeuvre »
1.3.3.1. Démarches
1.3.3.2. Variables
1.3.3.3. Outils de traitement et Finalités
1.3.4. Démarche spécifique à la vérification de l’Hypothèse 3 : « Le cadrage de gouvernance des écosystèmes naturels constitue le fondement d’une optimisation de la politique de préservation de l’environnement »
1.3.4.1. Démarches
1.3.4.2. Variables
1.3.4.3. Finalités
1.3.5. Chronogramme des activités
II. RESULTATS
2.1. ETUDE SOCIO-ECONOMIQUE DE LA POLITIQUE DE PRESERVATION DE L’ENVIRONNEMENT
2.1.1. Les politiques nationales de préservation de l’environnement
2.1.2. Les acteurs du PAE
2.1.2.1. La population rurale
2.1.2.2. Les scientifiques de la conservation
2.1.2.3. L’Administration publique malgache
2.1.2.4. Les experts des bailleurs de fonds
2.1.3. Déterminants des acteurs dans le PAE
2.1.4. Les enjeux socio-économiques de la politique publique de préservation de l’environnement
2.2. CARACTERISATION DE LA POLITIQUE SECTORIELLE DE L’ENVIRONNEMENT A RANOMAFANA
2.2.1. Les politiques sectoriels de préservation de l’environnement
2.2.2. Caractérisation du coût total du programme
2.2.3. Rapports entre le coût et les avantages
2.3. FACTEURS DE L’OPTIMISATION DE LA PRESERVATION DE L’ENVIRONNEMENT
2.3.1. Caractéristiques de la stratégie nationale actuelle
2.3.2. Corrélation du cadre de politique de préservation des écosystèmes naturels
2.3.2.1. Une bonne productivité
2.3.2.2. Une durabilité des infrastructures utilisées
2.3.2.3. Une convention acceptée par toute la communauté
III. DISCUSSIONS et RECOMMANDATIONS
3.1. DISCUSSIONS
3.1.1. Influence des institutions sur le comportement des consommateurs
3.1.2. Les impacts des politiques environnementales
3.1.3. La pratique du Tavy
3.1.4. Evaluation des rapports entre Conservation et Développement
3.1.5. Alliance entre environnement et économie dans les prises de décisions
3.1.6. Interprétation des résultats d’estimation
3.1.6.1. Le revenu par habitant
3.1.6.2. L’investissement
3.1.7. Limite de l’étude
3.2. RECOMMANDATIONS
3.2.1. Sur le renforcement des capacités des paysans
3.2.2. Sur la politique de développement relatif à la préservation des ressources naturelles
3.2.2.1. De la valorisation des produits agricoles et forestiers
3.2.2.2. Du développement rural équilibré et durable
3.2.2.3. De la professionnalisation des paysans
CONCLUSION
BIBLIOGRAPHIE
ANNEXES
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